Jaillissement de l'esprit
ordinateurs et apprentissages
Seymour Papert
C'est une approche naturelle de la programmation, synthèse de travaux sur l'ordinateur et l'enfant, effectués au MIT [Massachusetts institute of technology], que nous propose cet élève de Piaget, connu par ses recherches sur l'intelligence artificielle.
L'auteur constate que, pour une technologie nouvelle, c'est souvent le premier produit, aussi primitif soit-il, qui a tendance à s'imposer. C'est le phénomène « AZERTY ». « AZERTY » constitue le début de la rangée supérieure des touches de la machine à écrire. Dans les premiers modèles de machine, les touches ayant tendance à se coincer entre elles, on s'efforça de séparer celles qui se suivaient fréquemment dans les mots de la langue française. Par la suite, on résolut ce problème de blocage, néanmoins, le système « AZERTY » demeura. Il en est de même pour les ordinateurs où le langage « BASIC », parce que même une très petite machine pouvait le comprendre, s'est imposé pour apprendre à programmer aux enfants. Or, à l'heure actuelle, le coût de la mémoire d'ordinateur a tant baissé que les avantages économiques de l'utilisation du « BASIC » sont devenus insignifiants. En outre, même si le vocabulaire réduit du « BASIC » s'apprend assez rapidement, les programmes transcrits dans ce langage prennent une tournure si labyrinthique, que seuls les enfants les plus brillants arrivent à s'en servir pour autre chose que des banalités.
Afin que ce ne soit pas l'ordinateur qui programme l'enfant, mais qu'au contraire l'enfant, même d'âge pré-scolaire, puisse maîtriser la machine, l'auteur propose d'utiliser le langage « LOGO » permettant de communiquer avec la « TORTUE », animal cybernétique et entité dynamique munie de l'importante propriété d'orientation. Cette « TORTUE » est comparable à l'enfant lui-même : celui-ci peut faire appel à la connaissance qu'il a de son corps pour construire une géométrie « informatique » (la géométrie euclidienne pouvant être qualifiée de logique, celle de Descartes d'algébrique). L'enfant peut aborder la géométrie formelle : il n'a qu'à inventer la description, énoncée en langage « LOGO », langage avant tout figuratif et seulement en second lieu quantitatif.
Cet ouvrage ne constitue pas un manuel. Il envisage la programmation comme un processus d'apprentissage actif et auto-dirigé. L'auteur voit dans l'informatique non seulement un outil permettant d'expliquer les mécanismes de l'apprentissage et de la pensée mais aussi un moyen d'agir sur ces processus, de les modifier et, si possible, d'améliorer la façon dont l'être humain pense et apprend. Un index et une importante bibliographie des travaux en langue française sur le « LOGO » concluent ce livre qui s'adresse à un vaste public.