The French press
class, state and ideology
J.W. Freiberg
L'auteur analyse et cherche à expliquer, à travers le prisme de l'analyse marxiste et une vision particulière de l'évolution des sociétés capitalistes, la dynamique actuelle des deux processus qui marquent la presse française contemporaine : dépolitisation et concentration. Les changements de structure de la presse peuvent être étudiés en terme de transformation économique et sociale, celle même qui caractérise le néo-capitalisme (concentration économique et financière et accentuation des inégalités). Ce n'est donc pas sur la fonction idéologique des media en elle-même que l'auteur s'interroge, mais sur la structure particulière d'un secteur industriel, la presse. Il va envisager successivement l'analyse des relations de propriété et de pouvoir au sein de l'entreprise de presse, les conflits de classe, les rapports entre l'État capitaliste et la presse « libre », et enfin les diverses formes de journalisme et le rôle des media dans les relations entre classes sociales.
La première partie est consacrée à l'analyse du phénomène d'appropriation des organes de presse, la mise en évidence de l'influence des propriétaires sur les entreprises de presse avec une réflexion particulière sur le poids de la publicité et les contraintes politiques et économiques qu'elle fait peser sur les contenus. Suit la présentation de trois groupes, Prouvost, Hachette et Hersant, chacun représentant un type particulier : le « baron » de presse, la multinationale et l'empire de presse. Le cas du Monde prend, dans ce contexte, une valeur particulière d'entreprise originale de par l'importance de la participation des journalistes à la propriété du journal, mais les contradictions internes de la rédaction (dont les problèmes de choix d'un directeur sont une illustration), le poids croissant de la publicité et la relative stagnation de la diffusion amènent à s'interroger sur l'avenir de ce quotidien.
Les luttes de classe à l'intérieur de la presse se sont développées en raison du phénomène de concentration des entreprises et de la modernisation des procédés d'impression qui tendent à déqualifier les personnels de fabrication et à modifier les rapports des journalistes avec l'étape de fabrication. Ceci va contribuer à modifier les professions et les qualifications, donc les rapports de classe à l'intérieur du secteur.
Les relations entre l'État capitaliste et la presse « libre » sont assez complexes mais tendent à « favoriser le maintien au pouvoir de la bourgeoisie capitaliste ». Le contrôle de l'Etat s'opère au travers du monopole de l'Agence France-Presse. L'intervention directe est inexistante dans le cas de la presse écrite, sauf en période de crise grave qui suspend l'application du régime libéral, ce qui n'est pas le cas de l'audio-visuel où, en vertu du monopole, la mainmise de l'État est totale. Le libéralisme proclamé et protégé par la loi se voit peu à peu vidé de sa réalité du fait des contraintes économiques et financières qui pèsent sur les entreprises de presse.
Le rôle des media, et de la presse, dans les relations entre classes sociales en France porte essentiellement sur la préservation du système social et sa reproduction, y compris la reproduction des inégalités entre dominants et dominés, riches et pauvres.
Tableaux, données statistiques, comptes rendus d'entretiens menés par l'auteur lors de son séjour en France illustrent les arguments et théories qu'il développe. Une très abondante bibliographie et un index des thèmes et noms cités complètent cet ouvrage qui propose une interprétation politique de la situation actuelle de la presse française.