Georges Pompidou et la lecture publique
Étienne Dennery
Alice Garrigoux
Jean-Pierre Seguin
Le texte sur Georges Pompidou et la lecture publique a été écrit par M. Etienne Dennery dans les derniers mois de sa vie. Mme Dennery a bien voulu nous le transmettre pour publication dans le Bulletin des bibliothèques de France. Qu'elle en soit ici chaleureusement remerciée.
La Rédaction du Bulletin des bibliothèques de France est très honorée de ce geste et sait que les lecteurs du Bulletin partageront son émotion en lisant un article de celui qui fut de 1964 à 1975 directeur des bibliothèques et de la lecture publique. Il lui a semblé que faire connaître ces pages était le plus grand hommage qui pouvait être rendu à la mémoire d'Etienne Dennery dont l'effort pour permettre à un plus grand nombre possible l'accès à l'information et à la lecture a été constant.
Georges Pompidou et la lecture publique
Il est manifeste que M. Pompidou s'est beaucoup intéressé à la lecture publique et j'ai fait tous mes efforts pour l'aider dans ce domaine.
Une obligation familiale rendait nécessaire mon retour à Paris et il n'y avait plus de place vacante aux Affaires étrangères. Au mois de janvier 1964 alors que j'étais de passage dans la capitale, M. Marcadé, chargé de mission au Cabinet du Ministre de l'Éducation nationale, me fit venir pour me proposer le poste d'Administrateur général de la Bibliothèque Nationale et de Directeur des bibliothèques, que M. Julien Cain devait bientôt quitter. Je fus très étonné de cette proposition à laquelle je ne m'attendais pas. J'adorais les livres mais je ne connaissais pas les bibliothèques autrement que pour avoir préparé l'agrégation rue de Richelieu. J'acceptais au bout des huit jours qui m'étaient fixés, et après avoir vu le Général de Gaulle, Malraux et Christian Fouchet, j'insistais pour que le mot « lecture publique », un peu vieillot peut-être dans sa consonance, figurât bien dans mon nouveau titre. J'avais tout de suite dit à Marcadé que j'aimais aller à contre courant. Le développement de la lecture en France me paraissait à première vue si menacé qu'il me semblait utile et même passionnant de lutter pour y parer.
Je revins du Japon au mois d'août 1964 et pris mon poste dans les bibliothèques le 15 septembre. Je mis plusieurs jours à visiter quelques-unes de ces institutions et cherchais à me faire une opinion sur l'ensemble des bibliothèques françaises (bibliothèques de conservation, riches en trésors du passé, bibliothèques universitaires où les étudiants pouvaient préparer leurs concours, bibliothèques de lecture publique, destinées à rapprocher le livre de la population tout entière).
Mais de partout montaient les plaintes sur le fait « qu'on ne lisait plus ». Ces opinions pessimistes étaient partagées dans tous les milieux : éditeurs ou syndicalistes, écrivains ou journalistes, professeurs ou étudiants. Je commençais moi-même à douter. Un sondage avait affirmé que 56 % des Français ne lisaient plus, et tout le monde en France en était convaincu. Des hommes de grande culture eux-mêmes, comme M. Pompidou, alors Premier ministre, en étaient persuadés. Dans un numéro du Figaro du mois de septembre 1966, il avait déclaré que, pour la lecture, « tout était à faire » et qu'il comptait développer l'action de l'État.
A quelques jours de là, je rencontrais son beau-frère, M. Domerg, d'origine universitaire lui aussi. Notre conversation porta tout naturellement sur la lecture. Je déclarais que, malgré les bruits pessimistes qui couraient en la matière, il suffirait, me semblait-il, de peu de chose pour que la situation se retournât. Le travail accompli dans ce domaine était insuffisant ; mais ma courte expérience me montrait déjà que tout effort intelligent pour soutenir la lecture se révélait à mon avis très efficace. On ne lisait plus tout à fait la même chose qu'avant. La crise du livre était en fait celle du roman. Mais nous n'avions pas à nous plaindre si le public français était attiré par des ouvrages plus proches de la réalité. M. Domerg me dit qu'il rapporterait mon opinion à qui de droit.
M. Domerg vint me voir quelque temps après et me dit que, réflexion faite, M. Pompidou avait décidé de former un Comité interministériel pour étudier le sujet qui nous préoccupait.
Ce Comité se réunit le 18 novembre 1966. M. Pompidou lui-même le présidait, assisté de M. Malraux. Le chef du Gouvernement s'y montra aussi chaleureux dans la défense de ses idées qu'il l'avait été durant les semaines précédentes. Presque tout le monde le suivit, avec peut-être un degré d'optimisme en moins.
Les grands arguments en faveur du développement de la lecture furent à nouveau mis en avant. Celle-ci n'était pas seulement accroissement de connaissances. Elle supposait un effort de réflexion plus grand que n'en exigeait aucun autre moyen de diffusion de la pensée. Elle permettait au lecteur de s'arrêter sur ce qui l'intéressait, de revenir en arrière, de suivre à son gré la pensée d'un auteur. L'utilisation de plus en plus massive de moyens audiovisuels nombreux et puissants laissait en outre de moins en moins de place à la pensée et à l'action des individus. La multitude des images de toutes natures, transmises de tous côtés par les satellites spatiaux, menaçaient notre personnalité propre, notre liberté de jugement. L'existence de la lecture publique permettait en revanche de développer le génie propre des individus dont, sans elle, les horizons eussent été trop étroits. A une époque où la promotion sociale et l'éducation permanente étaient des doctrines admises, seule la lecture pouvait nous rendre leur application rationnelle. Le fonctionnaire de responsabilité devait être pourvu d'une culture générale, que seul le livre pourrait lui donner. Les idées de M. Malraux sur la formation des cadres rejoignaient très précisément, sur ce point, celles du Général de Gaulle lorsqu'il abordait la question de la formation des militaires. Des idées furent également émises sur les bienfaits de la lecture comme divertissement. Elle vous dépaysait, vous transportait dans un monde nouveau, et que l'on pouvait choisir.
Au cours de cette réunion, le Comité décida la création d'un groupe de travail chargé d'étudier les possibilités de favoriser la lecture. Je reçus instruction de faire un rapport suffisamment bref et qui pourrait conclure rapidement.
Le groupe de travail que je présidais tint dix séances plénières, en moins de trois mois, sans compter les réunions en comités restreints portant sur des sujets particuliers tels que : le livre dans les grands ensembles, la lecture et l'enseignement ou la formation des bibliothécaires de lecture publique. Le rapport fut rédigé par le secrétaire général, M. Bruguière, et remis le 15 février à M. Pompidou.
Il ne s'agissait à aucun moment d'un document abstrait. Il fallait alerter l'opinion et éveiller en elle le besoin d'un service public de lecture. De nombreuses suggestions furent faites, sans pouvoir être toujours retenues. M. Malraux proposa notamment, qu'en attendant mieux, l'État pourrait faire don à chaque bibliothèque de la collection complète des livres de poche. Et l'on en revint essentiellement à des discussions sur les bibliothèques municipales et sur les bibliothèques centrales de prêt.
Dans sa conclusion, le rapport prévoyait la réalisation d'un plan que nous avions voulu à dessein ambitieux malgré les réserves de la représentante du Ministre des Finances qui ne nous avaient pas échappé.
Étalé sur dix ans, et sans aboutir à des mesures législatives immédiates, ce Plan devait au fur et à mesure de sa réalisation, être mis à l'épreuve d'expériences nouvelles portant sur le programme de construction et de formation du personnel. Il s'agissait notamment des bibliobus. Dans la bibliothèque d'aujourd'hui, de nouvelles priorités étaient désormais données au service public et à l'animation.
Après un départ un peu lent, ce rapport fut publié le 1er février 1968 par la Documentation française et obtint en fait un réel succès. Mais il fut d'abord discuté et, à travers lui, c'était la Lecture publique qui était visée. Certains bibliothécaires mêmes pensaient qu'un conservateur en chef de la Bibliothèque Nationale, par exemple, avait mieux à faire, étant donné ses compétences, que de distribuer des romans populaires dans les campagnes. D'autres trouvaient le rapport trop bref. Mais nous en avions décidé ainsi. D'autres estimaient que son application s'avérait trop coûteuse.
Mais M. Pompidou était toujours aussi désireux d'aboutir et put annoncer à l'issue du dernier Comité interministériel l'adoption du Plan de la lecture publique.
Cette seconde réunion interministérielle eut lieu en fin d'année 1967 pour examiner le Rapport. M. Malraux n'était pas venu, pour protester, dit son adjoint, contre le fait que la lecture publique était rattachée à l'Éducation nationale, et non comme elle aurait dû l'être, au Ministère de la culture.
Le Ministre Gorse affirmait en souriant l'importance des romans faciles. Il déclarait que, lorsqu'on voyait dans un train un lecteur d'allure intellectuelle, on pouvait être à peu près sûr que son livre était un roman policier. Dans le Conseil, un homme était présent dont l'attitude pouvait être décisive : M. Debré, alors Ministre des finances, fit un grand éloge de notre activité. Il représentait notre destin. Il loua beaucoup le travail des bibliothèques municipales de Touraine, et aussi les résultats déjà obtenus par la bibliothèque centrale de prêt de la Réunion.
Nous étions remplis d'espérance et nous le restâmes tant que ne furent pas connus les résultats de la décision budgétaire. L'existence de notre « Plan de dix ans » ne fut jamais effective mais elle nous servit cependant beaucoup. La position du Premier Ministre facilita beaucoup les choses lors de l'examen des plans successifs et de l'adoption des budgets. Nos crédits, pour la lecture publique, furent, à partir de 1967, nettement accrus. Ils le furent davantage encore en 1968. Il est cependant regrettable que les événements de cette dernière année retardèrent alors un développement qui paraissait assuré. C'est à cette époque qu'est vraiment né l'intérêt en France pour la lecture publique. La preuve en est même que la plupart des Français cultivés savent aujourd'hui ce qu'est une bibliothèque municipale, une bibliothèque centrale de prêt.
Les progrès accomplis, si insuffisants qu'ils fussent, étaient néanmoins décisifs. La Direction des Bibliothèques avait pu créer un Service de la Lecture publique qui se montra très efficace sous la direction d'un conservateur en chef actif et compétent, Mlle Garrigoux. Une vingtaine de bibliobus avaient été mis en service au lendemain de la guerre. Mais faute de crédits, peu d'expériences furent alors tentées. Dès mon arrivée à la Direction des Bibliothèques, j'intervins pour que leur nombre fut accru, et de fait, il quintupla de 1963 à 1973. Le nombre même des bibliothèques municipales construites désormais chaque année s'éleva rapidement. Le total de celles entièrement construites ou reconstruites, de 400 m2 au moins, avait crû de plus de 150 en dix ans. Des bibliothèques très modernes dans lesquelles il était possible de trouver non seulement des livres, mais encore des disques, des films, des vidéo-cassettes ; des bibliothèques nouvelles où les volumes étaient mis en accès direct, ainsi qu'ils devraient l'être depuis longtemps dans toutes les bibliothèques de lecture publique dignes de ce nom ; des bibliothèques, enfin, dont l'apparence même révélait la destination, dont les vastes et lourds magasins avaient disparu et qui, conçues du temps de M. Pompidou, sortaient de terre à un rythme très rassurant. Ainsi l'on inaugure désormais des bibliothèques municipales très modernes : qu'il s'agisse de celles de Laval, de Cergy-Pontoise, de Lyon, de Strasbourg, de Metz, de Moulins, de Montauban, de Maisons-Alfort, d'Argenteuil ou d'Angers par exemple. Grandes villes ou villes moyennes, villes de banlieue ou villes nouvelles.
Il faut aujouter que depuis 1971, le 6e Plan, en consacrant un chapitre spécial à la lecture publique, reconnaissait son importance pour notre pays.
A la fin de chacune des deux réunions interministérielles où la question fut discutée, M. Pompidou me fit venir auprès de lui afin de me donner ses instructions. Je pense que deux de celles-ci méritent d'être rappelées.
La première fois, il me dit : « Je souhaite que la priorité soit donnée aux bibliobus ». Je n'en fus point étonné, bien que ma préférence personnelle soit toujours allée aux bibliothèques municipales. D'autres membres du Gouvernement ou du Cabinet avaient exprimé un semblable vœu. Les bibliothèques centrales de prêt sont sous le contrôle direct du Gouvernement et les Municipales, comme leur nom l'indique, sont, pour l'essentiel, soumises à la volonté du Maire. Le Gouvernement se sent mieux chez lui dans les premières, et bien que ces institutions ne soient nullement aujourd'hui des instruments de la politique, ses responsables ont toujours tendance à les préférer. Sans compter que les bibliobus constituent une bibliothèque ambulante de caractère original (en France tout au moins), et bien faite pour frapper l'imagination. Enfin, les bibliothèques centrales de prêt peuvent former rapidement un réseau qui couvre le pays et surtout les campagnes, que le Gouvernement a plus rarement l'occasion de toucher directement et qu'il cherche à atteindre efficacement chaque fois qu'il en a l'occasion. Les bibliobus, qui choisissent d'ordinaire la proximité des lieux de travail ou de détente, constituent un centre de rencontres et d'échanges pour les grands et les petits, et je me félicite que de nouveaux crédits puissent être trouvés pour eux. La médiocrité de leur installation était jusqu'à ce jour regrettable.
L'année suivante, M. Pompidou me dit : « Votre travail est excellent. Mais je désire beaucoup que vous ayez des activités dont on parle tout de suite et dont le succès soit évident, des activités sur lesquelles vous pourrez concentrer vos efforts, et qui feraient du bruit. Le livre doit avoir des défenseurs, non seulement actifs, mais qui attirent l'attention. Sa publicité doit être orchestrée, même s'il ne s'agit que d'une seule opération ». M. Peyrefitte qui assistait à notre conversation déclara qu'il était tout à fait d'accord.
Je pense que notre Premier Ministre avait dans l'esprit la mise à la disposition du public d'une bibliothèque du type de celle qui, à Beaubourg, avec un succès sans précédent, attire les masses depuis son ouverture. Il était d'accord avec moi pour penser qu'il était d'une grande importance pour la France d'avoir à sa disposition, alors qu'elle n'en avait jamais possédée, une vaste bibliothèque de documentation. Mais il estimait que les bibliothèques avaient besoin de faire parler d'elles. Une bibliothèque, qui pût exhiber tous les moyens de communications et tous les progrès récents, ferait beaucoup pour l'ensemble de toutes les autres. Lorsqu'il avait décidé d'installer un ensemble d'institutions artistiques sur le plateau Beaubourg, il n'avait peut-être pas pensé tout de suite à y incorporer une bibliothèque. Mais une fois l'opération faite, il se rendit bien vite compte de toute son importance. Beaubourg était bien la bibliothèque à laquelle il avait songé pour la France, celle qui aiderait les autres à grandir et amènerait notre pays à rattraper son retard dans la mise sur pied d'instruments indispensables du savoir.
Alice Garrigoux
Mlle Garrigoux qui dirigea à la Direction des bibliothèques et de la lecture publique le Service de la lecture publique et M. Seguin qui créa auprès de M. Dennery la Bibliothèque du Centre Georges Pompidou nous ont adressé les quelques lignes qui suivent et qui s'inscrivent naturellement dans l'hommage que nous voulons rendre à M. Dennery.
Après qu'il eut quitté en 1975 son poste de directeur des bibliothèques et d'administrateur général de la Bibliothèque nationale, Etienne Dennery souhaitait porter témoignage sur les hommes et les événements qui avaient marqué sa carrière de serviteur de l'Etat comme professeur, ambassadeur puis administrateur. Peu de temps lui fut donné pour le faire et c'est gravement atteint par la maladie qu'il écrivit le texte sur « Georges Pompidou et la lecture publique » publié ci-dessus.
Ces pages éclairent les circonstances d'un tournant de l'action culturelle des pouvoirs publics et la part décisive qu'y prit Georges Pompidou, Premier ministre. Aujourd'hui, elles nous apparaissent de plus comme l'hommage le plus juste qui puisse être rendu à Etienne Dennery dans un domaine qui lui tint tant à cœur. La foi et l'élan y transparaissaient qui n'ont cessé de nourrir une action acharnée nécessaire à qui veut avancer contre le courant. Ceux qui ont eu le privilège de collaborer à cette œuvre pendant huit années mesurent l'effort continu qu'exige une volonté de changement trop souvent contrariée par les incompréhensions et les aléas budgétaires.
Etienne Dennery n'aimait ni le spectacle ni le trompe-l'œil. Mener une politique de lecture publique signifiait pour lui étendre effectivement à un plus grand nombre la possibilité d'accès à l'information et à la culture. Des initiatives même modestes obtenaient, si elles lui paraissaient le mériter, son soutien attentif et chaleureux. Les résultats obtenus malgré les obstacles apportèrent vite la preuve du bien fondé de ses actions. Visitant bibliothèques et bibliobus, il percevait avec joie l'accueil fait par le public aux formes nouvelles de diffusion de la lecture. Soucieux de recruter et de former des bibliothécaires marqués par le même esprit d'ouverture, il infléchit vers la lecture publique l'enseignement de l'Ecole nationale supérieure de bibliothécaires. Il soutint avec un intérêt tout particulier les activités de la Bibliothèque pilote de Massy et celles de la Joie par les livres, organisme qu'il avait eu le plaisir de rattacher à l'Etat.
Au « tout est à faire en matière de lecture » de Georges Pompidou, répond comme un écho le témoignage du Ministre s'adressant à Etienne Dennery à l'heure de sa retraite : « la lecture publique vous doit tout. Vous l'avez conçue. Vous l'avez réalisée chaque jour ».
Tout reste encore à maintenir, continuer, développer. Mais l'impulsion efficace donnée à l'innovation restera inscrite comme l'œuvre exemplaire d'Etienne Dennery dans l'histoire de la lecture publique en France.
Jean-Pierre Seguin
Dans le dernier paragraphe de son texte, consacré à la Bibliothèque publique d'information, M. Dennery indique très clairement ce qu'il avait jugé essentiel dans le programme de la « Bibliothèque des Halles » que je lui avais soumis en 1968. Son adhésion et son soutien allaient aux propositions d'ouverture à tous, de libre accès aux collections, de recours aux medias modernes visuels et sonores et d'animation, qu'il estimait être de nature à faire de la Bibliothèque un outil de formation permanente adapté aux besoins et aux conditions de notre temps.
C'est pourquoi il avait osé créer à la Bibliothèque nationale même et dès mai 1968 un nouveau Département chargé de la réalisation du projet. Il allait ainsi contre l'opinion, très généralement répandue, que ce projet était utopique et il ne disposait au départ, pour le réaliser, que de moyens dérisoires. Cependant, cet Administrateur au courage tranquille mit à faire partager sa conviction une obstination, voire un acharnement extraordinaires.
Les ministres qui participèrent à la mise en route de cette bibliothèque furent par lui assiégés, harcelés, emportés enfin jusque dans les derniers détails. Le Président Georges Pompidou lui-même se rangea à son avis en admettant que la Bibliothèque conservât son autonomie au sein du grand ensemble du Plateau Beaubourg. Il reconnaissait ainsi le bien fondé de la conviction de M. Dennery selon laquelle cette bibliothèque d'un type nouveau devait avant tout contribuer au succès d'une politique d'ensemble de la Lecture publique ( *).
Celui qui pendant sept ans a travaillé presque chaque jour avec M. Dennery tient en outre à dire quelle reconnaissance il lui doit, à titre personnel. Aux sentiments de respect et d'estime qu'il éprouvait pour lui s'ajoutaient ceux d'une réelle et profonde affection qu'Etienne Dennery avait su faire naître et durer. Ces sentiments ont, dans les moments difficiles d'un long engagement commun, compté plus encore que les appuis matériels.