Newspaper history from the seventeenth to present day

par Jean Watelet
ed. by George Boyce, James Curran and Pauline Wingate. - London : Beverly Hills : Sage, 1978. - 423 p. ; 27 cm. - (Communication and society.) Bibliogr. p. 399-408. Index p. 409-423 : 4.95 £

Cet ouvrage, qui fait partie d'une série consacrée à la presse anglo-saxonne et aux mass media, est rédigé par vingt auteurs et concerne moins l'histoire des journaux, en dépit de son titre, que l'histoire du rôle de la presse dans la société britannique depuis la parution des premiers journaux, à Londres, vers 1620. Le terme de « quatrième pouvoir », aujourd'hui connu dans le monde entier, pour désigner l'influence de la presse écrite, parlée, filmée, voire enregistrée, apparaît dans le Times en février 1852. Dès 1855, l'écrivain Anthony Trollope disait : « des palais de Saint-Petersbourg aux chaumières du Connaught, personne ne peut lui échapper ». De fait, avant 1840, la presse jouissait d'une réputation détestable, et les journalistes étaient tenus pour des besogneux, voire pour les créatures des hommes politiques. Une telle opinion, ajouterons-nous, n'était pas particulière à l'Angleterre: Voltaire, à plusieurs reprises, a témoigné son mépris à l'égard des journalistes. Tout change dans la seconde moitié du XIXe siècle. La presse est alors prise en considération parce qu'elle a su acquérir une totale indépendance et est maintenant à même de négliger toutes les pressions. Ses tirages s'accroissent régulièrement grâce aux progrès techniques, grâce surtout à la diminution du nombre des illettrés. En 1836, 58 % des Anglais sont capables de signer leur nom, en 1893, ils sont 94 %, vivent surtout dans les villes, et la presse, qui touchait jadis un public de gentlemen souvent campagnards, est devenue à la fois populaire et urbaine. Le journal qui n'était guère lu en ville que dans les cafés - il y en avait 559 à Londres en 1739 - pénètre alors dans chaque foyer, et les 14 millions d'exemplaires vendus en 1780 deviennent 85 millions en 1851. Depuis les années 1830, les droits de timbre ont été supprimés, et les journaux doivent maintenant à la publicité l'essentiel de leurs recettes. En 1886, elle occupe 49 % de la surface du Times, qui paraît à 60 000 exemplaires, mais le cas du Times est exceptionnel: son tirage restera toujours modeste, sans aucun rapport avec son influence mondiale.

L'apogée de la presse anglaise se situe en 1896, lorsque le Daily mail abaisse son prix à 1/2 penny. C'est alors que se constituent les empires de presse aux mains de personnalités telles que Arthur Pearson, du Daily express et surtout lord Northcliffe du Daily mirror, dont le journal est le premier à dépasser le million d'exemplaires. A la veille de la Seconde guerre mondiale, les grands quotidiens nationaux, à eux seuls, tirent à 10 600 000 exemplaires, sans parler de cet aspect profondément original de la presse anglaise que constituent les suppléments du dimanche. Depuis, la presse décline lentement et des titres jusque là prestigieux: News chronicle, Sunday graphic, The Star disparaissent, en même temps que la presse accentue sa concentration au point que l'on peut dire que lord Beaverbrook a été le véritable patron de la presse britannique. Et son rival, lord Thomson, déclarait en 1961 devant la Commission royale pour la presse : « Mon ambition est de diriger la presse comme une affaire commerciale, pour gagner de l'argent ». Les récents avatars du Times prouvent à quel point il s'était trompé...

A la publication des journaux est liée l'existence des agences de presse, dont Reuter a été, depuis plus d'un siècle, la principale, et la concurrente, sur le marché mondial de l'information, de Havas devenue France-Presse et des deux américaines Associated press et United press.

De tous temps les journaux se sont souciés de conserver leurs collections, et y sont parvenus avec plus ou moins de bonheur, mais celles-ci suivent le sort des publications : les bibliothèques constituées par le Daily sketch et par le Sunday citizen à l'intention de leurs rédacteurs ont disparu, la collection du Daily herald, indispensable à qui veut étudier l'histoire du mouvement travailliste est entreposée dans un garage de Kings Cross, et il ne reste que des débris de celle de l'Evening standard. Ce sont les universités, dans lesquelles on étudie de plus en plus l'histoire de la presse, qui ont fourni le plus gros effort dans le domaine de la conservation. A Warwick, à Leicester, à Cardiff, à Reading sont rassemblés les documents les plus utiles pour l'histoire des journaux.

Soigneusement rédigé, pourvu de notes et d'une abondante bibliographie ainsi que d'un très commode index chronologique, ce livre rendra les plus grands services à tous les historiens de la presse britannique.