La presse française
Pierre Albert
Cette nouvelle étude de Pierre Albert constitue une mise au point de l'état de la presse française en 1978, et un tableau de toutes les activités du monde de la presse écrite.
Le dépôt légal recense actuellement près de 25 000 titres de périodiques français vivants, allant du simple bulletin d'association parfois multigraphié aux plus grands quotidiens et à leurs innombrables éditions.
« Un périodique, explique l'auteur, est à la fois un produit industriel soumis aux lois économiques de son marché et une création intellectuelle remplissant certaines fonctions sociales... Tout directeur de publication est journaliste et marchand, et la qualité d'une publication tient moins à son contenu qu'à sa capacité de trouver des lecteurs ».
Produit industriel, la presse assure environ 1 % du revenu national brut français et elle fait vivre environ 90 000 personnes, ce qui la place entre le 15e et le 20e rang des secteurs industriels français. De plus, en tant que produit, un périodique est vendu deux fois : aux annonceurs, qui achètent une « surface », et aux lecteurs, si bien que le prix de vente au public n'a aucun rapport ni avec sa qualité ni avec son prix de revient.
Presse d'information, de documentation, de renseignement, de distraction - la presse d'opinion est en pleine décadence -, la presse joue le rôle d'une institution sociale.
Le marché, toutefois, est loin d'être brillant. Depuis 1914, époque à laquelle les Français étaient les plus grands lecteurs du monde, la régression est constante. Qu'il s'agisse du nombre des titres : 11 quotidiens à Paris en 1803, 80 en 1914, 12 en 1975, ou de l'évolution des tirages, passés de 36 000 en 1803 à 8 250 000 en 1917, année record et finalement 3 195 000 en 1975, les quotidiens touchent 214 habitants pour mille, soit l'avant-dernier rang avant l'Italie.
La part des journaux parisiens n'a cessé de baisser : la presse quotidienne de province réalise actuellement 72,5 % des tirages, et son géant, Ouest-France culmine à plus de 660 000 exemplaires, très loin derrière les grands quotidiens anglo-saxons, japonais ou soviétiques.
Les périodiques, presse d'opinion, d'échos, magazines familiaux, magazines d'informations illustrés subissent la concurrence de la télévision. L'exemple le plus significatif est celui de Paris-Match, diffusant 1 200 000 exemplaires en 1966, et 580 000 dix ans plus tard. En revanche, la presse spécialisée dans les programmes de télévision est en continuelle ascension : Télé-7 jours « avec une diffusion de 2 278 000 exemplaires est le champion toutes catégories de la presse française ».
L'aide des pouvoirs publics est considérable. « De tous les pays occidentaux, la France est sans doute celui où l'aide de l'État à la presse est la plus élevée et la moins discriminatoire ». Rien qu'en exonération de la TVA, l'État perd, en 1978, 450 millions de francs de recettes.
Complétant ainsi la grande Histoire générale de la presse française, d'un maniement plus aisé que l'Annuaire de la presse et de la publicité qui s'adresse avant tout aux professionnels, cette étude sur la presse française contemporaine a l'immense mérite de donner des renseignements souvent très difficiles à se procurer.