Compte rendu des journées d'étude sur les fonds anciens des bibliothèques françaises

Les 13, 14 et 15 novembre 1975, se sont tenues à Lyon des journées d'étude sur les fonds anciens des bibliothèques françaises, organisées par l'Association de l'École nationale supérieure de bibliothécaires et plus particulièrement par l'un de ses membres, M. Jean-Marie Arnoult, conservateur de la Bibliothèque municipale de Châlons-sur-Marne. Cent trente personnes, bibliothécaires et chercheurs, se sont réunies en présence de MM. les inspecteurs généraux des bibliothèques Bleton, Caillet et Desgraves et, pour la séance de clôture, de M. l'Inspecteur général Poindron, représentant M. le Secrétaire d'État à la Culture, et de M. Le Rider, administrateur général de la Bibliothèque nationale.

Depuis la fin de l'année 1974, une enquête a été menée par le Service du livre ancien de la Bibliothèque nationale auprès des bibliothèques françaises, afin de connaître quantitativement les fonds anciens. Les résultats encore partiels, qui ont servi de base de travail aux journées d'étude, ont permis de dénombrer, en octobre 1975, deux millions de volumes imprimés avant le début du XIXe siècle (sans compter la Bibliothèque nationale), dont la moitié est à cataloguer. Cette situation est le résultat de différents facteurs mis en valeur par les exposés des directeurs et responsables de diverses bibliothèques : municipales (Troyes, Saint-Dié), universitaires (Montpellier, Strasbourg, Bibliothèque Sainte-Geneviève à Paris). Outre le manque de moyens financiers et le manque de personnels qualifiés pour l'exploitation de tels fonds, il convient de souligner que l'absence de toute langue commune (normes de catalogage notamment) entrave les actions entreprises localement. L'isolement est le lot de bon nombre d'établissements de province, contraints de travailler avec des moyens de fortune, sans liaisons efficaces entre eux, ce qui les conduit à une sous-exploitation de leurs fonds dont le catalogage est souvent remis à des jours meilleurs. Cet état de fait est d'autant plus regrettable que les besoins de la recherche sont pressants.

Les chercheurs et universitaires, venus nombreux, ont pu décrire avec précision ce qu'ils attendaient des bibliothèques. Cette rencontre entre utilisateurs et gestionnaires des fonds anciens, la première en date, a marqué une étape importante dans la conception des fonds anciens. L'exposé des travaux entrepris dans différents centres (Montpellier, Grenoble, Paris, Tours), les réflexions réalistes des universitaires confrontés à des tâches trop fréquemment complémentaires, sans le savoir, des fonctions des bibliothécaires, ont mis en évidence les lacunes des systèmes de catalogues français. La recherche, à l'heure actuelle, est impossible à réaliser sur le plan national sans une énorme patience de la part des chercheurs, alors que l'un des impératifs de cette recherche est la rapidité et la complétude.

S'abstenant de toute philosophie stérile sur les fonds anciens, les participants ont procédé de manière très réaliste et très logique. A l'issue de l'exposé sur l'expérience menée à la Bibliothèque municipale de Toulouse qui synthétisait les problèmes évoqués par les bibliothèques, des conclusions ont été aisément adoptées.

En premier lieu, un langage commun sera proposé prochainement à l'accord de toutes les bibliothèques pour le catalogage des livres anciens. En collaboration avec des centres universitaires de recherche, l'Institut de recherche et d'histoire des textes et les bibliothèques, des listes de vedettes auteurs seront établies, puis seront étudiées des solutions de vedettes pour les collectivités et les anonymes. En outre, il convenait de ne pas négliger l'apport des catalogues existants, même défectueux et anciens : il a été proposé de les photographier et de les centraliser soit par région, soit à Paris, afin de disposer d'un premier instrument de recherche qui servira de base à un catalogue collectif national. Ces conclusions ne pourront être mises en application qu'avec l'appui et l'aide d'un service commun à toutes les bibliothèques possédant des fonds anciens : le Service du livre ancien aura cette mission de coordonner les informations et de les diffuser.

Ces journées d'étude ont donc permis de mettre l'accent sur un domaine trop souvent considéré comme mythique des bibliothèques, notamment de province. Soucieux à la fois d'efficacité et de logique, les participants ont souhaité qu'une politique réaliste se dessine en faveur du livre ancien, afin de rompre l'isolement stérile des bibliothèques. La collaboration des chercheurs et des universitaires, les principaux clients, est un gage d'espoir.