L'information dans le domaine de l'énergie en France

Antoinette David

Après l'étude des structures du réseau français d'information en matière d'énergie, de la nature et de l'importance de cette information ainsi que des moyens de transmission adoptés, est abordée la question d'une coopération intellectuelle des centres qui, devant l'évolution des problèmes documentaires, des besoins des utilisateurs de l'information et des moyens d'information (ordinateurs), se transforme en une coopération plus large, liée à une politique de l'information elle-même

L'information, en figurant au programme de la 7e Conférence mondiale de l'énergie donne la preuve du rôle primordial qu'elle joue à l'heure actuelle, dans le domaine de l'énergie en particulier. N'est-elle pas « l'un des moteurs du progrès, puisqu'elle est à la base des décisions, puisqu'elle permet à la technologie de se transmettre, et aux inventions de se réaliser » ?

Pour jouer ce rôle, l'information doit être transmise efficacement à ceux qui en ont besoin. Or, cette transmission pose des problèmes et soulève des difficultés d'une grande complexité. Bien qu'ils ne soient pas propres au secteur de l'énergie, ils sont cependant dans ce cas particulièrement significatifs, par la nature même de ce secteur, qui est à la fois la base et le point de jonction de nombreuses disciplines.

C'est en fait sur ce plan que se situe l'étude de l'information.

Comment transmettre l'information existante sur l'énergie, pour que les utilisateurs potentiels reçoivent ce qui leur est utile en temps voulu ?

Nous nous proposons, après avoir défini le domaine concerné, d'expliquer par qui l'information est traitée, c'est-à-dire de présenter la structure du réseau français d'information. Nous situerons ensuite la nature et l'importance de cette information, ceux à qui elle s'adresse, et les moyens adoptés. Nous nous efforcerons ainsi, de mettre en lumière, en fonction d'utilisateurs aux besoins et aux attitudes divers et différents, les moyens de transmission adoptés.

Ces moyens se modifient devant la transformation et le développement tant de l'information elle-même que des utilisateurs. Nous essaierons de mettre en relief les problèmes qui se posent, les tendances ou les solutions envisagées, d'en dégager les éléments propres au domaine de l'énergie lui-même.

I. - Information dans le domaine de l'énergie

Précisons tout d'abord le domaine concerné. Il faut entendre, par là, l'ensemble des données (faits, notions, instructions) publiées et susceptibles d'être communiquées, interprétées ou traitées. Ces données intéressent dans notre cas, les différentes formes d'énergie : charbon, pétrole, gaz, électricité, énergie nucléaire, énergie solaire.

Elles concernent sous leurs aspects scientifique, technologique, et acessoirement économique : la production, le transport, la distribution et les utilisations, principalement thermiques, sans entrer dans les technologies particulières à chaque branche.

Bien que défini, ce domaine est très vaste; de plus, ses frontières ne sont pas précises, du fait qu'il pénètre à des degrés différents, dans tous les secteurs de l'industrie et de l'économie.

Et cette particularité de l'énergie conditionne en grande partie, tant la production que l'exploitation de l'information correspondante.

II. - Structure du réseau français d'information

Cette information, qui l'exploite ?

Suivant le sens que nous avons donné au terme « Information », nous voulons parler du réseau constitué par les centres de documentation. Précisons tout de suite pour éclairer notre exposé, que la structure de ce réseau s'explique par la physionomie même du domaine de l'énergie, telle que nous venons de la présenter.

Les Centres de documentation.

Nombreux sont les centres qui réunissent une documentation en ce domaine. Pour les uns, elle représente l'ensemble de l'activité, pour les autres, une partie seulement.

Il convient de distinguer d'autre part, ceux qui sont au service d'une entreprise, de ceux qui sont responsables d'un secteur, pour la collecte, le traitement et la diffusion de la littérature correspondante. Nous ne parlerons ici que de ces derniers : les centres d'entreprise sont en effet, dans une certaine mesure, les utilisateurs des centres spécialisés. Ils existent en fonction et pour une population restreinte d'utilisateurs, ceux de leur organisme, et ne donnent pas de ce fait, le reflet de l'information par secteur.

En se référant à leur spécialisation, les centres sont aisément répertoriés par source d'énergie et par utilisation. Il existe tout d'abord dans chacun des grands secteurs, charbon, pétrole, gaz, électricité, énergie nucléaire, utilisation thermique, un centre primaire responsable de l'information pour l'ensemble ou une partie des différents aspects de ce secteur. Ces centres, outre une large ouverture vers l'extérieur, ont le plus grand souci de collecter toutes les informations publiées dans leur domaine, et aussi de les diffuser largement et efficacement. Chacun n'est pas cependant le seul spécialisé dans son secteur. Ainsi, en matière d'énergie nucléaire, à côté du Centre du CEA (Commissariat à l'Énergie atomique), nous citerons celui de l'ATEN (Association technique pour l'énergie nucléaire), celui de BREVATOME (organisme de brevets nucléaires).

Dans le cas des combustibles gazeux, à côté du centre de l'Association technique du gaz, nous mentionnerons le service documentation de Gaz de France, et celui de CEDIGAZ. Pour le pétrole, la collecte de la documentation scientifique et technique, utile à l'ensemble de la profession, est faite essentiellement par l'Institut français du pétrole. Les données économiques sont réunies également, dans les mêmes soucis, par l'Union des Chambres syndicales de l'industrie du pétrole et par le Comité professionnel du pétrole. Toutefois, un centre primaire a un champ d'activité plus large, est utilisé par les autres centres, et en général couvre l'information qu'ils exploitent. Il ne s'agit pourtant pas de double emploi dans l'existence de ces centres, mais d'une nécessité pour toucher des utilisateurs que n'atteignent pas les centres primaires et répondre ainsi à leurs besoins.

Liaisons entre les centres français : le réseau.

Des liaisons étroites existent entre les centres d'un même secteur : les premiers faisant profiter les seconds de leurs travaux, et les seconds informant sur les besoins de leurs clients.

Ainsi, pour reprendre notre précédent exemple, le CEA fournit à l'ATEN sa bibliographie et une aide. De même, l'ATG distribue ses bulletins aux services de documentation de l'industrie gazière, et recueille inversement auprès d'eux, informations et documents (en particulier les documents de faible diffusion).

Le Centre de documentation de l'Institut français du pétrole, qui répond à toutes demandes de l'industrie et y diffuse largement des informations et documents d'intérêt pour elle, coopère avec d'autres services de documentation, pour partager l'exploitation de certains périodiques et construire des thésaurus. Une telle coopération existe en particulier sous l'égide de l'Union des chambres syndicales de l'industrie du pétrole.

La Documentation technique des Houillères fait bénéficier de ses services, outre les écoles des mines, les fabricants de matériel, et les autres mines.

A côté de ces liaisons entre centres spécialisés dans un secteur, d'autres liaisons existent, avec les centres spécialisés dans les secteurs marginaux (pour lesquels l'énergie ne représente qu'une partie de l'activité).

Ce type de liaison est particulièrement significatif pour la branche « Utilisations des combustibles ». L'Institut français des combustibles et de l'énergie, qui en est responsable, exploite les bulletins bibliographiques provenant de secteurs voisins (sidérurgie, céramique, mécanique, soudure, fonderie...) afin de relever ce qui lui est utile, et augmenter d'autant la masse documentaire exploitée. En particulier, en matière de pollution atmosphérique, une entente existe entre les centres responsables chacun d'un domaine défini pour se communiquer les références, en fonction des préoccupations de tous.

Enfin, les centres primaires de ces secteurs sont également en étroite liaison. Et fait assez remarquable, ces liaisons existent pratiquement depuis la création des centres. Il s'est agi jusqu'à ces derniers temps de relations spontanées, amicales et volontaires, dans le but de se tenir au courant des méthodes mises en œuvres, de s'aider (par des échanges de documents ou de renseignements) et surtout d'éviter les doubles emplois en cernant les domaines propres à chacun, et en échangeant fiches analytiques, bulletins, traductions. Grâce à ces liaisons, de bonne volonté, nous avons pu constater, lors de deux enquêtes sur le dépouillement des périodiques (effectuées en 1964 et en 1967) que les doubles d'articles analysés étaient, sur une moyenne de 300 périodiques, de l'ordre de 5 % entre deux centres. Sur les périodiques reçus et exploités par plusieurs centres, l'on constate également une nette séparation des préoccupations de chacun, d'après le choix des articles analysés.

De ce réseau d'information sur l'énergie, le Centre de documentation du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) en couvre quelque sorte l'ensemble. Son rôle propre étant de collecter la littérature publiée intéressant les chercheurs, sur les 13 500 périodiques reçus à la Bibliothèque il en exploite 7 000 dans leur presque totalité, et en publie des analyses classées par rubriques. En matière d'énergie, à côté des analyses faites par chacun des centres mentionnés et qui lui sont adressées, il est amené à recueillir celles qui appartiennent aux autres périodiques, ce qui représente environ 10 000 références par an.

De plus, un service central enregistre les traductions en cours ou effectuées par tous les centres français, et informe non seulement sur ces traductions mais sur celles enregistrées suivant le même principe par le Centre européen de Delft (pour les documents de langue difficile). Dans notre domaine qui s'imbrique dans tant de disciplines diverses, et dans tous les pays, ce service est particulièrement utile : non seulement il évite les traductions en double, mais rend accessibles de nombreux documents.

Relations internationales.

Enfin, cette présentation du réseau français d'information, serait incomplète si nous n'indiquions pas ses ramifications à l'extérieur, ses liaisons sur le plan international.

Elles existent essentiellement à partir des centres spécialisés vers leurs homologues dans d'autres pays. Pour tous ces centres, il s'agit en premier lieu, là encore de relations spontanées, nées du même désir que les liaisons nationales : s'informer, s'aider, en se rendant des services mutuels, échanges de renseignements et d'informations.

De plus, pour certains, ces liaisons ont pris une forme plus concrète, bien souvent à la faveur de l'existence d'un organisme international au sein de leur profession.

L'Association technique du Gaz a adopté un plan de classification internationale auquel elle a coopéré et qui a été élaboré au sein de l'Union internationale de l'industrie du gaz.

Le Centre de documentation des Houillères participe à deux accords d'échange réalisés sous l'autorité de la CECA : mise à la disposition de chacun des pays membres des traductions faites par les autres membres à partir des langues de l'Est et d'Extrême-Orient; et d'autre part mise en commun du dépouillement des publications médicales sur les questions de silicose et de lutte contre les poussières.

Le CEA prépare sur ordinateur l'index bibliographique pour le compte de l'Union internationale pour la science, la technique et les applications du vide. Il a également des accords de coopération avec Euratom et l'Agence internationale de l'énergie atomique de Vienne, accords dont nous aurons l'occasion de reparler.

Le Centre de documentation de l'institut français du pétrole a plus de 260 accords formels d'échanges d'information et de documents avec les organismes étrangers et bien plus d'autres encore non formalisés. L' « American Petroleum Institute » et l'Université de Tulsa, particulièrement actifs dans le domaine de la documentation, sont au nombre des organismes avec lesquels se sont établies des relations de travail privilégiées.

L'Institut français des combustibles et de l'énergie a construit un réseau de liaisons dans plus de vingt pays. En matière de pollution atmosphérique, ces liaisons ont pris la forme d'une coopération, variable suivant les pays intéressés parce que fondée sur des besoins réels et non pas sur l'a-priori.

Rappelons qu'il s'agit jusqu'à présent de liaisons entre centres spécialisés d'un secteur défini (charbon, gaz, pétrole...) et non pas encore de coopérations entre l'ensemble du réseau français, et un réseau concerné par les mêmes problèmes dans d'autres pays.

Aspects du réseau.

Ainsi, nombreux et très diversifiés tant dans leurs activités que dans leurs objectifs, les centres d'information concernés par l'énergie forment grâce à leurs liaisons un réseau articulé, véritable entité.

Le réseau permet :
- de partager nettement les compétences et les responsabilités;
- de couvrir l'ensemble du domaine énergie par ces différents centres;
- de faire parvenir les informations documentaires vers l'ensemble des différents types d'utilisateurs : recherche - industrie - enseignement;
- de répartir les tâches (analyses, traductions...) dans une bonne coordination ;
- d'exploiter largement des publications sur l'énergie diffusées dans le monde.

Les centres primaires spécialisés en constituent l'infrastructure et un ensemble que l'on peut considérer dans une certaine mesure comme représentatif de l'information reçue exploitée et diffusée en France.

Nous avons essayé de donner un panorama de cette information, en groupant dans un tableau en annexe les caractéristiques de chacun de ces centres : nom de l'organisme, origine, domaine couvert, fonds documentaire, personnel, fichiers, utilisateurs, modes de diffusion de l'information, évolution, forme de coopération française et étrangère.

C'est en traitant de l'évolution des moyens de transmission que nous serons amenés à préciser l'évolution qui s'en suivra pour la structure de ce réseau, et pour les relations internationales.

III. - Nature et importance de l'information exploitée

Voyons maintenant quelle est la masse documentaire traitée dans cet ensemble, c'est-à-dire par le réseau que nous avons présenté. Nous nous référerons ainsi que nous l'avons expliqué au fonds documentaire des centres qui en sont la structure (cf. schéma en annexe).

La littérature exploitée est fort abondante. Elle provient pour une part, de documents spécialisés sur l'énergie (un, plusieurs ou l'ensemble des secteurs) et pour une autre part, non moins importante, de publications appartenant aux différentes branches utilisatrices d'énergie, ou concernées par ce domaine. Cette littérature là est dispersée et diffuse, à la fois dans des secteurs nombreux et variés, et dans les pays qui produisent une littérature scientifique, technique ou économique, c'est-à-dire la grande majorité.

Et dans cette physionomie, nous retrouvons là encore le reflet de celle de l'énergie elle-même.

Catégories de documents.

Cet ensemble d'informations est constitué de différentes catégories de documents, dont l'accessibilité et l'intérêt, en tant que source documentaire, ne sont pas les mêmes, et varient en outre suivant la vocation propre au centre.

Nous placerons dans un premier groupe des documents couramment utilisés et facilement accessibles (ouvrages, périodiques), dans un second, les documents moins couramment utilisés, mais assez facilement accessibles (brevets, comptes rendus de congrès, textes réglementaires, codes, normes nationales ou internationales, catalogues de constructeurs...) et enfin la littérature de faible diffusion, et difficilement accessible aux centres d'information parce qu'elle échappe aux canaux classiques de diffusion, celle que l'on désigne parfois par « littérature souterraine » (rapports de recherche, thèses, spécifications, données numériques, monographies, rapports de synthèse...)

Nous faisons bien entendu allusion dans ce cas aux documents pour lesquels il n'y a pas de « restriction de diffusion ». Osons-nous ajouter une quatrième catégorie. Les documents qui ne sont pas publiés du tout, qui restent dans les dossiers, simplement parce que ceux qui ont fait les travaux ne prennent pas le temps de le faire savoir, alors que leur diffusion ne violerait aucun secret.

A-t-on le droit de souhaiter qu'un effort soit fait pour leur diffusion, alors que le « papier » sur l'énergie croît de façon exponentielle, et que nous essayons de maîtriser « la marée montante des documents » ? Sans doute...

Valeur d'information des documents.

C'est que ces diverses catégories, n'ont pas comme nous le disions, une masse en rapport avec leur « poids » et leur « qualité » en tant que source d'information. Expliquons-nous.

Le nombre des articles augmente, mais la qualité suit-elle? Nombreux sont ceux qui prétendent que les articles originaux et de valeur diminuent et sont « noyés » dans le flot des autres d'intérêt secondaire, d'où la difficulté du choix. Les ouvrages malgré leur nombre sont loin de répondre à tous les besoins : d'une part il y a, et c'est logique, des lacunes dans les sujets traités, et d'autre part, une certaine inertie par rapport à l'actualité, est bien souvent constatée, auteurs et éditeurs ne pouvant suivre le rythme d'accroissement des connaissances.

De ce fait, cette première catégorie de documents courants et facilement accessibles est loin de répondre à tous les besoins d'information. Cette catégorie pose ainsi un triple problème : problème de collecte de la masse dispersée, problème de traitement et problème de prix : les dépenses entrainées en temps et en matériel sont-elles compatibles avec l'utilisation qui en est faite ?

La deuxième catégorie de documents, moins courante pour certains centres (bien que ce ne soit pas le cas pour ceux auxquels nous nous référons) présente un intérêt croissant.

L'on ne saurait trop insister sur l'intérêt des brevets comme source documentaire (pour certains cette source constitue même près de 60 % de l'information utile), les catalogues de constructeurs sont pour l'industrie une source non moins précieuse (pour certaines entreprises près de 35 %). Mais comment les choisir, les classer, les tenir à jour afin d'équilibrer le temps d'exploitation avec l'usage que l'on en fait ?

Les données numériques, les statistiques, sont d'une utilité croissante dans toutes les branches et pour toutes les préocupations. Mais leur collecte, demande en général beaucoup de temps. C'est qu'actuellement, ces données sont le plus souvent diffuses et dispersées dans toute la littérature et dans tous les pays 2.

La littérature dite « souterraine » présente un intérêt qui ne cesse d'augmenter. Il est difficile d'en mesurer l'importance, à la fois parce que les documents sont mal connus, donc mal utilisés et parce qu'ils touchent un nombre plus restreint d'utilisateurs, du fait qu'ils traitent généralement d'un sujet très spécifique. Cependant tous les centres d'information sont d'accord pour reconnaître leur utilité : la difficulté est de savoir qu'ils existent et de les obtenir auprès de leurs auteurs. Les centres auxquels nous nous référons ont non seulement ce souci, mais aussi celui d'aider à la diffusion des rapports.

C'est ainsi que le Centre de documentation du C.E.A. groupe les rapports des organismes internationaux et des autres pays; inversement, il est responsable de la diffusion des rapports français.

Le service de documentation des Houillères est chargé de publier les études des ingénieurs de son organisme. Il en est de même dans certains services spécialisés d'EDF. Le Centre de documentation de l'Institut français du pétrole a joué le rôle d'expert pour l'indexation automatique sur ordinateur des rapports internes de cet organisme. Mais ces rapports ne sont pas publics et ne figurent donc pas dans le fonds du Centre de documentation qui a, lui, au contraire, une large vocation publique.

Toutefois il faut bien reconnaître que malgré l'intérêt de ces documents, leur collecte demande un effort, qui pour la majorité des centres d'information, dépasse largement le cadre étroit assigné à leurs activités.

Enfin, la publication de documents de valeur qui « dorment » dans les tiroirs entre directement dans les préoccupations de nos centres. Ils sont particulièrement placés pour en avoir connaissance, pour persuader leurs auteurs de les faire publier, et pour aider à cette publication.

Physionomie de la masse documentaire.

Ainsi, l'information que nous avons à exploiter est remarquable par son importance, sa dispersion, et le nombre des documents peu accessibles. Cette physionomie est pour une part à l'origine des liaisons entre centres et de la constitution de notre réseau d'information.

Faisons remarquer, par ailleurs, qu'elle explique pourquoi nous n'avons pas été en mesure de chiffrer le volume de toute cette littérature.

Ce caractère particulier de l'information sur l'énergie pose à tout centre qui doit l'exploiter un triple problème : le nombre, le choix, la collecte : comment traiter et exploiter les documents recueillis et comment proportionner l'effort à mener, (exprimé en temps et en matériel) à l'utilité des informations ainsi recueillies ?

Nous retrouvons à ce point la raison d'être de l'information : une transmission efficace des données publiées à ceux qui en ont besoin.

Un tel choix, valable dans une optique de productivité, est fonction des responsabilités du Centre, et par conséquent des utilisateurs. Ce sont finalement eux qui dicteront le choix, et par là même, qui dicteront le choix des modes de transmission.

IV. - A qui s'adresse l'information ?

Les utilisateurs, quels sont-ils, quels sont leurs besoins, leur attitude vis-à-vis de l'information telle que nous l'entendons, et enfin quelle est leur aptitude à la recevoir ?

Les utilisateurs occasionnels.

Pour les uns, l'énergie est une incidence dans leur activité propre ou leur spécialité. L'information ne les intéresse qu'occasionnellement, et en fonction de leurs propres problèmes. C'est le cas, par exemple, de ceux qui appartiennent aux branches utilisatrices d'énergie, telles que la céramique, la fonderie, la S.N.C.F... ou encore de ceux qui mènent des études économiques, dans lesquelles intervient le facteur énergie.

Ils ont besoin alors d'un élément précis, déterminé pour un cas spécifique. Ils désirent l'obtenir sans effort, sans recherches compliquées, infructueuses ou trop longues. Il n'est pas question de leur fournir, par exemple, une longue bibliographie qui leur demandera de passer du temps pour identifier les documents contenant ce qu'ils recherchent. Ils souhaitent également être renseignés avec un maximum de sécurité, c'est-à-dire être assurés qu'il y a une bonne probabilité pour que les documents susceptibles de contenir le renseignement recherché aient bien été exploités. Mais d'autre part, ils éprouvent des difficultés à situer leurs besoins exacts, à cerner leur problème du fait qu'ils connaissent peu ou mal un domaine qui ne leur est pas habituel.

Par ailleurs, ces utilisateurs accidentels n'ont pas à se tenir au courant sur un sujet qui ne les intéresse qu'exceptionnellement et par conséquent, ne cherchent pas à suivre régulièrement l'information.

Les utilisateurs du secteur énergie.

Pour les autres, au contraire, l'énergie (ou tout au moins un des secteurs) est, ou fait partie des activités propres. Ces utilisateurs là ont tout d'abord besoin de suivre ce qui se publie dans leur domaine. A ce titre, l'information constitue pour eux un moyen, et sans doute l'un des plus efficaces, de cette formation continue, si nécessaire à tous ceux qui participent à l'activité industrielle ou économique. Ce but sera d'autant mieux atteint que l'information concernera exactement la spécialité de l'intéressé à l'exclusion de toute autre afin d'éviter dispersion et perte de temps.

Il leur faut également avant d'aborder un travail déterminé qui leur est confié : étude, recherche, projet, fabrication..., savoir ce qui a été publié à ce sujet.

Le même souci se retrouve également en vue d'une prise de décision. De cette connaissance dépend en grande partie, l'orientation du travail ou de la décision, son efficacité et sa rentabilité (dans la mesure où l'on évitera de refaire ce qui existe grâce à l'information ainsi recueillie). Il faudra alors une collecte aussi sûre que possible et orientée de façon à renseigner non seulement sur un cas précis, mais sur ceux qui sont susceptibles d'avoir une relation directe ou indirecte avec lui.

L'intéressé acceptera souvent dans ce cas un certain délai, justement compatible avec l'importance du problème posé mais refusera généralement, sauf pour certaines recherches, d'avoir à examiner une longue bibliographie. Il désire être en possession des seuls documents qui intéressent directement son propre problème.

Les mêmes utilisateurs auront enfin besoin, eux aussi, de données sur un élément précis, déterminé pour un cas spécifique. Ils se retrouvent alors avec les mêmes exigences que les utilisateurs occasionnels.

Les services de documentation.

Les services de documentation deviennent à leur tour utilisateurs vis-à-vis des autres services. Ils jouent dans ce cas le rôle de relais entre celui qui recherche l'information et le centre spécialisé qui la détient.

La collecte.

Par ailleurs, l'ampleur de la collecte variera suivant la nature du sujet. S'il s'agit d'un domaine de pointe, l'antériorité sera récente, il en sera tout autrement d'un domaine classique.

Le sujet pourra se limiter à un pays donné, ou au contraire concerner tout un ensemble.

Attitude des utilisateurs.

Enfin, l'attitude des utilisateurs, et leur aptitude, sont fonction de la formation qu'ils ont reçue, de la forme de leur activité (recherche, fabrication, commerce, économie, enseignement) et bien entendu de leur caractère propre.

N'oublions pas également qu'il ne suffit pas d'organiser et d'adapter un centre d'information aux besoins réels de ses utilisateurs pour que ce centre soit productif, rentable, efficace. Faut-il encore que ceux qu'il est appelé à servir le fassent et faut-il aussi avoir leur adhésion afin qu'ils participent eux aussi au circuit de l'information, tout particulièrement en faisant connaître leurs besoins aux centres qui les servent. Ceci demande, dans la majorité des cas, et à des degrés variables, un effort tant du centre que de ces clients potentiels. Ceux-ci doivent être formés à se servir de l'information organisée.

Complexité et variété des besoins.

Ainsi, nous nous trouvons en présence, d'un côté, de besoins divers, variés, non seulement dans le domaine concerné, mais dans le but recherché, d'utilisateurs potentiels exploitant insuffisamment les possibilités qui leur sont offertes, et parfois même mal préparés à recevoir l'information.

De l'autre côté, il nous faut, pour répondre à leurs exigences, collecter dans une masse, de plus en plus difficile à saisir, effectuer un choix pertinent et sélectif suivant des besoins très spécifiques, proportionner le prix de revient de la recherche au service réel rendu, et enfin réduire les délais de réponse.

Peut-on, dans ces conditions, estimer raisonnablement que cette complexité dans la transmission de l'information, se ramène essentiellement à un problème de traitement qui sera résolu grâce aux procédés mécaniques modernes ?

C'est à dessein et pour éclairer ce problème que nous avons voulu situer avec autant de précision que possible, les différents problèmes que pose l'information. Avant le traitement, il s'agit d'abord et essentiellement de collecte et de choix. Le traitement lui-même, et nous le comprenons mieux maintenant que nous avons situé les besoins, ne saurait se ramener à un nombre limité de moyens si mécaniques soient-ils. Il serait à craindre dans ce cas que seule une petite fraction des utilisateurs potentiels soient servis, à l'exclusion des autres. Et l'on irait alors à l'inverse du but recherché, d'une part l'information ne toucherait pas tous ceux qui en ont besoin, et d'autre part, le coût de son traitement serait disproportionné aux services rendus.

C'est pourquoi actuellement, chez nous, des moyens nombreux et divers servent à transmettre l'information. C'est également la raison pour laquelle l'emploi des procédés modernes de traitement automatique est encore relativement restreint.

Passons successivement en revue ces moyens afin d'en préciser la nature et l'utilité. Nous comprendrons mieux ensuite l'évolution envisagée pour répondre à l'évolution des problèmes de transmission, dont la croissance de la masse documentaire n'est qu'un des aspects.

V. - Moyens de transmission

Nous distinguerons les fichiers, les bulletins analytiques et signalétiques, les systèmes de diffusion sélective de l'information, les bibliographies analytiques, les synthèses documentaires.

Fichiers.

L'accessibilité aux références est encore dans la majorité des cas obtenue à l'aide de fichiers.

Ceux dont la capacité ne dépasse pas environ 50 ooo fiches sont manuels, et organisés le plus souvent suivant un classement systématique. C'est le cas au Centre de documentation des Houillères, à l'A.T.G., à l'Institut français des combustibles. Il semble bien que ce soit pour cette capacité le moyen de recherche le plus rentable et le plus facile, en particulier pour les « clients » des centres qui désirent pratiquer eux-même les recherches.

Le système de fichier classé suivant un plan systématique, et exploité manuellement est encore utilisé à l'Électricité de France et à l'Institut du pétrole. Cependant, dans ces deux cas, il est appelé à disparaître parce qu'il n'est plus adapté au nombre de fiches (plus de 100 000) ni à l'évolution des préoccupations et des domaines traités par ces centres; les fichiers approchent de la taille critique; l'entrée en ordinateur des références de 1968 est en cours. A l'Institut du pétrole, un stock important de références des années 64-65-66 et 67 existe sur bandes; les programmes de recherche rétrospective qui ont dû être réécrits pour s'adapter au nouvel ordinateur doivent tourner au milieu de 1968. L'Électricité de France procède à des expériences limitées d'indexation, en vue d'un traitement automatique.

Au C.E.A., le fichier manuel classé suivant un plan systématique est abandonné depuis 196I (sauf pour les fiches matières des ouvrages) : la capacité était devenue trop grande, le plan dépassé par l'évolution rapide de cette branche et surtout il était difficile de trouver le personnel qualifié. Il n'existe plus maintenant de fichiers, mais des bulletins spécialisés, sur lesquels nous reviendrons.

Bulletins analytiques et signalétiques.

Les bulletins sont destinés à diffuser les références des documents reçus au Centre. Ils fournissent aux intéressés qui les reçoivent : une mise au courant sur ce qui se publie, les références étant groupées par sujet, et un outil documentaire pour la recherche de renseignements.

Certains services, en outre, diffusent directement les fiches de référence, afin de faciliter la constitution de fichiers. C'est le cas au Centre de documentation des Houillères et à l'Institut du pétrole.

Nous retrouvons là le souci des centres primaires de faire connaître ce qu'ils reçoivent, et de « servir ».

Ces bulletins, mensuels ou bi-mensuels, groupent entre 200 et 300 références, et ont une antériorité de publication variant de 6 semaines à 4 mois. Il nous faut citer à part celui du C.N.R.S., dont nous avons parlé précédemment. Les références concernant l'énergie y sont réparties dans plusieurs sections.

A l'exception du bulletin du C.E.A., ils sont rédigés à partir des analyses élaborées par le Centre lui-même, et suivant des moyens classiques, sans intervention mécanique. Toutefois, l'Institut du pétrole établit, à l'aide d'ordinateur, la liste de ses rapports internes classés suivant un système d'auto-indexation sur titre (A.I.D. I.P). Mais ces index ne sont pas diffusés. Par contre, la diffusion des analyses sur la documentation publique élaborées par le Centre de documentation est faite sous forme de fiches et non de bulletins.

Ce même système d'auto-indexation a été adopté dès 1962 par le C.E.A. pour procéder à l'indexation automatique des informations (selon une formule de KWIC index), et produire des bulletins spécialisés, qui remplacent les fichiers. Nous verrons lorsque nous aborderons les développements que ce système vient d'être abandonné à son tour, parce qu'il ne répond plus aux impératifs actuels.

Diffusion sélective de l'information.

Il s'agit d'un choix de références plus sélectif que le classement adopté dans un bulletin bibliographique, et destiné à satisfaire à des besoins déterminés d'information.

Si la sélection est pertinente, et sans lacune importante, cette forme d'information sur mesure est sans contestation la formule la plus élaborée pour assurer aux intéressés une mise au courant sûre et sans perte de temps. C'est le moyen de dominer l'accroissement de la masse documentaire et sa dispersion et de la réduire aux dimensions d'une spécialité précise et circonscrite. Les ordinateurs se prêtent bien à ce traitement. Des essais sont en cours au C.N.R.S. et à l'Institut du pétrole. L'Électricité de France l'envisage dans ses projets d'automatisation.

Synthèses - Études bibliographiques.

En face du flot accaparant de la littérature, les synthèses et les études bibliographiques représentent un moyen d'accès complémentaire du fichier.

Contrairement au fichier, qui permet l'analyse et qui est susceptible d'être traité sur ordinateur, le rapport de synthèse procède de la démarche inverse et est élaboré par l'homme.

Nos centres ont tous conscience de l'utilité de tels rapports, estimant qu'ils doivent faire partie de leurs activités et de leurs responsabilités. Leur élaboration est longue, délicate et exige d'être confiée à des spécialistes doués de qualités particulières. Les rapports entraînent ainsi un investissement élevé (en temps et en matière grise).

Mais ils se justifient par l'économie de temps qu'ils permettent et par la valeur des informations qu'ils procurent.

VI. - Perspectives de développement

Ce panorama de l'organisation et de la structure actuelles de l'information sur l'énergie en France, que vaut-il, projeté dans l'avenir ?

En matière de documentation, il nous semble exact d'avancer qu'un procédé, qu'une méthode ne valent qu'en fonction de leur utilité dans les 10 ou 20 prochaines années. Comment se présenteront, évolueront dans le domaine qui nous préoccupe ici, les facteurs qui conditionnent la transmission de l'information ?

Évolution prévisible des facteurs de l'information.

La masse documentaire augmentera, et ce, pour plusieurs raisons : augmentation des documents courants, emploi croissant de documents moins courants qui eux aussi augmenteront et, souhaitons-le, accessibilité plus aisée aux documents peu ou non diffusés, grâce à une amélioration de la circulation des informations.

Les domaines couverts par les centres changeront avec les modifications qui s'opèrent au sein du domaine lui-même (techniques, applications, matières premières, méthodologie nouvelles).

- L'attitude des utilisateurs évoluera. L'utilité de l'information sera mieux reconnue (on commence seulement à en prendre vraiment conscience). Les utilisateurs, souhaitons-le, auront appris à y avoir recours grâce à des cours de formation prévus pour eux. Ils deviendront de ce fait plus nombreux, plus exigeants, quant à la qualité, quant à l'efficacité, et quant à la rapidité. Inversement, ils participeront mieux au fonctionnement du Centre qui les sert et le rendront en quelque sorte plus « opérationnel ».

- Cette prise en considération de l'information en même temps que le développement de l'emploi des systèmes de traitement automatique, auront pour conséquence heureuse d'attirer dans les rangs des spécialistes, des esprits jeunes, dynamiques, brillants, qui auraient auparavant considéré comme un échec de s'y trouver. Il s'en suivra obligatoirement des progrès bénéfiques à la science de l'information.

- La recherche documentaire gagnera en complexité à la fois par l'augmentation de la masse documentaire, et par la nécessité d'explorer un domaine de connaissances toujours plus vaste, l'information demandée devra être de plus en plus pertinente.

- La nécessité où sera chacun de poursuivre sa formation impliquera une diffusion sélective de l'information en fonction des centres d'intérêts particuliers.

- La recherche plus poussée de la rentabilité et le coût plus élevé du traitement de l'information, pour ceux qui disposeront de moyens mécaniques, nécessiteront, pour chaque centre, de réviser les frontières de son champ d'activité et de ses responsabilités et d'en donner une définition plus précise sinon plus étroite.

- Les systèmes mécaniques de traitement de l'information se perfectionneront : plus grande capacité, meilleure adaptation aux besoins réels de l'information documentaire, facilité d'accès, diminution du prix.

- D'autres sytèmes apparaîtront, grâce au progrès.

- Le développement de tous ces moyens créera des supports documentaires qui ne seront pas directement accessibles : il faudra recourir à d'autres moyens. Par exemple, il est à prévoir que les grandes bibliographies ne seront plus disponibles que sur bandes d'ordinateur, et par conséquent accessibles à l'aide d'ordinateurs capables de les traiter.

Certaines publications se présenteront sous forme de microfiches qui demanderont de recourir à des appareils spéciaux pour pouvoir les lire.

Il s'agira toujours d'informations importantes sinon essentielles en qualité et en nombre ne serait-ce que pour justifier des frais engagés.

Il sera donc indispensable pour ceux qui ne les produiront pas, mais auront à s'en servir, d'être équipés et organisés pour les recevoir.

Et nous saisissons là, dans toute son acuité, l'obligation de suivre l'évolution des méthodes de traitement et de de diffusion de l'information et de s'y adapter. Un écart technologique entraînerait presque sûrement, et par voie de conséquence, de perdre l'accès à une partie, et sans doute, la plus utile, des nouvelles connaissances. C'est dans une certaine mesure l'avance scientifique et technique qui en subirait les conséquences et qui se trouve ainsi en jeu.

De telles perspectives ne sont pas propres à l'information sur l'énergie. Toutefois, dans notre cas, elles prennent un relief et une signification plus nets, du fait que notre domaine se trouve à la base et au point de jonction de nombreuses branches et de nombreuses disciplines.

Évolution propre à l'information sur l'énergie.

Est-il possible d'envisager ou de prévoir l'évolution qui est amenée à se faire dans nos moyens d'information, et par suite dans la structure du réseau, telle que nous l'avons décrite? Comment les liaisons actuelles, nées de besoins qui se sont présentés, changeront-elles pour répondre à d'autres besoins ?

Il convient d'être prudents, dans les renseignements que nous pouvons fournir. L'évolution dont nous parlons se dessine depuis assez peu de temps, le changement des moyens, de ce fait à peine amorcé, subira des transformations que l'on ne connaît pas encore.

Évolution des moyens.

Nous nous référons, dans ce cas encore, aux perspectives envisagées par les centres primaires puisqu'ils forment la structure de notre réseau d'information.

Pour certains il n'y a pas de changement prévu dans l'immédiat pour l'organisation des fichiers et l'élaboration des bulletins bibliographiques. La raison en est que ces moyens sont en mesure de les satisfaire dans les années à venir; la masse documentaire à traiter reste stable, de même que le domaine couvert. De plus cette formule qui permet aux utilisateurs un accès direct convient bien aux besoins actuels et prévisibles, enfin et surtout, le coût d'élaboration du fichier et des bulletins est proportionnel à leurs utilisations, et adapté au budget. Des sytèmes plus mécanisés ne se justifient pas dans ce cas : le nombre de références est insuffisant, et le coût de traitement beaucoup plus élevé est loin d'être payé par l'amélioration du temps de recherche. De plus, l'un de ces centres s'est engagé avec ses homologues étrangers à utiliser un plan international systématique pour fichier manuel.

Toutefois, tous ces centres jugent nécessaire d'envisager une adaptation à l'automatisation. Ils prévoient d'avoir de plus en plus recours aux sources documentaires des secteurs voisins, ou à de larges bibliographies couvrant plusieurs secteurs.

Ils estiment, que certains de leurs travaux pourraient efficacement être confiés à des ordinateurs. Par ailleurs, leur spécialisation et leur utilisation par des spécialistes leur donnent la possibilité d'effectuer des analyses précises, telles qu'elles sont nécessaires pour l'entrée en ordinateur.

Il semble donc que dans ce cas, la voie de l'avenir soit, tout en conservant un fichier manuel répondant à la majorité de leurs besoins, de participer à la mise en commun d'un stock documentaire dont le volume justifierait d'un traitement sur ordinateur. Ce stock serait exploité à partir d'un thésaurus élaboré en commun avec les centres chargés d'alimenter le fonds. En contrepartie, ces centres pourraient disposer des services de l'ordinateur, et en outre y avoir recours pour des recherches rétrospectives sur un domaine plus vaste que le leur. Cette solution a également l'avantage de permettre de participer à l'évolution des moyens d'information et d'éviter cet écart technologique si grave de conséquences.

Pour d'autres centres, au contraire, un changement est à prévoir :

Le stock documentaire en augmentation n'est plus exploitable de façon rentable et efficace sur fichier manuel, une diffusion sélective devient nécessaire, les demandes des utilisateurs augmentent en nombre, en complexité, et nécessitent des recherches sur plusieurs secteurs, et une sélection particulièrement fine. L'emploi d'un ordinateur est alors possible. Faisons cependant bien remarquer, que le problème n'est pas, en adoptant cette solution, de gagner sur le temps de la recherche. C'est là une fausse vue qu'il convient d'effacer : le gain de temps à la recherche est souvent perdu par le temps de traitement à l'entrée qui est beaucoup plus important dans ce cas. En fait, le temps même de la recherche est d'importance moindre que la qualité, la pertinence, la sûreté des renseignements obtenus, et c'est essentiellement cela qui est demandé à l'ordinateur : une amélioration des services rendus par le Centre allant de pair avec une bonne productivité. Dans cette optique, l'ordinateur n'est qu'un outil; il n'est pas inconcevable qu'il soit remplacé si un outil plus efficace apparaît, ou encore s'il s'avère qu'il ne réponde plus à de nouveaux besoins.

Une autre raison explique pour ces Centres l'utilisation d'un ordinateur.

Malgré leurs moyens, ils ne sont plus en mesure, sans grever exagérément leurs charges financières, de traiter eux-mêmes et d'indexer, tous les documents qui leur sont utiles.

Un exemple particulièrement frappant de la nécessité de rechercher la rentabiblité en évitant les duplications et en partageant le travail de préparation, est celui du Centre de documentation du C.E.A.

Bien que mécanisé depuis 196I, ce Centre n'a pas hésité à opérer des changements profonds dans ses méthodes et ses moyens pour s'adapter aux impératifs actuels. Depuis le début 1968, les index élaborés sur ordinateur sont supprimés et sont remplacés par un index de la littérature nucléaire française. Cet index constitue l'apport français aux grandes revues bibliographiques françaises et étrangères et aux organisations internationales, l'Agence de Vienne en particulier.

Indexée selon les normes internationales, mise sur bandes magnétiques, cette littérature lui permettra de recevoir en échange, sous la même forme, l'ensemble de la littérature nucléaire mondiale recueillie et préparée par l'Agence de Vienne. Cette littérature sera alors exploitée au C.E.A. en vue d'une dissémination sélective de l'information, et en vue de recherches rétrospectives, à distance, par le chercheur lui-même.

Dans ces développements, nous décelons que les grandes bibliographies couvrant de façon presque exhaustive un large domaine ou un ensemble de domaines, deviendront de plus en plus utiles. Toutefois, le coût dé leur fabrication ne cessera d'augmenter. Il faudra donc qu'elles soient élaborées par un centre puissant, et qu'elles servent un nombre élevé de « clients » pour compenser l'investissement. C'est pourquoi le C.N.R.S. envisage de construire avec les Centres concernés un thésaurus de l'énergie, à partir duquel il lui serait possible, grâce à l'ordinateur, de publier des bibliographies exhaustives spécialisées.

De cette projection dans un avenir proche ou lointain de notre réseau d'information, des perspectives se dessinent :

Évolution de la structure même du réseau.

- Les moyens de transmission de l'information seront nombreux et divers, pour satisfaire, dans un souci d'efficacité et de rentabilité, à des besoins qui tout en évoluant n'en seront pas moins très diversifiés.

- Des changements profonds sont appelés à s'opérer dans la conception de ces moyens.

- C'est essentiellement la structure même du réseau d'information qui est amenée à se modifier. Les centres deviendront plus étroitement dépendants devant limiter leur domaine, ils recourreront plus largement les uns aux autres. Chacun s'efforcera de connaître les possibilités des autres, afin de s'en servir comme il le ferait d'un manuel. Mais surtout, ils seront amenés à partager leurs efforts, à mettre en commun leurs travaux et à exploiter le travail d'un ensemble. Cet état de fait fera qu'à des niveaux différents, chacun deviendra la cellule d'un tout. Les centres seront alors amenés à penser, à concevoir leurs méthodes, leurs moyens, non plus seulement en fonction de leurs préoccupations et de leurs champs d'activité propres, mais aussi en fonction de l'ensemble. Et c'est en cela que réside essentiellement l'évolution.

Conditions de cette évolution.

Mais précisons bien qu'une telle évolution, si nécessaire soit-elle, ne se fera pas d'elle-même spontanément. Elle ne se réalisera qu'en la préparant et en lui donnant les moyens :
- L'adhésion des centres en est la base afin non seulement qu'ils en reconnaissent l'utilité, mais qu'ils y adaptent leur attitude. Il y a en quelque sorte « un climat favorable à créer ».
- Les changements à opérer doivent être pensés, d'une part en fonction des besoins, des problèmes, des développements, propres à chacun, et d'autre part en fonction de l'ensemble.
- L'étude de ces besoins est donc à faire. Elle s'apparente à une étude de marché.
- Un cadre est à fixer. Il est bien évident qu'une mise en commun devant constituer un ensemble exploitable n'est réalisable, qu'avec des éléments compatibles. Des règles, des spécifications, des normes sont donc à définir et à formuler en tenant compte d'une part des éléments à traiter, d'autre part des moyens de traitement.
- Enfin, et surtout, l'ensemble à constituer doit être défini, ou tout au moins, avoir un support, un guide, un élément directeur. Une politique commune est à définir. Dans notre cas, l'énergie ayant une incidence sur les autres disciplines et les autres branches, cette politique doit constituer une politique nationale, être l'expression de la politique scientifique, technique et économique si l'on veut qu'elle soit définie en fonction des besoins.

Nos centres de documentation ont pris conscience de ce problème. Ils ont créé récemment un groupe d'étude à l'initiative de la Délégation générale à la recherche scientifique et du C.N.R.S.

Ce groupe réunit les responsables des centres primaires, l'ossature de notre réseau. Le travail est à peine ébauché, et se limite à une étude des problèmes, projets et desiderata de chacun.

Il est prématuré d'en parler si ce n'est pour dire que le mérite de ce groupe est d'exister.

VII. Conclusion

Cette évolution, tracée dans un cadre national, ne saurait répondre à tous les problèmes que pose la transmission de l'information sur l'énergie. Il est une évidence que l'information n'a pas de frontière : elle prend naissance, et est utilisée dans tous les pays et cette évidence est particulièrement frappante pour l'énergie. L'évolution qui doit se faire ne pourra donc concerner tel pays particulier, mais l'ensemble de ceux qui produisent ou utilisent l'information sur l'énergie.

En fait les conditions de cette évolution, telles que nous les avons mentionnées dans un cadre national sont fonction de l'information en tant que telle; et s'appliquent aussi dans un cadre international.

Un climat, un terrain bien préparé, pour permettre l'adhésion des pays, sont indispensables.

Chaque centre devra connaître les possibilités des autres, quelle qu'en soit la localisation. Un annuaire de ces sources, véritable répertoire, s'avèrera utile, au même titre que l'on consulte un annuaire de spécialistes.

La coopération entre centres dans le partage des efforts et l'utilisation du fruit du travail commun impliqueront la mise en commun d'actions analogues à celles que nous avons indiquées dans un cadre national. Une prise de conscience sera nécessaire, particulièrement à l'échelon de ceux qui ont pouvoir de décision dans leur pays. Une harmonisation des politiques de l'information s'imposera. Elle permettra tout d'abord de porter un jugement sur l'ensemble, de le « diagnostiquer » en quelque sorte, en identifiant les actions à mener, les lacunes à combler, les objectifs à atteindre, les priorités à accorder...

Cette harmonisation est ensuite indispensable pour fixer un cadre à la coopération : spécifications, directives, normes, choix des langues. Nous nous trouvons devant les mêmes impératifs que ceux de la coopération nationale, assurer une compatibilité entre les travaux de chacun pour permettre leur exploitation en commun et l'utilisation de l'ensemble par chacun.

Ainsi l'efficacité de la transmission de l'information sur l'énergie est-elle étroitement dépendante des problèmes et des solutions actuels de la Science de l'information et qui conduisent à la voie de la coordination. Mais dans cette optique la recherche de l'efficacité, dans chaque cas particulier, implique de proportionner le coût des moyens mis en œuvre aux besoins et aux résultats recherchés.

Illustration
Annexe

  1. (retour)↑  Cet exposé, a été établi pour préparer une Communication sur le même sujet à la Conférence mondiale de l'énergie, session plénière de Moscou - 20-24 août 1968.
    Il a été rédigé à partir des renseignements fournis par le Centre national de la recherche scientifique et par les principaux centres de documentation des secteurs de l'énergie : centres de documentation du Centre d'études et de recherches des charbonnages de France, de l'Institut français du pétrole, de l'Électricité de France, de l'Association technique pour l'industrie du gaz en France, du Commissariat à l'énergie atomique et de l'Institut français des combustibles. L'Organisation de coopération et de développement économiques a bien voulu nous donner des précisions concernant les travaux de son groupe sur la politique de l'information scientifique et technique.
  2. (retour)↑  Cet exposé, a été établi pour préparer une Communication sur le même sujet à la Conférence mondiale de l'énergie, session plénière de Moscou - 20-24 août 1968.
    Il a été rédigé à partir des renseignements fournis par le Centre national de la recherche scientifique et par les principaux centres de documentation des secteurs de l'énergie : centres de documentation du Centre d'études et de recherches des charbonnages de France, de l'Institut français du pétrole, de l'Électricité de France, de l'Association technique pour l'industrie du gaz en France, du Commissariat à l'énergie atomique et de l'Institut français des combustibles. L'Organisation de coopération et de développement économiques a bien voulu nous donner des précisions concernant les travaux de son groupe sur la politique de l'information scientifique et technique.
  3. (retour)↑  Le C.E.R.E.N. (Centre d'études régionales sur l'économie de l'énergie) collecte pour la France une documentation économique axée principalement sur les statistiques d'économie générale et d'économie énergétique de l'énergie, et sur les résultats d'enquête. Cette documentation répond à la vocation de ce centre : études régionales sur l'énergie, et est réservée à ceux qui y participent. L'Institut économique et juridique de l'énergie de Grenoble réunit une documentation concernant les problèmes économiques et juridiques de l'énergie.