Les bibliothèques des Centres hospitaliers et universitaires
La réforme des études médicales de I958, dont les grandes lignes sont esquissées, créa les C.H.U. Après un aperçu des problèmes des bibliothèques de C.H.U. de province, le cas particulier de celles de Paris et de la région parisienne, leurs perspectives d'avenir sont étudiés
Avant de parler des bibliothèques des C.H.U. (Centres hospitaliers et universitaires) et plus précisément de celles de Paris que nous connaissons mieux pour nous en occuper, il ne nous paraît pas inutile de les situer dans leur contexte, c'est-à-dire d'exposer sommairement ce que sont les C.H.U. et ce qu'ils doivent devenir. Cela nous paraît d'autant plus nécessaire que l'expression recouvre des réalités très diverses, dont nous ferons un rapide tour d'horizon.
I. - Les C.H.U. et la réforme hospitalo-universitaire
La création des C.H.U. (ordonnance du 30 décembre 1958) correspond à la réforme des études médicales 1. Cette réforme crée une liaison organique, dans une nouvelle structure hospitalière et universitaire, entre les soins aux malades, la recherche médicale, l'enseignement de la médecine, les sciences cliniques et les sciences fondamentales.
Elle rapproche ainsi l'étudiant de l'hôpital et des malades. Elle veut surtout améliorer l'enseignement et favoriser la recherche et les soins par la fusion des carrières universitaires et hospitalières, en généralisant le « plein-temps » pour les enseignants, dont toute l'activité sera partagée entre l'hôpital et l'enseignement, ou le laboratoire et l'enseignement (ou bien même les trois).
a) Les C.H.U.
Selon les villes, la situation est différente. A Paris, les C.H.U. se sont matérialisés, à côté d'un groupe hospitalier, dans un bâtiment où ont lieu cours, travaux pratiques, enseignements dirigés, et où il y a de nombreux laboratoires de recherche (biochimie, biophysique, physiologie, pathologie expérimentale, etc.). Les C.H.U. de St-Antoine, de la Pitié-Salpêtrière, de Cochin (ouvert, mais non terminé) sont ainsi constitués. Par contre, au Kremlin-Bicêtre par exemple, où le C.H.U. doit être construit prochainement, les services hospitaliers et universitaires seront imbriqués dans les mêmes bâtiments, tout en restant distincts les uns des autres, liés seulement par des conventions. C'est de cette façon que se présente également le C.H.U. Nord de Marseille, qui regroupe hôpital, enseignement et recherche. A Grenoble, c'est une nouvelle faculté qui a été bâtie, proche de l'hôpital de la Tronche; à Clermont-Ferrand, la faculté vient d'être reconstruite, mais le nouvel hôpital n'entrera en service que dans quelques années. A Toulouse, à Nancy, etc..., il y a aussi des projets de constructions dans des ensembles généralement hors-ville, qui comprendront faculté et hôpital. A Lille, le regroupement géographique est déjà réalisé depuis 1952 sous forme d'une cité hospitalière, et, avant même la réforme hospitalo-universitaire, les effets en étaient ressentis. Le plus souvent, la bibliothèque est intégrée dans le bâtiment de la faculté, mais il y a des exceptions (Rennes, Marseille Nord, Toulouse).
Cependant, dans beaucoup de villes, il n'y a pas eu de construction nouvelle, et il n'en est pas prévu dans l'immédiat; on y parle pourtant aussi de C.H.U. L'expression désigne alors le regroupement « moral » d'un hôpital et d'une faculté (ou d'une école de médecine), liés par des conventions qui établissent entre eux des rapports d'ordre administratif, juridique et pratique.
Même dans ce dernier cas, où il peut sembler qu'il y ait juxtaposition et non transformation, une évolution se dessine et s'accentuera dans les années qui viennent : elle touchera les étudiants, les malades et les médecins, enseignants cliniciens ou fondamentalistes et chercheurs, dans la mesure où les effets de la réforme hospitalo-universitaire se feront sentir.
b) La réforme hospitalo-universitaire.
Cette réforme veut améliorer les études par un enseignement mieux adapté à l'état actuel de la médecine et à son évolution. Les contacts entre enseignants et étudiants devraient être favorisés par la multiplication de petits groupes de travail d'enseignement dirigé; la proximité des laboratoires peut leur faire mieux saisir les rapports étroits qui unissent les sciences fondamentales et cliniques, et leur donner une conscience plus nette de l'importance des sciences biologiques (physique et chimie biologiques en particulier) pour la recherche médicale : les deux types d'enseignement, clinique et fondamental, devraient ainsi se compléter au lieu de se concurrencer comme ils le font souvent; enfin, l'enseignement clinique (celui de la pathologie en particulier) devrait être amélioré par le regroupement géographique hôpital-centre universitaire, par une meilleure ventilation des étudiants dans les hôpitaux, aménagés conformément à leur mission d'enseignement, et par une participation plus effective des étudiants à l'activité hospitalière (tous, et non plus les seuls externes et internes, devant en principe y recevoir une formation clinique poussée); ils bénéficieront également de l'exercice du « plein-temps » par leurs maîtres, qui, se partageant entre leurs fonctions hospitalières et leur rôle d'enseignants, consacreront plus de temps à l'hôpital, devenu lieu principal, sinon exclusif, de leur activité.
D'autre part, les certificats d'études spéciales (C.E.S.), correspondant aux spécialisations, doivent se multiplier, en même temps que la réforme prévoit une amélioration de l'enseignement post-universitaire à l'intention des médecins praticiens.
En ce qui concerne les malades, il est certain que les soins, sans être le principal objectif de la réforme, peuvent se trouver améliorés par l'instauration du plein-temps, par la présence d'un plus grand nombre d'universitaires dans les services hospitaliers, par le développement de la recherche clinique dans les hôpitaux, ainsi que par une liaison plus étroite entre les disciplines fondamentales et les sciences cliniques.
Quant à la recherche médicale, la réforme veut également lui être favorable en lui donnant droit de cité dans les hôpitaux (où elle est ces dernières années devenue une « parente pauvre », a-t-il été dit au Colloque de Caen) et dans les centres universitaires. Des personnels hospitalo-universitaires cliniciens et fondamentalistes sont tenus de consacrer une partie de leur temps à la recherche, activité qui, avec les soins et l'enseignement, doit occuper la totalité de leur temps. De nouveaux laboratoires ont été créés et aménagés dans les C.H.U., et continueront à l'être; certains leur ont été associés quand ils dépendaient de facultés ou autres organismes; ainsi des unités de l'I.N.S.E.R.M. 2 ou du C.N.R.S sont nombreuses dans les services. Les biologistes seront plus proches de l'hôpital, en même temps que les cliniciens pourront mieux profiter du développement des recherches des fondamentalistes faites à proximité.
Il est certain toutefois que cette multiplication des centres de recherche, « saupoudrés » dans les C.H.U. entraîne une certaine dispersion, parfois critiquée, qui, nous le verrons, est source de nombreux problèmes pour les bibliothèques.
D'autre part, ce qu'on a pu appeler « l'adaptation architecturale » à la réforme n'a pu être réalisé immédiatement. Faute de locaux appropriés, le plein-temps effectif n'est pas encore appliqué partout, puisqu'il faut en effet, à côté de nouvelles constructions hospitalières, bâtir les locaux nécessaires à l'enseignement et à la recherche. En outre, l'intégration du personnel soulève de nombreux remous, dont nous avons tous eu des échos.
II. - La réforme hospitalo-universitaire et les bibliothèques de CHU en province
Cette transformation de l'enseignement médical, plus proche de l'hôpital et auquel la recherche est plus intimement mêlée, a déjà pour les bibliothèques des conséquences qui s'accentueront encore dans l'avenir.
Nous n'avons pas l'intention de nous appesantir sur la situation en province. Mais, si nous nous contentions de parler des bibliothèques de C.H.U. de Paris, nous donnerions à certains une idée fausse de ce que peuvent être les bibliothèques de C.H.U. en général : en effet, à bien des égards, les problèmes sont assez particuliers à Paris. Aussi, avant de les aborder, esquisserons-nous un tableau rapide de la situation dans quelques villes de province, telle qu'elle nous apparaît à travers une enquête sommaire faite auprès de quelques collègues, auxquels nous adressons ici tous nos remerciements pour leurs réponses souvent très pertinentes et intéressantes 3. D'avance, nous demandons à ceux de nos collègues qui pourraient ne pas se trouver d'accord avec nous ou que nous n'avons pas touchés, de nous en excuser. Nous n'avions ni le temps ni la prétention de faire une étude poussée.
Nous avons déjà évoqué la diversité des formes sous lesquelles se présentaient les C.H.U. dans un certain nombre de villes de faculté. Cette diversité se retrouve, bien entendu, dans les bibliothèques. Là où l'expression C.H.U. recouvre seulement le rapprochement, régi par des conventions, d'une faculté et d'un hôpital déjà existants, la bibliothèque de la Faculté de médecine ou la Section médecine de la Bibliothèque universitaire, n'a quelquefois pas encore perçu véritablement les effets de la réforme; ce sont souvent des bibliothèques assez anciennes, avec un fonds important, qui sont fréquemment très actives. Dans beaucoup de cas, des contacts existent depuis longtemps avec les services hospitaliers, qui signalent leurs nouveaux abonnements à la bibliothèque, celle-ci établissant parfois un catalogue collectif (Nancy, Clermont-Ferrand, Lille, Strasbourg, par exemple); d'autre part, beaucoup de nos collègues conseillent les personnes qui s'occupent des bibliothèques de services des hôpitaux. Dans la plupart des villes où la bibliothèque est riche et vivante, les chefs de services et médecins de l'hôpital y viennent depuis longtemps. Bien entendu, la situation est très différente quand il s'agit de bibliothèques de création récente ou aux ressources assez limitées comme celles de certaines écoles de médecine devenues facultés, et faisant maintenant partie d'un C.H.U.
Cependant, dans les villes où la faculté s'est rapprochée de l'hôpital, et même là où, sans nouveaux locaux, l'application de la réforme se fait davantage sentir, certains de nos collègues ont noté une amélioration ou une intensification de leurs rapports avec les instituts de recherche (Grenoble, Lille). Il est d'ailleurs intéressant de noter qu'à Lille, où, comme nous l'avons dit plus haut, le regroupement géographique est réalisé depuis 1952, Mme Nysenwaygue a constaté depuis cette date une extension considérable des demandes : il a fallu y faire face avec le prêt inter-bibliothèques et, dans la limite des possibilités budgétaires, avec une augmentation du nombre des abonnements; il semble que cette tendance s'accentue encore avec le plein-temps du personnel hospitalier et universitaire.
A Nancy, Mlle Kœst note une augmentation du nombre des chercheurs, parallèlement à celle des étudiants. Mme Masson le remarque à Montpellier et l'explique par l'accroissement du personnel dans tous les services.
A Clermont-Ferrand, à Strasbourg, la clientèle a toujours été très variée, cliniciens comme fondamentalistes utilisant la bibliothèque. Mais à Grenoble, depuis que celle-ci s'est rapprochée de l'hôpital, de nouveaux usagers sont apparus, et la demande est plus forte pour les sciences cliniques. A Marseille, dans le nouveau C.H.U. Nord, l'accent est actuellement mis pour les achats sur ce qui concerne la clinique, mais Mlle Perrin prévoit que cela changera probablement dans les années à venir. Mme Masson, à Montpellier note une augmentation des demandes pour les sciences fondamentales depuis dix ans.
Partout, nos collègues soulignent qu'un gros effort doit porter sur les abonnements, mais que la faible augmentation des crédits ne permet pas de suivre le rythme de croissance nécessaire dans ce domaine.
Autre difficulté assez générale : les locaux sont presque toujours trop petits, même dans des bibliothèques construites récemment ou en cours d'édification. Nous verrons que c'est à Paris un problème crucial. Il semble qu'en province aussi ce soit un des points sombres. C'est particulièrement vrai là où les écoles de médecine sont devenues facultés, parce que les programmes pédagogiques ont été faits par les Villes et la Direction des enseignements supérieurs, avant cette transformation, sans que la Direction des bibliothèques de France ait pu toujours intervenir efficacement; or nous savons trop bien que, lorsque la place manque, c'est fréquemment sur la bibliothèque que l'on a tendance à rogner. A Dijon, Rouen, par exemple, les bibliothèques nouvelles disposeront d'une surface rapidement insuffisante. C'est déjà le cas à Reims. A Rennes, par contre, où la bibliothèque n'est pas intégrée (elle est donc financée par la Direction des bibliothèques), la norme habituelle de I,50 m2 par étudiant a été respectée.
Certaines des constructions nouvelles sont du type traditionnel (Marseille-Nord, Tours), avec salle de lecture et salle des professeurs; une place plus ou moins grande y est faite au libre-accès aux rayons. D'autres sont prévues à deux niveaux (Toulouse, Rennes). Nos collègues ont d'ailleurs des opinions divergentes sur la nécessité d'une classification poussée pour les livres en libre-accès au niveau des étudiants des premiers cycles (ouvrages dont le nombre varie considérablement d'un endroit à un autre). En revanche, si peu de bibliothécaires semblent penser que les secteurs spécialisés se justifient en médecine, la majorité est favorable à une séparation en deux niveaux, étudiants des premiers cycles d'une part, dont les besoins sont assez limités (sauf en ce qui concerne le nombre d'exemplaires), étudiants avancés, internes, enseignants, personnel scientifique de l'hôpital, chercheurs d'autre part. Mlle Kœst souligne qu'un tel secteur « devrait comporter, à côté des répertoires bibliographiques et des ouvrages de référence indispensables, les collections (et non plus seulement les derniers fascicules) des périodiques les plus demandés, dont un service xérographique permettrait d'interdire la sortie »; elle considère que, « complété par une organisation cohérente et efficace du prêt entre bibliothèques, ce système répondrait aux besoins des différentes catégories de lecteurs ». Il semble incontestable que c'est dans ce sens que les bibliothèques devront aller, si elles veulent s'adapter à l'évolution de l'enseignement et de la recherche en médecine.
Ce bref aperçu montre en définitive que, dans la plupart des villes de province, la création de 22 C.H.U. n'entraîne pas de modifications considérables pour les bibliothèques médicales, sinon dans la mesure où elles devront accueillir des usagers plus nombreux au niveau des lecteurs différenciés, médecins travaillant dans les hôpitaux ou préparant des C.E.S. et chercheurs; cela signifie que les demandes s'intensifieront à un niveau élevé et que dans beaucoup de cas une augmentation des ressources de la bibliothèque s'avérera de plus en plus impérative, en particulier en ce qui concerne les abonnements; une multiplication des salles destinées à la recherche sera donc également indispensable.
III. - Les bibliothèques de CHU à Paris
A Paris, par contre, les choses ne se présentent pas de la même façon.
En effet, à la différence de la province (à l'exception, pour l'instant, de Marseille où le C. H. U. Nord s'ajoute à la Faculté), les C.H.U. de Paris sont en quelque sorte des établissements supplémentaires par rapport à la Faculté. Ils dépendent du Doyen; un Assesseur est plus particulièrement chargé de chacun d'eux, qui forme un « secteur » du C.H.U. de Paris. Certaines rumeurs laissent à penser qu'ils auront peut-être par la suite plus d'autonomie, mais pour l'instant, ils sont rattachés administrativement à la Faculté 4. Il n'en est pas moins vrai que chaque secteur du C.H.U. (nous dirons plus simplement C.H.U. selon l'expression courante) a une vie propre, et l'aura vraisemblablement de plus en plus. La présence permanente en un lieu unique pour les étudiants, le plein-temps pour les enseignants et chercheurs, donneront vite une unité et une personnalité à chaque C.H.U. C'est déjà sensible à Saint-Antoine et à la Pitié-Salpêtrière, situés dans Paris; cela le sera encore davantage à Créteil ou Aubervilliers, par exemple, plus isolés. C'est une chose dont nous devrons tenir compte dans l'organisation des bibliothèques de ces établissements, dont la situation ne sera pas sans rappeler celle de petites facultés de province : même nombre d'étudiants à peu près, mêmes exigences des enseignants, rapports avec les services du groupe hospitalier voisin et leurs bibliothèques. Mais tout en tenant compte de cette situation nouvelle, nous ne pouvons cependant pas oublier que les bibliothèques de C.H.U. sont des bibliothèques d'appoint du fait de l'existence de la bibliothèque de la Faculté, de celle du C.N.R.S., de la Bibliothèque médicale centrale des hôpitaux de Paris (anciennes Bibliothèques de l'Internat et du Collège de médecine), etc. Il y a un équilibre à trouver et une politique à définir avec plus de précision qu'elle n'a pu l'être au départ, où il était difficile de savoir exactement ce que seraient les C.H.U. de Paris, et, à plus forte raison, ce que devraient être leurs bibliothèques. A la lumière d'une expérience, certes encore incomplète, nous allons essayer de voir comment les choses se sont présentées, ce qui a pu déjà être réalisé, ce qui va l'être, et également ce qu'il nous paraît indispensable d'envisager à plus ou moins brève échéance si nous souhaitons ne pas décevoir les espoirs que les universitaires placent dans nos bibliothèques, avec juste raison voulons-nous croire.
a) Les locaux.
Trois C.H.U. sont déjà construits à Paris : Saint-Antoine et la Pitié-Salpêtrière qui ont respectivement ouvert en 1965 et 1966, Cochin où les étudiants sont entrés en février 1968, mais dont la bibliothèque n'était pas terminée à cette date. Necker-Enfants malades en cours de construction accueillera les étudiants en février 1969, et Créteil quelques mois plus tard. A différents stades (avant-projets, programmes pédagogiques, etc.), nous trouvons le Kremlin-Bicêtre, Aubervilliers, et Bichat, dont l'achèvement devrait intervenir d'ici trois ou quatre ans. De ceux qui suivront, nous ne parlerons pas, nous en tenant aux réalisations certaines et proches.
Disons tout de suite que dans ces nouveaux bâtiments, il a été donné aux bibliothèques une importance notoirement insuffisante; petite illustration de ce fait : dans le numéro du 15 mars 1967 des Notes et études documentaires consacré aux C.H.U., on ne trouve pas une seule fois le mot bibliothèque; par contre, il y est question à plusieurs reprises des animaleries (dont nous ne sous-estimons pas l'importance), des vestiaires pour les étudiants et des parkings pour les deux-roues... Trêve de plaisanterie; mais n'est-il pas incroyable que dans un fascicule consacré à des établissements d'enseignement supérieur et de recherche, la notion de bibliothèque n'apparaisse pas ? Et n'est-ce pas signe que leur importance a été sous-estimée au départ?
Partout, ce sont des bibliothèques intégrées qui ont été prévues, avec les difficultés que cela comporte. Dans les derniers programmes établis, la norme de I,50 m2 par étudiant a été proposée, et nous espérons que les surfaces qui nous seront attribuées n'auront pas été rognées entre temps. Dans ces programmes, d'autre part, la priorité a été donnée aux salles destinées au service public, très importantes par rapport aux magasins, ces bibliothèques n'étant pas destinées à avoir un rôle de conservation, mais ayant besoin d'un grand nombre de places.
Première caractéristique commune de ces bibliothèques : la surface est trop faible et le nombre de places très insuffisant (70 à St-Antoine, 200 environ à la Pitié-Salpêtrière, 156 à Cochin). Les salles seront également beaucoup trop petites à Necker, mais un peu moins à Créteil et dans les autres C.H.U. en projet.
Deuxième point commun : la disposition des locaux est médiocre, défaut fréquent dans les bibliothèques intégrées, où le constructeur s'est peu préoccupé des besoins de tous les utilisateurs. Trop souvent, ces bibliothèques ne forment pas un bloc homogène : pas de liaison intérieure directe avec les magasins situés à un autre étage dans les trois C.H.U. construits; à la Pitié-Salpêtrière, la salle des professeurs et un grand bureau sont séparés de la salle de lecture par un couloir de circulation toujours ouvert. Cette mauvaise disposition des locaux est particulièrement ressentie dans les petits établissements où le personnel est peu nombreux, alors que les horaires d'ouverture doivent être très larges. En ce qui concerne l'homogénéité des locaux, la situation sera encore médiocre à Necker mais un peu meilleure à Créteil et nous espérons que dans les constructions qui viendront ensuite (Kremlin-Bicêtre, Bichat, Aubervilliers, etc.), nous aurons enfin à la fois un nombre de places raisonnable et des bibliothèques convenablement disposées.
b) Les usagers. - I. Les étudiants des premiers cycles.
Les C.H.U. devaient, à l'origine, accueillir les étudiants avancés; d'autre part, ils étaient prévus pour 500, 850 ou 1 200 étudiants. En fait, ils accueilleront ceux des cinq premières années (et l'on sait que les Ire et 2e années « remplissent » beaucoup les bibliothèques), et surtout, ils en recevront plus qu'il n'était prévu (de 1 ooo à 2 ooo) .
Or, dans les bâtiments construits ou en cours de construction, où nous ne disposons même pas du mètre carré cinquante par étudiant déjà insuffisant pour les établissements qui ont moins de 1 800 étudiants à temps plein, il s'avère que la fréquentation des bibliothèques est intense. Cela ne peut surprendre d'ailleurs, les C.H.U. ayant davantage un caractère d'école que de faculté : les étudiants sont en permanence dans les mêmes bâtiments où toutes leurs activités sont regroupées, depuis les stages hospitaliers du matin jusqu'aux conférences d'internat, tard le soir.
Le pourcentage d'une place pour 10 étudiants longtemps considéré comme normal dans les bibliothèques de faculté, mais qui ne l'est sans doute plus dans les campus universitaires est donc très insuffisant. C'est d'autant plus fâcheux que si un C.H.U. comme celui de St-Antoine possède salle de détente et cafeteria, celui de la Pitié-Salpêtrière par exemple n'offre pas d'autres locaux d'accueil que ceux de la bibliothèque; conséquence : dès cette année, avec le tiers de son effectif (puisque les étudiants y ont été admis en commençant par la seule Ire année alors qu'à St-Antoine les 4 premières années ont débuté simultanément), la bibliothèque refuse couramment de 50 à 80 étudiants aux heures de pointe; la situation sera angoissante dès l'année prochaine, avec 450 étudiants de plus, et catastrophique ensuite, quand dans 3 ans, le cap des 2 ooo étudiants sera atteint.
Nous signalons au passage les inconvénients d'être local d'accueil (va-et-vient incessant, bruit, etc.), contre lesquels nous ne pouvons rien puisqu'il n'y a pas de salle de travail ou autres locaux où renvoyer les étudiants; disons un mot aussi des cas de conscience qui se posent à la bibliothécaire qui doit refuser, faute de place, l'accès de la salle à certaines catégories d'étudiants qui ont leurs cours dans le bâtiment, sans toutefois appartenir au C.H.U. (Certificats de rééducation orthophonique, psychomotricité, etc., comptant au total de 1 500 à 2 000 étudiants pour lesquels aucune bibliothèque n'est prévue à proximité). En revanche, il n'est pas question de refuser des cartes de lecteurs aux internes du groupe hospitalier voisin, ni aux étudiants des C.E.S., qui n'ont cependant pas été comptés dans les effectifs des C.H.U...
La question essentielle est donc, en ce qui concerne les étudiants, le nombre de places; il faudrait arriver à une place pour 4 étudiants au moins, et cela à condition qu'il y ait, en plus, des salles de travail et de détente.
La seconde question, en ce qui les concerne, est, bien entendu, comme partout, celle du nombre d'exemplaires mis à leur disposition; les titres consultés sont relativement limités, mais les mêmes livres sont demandés par beaucoup d'étudiants simultanément. Jusqu'ici, tous les volumes, encore peu nombreux, ont été mis en libre-accès et rangés suivant la classification de la « National Library of Medicine » américaine. Notons au passage que cette classification, adaptée à une grande bibliothèque de médecine à fonds général très riche, nous paraît un peu « dispersée » pour une salle de niveau Iers cycles. Nous ne croyons pas non plus, jusqu'à plus ample informé, qu'elle soit satisfaisante pour des fonds très spécialisés : c'est un gros inconvénient si nous voulons essayer par la suite d'uniformiser les classifications des bibliothèques de services hospitaliers ou d'unités de recherche disposées à une collaboration.
Pour faciliter le travail des étudiants, presque tous les livres sont actuellement prêtés à l'extérieur pour la durée du week-end, avec un système très simplifié de fiches de prêt dans les volumes. La bibliothécaire de St-Antoine envisage en ce moment la création d'un fonds de prêt distinct. Mais nous ne croyons pas que ce système pourra se généraliser là où les étudiants seront plus nombreux; nous préférons d'ailleurs qu'un maximum d'exemplaires soient dans les salles, à la disposition de tous, et pensons faire surtout porter notre effort sur les horaires d'ouverture, cela à cause du caractère « école » des C.H.U. 5
Actuellement, les salles sont ouvertes de 10 h à 19 h, et, deux fois par semaine, jusqu'à 22 h. A notre grande surprise, et contrairement à ce qui est constaté dans la plupart des bibliothèques de médecine, les séances du matin se sont révélées utiles, et un certain nombre d'étudiants y sont assidus.
Il est certain que pour de petites bibliothèques, où le personnel est très peu nombreux (une bibliothécaire, une sous-bibliothécaire, deux ou trois gardiens actuellement dans chacune), le roulement n'est pas facile à assurer et la charge est lourde : un congé de maladie est une catastrophe! Le travail est d'ailleurs très inégalement réparti, puisque, trop occupé pendant l'année universitaire, une partie du personnel est par contre sous-employé de juin à octobre, époque où les établissements sont désertés. L'emploi d'étudiants pour certaines permanences nous permettrait de pallier un peu cet inconvénient : nous comptons actuellement sur eux pour les séances du soir; mais les vacataires pèsent lourdement sur un budget de fonctionnement peu important, et nous hésitons à aller trop loin en ce sens, malgré l'intérêt qu'il y aurait, selon nous, à essayer de faire participer davantage les étudiants à la vie de la bibliothèque.
Dans les premiers C.H.U. construits (St-Antoine, Pitié-Salpêtrière, Cochin, Créteil, Necker), il ne sera malheureusement pas possible d'envisager des salles de deux niveaux, étant donné le manque de place et la disposition de nos locaux. Il n'y a même pas toujours une vraie salle des professeurs (St-Antoine et Cochin ne peuvent avoir qu'un « coin réservé aux périodiques » dans la salle unique). Par la suite, dans les nouvelles constructions, nous pourrons peut-être envisager une autre formule, adaptée à l'évolution des C.H.U.
c) Les usagers. - 2. Les enseignants et chercheurs.
Si nous avons commencé par parler des étudiants, c'est parce qu'il avait été prévu d'abord, pour éviter la multiplication des fonds médicaux avec toutes ses conséquences en dépenses de fonctionnement et de personnel, que ce seraient plutôt des salles de travail pour les étudiants qui seraient faites, non de véritables bibliothèques. Elles devaient donc comporter principalement des salles avec un fonds de manuels, d'ouvrages et de périodiques courants, en libre-accès.
Mais, très vite, on s'est aperçu que le problème ne se posait pas en termes aussi nets. Des professeurs, et non des moindres, ont objecté qu'il était indispensable que les chercheurs, nombreux dans les C.H.U. et dans les groupes hospitaliers voisins comme nous l'avons vu, trouvent des instruments de travail dans ces bibliothèques. Il est certain que le plein-temps du personnel hospitalo-universitaire ne prend tout son sens que si, dans le domaine de la documentation également, le clinicien ou le chercheur fondamentaliste peuvent s'adresser à la bibliothèque de leur lieu de travail, au moins pour les publications essentielles et les recherches courantes.
D'autre part, il y a, outre les enseignants, chercheurs et étudiants du C.H.U., d'autres catégories de lecteurs (internes, médecins préparant des C.E.S. par exemple) qui méritent également notre attention, et auxquels il semble que l'on n'ait pas assez pensé.
Il ne peut cependant être question de multiplier dans Paris les bibliothèques de faculté. Il a donc été décidé, au cours d'une réunion chez Monsieur le Directeur général des bibliothèques et de la lecture publique, en 1966, réunion à laquelle assistaient en particulier MM. les Professeurs Hamburger et Lemaire (C.H.U. Necker et St-Antoine), que les bibliothèques de C.H.U. consacreraient par priorité leurs efforts aux étudiants, mais s'efforceraient cependant de créer un « noyau de recherche », composé d'ouvrages et périodiques de références ou bibliographiques, pour les enseignants. Pour le reste de leur documentation, ils continueraient comme par le passé à s'adresser à la bibliothèque de la Faculté de médecine avec laquelle les bibliothèques des C.H.U. seraient, bien entendu, en liaison étroite.
Un service central des bibliothèques de C.H.U., chargé également de l'administration de ces bibliothèques ayant été créé, il pourrait coordonner l'ensemble et aider les chercheurs à localiser les documents.
Ce schéma, théoriquement satisfaisant, semble malheureusement résister assez mal à l'épreuve de la pratique.
Tous les chercheurs dans le domaine médical se plaignent des difficultés qu'ils rencontrent à Paris pour obtenir rapidement les documents qu'ils recherchent; ils disposent de peu de temps, ont souvent besoin de se procurer très vite certains articles, et ne peuvent se permettre en général de consacrer une demi-journée de circulation à la recherche d'un périodique (notons qu'à Marseille, où le C.H.U. Nord est à 15 km de la Faculté, les enseignants ont demandé qu'une bibliothèque double partiellement pour le C.H.U. celle de la faculté). A Paris également, ils considèrent qu'il leur est indispensable de disposer sur place des principaux instruments de travail et estiment qu'un C.H.U. doit posséder les revues les plus importantes dans différents domaines, et particulièrement en sciences fondamentales (les cliniciens des C.H.U. sont pour le moment beaucoup moins exigeants). Les livres très spécialisés pourraient, en revanche, être achetés dans les différents services 6.
Des réunions tenues avec les chefs de service fondamentalistes à la Pitié-Salpêtrière et à St-Antoine, ont montré l'importance qu'ils attachaient à ce que figurent au moins à la bibliothèque les périodiques généraux et interdisciplinaires. Au cours d'une réunion d'organisation du C.H.U. Necker-Enfants malades, l'intérêt porté par les chercheurs, très actifs dans ce groupe, à la bibliothèque est clairement apparu, ainsi que leur désapprobation à l'idée qu'elle ne leur soit pas suffisamment destinée.
Nous nous trouvons donc dans une situation complexe, soumis à une forte pression des usagers dont les arguments ne sont pas négligeables. Il est certain que nous ne pourrons pas les suivre complètement. Mais nous pensons de plus en plus qu'il faudrait trouver une formule moyenne qui permette de les satisfaire au moins partiellement. N'ajoutons pas au mécontentement qu'ils éprouvent trop souvent à l'égard des bibliothèques parce qu'elles ne leur rendent pas tous les services qu'ils s'estiment en droit d'en attendre (nous avons tous entendu citer en exemple telle ou telle bibliothèque étrangère...). Si nous ne nous montrons pas capables de remplir ce rôle (et il faudrait que cela ne tarde pas trop), c'est à d'autres organismes français ou étrangers qu'ils s'adresseront, et nous aurons failli à notre tâche en n'allant pas dans le sens de la réforme hospitalo-universitaire.
IV. - Réalisations, projets et espoirs (C.H.U. de Paris)
Que proposons-nous, confrontés avec ces problèmes ?
a) Les fonds de périodiques dans chaque bibliothèque.
Il n'est évidemment pas possible d'avoir dans chaque C.H.U. un fonds de revues assez important pour satisfaire toutes les demandes, ou presque 7. Il semble plus réaliste de s'en tenir, outre les périodiques bibliographiques et de références, aux revues générales, aux grandes revues interdisciplinaires (scientifiques autant que médicales) 8 et à quelques périodiques importants dans les spécialités correspondant à l'orientation particulière de chaque hôpital ou des laboratoires les plus actifs du C.H.U. Nous ne serons jamais bibliothèques de conservation et ne devons pas essayer d'être rétrospectifs. Mieux vaut nous en tenir, selon nous, aux titres demandés, sans chercher à équilibrer le fonds dans des domaines qui ne seront peut-être jamais exploités, car ce serait aux dépens de l'intérêt immédiat. Contrairement aux bibliothèques de faculté isolées, nous ne devons pas essayer d'équilibrer notre fonds, mais nous adapter à chaque situation. Pour les recherches futures dans les domaines où il y aura de grosses lacunes, comme pour les travaux rétrospectifs et comme pour tout travail approfondi, les fonds de la Bibliothèque de la Faculté de médecine de Paris sont riches et il doit y être fait appel, ainsi qu'à ceux d'autres bibliothèques (C.N.R.S., Académie de médecine, Centre international de l'enfance, Institut Pasteur, etc.).
Cependant, nous ne devons pas nous limiter à cela et il faut que nous développions notre action au moins dans deux directions différentes, pour essayer de remplir notre tâche.
b) Coordination, catalogues collectifs et reproduction.
D'abord, nous devons avoir un rôle de coordination, rendu important par les spécialisations différentes des hôpitaux. Chaque bibliothèque de C.H.U. (pour les abonnements d'abord, mais peut-être pour les ouvrages aussi par la suite) fera le recensement des ressources des services du C.H.U. et du Groupe hospitalier 9. Certains possèdent des bibliothèques assez importantes, servant souvent de centre de documentation avec dépouillement de périodiques, et leurs orientations sont très diverses. Ces catalogues collectifs seront regroupés au Service central (nous l'avons déjà fait pour les C.H.U. ouverts), qui pourra ainsi aiguiller les demandes. Grâce à ce catalogue inter-C.H.U. les lecteurs de chaque centre pourront profiter des ressources de tous, ce qui est considérable avec la spécialisation poussée de certains services hospitaliers. Pour les périodiques, nous pourrons probablement diffuser des listes qui aideront chaque bibliothécaire en lui permettant d'adresser ses demandes à coup sûr. Nous devons arriver à ce que, sur un coup de téléphone, la bibliothécaire du C.H.U. de Necker fasse reproduire un article demandé par un chercheur du C.H.U. de Créteil, article d'une revue que reçoit un service de l'hôpital Necker, et que, par courrier, cette reproduction parvienne 24 heures plus tard à Créteil. Les services auxquels nous avons adressé des questionnaires pour recenser leurs abonnements, leurs moyens de reproduction, leurs conditions d'admission, etc., nous ont répondu avec beaucoup de bonne volonté dans l'ensemble et nous pensons que nous devons pouvoir remplir correctement ce rôle de liaison. Les difficultés viendront du désordre qui règne parfois dans ces bibliothèques et des lacunes dans leurs collections.
Ces recensements, fréquents en province, n'ont guère été possibles à Paris jusqu'à présent (bien que le Service de documentation de la Faculté édite une liste des abonnements des chaires et cliniques, et que certains d'entre eux soient peut-être recensés par l'I.P.P.E.C.); nous découvrons avec étonnement que d'un service à l'autre du même hôpital, on ignore parfois l'existence d'une bibliothèque. Tous se plaignent du particularisme des services (même ceux qui en sont à l'origine) et il semble que l'action des bibliothèques de C.H.U. dans ce domaine sera la bienvenue.
c) Le Service central.
Mais il faudrait faire plus, et pour cela, il est nécessaire que le Service central des bibliothèques de C.H.U. de l'Université de Paris ait une existence moins précaire que celle qu'il a eue jusqu'ici.
I. - Rôle administratif et technique.
Étroitement logé en « squatter » au C.H.U. de la Pitié-Salpêtrière, pauvre en personnel, incertain de son avenir et de l'orientation à prendre, il a pour l'instant un rôle essentiellement administratif et s'efforce de donner une unité d'organisation aux différentes bibliothèques des C.H.U. Il suit, d'autre part, les problèmes de construction et d'aménagement des nouvelles bibliothèques, en liaison avec l'Administration des bibliothèques universitaires de Paris et la Direction des bibliothèques et de la lecture publique. Il a commencé aussi le catalogage et la multigraphie des fiches avec une machine à bandes perforées, pour permettre aux nouvelles bibliothèques d'organiser rapidement leur fonds.
2. - Rôle d'information bibliographique, de liaison et de reproduction.
Ce rôle technique et administratif nous paraît cependant insuffisant. Celui de service d'information bibliographique et de reproduction sera également indispensable dans l'avenir, pour tenter de résoudre une partie des problèmes que nous avons soulevés. Les catalogues collectifs auront, certes, une grande utilité. Il sera également souhaitable que nous puissions avoir à la Bibliothèque de la Faculté de médecine des possibilités de reproduction rapide : le C.N.R.S. y dispose d'un appareil de reprographie; il faudrait que de la même façon nous y fassions nos propres reproductions, ce qui permettrait de répondre aux demandes plus vite que les services photographiques et xérographiques de cette bibliothèque, surchargés de travail, ne peuvent le faire. Nous croyons en effet, comme beaucoup de collègues maintenant, qu'avec le nombre grandissant des usagers au niveau recherche et enseignement, la reproduction des documents, même coûteuse, est préférable au prêt des volumes et que c'est dans ce sens que nous devons travailler.
Parallèlement, nous devrons entretenir des rapports avec des bibliothèques générales moins assaillies de demandes que celle de la Faculté, et avec des bibliothèques spécialisées, quelquefois insuffisamment connues des lecteurs et dont les bibliothécaires sont tout disposés à ouvrir grandes les portes. Nous avons également pris contact avec un certain nombre de centres de documentation spécialisés et bibliothèques de services; nous essayerons de rester en liaison avec ceux-ci et d'entrer en rapport avec d'autres pour faciliter le travail des chercheurs.
3. - Nécessité d'un fonds central.
Liaison et coordination, orientation, et même reproduction, tout cela est important, certes; nous croyons néanmoins que cela ne pourra suffire pour donner satisfaction aux usagers, dans un domaine où les besoins sont considérables et où la rapidité de l'information est essentielle. Nous sommes de plus en plus persuadés qu'il est indispensable qu'un jour (que nous espérons aussi proche que possible), le service central des bibliothèques de C.H.U. de l'Université de Paris dispose lui-même d'un fonds de périodiques et d'un service de reproduction. Il ne serait bien entendu pas question d'être rétrospectifs : cela mènerait beaucoup trop loin, et, dans ce domaine, d'autres bibliothèques sont riches et doivent pouvoir satisfaire aux demandes. En revanche, en ce qui concerne la production courante (pour les revues au moins), nous pensons que cela ne serait pas superflu, et que, sans un fonds central d'abonnements groupé dans une bibliothèque commune aux C.H.U. de Paris, nous ne rendrons pas les services que l'on attend de nous. Déjà, avec les seuls C.H.U. ouverts, nous sentons cette nécessité; elle sera impérative quand ils seront plus nombreux. Il nous faudra aussi étudier attentivement les possibilités offertes par la microreproduction, en particulier par les microfiches, qui, si nous nous orientons essentiellement vers la transmission et la reproduction de documents, pourraient nous rendre de grands services (passons sur le gain de place que cela représenterait si nous 'conservions certaines collections sous cette forme). Les différentes bibliothèques seraient équipées de lecteurs-reproducteurs, et le service central pourrait envoyer, selon les cas, la microfiche originale, un contretype ou une reproduction.
Actuellement, en Hollande, la Fondation Excerpta Medica reproduit des périodiques médicaux sous forme de microfiches; en France, le C.N.R.S. et l'I.N.S.E.R.M. étudient cette question. Nous devons la suivre également avec attention et voir de quelle façon nous pouvons tirer parti des procédés actuels de microreproduction pour résoudre certains de nos problèmes.
Signalons au passage que les microfiches pourraient être ùtilisées pour une sélection des documents, s'il était possible par la suite de travailler en ce sens.
En proposant que le Service central dispose d'un fonds de périodiques commun aux C.H.U. de Paris, nous nous heurterons, bien sûr, à beaucoup d'objections : nécessité d'un local pour faire fonctionner un tel service, besoins en personnel et en crédits, et peut-être plus encore principe même d'un fonds médical s'ajoutant à ceux qui existent à Paris.
Le problème du local, indispensable pour qu'un service central puisse travailler sérieusement, nous paraît plus difficile à résoudre que celui du personnel qui, selon nous, pourrait ne pas être très nombreux, aussi longtemps en tous cas qu'il ne sera pas fait de documentation. De toute façon, d'ailleurs, il faut voir les choses telles qu'elles sont, et admettre que les bibliothèques des C.H.U. dispersées, avec des locaux souvent mal conçus et des horaires d'ouverture larges, seront très coûteuses en personnel. Mais n'est-ce-pas un peu le cas de toutes les nouvelles bibliothèques universitaires aux sections multiples ? Et puisque nous sommes présents dans les C.H.U., ne faut-il pas en admettre les conséquences ?
En ce qui concerne les crédits, nous pensons qu'une telle réalisation serait, à long terme, plutôt une économie! En effet, ne vaudrait-il pas mieux avoir un fonds de revues assez riche, centralisé, qu'un saupoudrage de petits fonds où se retrouveront toujours à peu près les mêmes titres, peut-être sous-utilisés ? Ces fonds ne pourraient guère dépasser 200 titres et seraient coûteux, étant donné le montant très élevé des abonnements en médecine (et surtout en sciences fondamentales); ils ne répondraient de toute façon que partiellement aux demandes. Avec 35 000 F d'abonnements dans chaque C.H.U., nous n'arriverons pas à quelque chose de satisfaisant : cela fera néanmoins, dans deux ans, quand il y aura 5 C.H.U. 175 000 F d'abonnements et, vers 1972, 280 000 F. Ne parlons pas du jour où il y aura 15 ou 20 C.H.U. dans l'Université de Paris. Pourtant, même si nous obtenons ces crédits, nous ne pourrons donner vraiment satisfaction aux usagers, dont les besoins croîtront encore, du fait de l'intensification de la recherche médicale liée à la réforme hospitalo-universitaire 10. Si, au contraire, nous pouvions réaliser une bibliothèque centrale des C.H.U., organisée pour la reproduction rapide des documents, et éventuellement leur recherche, cela permettrait de réduire le montant des abonnements dans chacun des C.H.U., tout en essayant de donner la possibilité aux chercheurs d'obtenir vite les documents sur leur lieu de travail.
Ce pourrait également être un pas, modeste certes, vers ce service central du traitement de l'information que réclamait M. le Pr Hamburger dans sa communication au Colloque de Caen. Ce type de travail ne pourrait-il pas, dans l'avenir, entrer dans le cadre des activités du Service central des bibliothèques des C.H.U., en liaison avec des unités de recherche et d'autres organismes de documentation ? Ne pourrions-nous pas espérer que, si nous nous orientions ainsi, l'I.N.S.E.R.M. par exemple fournirait son aide pour la collaboration d'un personnel à formation médicale, indispensable pour un travail poussé dans ce domaine ?
Dernière objection qui nous sera faite : ce fonds, commun aux bibliothèques des C.H.U. de Paris, ne doublerait-il pas inutilement ceux des grandes bibliothèques médicales de cette ville? Nous ne pensons pas, nous l'avons dit, qu'il faille essayer de reconstituer des collections : pour les recherches rétrospectives, la Bibliothèque de la Faculté, celles de l'Académie de médecine, du C.N.R.S. ainsi que des bibliothèques spécialisées (Centre international de l'Enfance, Institut Pasteur, Institut Gustave Roussy, etc...) sont en mesure de fournir les documents indispensables; nous pourrions, selon nos possibilités, aiguiller les chercheurs de façon à leur éviter une perte de temps, ou mieux encore, nous charger de leur procurer sous forme de volume ou de reproduction ce dont ils ont besoin : c'est un problème d'organisation et de personnel. Mais, en ce qui concerne la production courante, nous ne pensons pas qu'il soit possible de compter seulement sur une bibliothèque déjà existante comme celle de la Faculté, envahie et surchargée de demandes. Est-il logique d'ailleurs de considérer que le nombre des enseignants et des étudiants s'étant multiplié de façon spectaculaire (et devant augmenter encore beaucoup dans les années qui viennent), les bibliothèques, elles, puissent rester stationnaires et satisfaire des usagers infiniment plus nombreux ? De même que la Bibliothèque de la Sorbonne ne pourra suffire à toutes les exigences des Facultés de Nanterre, à cause de l'éloignement et du nombre croissant des demandes, et que la Bibliothèque de Nanterre sera certainement appelée à devenir de plus en plus importante, sans pourtant pouvoir prétendre concurrencer la Bibliothèque de la Sorbonne pour la richesse de ses fonds, nous pensons qu'en médecine aussi, s'ajoutant à la Bibliothèque de la Faculté (qui n'en restera pas moins la grande bibliothèque de médecine de Paris), une bibliothèque centrale des C.H.U. deviendra vite indispensable.
Signalons à ce propos que l'I.N.S.E.R.M., qui a récemment créé un service de renseignements et d'informations bibliographiques, encore limité, étudie actuellement la possibilité de constituer une bibliothèque centrale, pour éviter la dispersion coûteuse des abonnements dans les unités et aider les chercheurs à se procurer les documents dont ils ont besoin; cela fait suite à une enquête menée pour l'I.N.S.E.R.M. il y a un an, qui a montré que les chercheurs avaient souvent beaucoup de difficultés à trouver le matériel documentaire qui leur était nécessaire; ils se plaignaient, en particulier à Paris, de perdre du temps, et souvent en vain, à la recherche des revues dispersées dans les bibliothèques. Un service qui pourrait les aider dans ce domaine par son fonds propre et par ses liaisons avec les autres bibliothèques serait certainement le bienvenu.
Il pourrait, de plus, être en rapport avec des services de documentation français organisés de façon traditionnelle (Centre international de l'Enfance) ou automatisés (Institut Gustave Roussy à Villejuif), et bien entendu aussi avec des services étrangers de plus en plus importants comme le « MEDLARS » (Medical Literature Analysis and Retrieval System) de la « National Library of Medicine » de Bethesda, qui s'étend maintenant à plusieurs pays et faisait récemment entrer en mémoire électronique 165 000 articles par an, tirés de 2 800 périodiques, les prévisions pour 1969 étant de 250 ooo articles.
On nous reprochera peut-être de voir trop grand et de faire de l'anticipation. Mais nous pensons qu'il est indispensable de poser dès maintenant ces problèmes et de faire des projets, même s'ils dépassent nos possibilités immédiates. Leur réalisation ne devrait d'ailleurs pas trop tarder, car si nous nous contentons de faire dans les C.H.U. de Paris des « salles de travail améliorées », cela voudra dire que nous ne nous serons pas adaptés à la transformation de l'enseignement médical qui fait des C.H.U. des centres de recherche autant que d'enseignement, et que nous aurons déçu les espoirs que beaucoup placent en nous. Il est certain que la décentralisation de la recherche médicale ne nous rend pas la tâche facile - mais à problèmes nouveaux, solutions nouvelles -. Il sera malaisé, c'est certain, de parvenir à quelque chose de satisfaisant; ce sera long aussi. Nous entendrons beaucoup de récriminations en cours de route. Mais c'est la voie de l'avenir et nous ne devons pas nous dérober : dans l'intérêt des bibliothèques, comme dans celui de la recherche médicale, il est indispensable que nous nous y engagions.