Nécrologie
Diane Canivet
Raymonde Baget
Françoise Py
Éloignée de ses fonctions depuis plusieurs mois par une maladie qui ne laissait aux siens aucun espoir, Mlle Diane Canivet, bibliothécaire contractuelle à la Bibliothèque nationale, s'est éteinte le 10 mars 1965.
Sa carrière prématurément interrompue a été trop modeste au regard de ses rares qualités. Mlle Canivet, entrée à la Bibliothèque nationale en 1951 sur les fonds du chômage intellectuel, fut affectée au Département des entrées où elle reçut pour mission de choisir et acheter les livres italiens. Elle était parfaitement préparée à cette tâche par ses antécédents, sa formation, ses goûts. Née en 1919 à Alexandrie, où son grand-père avait fondé et dirigeait le premier quotidien égyptien de langue française, elle était française de nationalité mais appartenait à l'Italie par sa famille maternelle. Les années d'enfance qu'elle y passa lui laissèrent un souvenir vivant et enchanté. Elle poursuivit à l'École internationale de Genève ses études secondaires qu'elle termina à Paris. Également attirée par les arts et la littérature, elle fut reçue à l'École nationale des arts décoratifs dans la section d'architecture et fit une licence ès lettres à la Sorbonne et à l'Institut d'art et d'archéologie. Elle collabora en 1949 et 1950 à l'une des éditions du Catalogue de reproductions en couleurs de peintures publié par l'Unesco. En fonctions à la Bibliothèque nationale, elle compléta sa formation en passant dans un rang excellent le Diplôme supérieur de bibliothécaire (1953), puis le Diplôme d'études supérieures d'art et d'archéologie. Son travail de diplôme, L'Illustration de la poésie et du roman francais au XVIIe siècle, publié en 1957 grâce à une subvention du C.N.R.S., reste le meilleur répertoire bibliographique et iconographique concernant cette catégorie d'éditions. Responsable de l'accroissement du fonds italien pendant près de quatorze ans, elle a donné la mesure de sa connaissance intime de la langue et de la littérature italiennes, de sa culture variée, de sa finesse de jugement. Elle fut chargée également du Service des abonnements étrangers, tâche qu'elle mena avec méthode, collaborant efficacement avec le Département des périodiques à tenir à jour et compléter les collections.
Multiplement douée, elle menait, parallèlement à sa carrière administrative, une carrière littéraire, discrète mais qui était toute sa joie. Quelques articles - sur Pilâtre de Rozier, Figaro littéraire, 196I; sur Salvatore Quasimodo à l'occasion de son prix Nobel, Journal de Genève, 1958, - des pièces de théâtre -Le Navire en fête, Radio-Genève, 2 mars 1962; Les Exilés de Poker Flat, d'après une nouvelle de Bret Harte, R.T.F., 7 juin 1962; L'Écolier de Padoue, Radio-Genève, 2I février 1964 -, ainsi que de nombreux manuscrits de pièces et de romans, restent pour en témoigner.
Chez Diane Canivet, l'égalité d'humeur allait de pair avec une chaleureuse faculté d'enthousiasme, la bienveillance avec le sens de l'humour, la réserve avec l'amitié sans défaut. A travers le charme d'un caractère secret et digne, ceux qui l'ont approchée ont pu percevoir le rayonnement d'une âme d'exception qui devait s'affirmer dans la souffrance et suivre avec sérénité le chemin douloureux que le destin lui avait désigné.