Nécrologie
Paul-Henri Michel
Conservateur honoraire à la Bibliothèque Mazarine, Paul-Henri Michel est décédé le 16 avril 1964, après une courte maladie. Fils de Henri Michel, qui fut longtemps conservateur de la Bibliothèque municipale d'Amiens, il était né dans cette ville le 25 avril 1894 et y avait grandi parmi les livres, dans un milieu familial accueillant aux artistes, dont le grand pianiste Edouard Risler. Élève du Lycée Louis-le-Grand, puis étudiant en Sorbonne, d'abord germaniste sous la direction de Charles-Andler, il s'était tourné vers les études italiennes et possédait les deux licences d'allemand et d'italien quand il fut appelé aux armées. Il en rapporta une croix de guerre et dès sa mobilisation, en 1919, entra à la bibliothèque-musée de la guerre dont il publiait en 1923 le Catalogue méthodique du fonds italien. Il remplissait en même temps les fonctions de rédacteur au service de presse étrangère du Quai d'Orsay et préparait sa thèse sur Alberti, présentée en 1930. Nommé à la même époque à la Bibliothèque Mazarine, il n'allait plus cesser de publier des travaux dont la diversité apparente n'exclut pas une unité plus profonde : Les Fureurs héroïques, de Giordano Bruno; Giordano Bruno, philosophe et poète ; Giordano Bruno et le système de Copernic ; Cosmologie de la Renaissance ; Léonard de Vinci et le problème de la pluralité des mondes ; La Psychomachie ; Les Nombres figurés dans l'arithmétique ; La Science hellène ; Les Médiétés ; De Pythagore à Euclide, etc., sans compter des études d'histoire de l'art sur le Greco, les Fresques de Tavant, Delacroix, etc., par lesquelles il restait en liaison avec l'histoire du livre où il rejoignait ses préoccupations de bibliothécaire. D'où ses travaux intitulés A la recherche du livre ancien, Le Livre retrouvé, Pour la réalisation des catalogues collectifs, enfin le monumental Répertoire des ouvrages imprimés en langue italienne au XVIIe siècle, laissé inachevé mais qui ne comprend pas moins de 450 000 fiches à l'heure actuelle. On citera pour mémoire de nombreuses traductions d'auteurs italiens, Papini, Ferrero, Moravia, etc., que P.-H. Michel introduisit en France. Il avait encore gardé de sa collaboration au Ministère des Affaires Étrangères un goût des questions politiques, dont témoignent ses publications sur les républiques sud-américaines, la Question de l'Adriatique, etc.
Une telle activité qu'avait à peine interrompue la mobilisation de P.-H. Michel en 1939-1940, lui avait valu une particulière estime dans le monde de l'Institut de France où il comptait de nombreux amis. Aussi l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres a-t-elle tenu, dans sa séance du 17 avril 1964, à rendre à notre collègue un hommage d'autant plus significatif qu'il n'était pas de ses membres. Après avoir fait mention de ses principaux ouvrages et rappelé combien étaient appréciés « son caractère, sa courtoisie, sa modestie égale à sa valeur et une érudition dont la variété n'était pas de la dispersion mais plutôt la marque d'un esprit singulièrement agile à se mouvoir dans des disciplines diverses », Mr André Grabar, président en exercice, concluait : « Paul-Henri Michel, moins attentif au soin de sa carrière qu'à la qualité de son travail, honorait une profession envers laquelle il n'est pas de chercheur qui n'ait contracté quelque dette. L'Académie déplore sa disparition prématurée et exprime à sa veuve, qui fut aussi pour lui la plus dévouée des collaboratrices, ainsi qu'à ses fils, ses condoléances émues. » A plus juste titre encore, les collègues de Paul-Henri Michel ne sauraient que faire leurs de tels regrets.