La circulation des périodiques dans les services de documentation
Étude des deux systèmes possibles : retour à la bibliothèque entre chaque lecteur (circulation « en marguerite »), transmission directe de lecteur à lecteur (circulation rotative), leurs avantages et leurs inconvénients, les aménagements apportés. L'enregistrement de la circulation (modèles de fiches), l'ordre de circulation. Les difficultés rencontrées. Limites à envisager dans la mise en oeuvre d'une telle politique
Que les périodiques soient à l'heure actuelle une des sources documentaires les plus importantes, c'est là une vérité indiscutée et il est de fait que dans tous les organismes de documentation que nous avons visités, qu'ils s'occupent de sciences humaines ou de technologie, qu'ils appartiennent à des services publics ou à des entreprises privées au personnel nombreux ou restreint, le total des titres de périodiques reçus n'est jamais inférieur à cinq cents, il atteint deux mille et plus à la Chambre de commerce ou à l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE) par exemple. La multiplication de ces moyens d'information a accru la complexité de la tâche des services de documentation qui, d'autre part, doivent la plupart du temps, à l'intérieur d'une même spécialité, servir de nombreux intérêts représentés par des « directions » distinctes sur le plan administratif et parfois même sur le plan topographique; elles peuvent certes, à cause de la nature de leurs travaux, n'être intéressées que par un genre bien particulier de revues (tel est le cas des services sociaux ou des services juridiques), mais la majorité des périodiques reçus par la bibliothèque se rapportent peu ou prou aux activités de chacune des directions. Enfin, les membres du personnel d'une entreprise n'ont généralement pas le loisir de fréquenter la bibliothèque, le service de documentation doit donc leur apporter à pied d'œuvre les instruments de travail qui peuvent leur être utiles.
Il est évident que dans la mesure où bibliothèque centrale et « directions » diverses ont besoin d'un périodique pour leurs lecteurs, la multiplication des exemplaires du même périodique est souhaitable, mais un abonnement représente pour un budget une charge lourde et seuls des organismes « riches », comme le Commissariat à l'énergie atomique ou le Centre national d'études des télécommunications ont pu systématiser une telle politique et contracter autant d'abonnements qu'il y a de services intéressés.
Du reste, la présence permanente du périodique dans certains services n'est pas toujours recherchée, le périodique peut, au contraire, encombrer certaines petites bibliothèques, d'autre part, la présence simultanée du périodique dans les différents services n'est pas toujours indispensable: de la spécialité du service et de celle du périodique dépend l'urgence de la consultation.
Dans ces conditions, il semble que les différents usagers peuvent avec profit coopérer et accepter que les périodiques achetés par la bibliothèque circulent entre celle-ci et les directions intéressées.
Mais est-il possible de faire circuler des périodiques entre divers services? Nous allons voir qu'une telle politique pose, dans des établissements aux services groupés, des problèmes complexes. Peuvent-ils être résolus dans le cadre d'un établissement dont les services sont topographiquement bien distincts les uns des autres?
Cette situation accentue en effet les deux difficultés majeures présentées par la circulation des périodiques : le risque de perte et le retard pris dans la transmission de l'information.
Ces deux problèmes sont, en fait, liés, ils dépendent tous deux du système choisi pour faire circuler le périodique. Il existe en effet dans les services de documentation deux modes de circulation bien différents : la circulation qu'on peut appeler « en étoile » ou « en marguerite » et la circulation rotative.
Dans le premier cas, le périodique rentre à la bibliothèque centrale après lecture par chacun de ses destinataires. Cette mesure peut n'avoir qu'un intérêt pratique si elle n'est gouvernée que par la topographie des lieux ou par des habitudes administratives; par contre, elle peut être un élément de contrôle particulièrement efficace car elle permet à la fois de savoir à tout moment auprès de qui se trouve le périodique (de l'y reprendre, par conséquent, s'il est demandé par une personne extérieure à l'ordre de circulation) et de vérifier le temps passé par le périodique auprès de chaque lecteur. Mais ce système entraîne une perte de temps considérable, non seulement par les allées et venues qu'il implique, mais surtout par les pointages qu'il nécessite s'il est consciencieusement appliqué.
A l'Institut national de sécurité, chaque destinataire fait l'obiet d'un dossier où l'on inscrit la date de départ et la date de retour de chaque périodique envoyé; le contrôle du lieu où se trouve un périodique et du temps qu'il y passe ne peut ainsi se faire qu'après démarches successives. A l'Office national d'études et de recherches aéronautiques (O. N. E. R. A.), par contre, le contrôle s'opère de façon très étroite grâce à un système de fiches de prêt analogue à celui qu'on emploie pour le prêt de livres : chaque périodique, à son départ chez un lecteur, donne lieu à une double fiche de prêt, l'une classée au titre du périodique, l'autre au nom de l'emprunteur; ces fiches sont détruites et remplacées par celles afférant au destinataire suivant lors du retour du périodique à la bibliothèque. Les manipulations entraînées par ce mode d'enregistrement alourdissent le service au point qu'on cherche à réduire le nombre des périodiques mis en circulation.
Dans le système de circulation « rotative », la responsabilité de la circulation incombe aux destinataires qui transmettent eux-mêmes le périodique après lecture à la personne dont le nom suit le leur sur la liste attenant au périodique, telle est la règle à la Régie nationale des usines Renault (R. N. U. R.), par exemple.
En pratique, les deux systèmes sont souvent conjugués : le périodique circule en circuit rotatif entre les différents membres d'un même service, mais revient à la bibliothèque entre chacun des services. Les lecteurs, à l'intérieur de chaque service, peuvent être connus du service de documentation, ils peuvent également dépendre uniquement du responsable de chaque service. C'est le mode de circulation employé au service de documentation des établissements Péchiney, à celui de la Compagnie des compteurs, de la société Kodak-Pathé, ainsi qu'à celui de l'INSEE. Ce système permet de surveiller, au moins partiellement, la marche du périodique, tout en tenant compte des nécessités topographiques.
L'implantation géographique des services est en effet un facteur déterminant dans le choix du système de circulation : un établissement à la superficie réduite, aux liaisons rapides peut envisager de faire rentrer le périodique à la bibliothèque entre chaque lecteur, le système mixte peut être appliqué quand les services forment des unités distinctes tout en étant situés dans un même bâtiment, mais lorsque, comme à la Régie nationale des usines Renault, ce sont des kilomètres qui séparent certains services de la bibliothèque, le circuit rotatif est plus efficace.
Le système de circulation dépend également du nombre de personnes intéressées par tel périodique, la surveillance s'avère en effet moins indispensable pour trois lecteurs que pour vingt. Ainsi, à la Compagnie des compteurs, la circulation est purement rotative quand un périodique ne passe qu'entre quelques ingénieurs, lorsqu'il va dans plusieurs services au personnel nombreux, on le fait rentrer à la bibliothèque entre chacun des services. A la R. N. U. R., le nombre des consultants est limité de façon systématique et les exemplaires du même périodique multipliés selon les besoins.
Il faut d'ailleurs noter que, dans la majorité des services de documentation, quel que soit le système de circulation, dès qu'un périodique est demandé par un grand nombre de lecteurs, dès qu'il est d'importance essentielle ou que sa périodicité est courte, il est commandé en autant d'exemplaires qu'il est nécessaire pour que le circuit de chacun d'entre eux ne soit pas trop lourd et qu'il n'arrive pas au dernier lecteur totalement périmé. Il peut ainsi y avoir plus d'une douzaine d'abonnements pour un même hebdomadaire important.
La valeur d'une information, quand il s'agit en particulier de périodiques scientifiques, est en effet fonction de son actualité et le temps passé par le périodique auprès de chaque lecteur est un facteur aussi important que la limitation du nombre des lecteurs. Cependant, il semble que les services de documentation préfèrent, en règle générale, faire appel à la bonne volonté des lecteurs plutôt que de leur imposer un délai fixe pour la consultation des périodiques qui leur sont communiqués (cet esprit de tolérance se conçoit d'autant mieux que les destinataires sont en nombre plus réduit). On peut noter toutefois que chez Péchiney, le délai est de cinq jours et qu'à la R. N. U. R., il est fonction de la périodicité du périodique, plus ou moins long selon qu'on a affaire à un hebdomadaire ou à un périodique trimestriel.
Il est évident que dans une circulation rotative, seule la discipline des lecteurs fait que le délai fixé est respecté ou non. La transmission des périodiques peut être effectuée par le lecteur, par la voie normale d'acheminement du courrier ou par l'intermédiaire du personnel du centre de documentation. On laisse souvent au suivant sur la liste des destinataires le soin de réclamer à son prédécesseur le périodique qu'il garde trop longtemps, ces réclamations personnelles ayant plus de poids qu'un ordre venu de la bibliothèque.
Cependant, la bibliothèque peut aussi procéder à des rappels systématiques, ils vont directement au responsable du retard ou au moins au service auquel il appartient si la circulation est « en marguerite », on les adresse au dernier de la liste d'un circuit rotatif qui les transmet au besoin à ses prédécesseurs. Ces réclamations peuvent se faire, soit sur la liste des destinataires accompagnant le périodique, soit grâce à des imprimés spéciaux. Elles peuvent être assorties de sanctions : achat de l'exemplaire perdu aux frais du service ou du lecteur responsable du retard (à la Compagnie des compteurs), plus souvent interruption de la circulation chez le responsable jusqu'à ce que les exemplaires manquants aient été rendus (à la R. N. U. R., chez Péchiney, chez Kodak). Quand un lecteur ou un service sont habituellement causes de perturbations dans le circuit, on peut délibérément les mettre en dernière position dans la liste des destinataires ou même les en éliminer en attendant leur réaction.
Le lecteur pris par le temps a en effet la possibilité, dans la plupart des établissements, soit d'ajouter son nom en fin de liste afin que le périodique lui revienne en fin de circulation, soit de le demander en prêt au retour à la bibliothèque, soit enfin de demander que soit reproduit l'article qui l'intéresse. La rapidité des moyens techniques actuels permet qu'une telle reproduction soit établie en cours de circulation entre deux lecteurs. Il est d'ailleurs nécessaire qu'un appareil de reproduction existe à la bibliothèque ou dans les services qu'elle dessert, et qu'il soit d'un emploi commode et habituel pour que des délais de consultation puissent être imposés avec succès.
La gratuité des reproductions est un facteur dont l'importance n'est pas négligeable, la xérographie est la technique la plus fréquemment employée, cependant, chez Péchiney, les reproductions réalisées par ce moyen doivent être payées, seuls les microfilms sont gratuits.
Le contrôle du retour à la bibliothèque des numéros de périodiques en circulation, pour être efficace, dépend, du reste, du mode d'enregistrement pratiqué. Trois opérations différentes sont en effet requises pour suivre avec précision la circulation d'un périodique : l'enregistrement traditionnel à l'arrivée du numéro à la bibliothèque, le pointage des passages successifs à la bibliothèque en cas de circulation « en marguerite », et la mention de son retour définitif. Le contrôle se fait de façon immédiate quand ces trois enregistrements peuvent être faits sur une seule et même fiche; dans un circuit totalement « en marguerite » cette condition ne peut être remplie, au contraire il est possible d'agir de la sorte quand le passage par la bibliothèque n'est imposé qu'entre chaque service et non entre chaque lecteur (à condition que le nombre des destinataires pour un exemplaire soit limité) on trouve alors sur une seule fiche une colonne pour enregistrer la date d'entrée, une colonne plus large pour noter la date de chaque passage à la bibliothèque, et enfin une troisième colonne destinée au pointage du retour définitif. Quand le circuit est rotatif, les deux seuls pointages possibles, réception et retour, trouvent à plus forte raison, place sur une seule fiche. On établit en général autant de fiches qu'il y a d'exemplaires du même périodique. (Il faut cependant noter qu'il existe toujours à côté de ce fichier de circulation un fichier inventaire distinct établi soit à l'arrivée du périodique, soit à son retour, où l'on trouve tous les périodiques reçus, qu'ils circulent ou non, et qui donne tous renseignements sur les modalités de commande, de reliure, etc...).
Mentionner le retour du périodique sur la même fiche que sa date d'arrivée permet de voir immédiatement à l'enregistrement des numéros suivants si les retours se sont effectués en temps voulu; s'il faut se reporter à deux endroits différents pour l'arrivée et le retour, il est évident que l'on procédera plus rarement à des contrôles.
Dans certains centres de documentation et pour certains périodiques importants, en dehors des exemplaires qui circulent, un abonnement peut être réservé à la bibliothèque. Ce système résout les difficultés rencontrées lorsqu'un périodique en cours de circulation est demandé en consultation par des personnes étrangères au circuit (elles sont d'autant plus grandes lorsque le circuit est rotatif). D'autre part, il permet d'établir les reproductions demandées sans obliger le périodique à rentrer à la bibliothèque, enfin il donne au responsable de la bibliothèque la faculté de faire les dépouillements et les analyses requis sans retarder la mise en circulation du périodique. La présence à la bibliothèque d'un exemplaire permanent laisse également la possibilité d'être moins rigoureux pour exiger le retour d'un périodique à la bibliothèque après circulation, quand certains lecteurs souhaitent le garder à titre définitif.
Il arrive qu'une mesure intermédiaire soit appliquée : tous les périodiques reçus à la bibliothèque, qu'ils circulent ou non, restent « exposés » une semaine environ dans le local de la bibliothèque, à la disposition de tous les lecteurs et de la personne chargée éventuellement de leur dépouillement. C'est ainsi qu'agissent l'O. N. E. R. A. et l'Institut français du pétrole. Cette « exposition » peut être accompagnée de l'envoi au personnel d'un bulletin des sommaires qui, rapidement élaboré, incitera les lecteurs étrangers au circuit à venir consulter le périodique à la bibliothèque, et attirera l'attention des destinataires sur l'article susceptible de les intéresser. Quant au bulletin analytique, il n'a d'intérêt réel, dans le cadre de notre étude, que s'il paraît assez vite pour arriver au lecteur presque en même temps que le périodique analysé (c'est ce à quoi parvient Péchiney grâce à des moyens en personnel et en matériel très importants), si un exemplaire de référence demeure en permanence à la bibliothèque ou si, au moins, les périodiques rentrent assez vite de circulation pour qu'on puisse s'y reporter avant qu'ils n'aient perdu leur caractère d'actualité.
Cependant les articles relevés lors du dépouillement peuvent être cochés sur le périodique lui-même et signalés ainsi aux lecteurs; la participation de ceux-ci au dépouillement est plus active à l'Institut national de sécurité que partout ailleurs : ils ont en effet la possibilité de noter sur le bulletin de circulation le titre des articles qui n'ont pas été relevés avant le départ du périodique de la bibliothèque, et pour lesquels ils souhaitent qu'une fiche analytique soit établie. Il arrive également, chez Kodak-Pathé, que des ingénieurs indiquent à leurs successeurs sur la liste de circulation tel article de leur ressort, ces indications peuvent même amener le service de documentation à rompre le circuit habituel pour « servir » un lecteur occasionnel. D'autre part, à l'O. N. E. R. A., au moment du dépouillement de périodiques qui à cause de leur portée habituelle n'ont pas été demandés par tel lecteur, des reproductions peuvent être faites pour des articles particuliers et envoyées d'office par la documentaliste à l'intéressé.
Le choix des périodiques destinés à tel ou tel lecteur se fait, en règle générale, au début de chaque année; la bibliothèque établit la liste des périodiques qu'elle reçoit et l'envoie à tous les membres du personnel susceptibles d'être intéressés; la hiérarchie n'entre généralement pas en ligne de compte pour déterminer le droit de chacun à bénéficier de la circulation, seul l'intérêt du service est pris en considération, il est même des services de documentation où des périodiques généraux, comme Science et vie, sont transmis à des membres du personnel sans spécialité, à seule fin d'encourager leur curiosité d'esprit. Quand, en cours d'année, un périodique nouveau est reçu (soit qu'il ait été signalé par un lecteur, soit qu'il ait été choisi par le bibliothécaire) à l'Institut français du pétrole, entre autres, il est envoyé pour consultation aux lecteurs qu'il est susceptible de concerner; on peut également, comme à la Compagnie des compteurs ou à la Société Kodak, soumettre aux lecteurs la liste des périodiques reçus depuis un an au moment du renouvellement des abonnements, afin de savoir s'ils méritent d'être reconduits. A la R. N. U. R., lorsqu'un ingénieur n'a pas coché sur la liste annuelle des périodiques qui semblent se rapporter à sa spécialité, il arrive qu'on le convoque au service de documentation afin de les lui mettre sous les yeux.
Malgré ce pointage annuel, des routines peuvent s'établir et il devient parfois manifeste que telle personne reçoit des périodiques dont elle n'a plus rien à faire; on peut alors la supprimer purement et simplement de la liste des destinataires, son absence de réaction confirmant la présomption du bibliothécaire. Il est également possible, comme le fait en ce moment le service de documentation de l'O. N. E. R. A., de considérer comme nulle la liste des revues en circulation et d'exiger des ingénieurs une demande en bonne et due forme pour tout périodique qu'ils désirent voir : cette formalité les oblige à considérer l'intérêt des périodiques plus sérieusement que le simple pointage d'une liste.
Pour décider de l'ordre de passage du périodique parmi ceux qui ont demandé à bénéficier de sa circulation, la spécialité du destinataire et celle du périodique sont déterminantes (là encore, la possibilité de multiplier les exemplaires des revues les plus intéressantes résout bien des difficultés); la rapidité de lecture des destinataires entre ensuite en ligne de compte; enfin, il va de soi que des considérations d'ordre topographique et d'ordre hiérarchique peuvent intervenir, mais celles-ci ont bien souvent moins d'importance qu'on ne pourrait l'imaginer.
Quand la liste des destinataires a été établie, elle est, dans la majorité des cas, apposée sur la fiche d'enregistrement du périodique concerné, soit directement s'il n'y a que deux ou trois destinataires, soit sur un papillon annexe si leur nombre est supérieur (on peut noter avec intérêt qu'à l'I. N. S. E. E., le nom propre du destinataire est remplacé par le sigle correspondant à son poste, de telle sorte que lorsqu'il y a mutation du titulaire du poste, les périodiques intéressant cette fonction ne changeant pas, il n'est pas nécessaire de modifier la liste des destinataires).
Quand un numéro de périodique est enregistré, on reporte la liste des lecteurs auprès de qui il doit aller sur sa couverture, soit au moyen d'un papillon qu'on y colle, soit directement si l'on craint que le papillon ne se perde. Cette liste dans certains cas est manuscrite, dans d'autres, on coche sur la liste multigraphiée de tous les lecteurs possibles ceux que concerne le périodique en question, en apposant en face de leur nom l'ordre de consultation.
Il est en général prévu sur ces bulletins de circulation deux colonnes annexes, l'une pour noter la date d'arrivée du périodique chez un lecteur, l'autre pour qu'il y appose son visa. Mais il est rare que les dates soient ponctuellement mises, elles ne le sont en fait que lorsqu'un destinataire a gardé trop longtemps un périodique et que son successeur sur la liste veut le faire remarquer!
Dans le cas de circuit « en marguerite », il est préférable, pour être sûr que le périodique revienne à la bibliothèque entre chaque lecteur, de n'apposer au départ que le nom du premier destinataire et de changer le papillon à chacun des retours à la bibliothèque; aucune mention de date n'est alors requise.
L'Institut français du pétrole donne, nous semble-t-il, un exemple intéressant de l'organisation d'un circuit de périodiques à grande échelle, dont nous disions en commençant cette étude qu'il était le plus difficile à mettre au point; il peut donc être utile d'examiner particulièrement les modalités qui le régissent. L'Institut français du pétrole est composé de différentes « divisions » réparties dans un vaste parc et ayant chacune des spécialités qui, toutes proportions gardées, sont très différentes les unes des autres. Dans les plus importantes de ces « divisions » se trouve un service de documentation géré par une documentaliste (dans les divisions mineures la circulation des périodiques est assurée par une secrétaire); coiffant le tout on trouve un service de documentation central.
C'est le service central qui regroupe tous les abonnements de tous les périodiques reçus à l'Institut (cette politique permet de constituer très rapidement le catalogue collectif des collections de périodiques). Ils se divisent alors en trois catégories distinctes selon le sort qui leur est fait. Un certain nombre d'entre eux, relativement peu nombreux, soit parce que ce sont des périodiques bibliographiques, soit à cause de leur intérêt trop fragmentaire, ne quittent pas la bibliothèque, d'autres - et leur proportion est la plus grande - qui ont été demandés spécialement par tel service, ou qui sont assez importants pour nécessiter une présence simultanée dans différents services, sont enregistrés à la bibliothèque centrale et aussitôt envoyés aux services intéressés chez qui ils restent généralement de manière définitive (à moins que la « division » ne dispose pas d'un local suffisant), enfin des revues secondaires ou des revues d'intérêt général sont mises en circulation entre les différents services concernés. Pour nombre de ces revues, un exemplaire reste en permanence au siège de la bibliothèque centrale afin de pouvoir être consulté alors même que la revue circule. Entre chaque service spécialisé, la circulation est interrompue par le retour à la centrale, l'ordre de passage étant déterminé par la spécialité du périodique et de la « division », par le nombre de lecteurs dans chaque « division » et, par conséquent, par le temps que le périodique doit y passer; le nombre d'exemplaires de chaque périodique dépend du nombre de « divisions » qu'il intéresse. A l'intérieur de chaque « division », le responsable organise le circuit des périodiques qui lui sont propres et de ceux qui viennent de la bibliothèque centrale comme bon lui semble, et l'on trouve alors appliqués tous les principes exposés précédemment. Évidemment, la circulation se fait d'autant mieux que c'est une documentaliste qui s'en occupe et non une secrétaire qui ajoute cette tâche à de nombreuses autres.
En effet, outre les contrôles effectués à la bibliothèque centrale, seule une surveillance assidue des délais impartis aux lecteurs de chaque « division » peut garantir que l'information arrive aux intéressés sans trop de retard.
Même si les conditions de circulation sont scrupuleusement respectées, à raison de quatre ou cinq destinataires dans chaque service, le périodique y passe en moyenne un mois, il ne peut donc être question, si l'on veut que ce système ait encore quelque raison d'être, de faire circuler autre chose que des périodiques de synthèse. Certains centres de documentation peuvent inclure dans le circuit des périodiques des annexes éloignées : c'est le cas de l'ONERA et de son usine de Modane (mais ce système ne joue qu'en de rares occasions), c'est le cas de Kodak et de son usine de Châlons-sur-Marne (mais ils bénéficient de liaisons quotidiennes et rapides). La plupart du temps, les filiales provinciales ont leurs propres abonnements.
Il ne faut donc pas se leurrer sur les avantages de la circulation des périodiques et voir en elle la panacée universelle. Elle n'a d'intérêt que si, au moins pour les périodiques les plus importants, on peut multiplier les exemplaires de façon que chacun d'eux ne circule qu'entre quelques lecteurs; mais une telle politique est gouvernée par les crédits mis à la disposition du service de documentation. Si la revue doit circuler entre de nombreux intéressés, y a-t-il vraiment avantage, sous prétexte d'apporter l'information au lecteur, à la lui apporter deux ou trois mois après sa diffusion ? Mieux vaut alors, nous semble-t-il, publier un bulletin analytique bien fait et laisser les revues à la disposition des lecteurs de la bibliothèque, assorties de moyens commodes de reproduction.