Les recherches biographiques et la documentation imprimée

Jean Bruno

Michel Roussier

Rappel des instruments de travail dont on dispose pour les recherches biographiques en France. Nécessité d'établir des bibliographies propres à une époque, une profession ou une région et de dresser la liste des fichiers et collections de dossiers biographiques existant dans les bibliothèques et dépôts d'archives

Quel que soit l'intérêt, qui peut parfois paraître secondaire, des recherches biographiques, et bien que l'attention se soit aujourd'hui plus largement déplacée vers les problèmes économiques, sociaux ou démographiques, il n'en reste pas moins de nombreux lecteurs à venir demander aux bibliothèques des informations biographiques, et les bibliothécaires sont les premiers à en avoir besoin pour éviter des confusions dans leurs catalogues. Trop d'heures se perdant dans ces recherches, par suite de la multiplicité et de l'insuffisance des instruments de travail, il ne paraît pas inutile d'en esquisser sommairement ici le bilan, quoique la plupart de ces ouvrages soient bien connus, et de rappeler quelques-uns des moyens utilisés pour remédier à leur dispersion, à leur retard ou à leurs lacunes.

Conçu avant 1914, le Dictionnaire de biographie française a commencé à paraître en 1929. Interrompu lors de la guerre, il a maintenant publié 9 volumes et atteint le début de la lettre D. Devant compter en tout 24 volumes, il ne pourrait s'achever, s'il gardait son rythme actuel (3 fascicules, c'est-à-dire la moitié d'un volume, par an), que dans une trentaine d'années. Actuellement, la copie est au point pour la presque totalité de la lettre D et la documentation bibliographique préparée pour les trois lettres suivantes. Il semble donc que l'impression pourrait être dès à présent accélérée sans essouffler l'équipe actuelle de rédacteurs, qui devrait s'accroître notablement pour finir le travail dans de plus brefs délais. Il serait hautement souhaitable qu'entrepris un demi-siècle après les grands dictionnaires biographiques anglais et allemand, notre répertoire ne mette pas deux ou trois fois plus de temps que ceux-ci pour se terminer. Une fois achevé, le Dictionnaire de biographie française répondra pour l'essentiel aux besoins des bibliothèques et des chercheurs, mais il serait naïf d'attendre qu'il épuise l'ensemble des questions d'ordre biographique; les bibliographies qui suivent presque toutes les notices permettent de pousser les investigations plus loin, et, à la suite de critiques réitérées sur l'élimination de personnages de peu d'importance, ceux-ci sont désormais beaucoup plus largement accueillis et leurs notices rédigées, depuis le volume VI, dans un corps plus petit. Afin de multiplier les noms, la dimension moyenne des articles a été réduite, néanmoins un choix s'impose toujours et un dictionnaire de ce genre ne peut pour le passé se confondre avec l'état civil. Il élimine de plus par principe tous les vivants. Il doit donc être complété pour le présent par les répertoires et annuaires de contemporains.

Ceux-ci sont actuellement nombreux et variés. Souhaitons au Who's who in France qui, après avoir d'abord publié un volume sur Paris pour 1953-1954, s'est ensuite étendu à toute la France et a atteint avec 1963-1964 sa 6e édition, une carrière aussi durable qu'à ses homologues anglais et américains; ceux-ci continuent depuis 1849 et 1899, alors qu'après le dernier supplément du Vapereau en 1895 la France a connu une multitude d'entreprises passablement disparates. Le Nouveau dictionnaire national des contemporains (Paris, Robin, 196I), qui fait suite au dictionnaire en 3 volumes dirigé par Nath Imbert (1936-1939), donne comme ce dernier des photographies, mais ses notices sont inégales, pas toujours aussi précises qu'on le désirerait. Il faut néanmoins le consulter, car il ne donne pas les mêmes noms que le Who's who in France.

Si le satirique Dictionnaire des contemporains, dirigé par Galtier-Boissière et dont les notices sont signées, veut à la fois informer et amuser le grand public (Crapouillot, 1950-59, nos 8, 9, et 10, 42 et 43), le Dictionnaire biographique français contemporain (Ire éd. 1950, 2e éd. 1954, 3e éd. en préparation), publié par l'Agence de presse Pharos, apporte une documentation plus traditionnelle. On doit à une autre agence parisienne, la Société générale de presse, des fiches biographiques mobiles, multigraphiées, de format oblong, présentées en classeurs correspondant à diverses institutions ou professions (Parlement, cabinets ministériels, Cour des comptes, corps diplomatique et consulaire, presse, publicité, etc.). Cette formule permet aussi bien des refontes complètes qu'une mise à jour permanente, tandis que le Who's who in France suit l'actualité en multipliant ses rééditions et en dressant, soit à la fin (en 1955-56), soit au début (depuis 1957-58), une liste des décédés, sur lesquels on trouvera des notices plus développées dans le répertoire nécrologique de Temerson, qui a déjà paru quatre fois, pour 1956, 1957, 1960 et 196I, avec une lacune pour 1958 et 1959 1.

Les dictionnaires biographiques spécialisés ne sont pas moins nombreux et disparates, qu'ils soient professionnels ou embrassent toutes les superficies possibles, de la ville à la province ou à la région naturelle. Plusieurs d'entre eux n'ont qu'une valeur critique très faible ou sont restés inachevés 2. Le report sur une carte de France de ces répertoires locaux révèle d'un coup d'œil lacunes et retards dans ce domaine qui, totalement laissé à l'initiative individuelle, ne peut être qu'anarchique, fragmenté et rarement à jour. Or, il n'en existe pas de bibliographie qui permettrait de faire rapidement le choix du recueil à utiliser pour trouver le renseignement désiré.

La base d'une telle bibliographie existe dans le Catalogue de l'histoire de France de la Bibliothèque nationale. La division Ln recense en 26 rubriques les recueils biographiques, une 27e étant réservée aux biographies individuelles, et les subdivisions Lc16 et Lc36 recensent les périodiques ou les annuaires biographiques. Malheureusement, ce catalogue n'est pas entièrement à la disposition du public; son supplément fut autographié en 1884, et, pour les ouvrages entrés depuis 1950, un fichier a été installé dans la Salle des catalogues. Il serait souhaitable que la publication de ce catalogue fût reprise : ce serait mettre entre les mains des historiens un instrument de travail bien précieux et dans le cas particulier qui nous concerne ici, les biographies, combien de recherches seraient simplifiées. Cependant le Catalogue de l'histoire de France ne peut prétendre remplacer une bibliographie des recueils biographiques. Il ne recense, à juste titre, que les recueils consacrés uniquement à des Français. En sont donc écartés tous les dictionnaires universels qui, écrits par des Français, font une très large place à leurs compatriotes, ainsi le Dictionnaire des contemporains de Gustave Vapereau n'y figure pas. Il en est de même pour certains recueils, numéros spéciaux de périodiques ou bulletins d'associations comme les tables du Bulletin de l'Association amicale des secrétaires et anciens secrétaires de la Conférence des avocats à Paris, tables qui sont essentiellement des notices biographiques.

Établir une bibliographie des recueils biographiques est un travail de longue haleine qui ne pourrait être réalisé que par une équipe. Pour arriver rapidement à un résultat la solution doit être recherchée, nous semble-t-il, dans l'établissement de plusieurs bibliographies propres à une époque, une profession, une région. Le travail est commencé. Trois mémoires de fin d'études de l'Institut national des techniques de la documentation ont eu pour objet les recueils biographiques, mais ces bibliographies n'existent malheureusement que multigraphiées ou dactylographiées et en très peu d'exemplaires.

La Bibliographie des recueils biographiques de contemporains des XIXe et XXe siècles en France, de Mme Auffray, recense les recueils biographiques généraux, c'est-à-dire sans distinction de profession ni de lieu, qui contiennent des biographies de Français ou d'étrangers vivant en France, personnages vivants ou morts récemment ; les recueils sont classés selon l'ordre chronologique des périodes pendant lesquelles vivaient les personnages qui font l'objet des notices biographiques.

Mme Marcheix dans sa Bibliographie analytique de biographies des parlementaires français de 187I à 1960 recense par Républiques (IIIe, IVe, Ve), avec une subdivision par législatures ou grandes périodes selon les assemblées, les recueils consacrés aux parlementaires.

Mlle Westercamp, sous le titre : Instruments pour les recherches biographiques de 1920 à 1960, a établi « la liste des principaux répertoires biographiques et de quelques autres instruments importants pour les recherches biographiques sur des Français actuellement vivants ou décédés après 1920 » 3.

Un exemple de bibliographie régionale nous est donné par la Fédération des sociétés d'histoire et d'archéologie d'Alsace qui vient de publier un Répertoire bibliographique des biographies collectives d'Alsace. L'auteur, Mr Christian Wolff, fait le point de toutes les ressources dont on dispose pour retrouver des renseignements biographiques sur un Alsacien : recueils biographiques proprement dits, ouvrages ou articles de revues concernant une catégorie de personnages, fichiers ou collections de coupures de presse des bibliothèques et archives de la région, bibliographies et tables de revues permettant de retrouver les notices individuelles.

Par un hasard heureux, ces bibliographies représentent les trois types de bibliographies générales, professionnelles et régionales que nous souhaitons voir réaliser. L'effort doit porter en premier lieu sur ces dernières sans lesquelles les autres sont plus difficiles à entreprendre. Nous signalons l'intérêt de travaux de ce genre aux futurs élèves de l'École nationale supérieure de bibliothécaires qui auront un mémoire à présenter. Si toute la France était recouverte par des travaux du genre de la bibliographie de Mr Wolff, il y aurait un grand pas de fait.

Que ce soit pour compléter les annuaires ou dictionnaires ou pour remédier à leur absence, il serait important que les articles épars en de nombreux périodiques soient régulièrement inventoriés. On déplorera que l'idée d'une table de la Bibliographie générale des travaux historiques et archéologiques des sociétés savantes, des origines à 1940, paraisse abandonnée parce que l'on a craint ses dimensions excessives 4. On n'a jusqu'ici retenu aucun des projets d'index proposés par Mr Gandilhon qui aurait entrepris ce lourd travail s'il avait reçu l'assurance qu'une fois achevé on l'imprimerait. A défaut d'une table intégrale des sujets, un index au moins des noms de personnes rendrait d'incontestables services.

Basée sur de tout autres principes, puisqu'elle dépouille tous les périodiques provinciaux depuis leur origine quelle que soit leur discipline, au lieu de s'en tenir aux études historiques et archéologiques des seules sociétés savantes, la Topobibliographie de la France de Mr Maurice Duportet est classée systématiquement en 25 sections, dont une pour les généalogies (n° 12) et une pour les biographies (n° 24). Si seuls trois départements ont été imprimés avant la guerre (Allier, Creuse, Indre), M. Duportet a poursuivi sur fiches ses dépouillements pour plus de cinquante départements, la plupart situés au sud du niveau de la Loire 5, multipliant ses fiches en fonction des commandes et pouvant constituer des séries par auteurs, par disciplines ou par lieux. Parmi les fichiers constitués par M. Duportet, citons celui de la Bibliothèque municipale de Toulouse, groupant les huit départements de la région universitaire et celui de la Fédération régionaliste française en cours de classement au Musée des arts et traditions populaires.

La multiplicité des instruments de travail à consulter pour découvrir des notices de personnages peu connus décourage. Pour accélérer et simplifier les recherches on a imaginé de dépouiller par noms de personnes le contenu des dictionnaires ou annuaires et parfois de nombreux articles, soit sur fiches, soit dans des répertoires imprimés, qui constituent pour ainsi dire l'index général d'un plus ou moins grand nombre de sources biographiques imprimées. L'Onomasticon de L. Ferrari (1947), malgré ses lacunes et imperfections, est sans doute le plus typique de ces répertoires nationaux de références, car, allant de 150I à 1850, il veut pallier le morcellement de l'Italie. Le récent Dizionario biografico degli Italiani (depuis 196I) n'en annule pas l'intérêt, car, devant opérer lui-même un choix, ce dictionnaire a omis certains des individus notés dans l'Onomasticon, mais est pour certains noms plus riche que ce dernier. On trouvera des Français dans l'Internationale Personalbibliographie d'Arnim, dont un supplément est en cours de publication, et qui signale surtout des intellectuels, écrivains ou savants après 1800 ; dans la bibliographie courante américaine : Biography index (New York, depuis 1946), et pour le passé dans L. B. Phillips (The Dictionary of biographical references, 2e éd., 1889) et Hyamson (A Dictionary of universal biography, 2e éd., 195I). Ces deux derniers auteurs n'ont exploré que très peu d'instruments de travail français, et ne sauraient être d'une grande utilité pour notre pays. Il serait dangereux, lorsqu'on ne trouve pas un nom dans un index de ce genre, de croire que les répertoires qu'il a dépouillés ne peuvent fournir le renseignement cherché. La Bibliographie annuelle de l'histoire de France, qui a repris ses dépouillements depuis 1955, malgré sa richesse en références biographiques, est cependant tenue à une sélection. Elle élimine en général les vivants et les contemporains qui n'eurent d'activité notable qu'après 1939.

Si le dépouillement des sources biographiques n'existe pas pour la France en volumes, il se trouve partiellement réalisé sur fiches dans plusieurs bibliothèques. Le fichier biographique de la Sorbonne 6, avec ses 325 000 fiches, constitue, bien que, faute de personnel, il ne soit plus alimenté, une source très précieuse de documentation, tant pour le passé que pour le présent, en raison du grand nombre d'ouvrages et surtout de revues des XIXe et xxe siècles qui ont été dépouillées.

A. Boutillier du Retail, amplifiant un projet de L. Staude, organisa sous l'occupation, au Centre de documentation qu'il dirigeait rue du Faubourg Saint-Honoré, un vaste service de biographie française 7. Ces « archives » ne se proposaient nullement de doubler le dictionnaire publié chez Letouzey, mais de fournir des références en attendant l'achèvement de celui-ci et des compléments pour des personnages oubliés. Elles devaient intégrer des matériaux d'origines très diverses : livres et brochures, articles de revues et journaux, dépouillements de dictionnaires généalogiques et biographiques et de mémoires, autographes, épitaphes postérieures aux publications de Guilhermy et de Lasteyrie, de Raunié, résultats d'enquêtes, etc. Ce plan a été partiellement réalisé de 194I à 1945 par des équipes de chômeurs intellectuels. Il en reste des fichiers et des dossiers, aujourd'hui conservés à la Bibliothèque nationale 8. Si ces instruments de travail sont très imparfaits, parce qu'inachevés et compilés sans critique ni coordination, ils apportent souvent des renseignements inattendus. Le fichier biographique, gardé au Département des imprimés et dépassant, comme le fichier de la Sorbonne, 300 000 fiches, a dépouillé plus de 150 dictionnaires et annuaires généraux, spéciaux et locaux. Il est particulièrement riche pour tout le XIXe et le début du XXe siècles. Actuellement utilisé pour les nécessités de son travail par le service qui rédige le Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque nationale, il est complété par de nouveaux dépouillements surtout pour la fin de l'alphabet. Ce service possède en outre un fichier de pseudonymes français de près de 25 000 fiches, dont la moitié pour les noms réels, mais il s'agit de renseignements compilés dans divers répertoires qui ne concordent pas toujours et qu'il serait imprudent d'utiliser sans contrôle.

Le fichier des familles françaises établi par une des équipes de Boutillier du Retail se trouve également dans un service du Département des imprimés. Bien qu'ayant recouvert la plupart des provinces, il reste très incomplet. Il ne mérite pas d'être continué, car deux ouvrages en préparation vont en diminuer l'intérêt : une bibliographie héraldique et généalogique, par Mr G. Saffroy, et un dépouillement, famille par famille, du contenu des répertoires et annuaires généalogiques, effectué par le colonel Étienne Arnaud.

Un autre fichier biographique fut exécuté pendant la guerre à la Bibliothèque nationale par des chômeurs intellectuels sous la direction de Mr Roman d'Amat et de Mlle Campardon. Comprenant 95 000 fiches, il se trouve dans la Salle des catalogues. Ses dépouillements ont porté sur de nombreux périodiques, des recueils collectifs et parfois des dictionnaires; ils ont repris aussi une partie des monographies appartenant à la série de l'histoire de France (Ln27) ou à d'autres séries.

La fusion de ces divers fichiers, qui se complètent, est actuellement envisagée. Elle simplifierait les recherches et pourrait fournir la base d'un répertoire national de références biographiques françaises, dont la place naturelle est à la Bibliothèque nationale qui seule possède l'ensemble des publications dépouillées.

Le fichier de la Bibliothèque administrative de la Préfecture de la Seine 9, contrairement aux fichiers précédents, a été conçu non comme un fichier spécial, indépendant des fichiers normaux d'une bibliothèque, mais comme la section « noms de personnes » du fichier matières de la bibliothèque; il a été constitué au départ par toutes les fiches noms de personnes retirées du catalogue matières général et d'un catalogue d'articles de périodiques établi pendant quelques années. Depuis janvier 1960 est assuré le dépouillement régulier de ce qui entre à la bibliothèque, ouvrages et périodiques, et peu à peu les collections anciennes seront dépouillées. Le fichier comporte actuellement environ 30 000 fiches.

Une enquête serait à faire pour dresser la liste de ces fichiers dans les bibliothèques et dépôts d'archives de province, avec l'indication de leurs limites dans le temps et dans l'espace. Il semble que la documentation départementale sur fiches de Mr Duportet fournirait tout naturellement, pour la plus grande partie de la France, le point de départ de fichiers locaux ou régionaux, si l'on voulait généraliser ceux-ci, tandis que leur mise à jour serait aisément assurée par le découpage des bibliographies régionales courantes, qui souvent n'ont pas de table, précisément parce qu'elles sont destinées à être collées sur fiches 10.

Pour éviter l'intermédiaire du fichier et donner une documentation directe, bien des bibliothèques ont constitué des dossiers groupant sur un personnage des coupures de presse, des articles de revues ou même des brochures. Ces dossiers ont le grand avantage de rendre utilisable une source extrêmement riche en informations biographiques, les journaux. Si des tables rétrospectives ont été établies pour des périodiques comme la Gazette de France ou le Mercure de France sous l'Ancien Régime et si le Moniteur universel en a régulièrement publié jusqu'au milieu du XIXe siècle, on déplorera de n'en pas avoir pour aucun grand quotidien français actuel, alors qu'il en existe à l'étranger, par exemple pour le Times de Londres ou le New York Times 11.

Parallèlement à ses fichiers, Boutillier du Retail, aidé par L. Staude, groupa ainsi sur des individus de nombreux extraits, qui sont conservés au Département des périodiques de la Bibliothèque nationale en 560 cartons, pour les revues in-16° ou in-8°, et en 5I tiroirs métalliques pour les plus grands formats et les coupures de presse 12. Ces dossiers se rencontrent plus fréquemment dans les bibliothèques et centres spécialisés. C'est ainsi que la Bibliothèque historique de la ville de Paris en possède une importante collection, dans sa série, si riche et si peu connue d'Actualités, où la division 30, consacrée aux biographies, comprend 300 cartons 13. Mais souvent, on choisit une forme ou l'autre de documentation : l'Arsenal découpe la presse (sur les arts du spectacle, le théâtre et même sur des écrivains qui ne sont qu'occasionnellement dramaturges), mais ne dépouille pas les articles sur fiches, tandis que le Muséum n'a que peu de dossiers, mais entretient un fichier biographique sur les savants et naturalistes. Il existe de pareilles collections de dossiers dans bien d'autres bibliothèques et dans des dépôts d'archives. Il serait intéressant d'en avoir la liste 14.

Le rapprochement d'un grand nombre de références sur le même individu révèle souvent des contradictions, qui apparaîtraient encore en plus grand nombre si les répertoires biographiques n'avaient la fâcheuse habitude de se copier sans fin. Il arrive que des erreurs se propagent durant des décades, parfois des siècles. Dans un genre où la précision semblerait aller de soi, on rencontre les fantaisies les plus diverses : noms déformés, personnages composites ou fragmentés, confusion de portraits, erreurs de dates, etc. 15. Aucune notice biographique sérieuse ne peut être rédigée sans de multiples contrôles, dont les plus élémentaires devraient porter sur les lieux et les dates de naissance et de mort, de même que sur les prénoms qui ne sont pas toujours identiques à l'état civil, à l'église et dans la vie courante ou sur les publications, certains auteurs en ayant changé au cours de leur carrière. Que les inexactitudes soient imputables au biographe ou à l'intéressé lui-même (qui n'hésite pas quelquefois à truquer son âge, généralement pour se rajeunir, ou qui est distrait), il faut remonter aux sources.

On s'adressera donc, selon les dates, aux mairies ou aux archives, parfois aux administrations (dont il faut consulter les annuaires, tableaux d'avancement, etc.), et l'on recherchera les pièces officielles, en prenant garde aux erreurs de transcription ou aux déclarations inexactes, surtout lorsqu'il s'agit d'étrangers vivant en France. On pourra se livrer à des vérifications sur les faire-part imprimés (dont il existe des collections, naturellement très lacunaires, à la Bibliothèque nationale et aux Archives nationales), bien qu'ils n'aient qu'un caractère privé, mais l'on n'utilisera qu'avec beaucoup plus de prudence les généalogies, dans l'établissement desquelles la complaisance a parfois joué jadis un rôle abusif.

Si la méfiance généralisée, la multiplication des recoupements et des contrôles directs sont de règle lorsqu'on rédige un article de fond, une monographie ou une solide notice de dictionnaire, on se rappellera que tous les instruments de travail imprimés ne répondent pas à ces exigences critiques, et que dans les meilleurs ont pu se glisser des erreurs ou des approximations. La consultation de certaines notices ne saurait avoir d'autre utilité, dans bien des cas, que de fournir aux recherches leur point de départ.

  1. (retour)↑  Biographies des principales personnalités françaises décédées au cours de l'année... (Paris, l'auteur, 13 bis, rue Beccaria). Rappelons que de 190I à 1936 (dans les volumes 1903 à 1937), le Tout-Paris avait signalé chaque année les décès, mais sans préciser leur date exacte.
  2. (retour)↑  La fin inédite du Répertoire de bio-bibliographie bretonne, de Kerviler, interrompu à G en 1908, se trouve à la Bibliothèque municipale de Nantes, tandis que la suite du Dictionnaire... des familles du Poitou, de Beauchet-Filleau, arrêté aussi au G en 1909, est restée dans la famille (à Chef-Boutonne, Deux-Sèvres), qui projette de reprendre la publication.
  3. (retour)↑  Mlle Westercamp inventorie les répertoires généraux, spéciaux et locaux français, de même que l'ont fait pour la Belgique J. Dhondt et S. Vervaeck, dans : Instruments biographiques pour l'histoire contemporaine de la Belgique (Louvain, Paris, Nauwelaerts, 1960).
  4. (retour)↑  L'ensemble de la bibliographie de Lasteyrie-Vidier-Gandilhon forme 15 volumes in-4° et comporte 300 000 numéros. C'est certainement à cause de son développement trop considérable que la table auteurs et matières rédigée par Vidier pour 190I-2 n'eut pas de suite : elle remplissait 110 pages, alors que les dépouillements en avaient pris 164.
  5. (retour)↑  Mr J.-L. Rocher a énuméré les départements achevés lors de la publication de son article : Bibliographie et documentation régionales, et publié le cadre détaillé de la Topo-bibliographie. (Cf. B. bibl. France, nov. 1958, pp. 783-792, et la discussion de la Commission nationale de bibliographie, pp. 812-4.)
  6. (retour)↑  Cf. Jean Bonnerot : L'Index biographique de la bibliothèque de la Sorbonne. (Bulletin d'information de l'A. B. F., n° 19, mars 1956, pp. 11-14.)
  7. (retour)↑  A. Boutillier du Retail : Les Archives de biographie française. (F. I. D. Communicationes, 1943, vol. X, fasc. 2, pp. 18-21.)
  8. (retour)↑  Mais les relevés d'épitaphes faits aux cimetières d'Auteuil, de Passy, de Grenelle, du Calvaire (Montmartre), de Saint-Vincent, et partiellement à Vaugirard, sont actuellement aux Archives de la Seine. (Cf. Meurgey de Tupigny : Guide des recherches généalogiques aux Archives nationales, p. 80, et un article de R. Laulan, Mercure de France, 1er avril 1956, p. 786.)
  9. (retour)↑  Cf. Michel Roussier et Gaston Lasbordes : Le Fichier matières « noms de personnes » de la Bibliothèque administrative de la Préfecture de la Seine. (Bulletin d'informations de l'A.B.F., n° 38, juin 1962, pp. 91-95.)
  10. (retour)↑  Si la Bibliographie normande annuelle, établie par Mr Michel Nortier, pour les Annales de Normandie et les Cahiers Léopold Delisle, a des tables alphabétiques par lieux, personnes et auteurs, le Bulletin bibliographique et critique d'histoire de Normandie (qui continua de 1928 à 1939 sous le titre Normannia) avait prévu dès son début en 1925 le découpage sur fiches et proposé une édition imprimée d'un seul côté. A la limite, si l'on ne veut pas découper ou recopier au complet les notices, il suffit d'en établir sur fiches un simple index matières renvoyant à la bibliographie, à condition que celle-ci soit à proximité du fichier.
  11. (retour)↑  Signalons que l'on vient d'en projeter une pour la première décade du Temps et que subsiste au Département des périodiques de la B. N., en 34 boîtes, la table sur fiches du journal Le Matin jusqu'en 1944, malheureusement très incomplète pour les dernières lettres de l'alphabet.
  12. (retour)↑  On trouve ainsi un carton entier pour Pascal, Molière, Rousseau, Robespierre, Mme de Staël, Mérimée, Zola, Verlaine, Clemenceau, Briand, Claudel, deux cartons pour Chateaubriand, Flaubert, Lamartine ou Thiers; trois pour Hugo, etc. Lors d'une récente exposition un de nos collègues y découvrit une trentaine d'articles qui avaient échappé à la Bibliographie barrésienne de Zarach. Une abondante série de coupures sur A. France, d'une origine différente, est conservée à part dans de grands classeurs bleus.
  13. (retour)↑  Il y a par exemple 30 cartons sur Gambetta, 1 sur Déroulède, etc. Ces dossiers ne contiennent que des coupures de presse.
  14. (retour)↑  La bibliographie de Mr Wolff en signale plusieurs en Alsace.
  15. (retour)↑  En voici quelques exemples. Le nom de Canisio, sous lequel est souvent classé Gilles de Viterbe, semble remonter à une coquille dans un ouvrage latin de 1644. Le portrait erroné de Mme Guyon, reproduit en 1924 dans Bédier-Hazard, passa en 1930 dans le tome III du Larousse, puis en 1955 dans le Dizionario ecclesiastico. Deux dates de naissance (1858 et 186I, celle-ci fausse) sont alternativement données à Courteline, selon les dictionnaires, etc., etc.