Chronique des bibliothèques
Bibliothèque nationale.
Département des estampes.
Le Cabinet des estampes a acquis en vente publique une épreuve de la gravure de Louis-Marin Bonnet : Jupiter et Danaé, d'après François Boucher (n° 28 du catalogue de L.-M. Bonnet par Hérold).
Il s'agit d'une épreuve du 2e état dans lequel a été supprimée l'abondante pluie d'or qui, au Ier état, rompait à l'excès le dessin gracieux du corps de Danaé, mais où subsistent trois pièces d'or logées dans le giron de l'héroïne, qui disparaîtront du 3e état en même temps que la planche de jaune qui servait à les colorer.
L'œuvre, telle qu'elle apparaît dans cette épreuve, est une des plus belles réussites de Louis-Marin Bonnet dans la gravure en manière de pastel.
Don de manuscrits de Colette.
La piété dont M. Maurice Goudeket entoure la mémoire de Colette lui a inspiré le geste généreux de faire don à la Bibliothèque nationale des manuscrits autographes de Claudine en ménage, Claudine s'en va, et La Retraite sentimentale.
La petite salle qui précède la Galerie Mazarine a accueilli, le 28 janvier pour quelques jours avant leur entrée au Cabinet des manuscrits, les célèbres « petits cahiers » dont Colette a raconté l'histoire mouvementée dans Mes apprentissages. Sauvés de justesse par Paul Barlet, un des secrétaires de « M. Willy » et restitués à Colette, après son divorce, ils permettront d'étudier, la genèse de ces premiers romans où s'affirme déjà sa maîtrise. Dans les marges de certaines pages on pourra voir courir « l'écriture microscopique, gladiolée, ascendante » de Willy. On s'assurera ainsi que si les « réprimandes » dont parlait Colette sont, comme elle le disait, « directes et coupantes », elles restent surtout des plus « brèves ».
Témoignage d'une « collaboration littéraire » qui, de la part de Willy, fut surtout une découverte, le don de M. Maurice Goudeket a été remis à M. Julien Cain, administrateur général, au cours d'une brève cérémonie où furent évoqués les liens de voisinage et d'amitié ayant uni Colette à la Bibliothèque nationale.
Bibliothèques universitaires.
Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).
En 1958, M. Jacques Archimbaud, bibliothécaire à la Bibliothèque de l'Université de Clermont-Ferrand, section de médecine et de pharmacie, avait fait paraître, sous forme multigraphiée, le répertoire des périodiques en cours reçus par sa bibliothèque 1; le catalogue qu'il vient de publier 2 est d'un intérêt qui dépasse le cadre de l'établissement. A côté des périodiques en cours, assortis de leur cote en salle de lecture et en magasin, de l'état de leur collection et des divers titres qu'ils ont pu avoir, figurent en effet, sous une forme typographique différente, et les périodiques « morts » et, innovation notoire, les périodiques courants possédés par la Bibliothèque universitaire centrale, susceptibles d'intéresser les lecteurs de la section médicale. Un index alphabétique de matières et une table des sociétés éditrices permettent une orientation facile et rapide.
Le nombre des périodiques acquis depuis la dernière édition de ce répertoire témoigne de l'activité de la Section de médecine et de pharmacie de la Bibliothèque universitaire de Clermont-Ferrand.
Bibliothèques municipales.
Chaumont (Haute-Marne).
Les importants travaux d'aménagement opérés au cours de l'année dernière à la Bibliothèque de Chaumont ont complètement transformé son installation et amélioré son fonctionnement. On y a introduit le chauffage central et un éclairage bien étudié et la grande salle ovale qui était le salon de réception de la Préfecture sous le second Empire, ayant retrouvé ses belles proportions et ayant été pourvu d'un mobilier moderne, accueillera désormais les lecteurs qui viennent consulter le fonds d'étude.
L'inauguration de cette salle a eu lieu le Ier février. A cette cérémonie, présidée par M. le Préfet, assistaient le maire, M. Baron, les représentants des principaux services départementaux et municipaux, les directeurs des établissements scolaires et l'inspecteur général, M. Brun.
A cette occasion le bibliothécaire, H. Henriot, avait exposé dans des vitrines une sélection des récentes acquisitions ainsi que des ouvrages précieux de la Réserve.
Le Mans (Sarthe).
Réalisée avec le concours de l'Institut pédagogique national et le Centre départemental de documentation, une exposition consacrée à Descartes fut présentée en janvier dernier dans le hall d'entrée et les escaliers de la Bibliothèque municipale.
Toute une série de panneaux illustrèrent la vie du philosophe, physicien et géomètre qui fit ses études dans la Sarthe au Collège de La Flèche.
Dans des vitrines, le public put admirer des documents extraits de l'excellent fonds de la Bibliothèque municipale.
Moulins (Allier).
Dans le cadre des journées d'amitié franco-canadiennes organisées par le Forum de Moulins, cercle d'études culturelles et sociales, la Bibliothèque municipale a présenté une exposition de livres canadiens au cours du mois de février. Trois cent cinquante livres gracieusement prêtés par l'Ambassade du Canada à Paris donnaient un panorama de la littérature canadienne française : romans, poèmes, essais, parmi lesquels on remarquait des œuvres d'Anne Hebert, Gilles Marcotte, Jacqueline Dupuy, Jacques Godbout, Jean Le Moyne. Des ouvrages documentaires en français et en anglais les accompagnaient, concernant l'art, l'histoire, le folklore, la géographie, la vie économique du pays. Des revues dans les deux langues complétaient cet ensemble. L'exposition, organisée en salon de lecture avec entrée libre était agrémentée de trente-quatre photographies inédites de Montréal.
Le II février, cette exposition a été honorée de la visite de son Excellence M. Pierre Dupuy, ambassadeur du Canada en France; à l'issue de la cérémonie, la Bible de Souvigny lui a été présentée ainsi qu'aux personnalités présentes.
Toulouse (Haute-Garonne).
Le 18 décembre 1962 a été inaugurée au Musée des Augustins de Toulouse une importante exposition consacrée à l'évocation de trois siècles d'histoire de la Réforme dans la capitale du Languedoc.
Cette manifestation, suivant l'ordre chronologique, commençait par l'apparition, vers 1530, des premiers humanistes réformateurs toulousains, dont Jean de Boissoné fut le type le plus accompli et s'achevait après la promulgation de l'Édit de Tolérance, par l'organisation de l'Église réformée de Toulouse dans les dernières années du « Siècle des Lumières ».
Elle était axée sur deux dates essentielles : 1562, année qui vit se dérouler la suprême épreuve de force entre catholiques et protestants, marquée par la victoire des premiers et l'expulsion des seconds, et 1762, année où éclatèrent trois « affaires » qui, à des degrés divers, sensibilisèrent, notamment grâce à l'intervention de Voltaire, l'opinion publique de l'Europe entière : l'exécution du pasteur Rochette et des trois frères de Grenier, celle de Jean Calas, enfin le procès de Pierre-Paul Sirven.
Le rappel chronologique des événements s'accompagnait de l'évocation de personnages ayant joué un rôle dans l'histoire du protestantisme, entre autres, pour le XVIe siècle, Marot, de Bèze, le cardinal de Chatillon, Coras, du Bartas, l'imprimeur Guyon Boudeville et, aux XVIIe et XVIIIe siècles, Bayle, Pélisson et Rapin-Thoyras. A côté d'eux, une place était faite à d'autres figures qui furent, à des titres divers, favorables ou hostiles au protestantisme toulousain : les rois de France et particulièrement Henri III, Henri IV et Louis XIII, les cardinaux d'Armagnac et de Foix, Rabelais, Montaigne, le maréchal de Monluc, le cardinal et les ducs de Joyeuse, Pibrac, Scaliger, les intendants de Languedoc : d'Aguesseau et Baville, le duc de Richelieu, ainsi que plusieurs « philosophes » notoires : Diderot, d'Alembert, Helvétius, Rousseau et surtout Voltaire.
L'exposition, qui groupait, à côté de documents d'archives, de livres manuscrits et imprimés, des peintures et des dessins, des gravures, des sculptures, des médailles, des costumes et des objets d'art décrits dans un catalogue illustré de 654 numéros 3, a duré du 18 décembre 1962 au 3 février 1963.
Elle était l'œuvre commune des collections publiques de Toulouse : Archives départementales et municipales, Bibliothèques municipale et universitaire, Musées des Augustins et Paul Dupuy. Une contribution précieuse avait été apportée par des collections publiques et privées, françaises et étrangères parmi lesquelles il faut mentionner, pour les bibliothèques, la Bibliothèque nationale et les grands établissements parisiens, Arsenal, Mazarine, Sainte-Geneviève, ainsi qu'en province, les Bibliothèques municipales d'Auch, de Bordeaux, de Cahors, de Montpellier et de Nantes.
Pour leur part, les Bibliothèques municipale et universitaire de Toulouse avaient contribué à cette manifestation par le prêt de 290 numéros, dont quelques manuscrits et surtout des éditions rares des XVIe et XVIIe siècles, provenant en majeure partie d'ateliers typographiques toulousains.