La nouvelle Bibliothèque scientifique universitaire d'Orsay

Gabriel Garnier

A 20 kilomètres au sud de Paris, à Orsay, vient d'être ouverte pour les usagers de la nouvelle Faculté des sciences, soit 8 à 9 ooo personnes d'ici deux à trois ans, une bibliothèque universitaire, édifiée en dix-huit mois, représentant près de 10 000 m2 de planchers, dont les salles publiques offrent près de 1000 places assises et dont le magasin est susceptible d'abriter environ 700 000 volumes. Dans une des ailes de la bibliothèque et sur deux étages ont été prévues des salles de travail d'accès entièrement libre aux étudiants pour le travail par groupes

L'augmentation constante des étudiants de sciences depuis quarante ans et la nécessité pour les professeurs et les chercheurs de disposer de vastes laboratoires de recherche ont conduit les pouvoirs publics à envisager l'élévation, en banlieue, d'une nouvelle Faculté des sciences, annexe de celle de Paris devenue trop petite. C'est ainsi que fut décidée l'acquisition en Seine-et-Oise du domaine de Launay et des terrains du Grand Mesnil : 160 hectares, situés dans la vallée de Chevreuse sur les communes d'Orsay et de Bures, à 20 kilomètres au sud de Paris.

Un cadre particulièrement agréable, la proximité des laboratoires du Centre national de la recherche scientifique à Gif-sur-Yvette, ceux de l'Institut national de la recherche agronomique à Jouy-en-Josas, du Centre d'études nucléaires du Commissariat à l'énergie atomique à Saclay, d'un certain nombre d'industries électroniques ou chimiques dans la région (Limours, Palaiseau, Massy...), de la Cité universitaire d'Antony, la liaison facile avec Paris par la ligne combinée chemin de fer-métro qui dessert la Cité universitaire du boulevard Jourdan et le Quartier latin (Denfert-Rochereau, Port-Royal, Luxembourg), tout concourait au choix de ces terrains.

Les travaux de la Faculté ont commencé en 1956 et l'on vit rapidement s'élever : trois amphithéâtres, le restaurant universitaire, les laboratoires de physique nucléaire, le bâtiment du froid, le cyclotron, le grand accélérateur linéaire, une partie des bâtiments de physique, celui des travaux pratiques du second cycle, les laboratoires de botanique et de chimie-physique. D'autres ont été récemment terminés ou sont sur le point de l'être, ceux d'électronique, de mécanique des fluides, de zoologie, de physiologie végétale, de biologie expérimentale, un institut de mathématiques, etc... et deux bâtiments de résidence universitaire à Bures. Lorsque sera réalisé le programme complet de l'opération, les bâtiments couvriront une surface de 150 000 m2, le tout agrémenté de pelouses et de très beaux arbres que protège d'ailleurs la Commission des sites.

Dans un tel ensemble, une bibliothèque en rapport avec le développement de la Faculté s'imposait. Elle ne fut pas oubliée. Construite sur les crédits de la Direction des bibliothèques de France, en collaboration étroite avec l'Université de Paris, elle fut réalisée par les architectes en chef : MM. Cassan, Coulon, Madeline, Seassal, assistés de MM. Barberon et Berger.

En attendant la construction de la bibliothèque, fut ouverte, en octobre 1959, dans les locaux déjà construits du bâtiment de propédeutique, une petite bibliothèque composée d'une salle, de quelques rayonnages métalliques et de tables pour quarante-huit lecteurs. Destinée primitivement aux étudiants de propédeutique, cette petite bibliothèque a dû, à partir d'octobre 1960, recevoir successivement les étudiants du second cycle, puis ceux du troisième cycle, de doctorat et d'agrégation. En raison du nombre réduit des places et de l'exiguïté de la salle, il fallut, faute de pouvoir accueillir tout le monde, organiser un important service de prêt à domicile, doté de manuels en multiples exemplaires.

La construction de la grande bibliothèque commença en novembre 1960. Elle était achevée, sauf quelques aménagements intérieurs, en avril 1962. Pendant les travaux, les services chargés de l'organisation de la nouvelle bibliothèque commencèrent à fonctionner en 1960, sous la direction du conservateur en chef chargé de l'administration des bibliothèques de l'Université de Paris; ils furent installés en février 196I, 8, place du Panthéon, dans une partie de l'ancienne Bibliothèque nordique. A la fin d'avril 196I, un conservateur fut chargé de la direction de la bibliothèque d'Orsay. Les différents services n'émigrèrent à Orsay qu'en avril 1962.

La bibliothèque, de forme asymétrique, est constituée par un bâtiment indépendant, ce qui a permis d'éclairer au maximum les salles de lecture et les bureaux. Sa projection horizontale forme un polygone concave irrégulier. La surface bâtie est de 3 779 mètres carrés. La surface totale des différents niveaux est de 9 889 mètres carrés. Le volume général de la bibliothèque est de 3I 546 mètres cubes. Dans tous ces chiffres ne sont compris ni les vides sanitaires ni les terrasses.

La bibliothèque est située sur une pente descendant du nord vers le sud, de sorte que le rez-de-chaussée du côté nord (rez-de-chaussée haut) est en réalité un premier étage du côté sud. Il existe donc un rez-de chaussée bas, mais qui n'occupe que le sud et le centre de la bibliothèque. La partie centrale de la bibliothèque est le magasin qui a la forme d'un parallélépipède droit couvrant 554 mètres carrés et haut de 17 mètres; il comprend sept niveaux de 2,20 mètres chacun. Son volume est de 10 08I mètres cubes, la surface des sept niveaux étant de 3 878 mètres carrés. Actuellement ne sont pourvus en rayonnages métalliques que les deux niveaux inférieurs; un troisième le sera incessamment. Lorsque le magasin sera complètement équipé il pourra contenir 23 kilomètres de tablettes. En ajoutant les rayonnages des usuels, des salles de lecture et des bureaux, cela fera en tout, pour la bibliothèque, environ 24 kilomètres de tablettes. Trois escaliers, deux ascenseurs, deux monte-livres réunissent les sept niveaux du magasin.

Au rez-de-chaussée bas se trouve le premier niveau du magasin; un couloir le longe sur les côtés nord, est et sud. Au nord se trouvent la cabine électrique avec les transformateurs, la sous-station de la chaufferie, une pièce équipée de rayonnages et un escalier montant à l'étage supérieur; à l'est, une pièce pour les doubles, un réfectoire avec eau chaude pour le personnel qui ne déjeune pas à la cantine de la Faculté, une cabine de douche et les installations sanitaires pour le personnel de l'étage, un bureau pour la multigraphie; au sud, cinq bureaux.

A la pointe de l'angle sud-ouest, se trouve la grande salle des périodiques qui forme une avancée vers le sud, de façon à présenter à la lumière du jour ses faces est, sud et ouest. Elle est vitrée sur ses trois côtés et haute de 6,25 m; elle a une surface de 435 mètres carrés. Tout autour de cette salle sont installés des « présentoirs » pour les numéros récents des périodiques les plus courants et, dans une petite dépendance, longeant le magasin du côté ouest, des alvéoles pour les périodiques en fascicules qui ne peuvent trouver place sur les présentoirs. Ces alvéoles sont séparées par des cloisons verticales mobiles qui peuvent être déplacées pour s'adapter aux dimensions des revues. Cette salle des périodiques est en liaison directe avec le premier niveau du magasin, niveau réservé aux périodiques. Elle communique par un escalier avec la salle des catalogues et l'entrée de la bibliothèque.

Au rez-de-chaussée haut se trouve le deuxième niveau du magasin. Comme au rez-de-chaussée bas, un couloir longe le magasin sur les côtés nord, est et sud. Sur ce couloir donnent : au nord la loge du concierge, un escalier montant aux salles de travail dont il sera parlé plus loin, un garage pour une fourgonnette et une voiture, et un escalier descendant à l'étage inférieur. Entre l'escalier contigu à la loge et le garage part un couloir traversant longitudinalement l'avancée nord de la bibliothèque (cette aile nord qui est possible à ce niveau n'existe pas au rez-de-chaussée bas). Ce couloir conduit aux pièces réservées au service photographique et à l'appartement du conservateur.

Le service photographique comprend : une grande pièce avec trois boxes pour les prises de vues, un cabinet noir pour le chargement des caméras, deux cabinets noirs de développement et trois grandes pièces destinées au fonctionnement de ce service. La surface totale prévue pour le service photographique est de 173 mètres carrés.

Sur le couloir est donnent une salle de manutention débouchant au nord sur un petit quai prévu pour la livraison des caisses et des colis, des bureaux, les installations sanitaires pour le personnel de l'étage et un autre escalier conduisant au rez-de-chaussée bas. Sur le couloir sud, qui aboutit à la salle des catalogues, également des bureaux.

Du côté ouest du magasin se trouvent la salle des catalogues de 446 mètres carrés de surface, entourée de quelques rayonnages contenant des encyclopédies et quelques grandes collections et une banque de distribution des livres en communication directe avec le magasin. Un escalier réunit, comme nous l'avons signalé plus haut, la salle des catalogues à la salle des périodiques située au rez-de-chaussée bas. Sur cette salle des catalogues donnent, côté nord, l'entrée de la bibliothèque, côté ouest, la salle des professeurs, et, perpendiculairement à la salle des catalogues, une salle de lecture rectangulaire de 861 mètres carrés; un escalier la réunit à un bloc sanitaire situé à l'étage inférieur et réservé aux lecteurs. Elle est entourée de rayonnages où se trouvent les grandes revues bibliographiques (Chemical abstracts, Chemisches Zentralblatt, Nuclear science abstracts, Biological abstracts, Berichte über die wissenschaftliche Biologie, Berichte über die gesamte Physiologie, Astronomischer Jahresbericht, Mathematical review, Bulletin signalétique, etc...). Elle est équipée de tables de quatre places pour 308 lecteurs. Mais on pourra facilement y loger à l'aise environ 350 lecteurs.

Une deuxième salle de lecture de 1175 mètres carrés de surface, communiquant avec la première par un large escalier, se trouve au-dessus de celle-ci et d'une partie de la salle des catalogues. Elle est en liaison avec le quatrième niveau du magasin et peut contenir environ 400 places.

Au-dessus du service photographique (aile nord) se trouvent deux étages contenant vingt salles de travail, avec tableaux noirs, réservées aux étudiants qui veulent étudier par petits groupes; ces salles de travail, indépendantes administrativement de la bibliothèque, sont cependant en communication rapide avec celle-ci.

L'ossature de la bibliothèque est en béton armé. Les bâtiments sont couverts de terrasses. Le chauffage est assuré par des cordons à ailettes pour le magasin, par le sol pour le reste. Les couloirs et les bureaux sont à notre avis trop sonores, malgré le revêtement des sols en caoutchouc et les communications téléphoniques y sont pénibles à cause des échos et des interférences qui en résultent. En revanche, les bureaux sont très aérés et très clairs, les plus petits ayant au moins deux fenêtres. Les salles de lecture sont éclairées par de très nombreuses baies vitrées à double paroi avec stores vénitiens entre les parois; les baies se trouvent au moins sur deux façades différentes. C'est ainsi que les deux grandes salles de lecture ont les parties côté sud très lumineuses et ensoleillées et les parties côté nord dotées d'une lumière diffuse très douce et il est intéressant de voir que les lecteurs, alors que la place ne manque pas, se groupent instinctivement soit du côté ensoleillé, soit du côté nord, comme si les uns présentaient un héliotactisme positif et les autres négatif.

A partir du troisième niveau, le magasin est aéré et éclairé par de petits châssis ouvrants qui permettent de s'orienter en cas d'arrêt de l'électricité, mais qui sont insuffisants pour la recherche d'un livre. L'éclairage électrique de toute la bibliothèque est à incandescence. En plus de l'éclairage artificiel pour les jours sombres, la salle des catalogues est éclairée dans la journée par des lanterneaux translucides, en plexiglas.

A chaque étage du magasin et dans toutes les pièces de la bibliothèque se trouvent des détecteurs d'incendie en relation avec une sonnerie et des signaux lumineux installés dans la loge du concierge.

Comme on peut le voir par cette description et par les figures qui l'accompagnent, le plan de cette bibliothèque a été étudié pour économiser les allées et venues du personnel et les réduire le plus possible.

Le magasin central entouré d'un couloir sur lequel donne chaque bureau permet aux bibliothécaires quel que soit l'étage ou le point cardinal où ils se trouvent d'être immédiatement dans le dépôt des collections de livres. Les ascenseurs, doublés d'escaliers, situés dans les magasins, au centre et près des extrémités de la diagonale nord-est sud-ouest et peu éloignés des portes, permettent d'accéder rapidement aux différents niveaux quel que soit le bureau ou l'endroit du magasin où l'on se trouve. Chacun des comptoirs de distribution des livres des trois salles est près d'une porte du magasin. Le quai de débarquement donnant sur la salle de manutention au même niveau que les services des entrées, de la reliure et des thèses, permet avec un simple chariot et sans avoir à prendre d'escalier de transmettre le contenu des colis aux services intéressés.

La bibliothèque, partie de zéro, a commencé à être équipée en 196I. Elle n'est donc pas encore très riche en volumes. Elle est cependant déjà abonnée à 740 revues scientifiques dont quelques-unes, parmi les plus fondamentales, ont pu être obtenues à partir d'une année assez reculée, quelquefois depuis la tête de la collection. La bibliothèque a reçu aussi quelques dons de bibliothèques, de professeurs et de sociétés.

Certaines pièces ne sont pas encore équipées (service photographique, salle des professeurs, salle de lecture de l'étage supérieur...) mais nous espérons avoir bientôt les crédits et le personnel nécessaires pour les mettre en service.

En résumé, grâce au calme du site, à la situation presque centrale de la bibliothèque dans le Campus, à l'éclairage parfait des salles, à la possibilité d'extension du fait de la place existante, à la commodité des liaisons qui permettent une distribution rapide des documents, à l'acquisition progressive de collections importantes, à l'équipement prochain du service photographique (microfilms, microfiches, photocopies, etc...), cette bibliothèque qui a ouvert ses portes il y a moins de six mois devrait bientôt donner satisfaction aux étudiants et, au fur et à mesure de son enrichissement en livres et périodiques, à tous les chercheurs qui voudront bien y faire appel.

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