Nécrologie

Georges Huard

Émilie Hardel

Né à Caen d'une vieille famille normande le Ier juillet 1887, Georges Huard s'est éteint le 6 juillet 1962 à Lisieux où il s'était retiré, il y a quelques mois, après la mort de sa femme.

Entré à l'École des Chartes en 19II, il vit sa scolarité interrompue par des années de mobilisation. La thèse qu'il acheva, dès qu'il fut rendu à la vie civile, sur la Paroisse et l'église Saint-Pierre de Caen des origines au milieu du XVIIe siècle lui valut le prix Auguste Molinier décerné à la meilleure thèse de l'année. Publié par la Société des antiquaires de Normandie en 1925-1927, ce travail reçut alors une récompense de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres au concours des travaux des Sociétés Antiquités nationales.

Le voici archiviste paléographe et aussitôt nommé conservateur de la bibliothèque et des archives de la ville de Caen. Sans plus attendre, il participe aux travaux des Sociétéssavantes locales et collabore à leurs revues.

Mais la Normandie ne garde pas le jeune érudit qui entre à la Bibliothèque nationale en août 192I pour y poursuivre une carrière de trente ans. Après quelques années passées au Service des entrées, dirigé alors par Émile Dacier, il est affecté au Service du Catalogue général des livres imprimés dont la direction lui revient plus tard. Ce travail lui permet d'appliquer son goût de la recherche, sa curiosité toujours en éveil, la sûreté de sa méthode, les qualités de son esprit fin et ingénieux. Son immense culture, nourrie par une inlassable activité intellectuelle, apporte à ses collaborateurs et collègues une aide inappréciable qu'il dispense avec la plus courtoise et affable générosité.

Cependant son œuvre se construit autour de ses thèmes préférés, sa Normandie natale et le Paris de la rive gauche qu'il a adopté : le Guide bleu de la Normandie lui doit une introduction maintes fois réimprimée et son ouvrage sur l'Art en Normandie mérite, en 1929, le prix Bordin de l'Académie des Beaux-Arts. De nombreuses revues et collections recueillent ses études d'histoire, d'archéologie, d'héraldique, de littérature : Bibliothèque de l'École des Chartes, Bulletin monumental, Bulletins de la Société des antiquaires de France, de la Société des antiquaires de Normandie, de la Société de l'histoire de Paris et de l'Ile-de-France, de la Société historique du VIe arrondissement, Revue d'histoire littéraire de la France, Gazette des Beaux-Arts, Revue de l'art ancien et moderne, Bulletin de la Société de l'histoire de l'art français, Études lexoviennes, Bulletin de la Société historique de Lisieux, Normannia, Bulletin du bibliophile, Trésors des bibliothèques, Revue française d'héraldique et de sigillographie, etc...

Plusieurs expositions à la Bibliothèque nationale font appel à sa compétence (Diderot et l'Encyclopédie) et en particulier à sa connaissance approfondie du XIXe siècle : Anatole France, Victor Hugo.

Sa retraite, en 195I, ne lui fit pas perdre l'habitude d'une présence quasi quotidienne rue de Richelieu. Une dernière joie l'attendait : c'est avec une ferveur particulière qu'il participa à la commémoration du cinquantenaire de la mort de Léopold Delisle. En ce maître vénéré dont il sut alors évoquer la figure avec sensibilité et affection, ne retrouvait-il pas trois pôles de sa vie : la Normandie, l'érudition chartiste et la Bibliothèque nationale.