Les bibliothèques sur les lieux de travail

Journées d'étude organisées du 20 au 22 novembre 1961 par la Commission de la République française pour l'éducation, la science et la culture

Formation et animation d'une bibliothèque d'entreprise. Prêt aux enfants, aux adolescents, aux travailleurs étrangers. Constitution et fonctionnement d'une discothèque. Aide apportée aux bibliothèques d'entreprises par les organismes privés et les services publics

La Commission de la République française pour l'éducation, la science et la culture avait réuni à l'Unesco, les 20, 2I et 22 novembre 196I, environ deux cents participants à des journées d'étude ayant pour thème : « Les bibliothèques sur les lieux de travail ». Les usines, les entreprises, les administrations les plus diverses s'y étaient fait représenter : industries automobiles, métallurgiques, textiles, électromécaniques, Sociétés pétrolières, Compagnies d'aviation et de chemins de fer, banques, grands magasins, usines alimentaires, etc... La présidence de ces journées devait être assurée par M. Louis François, vice-président de la Commission, puis par Mme Hattinguais, présidente du Comité « Éducation » de cette même Commission.

Définir quelques-uns des problèmes que pose la lecture dans les milieux du travail, aider au développement de la lecture publique dans les milieux des travailleurs, tel était l'objectif que M. Julien Cain, directeur général des Bibliothèques de France, devait assigner à ces réunions dans son allocution d'ouverture, car « une politique d'éducation permanente, une politique de promotion sociale ne saurait se faire sans le livre et les bibliothèques ».

Ces journées, qui furent préparées par un groupe de bibliothécaires d'entreprises et par M. Brunsvick, secrétaire général de la Commission française, avaient été précédées par une enquête menée dès le mois d'octobre 1960 auprès de 2 800 entreprises. Les 704 réponses reçues ont permis de faire des études statistiques donnant une vue d'ensemble du problème.

Le programme de travail, partant de ce document de base, rassemblait une quinzaine de rapports, exposés ou communications qui peuvent être répartis sous trois grandes rubriques :
I° Formation et animation d'une bibliothèque d'entreprise.
2° Les services que l'on pourrait appeler « d'extension » de la bibliothèque : prêt aux enfants, aux adolescents, aux travailleurs étrangers, discothèque.
3° L'aide apportée en province aux entreprises et aux travailleurs, soit par des organismes privés (Inter-livres - Rond-point des lecteurs - Office central des bibliothèques), soit par des services publics : bibliothèque municipale, bibliobus rural et urbain.

Il n'est pas dans notre intention de publier ici in extenso tous les rapports présentés au cours des séances ni les débats auxquels ils donnèrent lieu et qui furent, comme on peut le lire dans un compte rendu donné dans la Bibliographie de la France 1, « passionnés et passionnants pour les assistants, nombreux aussi, qui n'étaient pas directement engagés dans cette grande aventure : conquête du lecteur ou conquête du livre selon l'optique adoptée ». Nous nous bornerons à donner des extraits des principales communications qui furent faites.

M. B. Cacérès, secrétaire général de « Peuple et culture », devait tout d'abord, « non définir ces journées, mais les situer par rapport au problème plus général de la lecture des travailleurs manuels 2 ». Car le lecteur ouvrier est un lecteur de type particulier pour lequel il convient d'adopter des solutions particulières.

« Dans les bibliothèques sur le lieu de travail, le lecteur ouvrier qui vient demander un livre se pose d'autres problèmes que les habitués d'autres genres de bibliothèques. Il veut lire, il veut apprendre, mais quel livre lire ? Comment le choisir ? Les autodidactes qui ont témoigné de leur premier contact avec les bibliothèques nous disent leur difficulté et leur douloureux dilemme... Les bibliothèques sur le lieu de travail ne doivent pas être des offices techniques de distribution du livre. Elles sont un moyen culturel parmi d'autres. Leur action doit être reliée à d'autres actions, afin que ce lieu privilégié serve d'éveil culturel... S'imaginer que le chef-d'œuvre littéraire va, à lui seul, créer une transformation du lecteur, est une utopie à laquelle croient encore certains clercs... Le lecteur traditionnel est seul avec le livre. C'est une situation souvent intolérable au départ pour le lecteur ouvrier. Il s'agira de savoir de quelle manière il est possible d'apporter remède en sauvegardant la vertu essentielle du livre qui doit porter à une réflexion, à une méditation personnelle. Ceci n'a pas échappé aux organisateurs de ces journées puisque trois rapports traiteront du problème de l'animation de la bibliothèque.

« Le travailleur manuel, comme tous les hommes, a ses circuits habituels. Il va de son domicile à son travail, à son organisation politique ou syndicale, à ses loisirs. Que trouve-t-il dans le domaine de la lecture en dehors du lieu de travail ? L'habitation humaine tend à la concentration. Se loger est un des problèmes les plus difficiles de l'heure. Pour parer au plus pressé, on a trop délaissé l'équipement socio-culturel des grands ensembles. Déjà le quartier ouvrier d'autrefois ne disposait pas d'institution qui mette le livre en contact avec le lecteur. Il est de notre devoir de veiller à ce que dans les grands ensembles cela puisse se réaliser dorénavant. Nous devons donc pour commencer nous montrer attentifs aux réalisations existantes de l'organisation de la lecture sur le lieu d'habitation.

« Elles nous indiquent peut-être une voie à suivre. Nous nous devons d'étudier les réalisations d'éducation populaire qui ont été élaborées dans ce domaine par les Maisons de jeunes et de la culture, les groupes de loisirs, les institutions de base, qui utilisent la lecture comme moyen de culture. Ne devrait-il pas y avoir coordination entre les bibliothèques du lieu de travail et l'animation culturelle par la lecture sur le lieu d'habitation ? Nous devrions être les promoteurs d'échanges de livres, d'échanges de techniciens, d'échanges d'animateurs, d'échanges d'expositions. La civilisation technique supprime de plus en plus le cloisonnement. Le secteur culturel doit évoluer de la même manière, la bibliothèque ne doit plus être un rassemblement d'initiés; plus de cimetière de livres, mais des livres vivants mis à la disposition de tous, par tous les moyens. »

Car, devait faire remarquer M. Cacérès, il existe un public composé « de milliers de lecteurs qui lisent mal, mais qui sont peut-être prêts à lire mieux ». La meilleure preuve en est la vente, à plusieurs milliers d'exemplaires, de publications aux titres révélateurs et à illustration abondante dont le contenu tient compte des mythes actuels répandus notamment parmi la jeunesse et parmi une certaine clientèle féminine. Leur format pratique et leur prix modique en facilitent au maximum la diffusion.

D'autre part, « il est de mode aujourd'hui de parler, pour toutes les actions culturelles, des moyens audio-visuels. A côté de la civilisation habituelle où le livre a joué pendant des siècles un rôle essentiel, se crée aujourd'hui une civilisation de l'image.

« C'est à cette civilisation que nous devons réfléchir. Comment pouvons-nous l'intégrer ? D'aucune manière nous ne pouvons la refuser. Et ceux auxquels nous nous adressons ne sont-ils pas, par leur vie même, par les sollicitations constantes de notre monde moderne, plus formés ou déformés par cette civilisation de l'image que par toute autre ? Cinéma, radio, télévision sont cependant d'admirables moyens techniques de diffusion de la culture. Il n'est plus à démontrer qu'un livre, dont un film est tiré, se vend par la suite à des milliers et des milliers d'exemplaires. Non seulement les bibliothèques doivent utiliser ces moyens de culture, et elles le font déjà, mais elles doivent essayer de l'influencer. La liaison entre le livre et les émissions de télévision notamment et l'exploitation des émissions où il est parlé d'un livre ne sont encore qu'à leurs premières expériences. Les suggestions que nous aurions à proposer à la télévision, par exemple, seraient certainement bien accueillies. »

Mais une action culturelle ne peut être efficace sans une connaissance approfondie du public auquel on s'adresse. Or « la psychologie, la manière de vivre, la manière de voir, les préoccupations quotidiennes, les préoccupations fondamentales des travailleurs ne sont pas simples. Certes l'expérience de ce milieu est irremplaçable, mais à moins d'être soi-même un travailleur, cette connaissance s'avère longue et difficile.

« La sociologie et les sociologues sont pour nous des aides précieux auxquels nous devrions constamment faire appel... Ils devraient nous aider... à mieux connaître... les causes d'absentéisme à la lecture. Nous savons par une enquête récente que la fréquentation des bibliothèques sur le lieu de travail varie de 10 % de l'effectif de l'entreprise, chiffre faible, à 30 %, chiffre fort. Quelles sont les causes de cet état de choses ? Certes, nous savons que pendant les trois derniers millénaires, la chose écrite ne s'adressait en fait qu'à une petite minorité de l'humanité. Il n'y a même pas cent ans que l'école primaire est obligatoire en France. L'accession des masses à la culture est un fait nouveau. Raison de plus pour que, tous ensemble, nous essayions d'aider le plus grand nombre à participer aux joies culturelles. »

Il est certain que, de nos jours, il n'existe guère de secteurs, qu'ils soient commerciaux, industriels, culturels, qui ne fassent appel à l'enquête, aux sondages, aux statistiques, de manière à mieux délimiter les objectifs à atteindre et, par conséquent, à obtenir de meilleurs rendements. C'est la raison pour laquelle le premier rapport de synthèse qui fut présenté aux participants de ces journées fut consacré aux études statistiques qui purent être faites d'après les résultats de l'enquête dont nous avons parlé.

Sur les 704 entreprises qui ont répondu au questionnaire diffusé par la Commission de la République française pour l'éducation, la science et la culture, 136 ne possédaient pas de bibliothèques et sur les 568 réponses positives, 483 seulement étaient suffisamment complètes pour pouvoir être utilisées. Quels enseignements ont été dégagés de leur dépouillement?

L'addition des chiffres fournis par ces entreprises donnait les résultats suivants :
Effectifs ........................... I.24I.674 personnes
Nombre de lecteurs ................. 397.819
Nombre total de volumes ............ 2.106.295
Nombre de prêts ................... 5.94I.069
Nombre de bibliothèques annexes ..... 252 pour 85 établissements.
Nombre de bibliothèques d'enfants .... 240
Nombre de discothèques ............. 103

L'enquête demandait également d'indiquer les ouvrages les plus souvent demandés : romans, livres d'histoire, de voyage, documentaires. Pour toutes les bibliothèques, à l'exception d'une seule, les romans venaient en tête, « les autres genres permutant de façon telle qu'il est impossible d'assigner un rang à chacun d'eux ».

La plupart de ces bibliothèques sont de création relativement récente. Toutefois six d'entre elles existaient avant 1900, la première ayant été fondée en 1855. De 1900 à 1934, on enregistre six créations, après quoi il faut noter deux périodes particulièrement favorables :
- la première en 194I et 1942, sous l'influence de l'ordonnance créant en 194I les comités sociaux ;
- la seconde en 1945-1946, après la promulgation en 1943 de la loi créant les comités d'entreprise.

A partir de 1948, un net ralentissement se produit et l'on ne compte guère en moyenne qu'une douzaine de créations annuelles.

Quant aux effectifs des entreprises dotées de bibliothèques, ils se répartissent, suivant les régions administratives de la France, de la manière suivante :

D'autre part, 26 professions possèdent des entreprises ayant des bibliothèques :
Art ........................ 2
Alimentation ................ 22
Automobile ................. 8
Aviation .................... 9
Banques, finances ............ 16
Bâtiment ................... 20
Brosserie ................... 1
Caoutchouc ................. 3
Céramique .................. 2
Chimie ..................... 61
Électricité .................. 17
Électromécanique ..... 58
Filatures, textiles ............. 43
Gaz ...................... 1
Grands magasins..... 5
Marine .................... 17
Assurances................. 13
Mécanique ................. 4I
Métallurgie..... 107
Mines ..................... 16
Optique ................... 4
Livres, papier............... 17
Pétrole .................... 16
Cuirs ...................... 1
Verrerie ................... 1
Tabac ..................... I

Les chiffres fournis ont également permis aux enquêteurs de calculer pour chaque bibliothèque des coefficients traduisant en chiffres leur activité et leur efficacité et d'illustrer par des graphiques les résultats obtenus. Sans entrer dans le détail de ces recherches un peu ardues, nous relevons certaines constatations qui ont pu être faites au cours de cette étude. Si tout d'abord on examine le rapport entre le nombre de volumes possédés par la bibliothèque et l'effectif de l'entreprise (ce que les auteurs désignent sous le nom de coefficient de composition), on met en lumière un aspect financier important du problème. En effet, « si pour une entreprise de 100 personnes nous avons 100 volumes, chaque personne aura la possibilité de lire ces 100 volumes. Si une entreprise de 1 ooo personnes a à sa disposition une bibliothèque de 1 ooo volumes, chaque personne aura la possibilité de lire ces 1 ooo volumes. Si donc l'entreprise de 100 personnes veut avoir les mêmes possibilités que l'entreprise de 1 ooo personnes, il faudra faire une mise de fonds dix fois plus forte par unité d'effectif. Les entreprises à petits effectifs ont donc là un sérieux problème à résoudre. Or l'enquête a précisément montré qu'à de rares exceptions près, ce sont les entreprises à faible effectif qui ont les coefficients de composition les plus élevés ».

En divisant le nombre de prêts enregistrés dans chaque entreprise en une année par l'effectif de cette entreprise, a été obtenu un « coefficient d'efficacité ». Ainsi ont pu être dressés des tableaux sur lesquels on peut suivre l'efficacité des bibliothèques d'entreprise par région et par profession, par rapport aux effectifs des entreprises et suivant la qualification du responsable de la bibliothèque. Il nous paraît intéressant de reproduire les deux premiers de ces tableaux : 3

Dans la répartition faite par région, la Méditerranée qui a des pourcentages très importants ne compte que 6 900 personnes pour 12 entreprises. Or cette étude a précisément montré que plus les effectifs sont nombreux, moins la bibliothèque est efficace. Si l'on considère les résultats obtenus dans les entreprises ayant plus de 2 500 employés, on voit que 50 % d'entre elles environ prêtent moins de deux volumes par an et par employé.

La qualification du responsable joue évidemment un rôle capital dans le succès de la bibliothèque. Les statistiques ont prouvé que le bibliothécaire diplômé obtenait une plus grande efficacité. Mais les bibliothécaires diplômés n'existent que dans 6,45 % des entreprises, qui ne sont pas nécessairement des grandes entreprises, puisque « 6 entreprises de moins de 300 ouvriers et 3 entreprises de moins de 1 000 ouvriers ont des responsables qui sont des bibliothécaires diplômés ».

A l'austérité et à la sécheresse des chiffres, devait succéder la relation d'expériences de formation et d'animation de bibliothèques sur le lieu de travail. La parole fut de nouveau donnée à M. Cacérès qui proposa diverses solutions pour attirer les travailleurs au livre et à la bibliothèque : exposition, sortie touristique, concours de photographies organisé dans le cadre de la bibliothèque, livre « vivant », guide de lecture, club de lecture, cycle culturel constituant la synthèse des divers modes d'expression utilisés par les mouvements d'éducation populaire 4, etc.

Encore faut-il, pour mener à bien un tel programme, que certaines conditions matérielles soient réalisées, « tous les animateurs, note M. Cacérès, insistant sur l'importance des locaux. Le libre accès aux livres, les tables, l'éclairage, le lieu, l'accueil » doivent donner aux employés l'impression de se sentir chez eux. Telle est, par exemple, l'impression qu'éprouvent les ouvriers de la Compagnie des ateliers et forges de la Loire, Usine de l'Ondaine, comme le fait remarquer la bibliothécaire Mlle Davoine : « Le travailleur apprécie, après le bruit et la poussière de l'atelier, de trouver un endroit calme, propre, agréable à la vue. Il n'est pas rare d'entendre cette réflexion : « On est bien chez vous. »

Les deux bibliothèques de l'usine de l'Ondaine (secteur Firminy et secteur Unieux) jouissent en effet de locaux particulièrement attrayants. Elles sont dotées chaque année d'une subvention qui s'est élevée en 196I à 6 ooo NF pour la bibliothèque d'Unieux et s'adressent non seulement à toutes les catégories de travailleurs, ouvriers, employés, ingénieurs, mais à leurs familles, femmes et enfants. Le prêt cependant n'est pas gratuit, mais une faible cotisation est perçue qui varie suivant la catégorie du travailleur (I à 5 NF pour l'année) et donne droit à deux livres pour quinze jours ou trois semaines.

Les heures d'ouverture sont soigneusement adaptées aux horaires de travail des ouvriers et employés, tout en tenant compte des particularités de chaque usine. Ainsi la bibliothèque d'Unieux est ouverte tous les jours, sauf le samedi, de 13 à 14 heures et de 16 à 19 heures, tandis qu'à Saint-Chamond, la bibliothèque ouvre sans interruption de 13 h 30 à 19 heures, même le samedi.

Ces conditions très favorables, jointes au fait que les responsables de ces bibliothèques reçoivent une formation spécialisée, font de la bibliothèque un organisme vivant. En 1950 à l'usine d'Unieux, 600 lecteurs étaient inscrits et on enregistrait une sortie annuelle de 22 ooo livres. En 1960, le nombre de lecteurs s'élève à 800 et le nombre de prêts annuels à 30 ooo volumes. A l'usine de Firminy, les 940 lecteurs inscrits en 1960 ont emprunté 35 000 livres et, pour l'ensemble de l'usine de l'Ondaine, on compte près de 1 800 lecteurs sur un effectif de 6 500 personnes, et un prêt de 65 000 volumes 5.

Ces résultats ont pu être atteints grâce à la collaboration étroite existant entre la Commission de bibliothèque et la bibliothécaire. « La Commission de bibliothèque, nous dit Mlle Davoine, dérive du Comité d'établissement. Elle est composée d'un représentant de la direction, d'un ingénieur, maîtrise, employés, ouvriers (10 à 15 membres), chaque organisation syndicale désignant ses délégués. Pour l'usine d'Ondaine (Firminy et Unieux), on compte 6 C. G. T., 3 C. F. T. C., 1 C. G. C., 1 F. O. La Commission de bibliothèque se réunit plusieurs fois par an, discutant du budget, de la subvention à accorder, des aménagements extérieurs, de l'organisation interne et des nouveaux achats de livres au cours de l'année. Il faut souligner l'activité des membres, leur insistance pendant des années auprès des directions pour obtenir des locaux, des modernisations; les commissions sont justement fières des résultats obtenus à Saint-Chamond, Saint-Étienne et Firminy. »

Cette lutte des travailleurs pour conquérir le droit à la culture fut très vigoureusement mise en lumière par M. Delarue, secrétaire général de « Travail et culture », qui dénonça la mauvaise volonté mise par certaines directions d'entreprises à donner satisfaction aux désirs des travailleurs 6.

« Dans de nombreuses entreprises, la bibliothèque n'est qu'un meuble, installé dans la salle commune ouverte quelques heures par semaine pour un prêt ultra-rapide organisé après le repas pris à la cantine, avant l'heure de reprise du travail... Le camarade qui prête les livres, qui est la plupart du temps un bénévole, ne dispose que très rarement d'heures de délégation pour remplir cette tâche. Il doit lui-même prendre sur ses loisirs le temps qu'il consacrera au classement et à l'organisation du prêt... La bibliothèque disparaît dès qu'il est fatigué d'accomplir cette tâche. Il y a, bien sûr, des entreprises où les comités disposent de locaux, voire d'un personnel approprié. Cela suppose déjà de grosses entreprises ou des entreprises pour lesquelles il est plus difficile de ne pas appliquer la loi, telles les entreprises nationalisées ou semi-nationalisées. Mais là encore, ce qui est acquis ne le fut que par la lutte et n'est maintenu que par la lutte.

« Mais cette lutte même est l'école du militant culturel qui se forme, non pour lui, mais pour conquérir des moyens plus grands pour tous... En ce sens, dans la région parisienne, il existe des pionniers. J'ai déjà nommé Air France Nord, Air France Sud; il y a les SNECMA, Desfossés, Hispano-Suiza. Ceux-ci ont obtenu de grands locaux réservés à la seule bibliothèque; l'accès aux rayons est possible, car ces locaux sont vastes. Chez Hispano, c'est un véritable petit foyer avec des tables de lecture sur lesquelles sont disposées les revues. On s'est attaché à ouvrir un très bon rayon d'enfants et un rayon pour adolescents. On y mène avec vigueur la lutte pour le respect de l'enfant contre le mauvais illustré, contre les livres qui exaltent le racisme et le « superman ». La bibliothèque est un véritable lieu de détente. Proche de la cantine, elle est une sorte de petit salon populaire où l'on peut venir se détendre quelques minutes. Ainsi, certains comités ont mis tout leur cœur à rendre la bibliothèque accueillante et coquette, à faciliter l'accès du livre, à disposer de nombreux livres bien reliés et bien illustrés et pas uniformément soumis à cette livrée rebutante des reliures standard. A toutes les questions que le travailleur se pose, on doit pouvoir apporter une réponse. Les bons livres de vulgarisation y ont la place importante qu'ils méritent.

« On peut, en gros, classer les activités culturelles qui ont lieu dans la bibliothèque en deux catégories : celles qui ont pour but d'animer la bibliothèque et celles qui ont pour but de faire servir la bibliothèque à la pratique intelligente des autres activités de culture et de loisirs organisés par le comité ou de les prolonger.

« La conférence a peu de succès... Ne pouvant avoir lieu que tardivement, elle ne peut réunir que le célibataire, celui qui n'habite pas loin, le jeune qui ne craint pas de se coucher tard et de se lever tôt. Mieux vaut parler de causeries. Celles-ci ont lieu assez souvent et attirent de 20 à 50 personnes autour d'un débat sur une pièce de théâtre, une audition de disques, la présentation d'un écrivain.

« A l'occasion des étrennes, on organise dans un grand nombre d'usines des expositions-ventes de livres qui durent quelquefois plusieurs semaines. Ces ventes aujourd'hui s'étendent au disque. « Travail et culture », pour sa part, en organise de nombreuses, mais sur des thèmes précis : le livre d'enfants, avec causeries... de pédagogues, critiques, auteurs, et projection du film de la Ligue de l'enseignement : On tue à chaque page ; la littérature nord-africaine, sud-américaine, progressiste-allemande, ou dans le cadre des anniversaires, Hugo, Flaubert, George Sand, avec exposition à l'appui.

« Des expositions se font d'ailleurs sur des sujets variés : l'homme à la conquête de l'espace, Brecht, Vinci, la Commune, la contribution des peuples français, anglais, américain et russe à la civilisation et à la culture, Courbet, le paysan dans l'art, etc... Ces expositions se font sur des panneaux portatifs qui sont installés sur un matériel de support que les comités... ont réalisé chacun à leur manière. Les signatures de livres par leurs auteurs se font périodiquement. La forme que nous préférons est celle où le livre est diffusé longuement avant la venue de l'écrivain qui signe les livres déjà lus, en discutant avec ses lecteurs. La signature de disques est devenue également assez courante.

« Pour lier la bibliothèque aux autres activités, ont lieu de petites expositions de photos sur l'activité culturelle (pièces du T.N.P. ou de Roger Planchon, venue d'un virtuose, expositions marquantes à Paris); on organise également un voyage au pays de Maupassant, de Flaubert, de Rabelais, avec conférence...

« L'une des plus originales de ces activités est celle dont le Comité d'entreprise de la Caisse vieillesse de la Sécurité sociale a la paternité, dont nous élargissons l'audience et les moyens d'action à un grand nombre d'entreprises. En mai prochain, pour aider les travailleurs à choisir leur lieu de vacances, et l'ayant choisi, à le mieux connaître, des expositions... circulantes sur les grandes provinces de France, avec conférence,... vente de livres d'histoire et de géographie, de romans, de cartes, de guides, projection de vues fixes, distribution de prospectus, informations touristiques, sur lieux de séjour, camps populaires, voyages organisés. Le but est, par ces expositions et ces livres, de faire connaître aux travailleurs de Paris les paysans et les travailleurs des autres provinces...

« L'une des préoccupations majeures des bibliothèques d'entreprises est d'être démocratique dans leur gestion, démocratique dans leur contenu, mais aussi démocratique par leur animation. Le bibliothécaire n'est pas technicien, mais un animateur travaillant avec des militants, le comité cherche par tous les moyens à associer le lecteur à l'animation de la bibliothèque, non pas tant par des sondages de goût et d'opinion que par des réalisations collectives à entreprendre ou des responsabilités à prendre. C'est pourquoi certaines bibliothèques (Air France, Orly Sud) vont faire établir des fiches critiques par les lecteurs eux-mêmes, pensant que l'avis individuel d'un lecteur peut engager un autre à lire ce livre plus facilement qu'un avis plus extérieur.

« Profitant d'un thème d'actualité, la liste de tous les livres... que possède la bibliothèque sur ce thème est distribuée, sous forme de prospectus, aux travailleurs à la sortie de l'usine. Pour permettre au lecteur d'utiliser d'une façon plus rationnelle et avec méthode la bibliothèque et la discothèque d'entreprise, certains comités ont confié à « Travail et culture » le soin de rédiger à leur intention une revue culturelle qui est remise à chacun d'entre eux et dont les articles ont pour but d'éveiller la curiosité des lecteurs pour telle ou telle œuvre, pour tel ou tel écrivain, artiste ou compositeur. Cette revue a atteint un tirage de 35 000 exemplaires. Malgré les difficultés qu'ils connaissent, les comités d'entreprises peuvent être fiers du résultat obtenu. Mais ce résultat, ils ne le doivent qu'à eux seuls.

« Puisse l'Unesco, si elle a l'intention d'émettre des vœux, émettre celui-ci : que l'État fasse obligation du respect de la loi sur les comités d'entreprises et définisse un pourcentage minimum obligatoire pour toutes les entreprises des crédits gérés exclusivement par les comités, ainsi que le pourcentage qui devrait être obligatoirement affecté aux activités culturelles et éducatives. »

Les deux séances qui eurent lieu le matin des mardi 21 et mercredi 22 novembre furent plus spécialement consacrées aux services que nous avons appelés « d'extension » des bibliothèques sur le lieu de travail : prêt à des catégories particulières de lecteurs (adolescents, enfants, travailleurs étrangers), problèmes posés par l'adjonction d'une discothèque à la bibliothèque initiale.

C'est à M. Cantin, directeur du Centre d'observation éducative de la Garenne-Colombes qu'il appartenait de parler de la lecture chez les adolescents dans un exposé parfaitement documenté et plein de notations psychologiques d'une si grande justesse qu'il nous paraît utile d'en reproduire de larges fragments.

« Qu'entend-on par lecture chez les adolescents et que lisent-ils ? Tout d'abord, mentionnons l'isolement dans lequel se pratiquent leurs lectures. Un sujet sur deux a déclaré n'être conseillé par personne et un sur quatre est détourné de cette occupation par ses parents : « Tu auras le temps de lire plus tard. » Mais qui est donc leur conseiller? Pour 17,5 % d'entre eux, c'est le professeur ou l'instituteur, pour 12,5 % les parents (père et mère indifférenciés), pour 14,5 % la mère, pour 5,5 % le père et pour 13,5 % leurs camarades et amis.

« Au total, les parents ne conseilleraient les enfants que dans 32,5 % des cas, environ 1 fois sur 3. Ce pourcentage traduit l'incompétence, le manque d'intérêt, sinon l'opposition, manifestés par les parents.

« Il est à noter - mais je ne voudrais pas trop généraliser - que si nous avions un classement à établir au sujet de l'intérêt porté aux bibliothèques de prêt par les adolescents, nous aurions à citer en premier lieu celles des centres d'apprentissage, puis celles des écoles primaires, celles des lycées et collèges, celles des entreprises et enfin, les bibliothèques municipales.

« La difficulté, voyez-vous, c'est qu'il est impossible de généraliser. La lecture chez les adolescents est essentiellement fluctuante. Aucun critère n'est absolu...

« Milieu, quartier, professeur, tout cela influe et vous montre l'importance et la difficulté de votre travail de bibliothécaire, surtout que si vous, vous mettez à la disposition de vos lecteurs quelques milliers de livres, qu'ils soient d'aventures, de voyages, ou d'histoire, vous savez bien qu'à côté de vos livres, les jeunes ont à leur disposition 19 millions d'exemplaires d'illustrés par mois, sans compter les journaux dits pour adultes.

« De toutes les enquêtes dont j'ai pu lire les résultats, on arrive à la conclusion de MM. Fouilhé et Raillon : 3 % seulement de jeunes ne lisent jamais d'illustrés. Légère différence entre les apprentis et les lycéens. Si, pour les premiers, à 14 ans, 98 % d'entre eux lisent des illustrés, à 17 ans, ils ne sont plus que 68 %, alors que, pour les lycéens, on va de 92 % à II ans jusqu'à 29 % à 19 ans, avec une chute accentuée de 14 à 16 ans, époque à laquelle les sujets commencent à s'intéresser aux revues sportives et semi-pornographiques.

« Qu'ils soient de formats, de caractères, d'esprit très différents, les journaux d'enfants ont cependant un point commun : l'illustration (75 à 80 % en moyenne de la surface de ces journaux sont occupés par l'illustration). Dans un numéro de Mickey, sur 16 pages, 13 sont en images, 2 comportent un texte et 1 des jeux. Dans Tintin, sur 32 pages, 27 sont en images, 4 comportant un texte et 1 des jeux. Dans Cosmos, sur 68 pages, 68 sont en images. L'illustré introduit au foyer la présence d'un tiers et d'un tiers qui sera toujours du côté de l'enfant, jamais de celui des parents. En effet, les héros qu'ils mettent en scène, de par leurs fonctions de protecteurs et de justiciers, correspondent aux besoins d'ordre et de sécurité inhérents à la jeunesse. Ce pouvoir de façonner en quelque sorte une conscience d'enfant confère à l'illustré sa véritable grandeur, mais aussi sa terrible responsabilité. L'analyse des thèmes, des types de héros proposés, révèle une standardisation assez poussée des sujets et des personnages : le cow-boy redresseur de torts, c'est-à-dire l'homme en révolte contre la société, l'aventurier interplanétaire, le professeur (de physique bien entendu, et nucléaire si possible, mais sans rapport avec le professeur de physique du lycée), le gangster ou « dur ».

« Ces journaux se copient à ce point les uns les autres qu'un enfant peut aborder dans un journal qu'il ne connaît pas une histoire commencée depuis plusieurs épisodes, sans être effrayé, et sans avoir besoin de lire le résumé des aventures précédentes. Cet univers borné dans le temps et dans l'espace, limité à quelques intrigues selon les canons bien définis, explique le fait que l'enfant s'y retrouve aussi facilement...

« Quand on parle « illustrés », on pense surtout « enfants », alors que les adolescents sont également acheteurs et lecteurs de cette presse en images...

« Ne faut-il pas ajouter d'ailleurs - à l'instar de M. Soriano dans la revue Enfants - l'ambiguïté fondamentale qui, à notre époque, entoure la notion d'adulte. Étant donné que dans l'ensemble un effort de culture, après l'âge de 14 ans, reste fortuit, la règle d'or dans la plupart des journaux d'information reste de s'adapter - aussi bien dans la présentation que dans le style et les sujets abordés - à un public adulte, dont l'âge mental ne dépassera pas 14 ans 1

« La réciproque semble vraie puisque le sous-titre de Top-Réalités-Jeunesse indique : « l'hebdomadaire des enfants qui ne sont plus des enfants » ! Toujours est-il que Paris-Match est lu par 70 % des adolescents, et Ici-Paris par 30 %.

« Cinq grands types de périodiques retiennent l'attention des jeunes : l'actualité à sensation, dont la consommation incompréhensible et indépendante de l'âge la montre comme la littérature essentielle du milieu familial - la littérature condensée - les revues techniques et scientifiques - les revues sportives - enfin, les revues cinématographiques et les revues semi-pornographiques, lues de 14 à 16 ans, puis marquant un temps d'arrêt, pour reprendre vers 19 ans.

« Il nous faut maintenant aborder les livres proprement dits... : Quels livres lisent les adolescents ? N'oublions pas que le livre est paré d'un prestige quasi sacré et que, pour beaucoup, ce qui est écrit est vrai. Là encore, pas de réponse d'ordre général, car les goûts des adolescents sont tout à fait différents de ceux qu'ils devraient avoir ou de ceux qu'on leur prête. Dans les classes terminales des lycées et collèges, des rencontres comme celles de Sartre et Tintin ne sont pas exceptionnelles !

« Le jeune lecteur se détourne de son enfance, nous dit encore M. Soriano, et la renie, il repousse les collections enfantines, et aspire à des lectures adultes, mais en même temps, les lacunes de ses connaissances et les intérêts sporadiques qui caractérisent la crise de maturation qu'il traverse ne lui permettent pas encore de s'intéresser à tous les livres pour adultes. Timide et brutal, cynique et plein de pudeur, partagé entre le désir de se singulariser et le besoin de s'intégrer, l'adolescent constitue un public dont les réactions sont apparemment imprévisibles, ou en tout cas fortement différenciées.

« Souvenons-nous également que nous nous trompons souvent quand nous croyons que les jeunes ont des idées. Ils ont, avant tout, des désirs.

« N'ai-je pas lu, il y a quelques jours, l'annonce suivante, faite pour un excellent livre d'ailleurs : « Il ne s'agit pas d'un ouvrage pour enfants, mais d'un livre pour adultes. A partir de 15 ans, les jeunes le liront avec intérêt et profit. » Vous voyez bien qu'il est difficile d'élever une barrière entre les livres pour adolescents et les livres pour adultes!...

« On se plaint de ce que les jeunes n'aiment plus lire, mais à qui la faute ? Je l'attribue aux méthodes scolaires qui ont exagéré l'enseignement par le concret et l'image, tout en donnant à l'enfant une attitude passive.

« Si le point de départ est bon, car l'enfant, tourné vers le concret pense par images et n'accède pas encore à l'abstrait, puisqu'il en est au stade sensoriel, cela paraît discutable quand il s'agit d'adolescents de 16 ou 17 ans. Cette méthode, défendable au niveau de l'école primaire, semble hors de saison dans le secondaire. En effet, un support concret et matériel de la pensée, trop longtemps prolongé, obnubile la notion d'abstrait, et en empêche l'acquisition et le développement normaux. Quand l'enfant a abordé les ouvrages sérieux sur les bancs de l'école primaire, l'idée s'est fortifiée en lui que la page de livre est une somme de dessins ou de photographies entourés d'un peu de texte. L'image est première, le texte n'en est que le commentaire. Ce qu'il a appris est d'abord entré dans son esprit par le visuel. Comment voudrait-on qu'il ne fût pas profondément dépaysé lorsqu'il aborde un texte qui existe uniquement par lui-même et sans référence à un dessin, à moins que l'on se mette à dessiner Le Cid, Le Sermon sur la mort, ou le Contrat social?

« On arrive aux mêmes résultats dans les sciences physiques ou dans les comptes rendus de travaux pratiques. Dans une classe de seconde, on trouve ceci : « On a pris une liqueur bleue, on y a versé une liqueur jaune, et c'est devenu rouge. » Les produits chimiques sont vus par leurs seules qualités sensibles, sans que les élèves puissent s'élever au-dessus d'elles.

« Y a-t-il lieu de s'étonner du caractère catastrophique de ces résultats, surtout qu'un danger supplémentaire vient s'y ajouter : celui de l'attitude passive. Il est assez curieux, d'ailleurs, que des méthodes se voulant actives recourent à des procédés dont la condition sine qua non exige d'être passif en face d'eux. Aujourd'hui, la physionomie d'une classe à laquelle on va faire entendre un disque est celle de la sortie en récréation et son attitude, celle de la relaxation...

« Au bout du compte, à force de se convaincre que « savoir par cœur n'est pas savoir », et qu'« apprendre n'est pas comprendre », on en arrive à la découverte que comprendre sans apprendre n'est pas savoir. »

Ce n'est pas malgré tout sur une conclusion pessimiste que M. Cantin devait laisser son auditoire. Après avoir dénoncé les carences familiales et sociales, il ajouta : « La solution de ce problème grave... ne viendra pas d'en haut, ni autoritairement, mais de la base, non pas imposée, mais librement consentie et recherchée quand le public enfin aura la nausée. »

L'aspect pratique de la lecture des jeunes et des enfants fut évoqué par Mlle Boisseaud, bibliothécaire d'Hispano-Suiza à Bois-Colombes, puis par Mlle Gruny qui dressa un tableau de la bibliothèque idéale.

A Hispano-Suiza, où sont employés 4.500 travailleurs, la bibliothèque existe depuis 15 ans et compte 7.500 livres dont 526 livres pour enfants. Chaque emprunteur peut emporter deux livres pour adultes et un livre par enfant au foyer. Une centaine de livres constituent le rayon réservé aux adolescents qui d'ailleurs ne le fréquentent guère, car ils ressentent comme une brimade le fait de n'avoir pas accès aux autres ouvrages. D'autre part le choix des livres pour enfants, étant fait par les parents, ne peut donner entière satisfaction, ceux-ci accordant une préférence aux livres qu'ils ont autrefois aimés. Pour remédier à cet inconvénient il serait utile de distribuer un catalogue des livres possédés par la bibliothèque et d'ailleurs, avant la période des vacances, des listes d'ouvrages pour jeunes sont remis aux lecteurs.

Car le choix des livres, s'il est important quand il s'agit de lecteurs adultes, est à plus forte raison primordial lorsqu'on crée une bibliothèque pour enfants et Mlle Gruny insista tout particulièrement sur ce point. Le livre doit à la fois plaire aux enfants et plaire aux éducateurs : « Le choix doit plaire aux enfants, certes, car à quoi servirait une collection que bouderaient les lecteurs ? ...

« Mais ce choix doit aussi respecter les exigences de leur éducation, car cette éducation, on en comprend de plus en plus nettement l'importance. On sait que les quelques années d'enfance sont décisives dans la vie d'un être humain. Cette notion - dont certains psychologues du passé avaient l'intuition - est maintenant partout répandue : médecins-psychiatres, psychologues, sociologues, juges, s'en font les porte-parole avertis, et tous ceux, comme les travailleurs sociaux, que leurs fonctions appellent à assister les hommes dans leurs misères, en constatent la justesse.

« Or, si l'on trouve sans peine des œuvres qui plaisent aux enfants, il en est peu qui, en même temps, présentent toutes les qualités souhaitées par un éducateur soucieux : d'abord, des qualités de fond qui enrichissent l'expérience des enfants, contribuent à les ouvrir à la vie morale, les aident dans la difficile connaissance de soi-même, les aident à connaître le monde. L'éducateur demande aussi des qualités de forme : une construction logique et une écriture au moins correcte, propre à leur apprendre leur langue. Il demande encore une belle présentation qui, de même qu'un style élégant, développera leur sens esthétique.

« Malheureusement, la littérature pour enfants - malgré des progrès certains - est, dans l'ensemble, médiocre, comparée à celle publiée pour les adultes. On voit des œuvres alertes, mais propres à donner des idées fausses sur la vie et le monde, comme les nombreux « Delly » pour petites filles, comme encore les douzaines de romans du « capitaine Johns », partout répandus, pour raconter les invraisemblables aventures de « Biggles »...

« A côté d'histoires d'une aussi parfaite ineptie, on voit des œuvres de propagande plus ou moins camouflée, parfois agressives - inconsciemment ou non - à l'égard d'une classe sociale, d'une tendance religieuse ou politique, d'une race, d'une nationalité. D'autres abondent d'informations erronées.

« Le style est souvent banal, voire vulgaire, fourmillant de locutions ampoulées. Quant à la présentation, vous pouvez constater combien l'heureuse tendance à rendre les livres beaucoup plus gais qu'avant la guerre, par l'utilisation des couleurs, peut tourner à la vulgarité. Dans une bibliothèque pour enfants bien comprise, toutes ces considérations... ont été pesées, et, s'il n'a pas été possible de rassembler seulement des chefs-d'œuvre, - il en existe trop peu - du moins n'y est-on pas descendu au-dessous d'un certain niveau. Donc, une bibliothèque pour enfants est, avant tout, une collection de livres variés, choisis avec soin. »

Ce choix des livres est également un grave problème pour Mme Grosdidier, bibliothécaire à Hagondange 7, et d'une manière plus générale pour toutes les bibliothèques d'entreprises de la région de l'Est de la France qui recrutent une importante main-d'œuvre étrangère.

Pour prendre le seul exemple de la bibliothèque d'Hagondange, sur un effectif de 7.000 ouvriers, on compte :
4.820 Français, soit : 69 %
I.200 Italiens, soit : 17 %
350 Algériens, soit : 5 %
630 « autres nationalités » : 9 %

Quelles sont ces autres nationalités ? Le nombre total en est de 24 : Polonais, Espagnols, Allemands et Sarrois, Yougoslaves, Hongrois, Belges, Luxembourgeois, Suisses, Portugais, Indochinois, Marocains, Tunisiens, Autrichiens, Russes, Tchécoslovaques, Roumains, Bulgares, Lithuaniens, Grecs, Thaïlandais, Esthoniens, Américains. A Longwy-Mont-Saint-Martin et à Thionville sont en outre employés des Ukrainiens, des Sanmarinois, des Hollandais, des Lettons, des Lithuaniens, etc...

Ainsi se trouvent arbitrairement groupés des gens exclus volontairement ou involontairement de leur patrie et à qui leur déracinement peut inspirer deux attitudes opposées : ou bien ils cherchent à s'assimiler, tels les Italiens, ou bien au contraire à sauvegarder leurs traditions, leur religion, leur folklore et surtout leur langue, tels les Polonais. D'autre part leur niveau intellectuel est très différent. Les Hongrois, arrivés en France en 1956, font généralement preuve de très grandes aptitudes. Il en est de même de la qualification professionnelle. Pratiquement nulle chez les Italiens, elle est particulièrement élevée chez les Espagnols. Comment la bibliothèque pourra-t-elle servir efficacement un public si composite ?

A ces difficultés s'ajoute le problème particulier à ces régions de l'Est : le bilinguisme de la population autochtone. Le fonds de la bibliothèque d'entreprise devra donc comprendre d'abord des livres en langue française et en langue allemande. Quant aux autres langues, dans quelle mesure doivent-elles être représentées. Si l'on s'en tient aux nationalités dominantes, fait remarquer Mme Grosdidier, on se heurte à un autre écueil : il y a quelque temps, les ouvriers algériens étaient les plus nombreux; actuellement ce sont les Italiens, demain, ce seront peut-être les Espagnols, car cette population est extrêmement mouvante, ce qui ne simplifie pas les choses.

La solution la meilleure serait évidemment d'apprendre le français aux étrangers qui toutefois le désirent. C'est ainsi qu'à Hagondange, le Service social s'est efforcé de regrouper les ouvriers espagnols et de mettre sur pied un cours de langue française à leur intention.

En attendant, il est bien certain que le nombre des travailleurs étrangers qui fréquentent la bibliothèque d'entreprise est faible...

« Viennent à la bibliothèque d'Hagondange :
Italiens........ 28 sur 1.200 soit 2 % environ
Algériens ...... 2 - 350 - 0,57 % -
Allemands..... 13 - 80 - 16 % -
Polonais....... 8 - 252 - 3 % -
Hongrois...... 3 - 20 - 15 % -
Yougoslaves.... 2 - 49 - 4 % -
Russes........ 3 - 32 - 9 % -
Espagnols...... 2 - 120 - I,67 % -

« A Mont-Saint-Martin :
Belges 8........ 12 sur 1.800 soit 0,67 % environ
Algériens ...... 5 - 650 - 0,70 % -
Italiens........ 40 - 600 - 7 % -
Polonais... 16 - 74 - 21 % -
Portugais....... 1 - 30 - 3 % -

« A Thionville :
Italiens......... 10 sur 490 soit 2 % environ
Algériens....... 23 - 200 - II % -
Polonais........ 35 - 195 - 18 % -
Allemands..... 24 - 34 - 70 % -
Russes......... 5 - 32 - 15 % -
Luxembourgeois. 5 - 22 - -
Hongrois....... 5 - 13 - 38 % -
Sarrois......... 3 - 6 - -

En fait, ajoute la bibliothécaire, il n'y a pas à s'effrayer de ces chiffres car la bibliothèque n'est fréquentée que par une élite. Et nombreuses sont les anecdotes qui peuvent être citées pour confirmer ce propos. Tel cet Algérien qui savait à peine parler et ne savait pas lire le français et dont le rêve était d'être garde-barrière. « Trois ans de travail et de persévérance pour lui et pour ses professeurs bénévoles » lui ont permis d'obtenir le certificat d'études indispensable. Ou bien encore ce technicien hongrois, arrivé en 1956 qui, s'intéressant aux sciences physiques, à la philosophie, à l'art et à l'histoire, a lu 140 livres en quatre ans et dont le fils, ne sachant pas le français à son entrée en France, « a passé brillamment son baccalauréat puis réussit quatre concours d'entrée aux grandes écoles sur cinq, tout en empruntant à la bibliothèque 106 ouvrages en deux ans ».

Les statistiques dont il a été question au début de ce compte rendu ont fait apparaître que, sur 252 bibliothèques d'entreprise, 103 possédaient une discothèque. Ces chiffres tendraient à prouver, s'il en était besoin, le rôle grandissant du disque dans la formation culturelle. Or si les achats de livres sont l'une des tâches délicates du bibliothécaire, les achats de disques ne sont pas moins ardus. Mme Igot, chargée du Service de documentation audio-visuelle de l'Institut pédagogique national, insista sur les difficultés que présentait l'élaboration d'une discothèque de base. Musique classique et musique contemporaine doivent y trouver place aussi bien que les disques de variétés; encore faut-il, « dans ce domaine fluctuant, ne retenir que les œuvres solides de valeur sûre ». Quant à la discothèque pour enfants, elle doit faire l'objet d'autant de soin que la bibliothèque pour enfants.

La discothèque de la Radiotechnique à Suresnes a maintenant quatre ans d'existence et elle possède 2.914 disques. La bibliothécaire, Mme Juge, fit part de l'expérience qu'elle y avait acquise. Les disques sont tout d'abord enregistrés sur des livres d'entrée, avec un livre d'entrée par format, c'est-à-dire cinq registres :
I pour les disques 17 cm.
1 - - 25 cm mono.
1 - - 25 cm stéréo.
I - - 30 cm mono.
1 - - 30 cm stéréo.

Les disques sont ensuite équipés pour le prêt : au verso, est inscrite la cote complète, puis un coin est fixé sur la pochette pour retenir la fiche de prêt sur laquelle figure la cote, le nom du compositeur, le titre du disque et le genre. Ces fiches de prêt, ainsi que les fiches d'emprunteurs, sont de couleur différente de celles de la bibliothèque, ce qui évite toute confusion. La protection des disques est assurée par des pochettes intérieure et extérieure en matière plastique. Trois fichiers sont à la disposition des emprunteurs : un fichier alphabétique par genre (chant, classique, danse, diction, enfants, folklore, jazz, etc...), un fichier alphabétique des interprètes, un fichier des titres.

Quelle est la composition de la discothèque? Les 2.914 disques se répartissent ainsi : I.233 disques de musique classique soit 43 %
462 - danse - 16 %
318 - folklore - II %
293 - chant - 9,5 %
207 - jazz - 8 %
142 - diction - 45 %
135 - pour enfants - 4,5 %
58 - ambiance - 2 %
et 66 disques stéréo, pour la plupart de musique classique.

Le nombre des prêts s'est élevé, pour l'année 1960, à 12.846 disques, avec les pourcentages suivants :
53 % musique classique;
17 % musique folklorique;
9 % disques pour enfants;
6 % disques de danse;
6 % disques de jazz;
4 % disques de chant;
3 % disques de diction.

Quant aux musiciens les plus demandés, la liste semble devoir en être établie comme suit :
Beethoven avec 65 disques I.088 prêts
Bach - 78 - 826 -
Mozart - 59 - 698 -
Chopin - 30 - 387 -
Tchaïkovsky - 26 - 38I -
Liszt - 21 - 32I -
Vivaldi - 12 - 168 -

Le prêt est soumis à une redevance de 30 à 50 francs selon le format du disque emprunté. Quant à l'usure des disques, elle n'est pas aussi rapide qu'on pourrait le craindre. « Un bon disque peut être prêté jusqu'à 50 fois et être non seulement audible mais en parfait état. En gros, en quatre ans, ont été éliminés une trentaine de disques. Et les emprunteurs sont en général très soigneux. »

Mme Juge, commentant les résultats obtenus, pouvait exprimer sa satisfaction de voir grandir le nombre des emprunteurs difficiles.

Les rapports dont nous venons de donner des extraits ou des résumés ont bien mis en lumière la tâche souvent difficile et complexe à laquelle ont à faire face les responsables des bibliothèques sur les lieux de travail. Se heurtant à des difficultés matérielles (manque de crédits, manque d'informations bibliographiques parfois), ils sont non seulement amenés à guider les adultes mal préparés à la lecture dans le domaine des livres mais encore à jouer le rôle de bibliothécaires pour enfants, de discothécaires et de moniteurs d'éducation populaire et cela sans avoir la plupart du temps reçu une formation polyvalente.

C'est pourquoi un certain nombre d'organismes se sont constitués pour leur venir en aide et rompre en quelque sorte l'isolement dans lequel ces bibliothécaires travaillaient. L'activité de deux de ces organismes s'étend à l'ensemble de a France : il s'agit du Rond-point des lecteurs 9 et d'Inter-livres 10. Sur le plan régional, il existe dans la région lyonnaise l'Office central des bibliothèques que Mme Courbier allait présenter aux participants des journées d'étude.

Mais M. Julien Cain dans son allocution d'ouverture avait exprimé l'idée que la bibliothèque sur le lieu de travail n'était peut-être pas la meilleure ni même l'unique solution pour gagner au livre de nouveaux lecteurs : « L'avenir demeure pour moi... dans le développement des bibliothèques publiques, service public ouvert à tous les citoyens, quelle que soit leur profession, et je demeure persuadé que des succursales de prêt et des bibliobus urbains dans les villes, des dépôts de livres et des bibliobus ruraux dans les campagnes, travaillant les uns et les autres en liaison étroite avec les bibliothèques d'entreprise, permettront de mettre le livre à la disposition de tous. »

Mme Guillien, bibliothécaire de la Bibliothèque municipale de Villeurbanne, qui créa en 1955 un Service de bibliothèque pour les usines de Villeurbanne, M. Fillet, bibliothécaire de la Bibliothèque municipale de Tours et directeur de la Bibliothèque centrale de prêt d'Indre-et-Loire et M. Vaillant qui lança le premier bibliobus urbain à Grenoble en 1956, montrèrent dans leurs interventions que les bibliothèques publiques françaises s'étaient déjà engagées dans cette voie.

En 1946, l'Office central des bibliothèques se constitua à Lyon, en association déclarée et s'attacha à mettre sur pied un Service de prêt collectif. Actuellement ce Service possède 15.000 livres et compte 84 collectivités abonnées. Car si les entreprises représentent une bonne partie de la clientèle de l'O.C.B., son activité déborde très largement ce cadre : 6I entreprises et 23 collectivités diverses (maisons sociales, écoles de service social, mairie, prisons, etc...), bénéficient en effet de ses services.

Mme Courbier en explique ainsi le fonctionnement : « Les livres sont échangés par les entreprises tous les matins de 9 heures à midi. Les rayons sont accessibles aux bibliothécaires. Celles-ci sont recrutées différemment selon les cas : assistantes sociales, employées, secrétaires... Le choix des livres peut se faire de deux façons : en rayons, par la bibliothécaire d'entreprise qui constitue elle-même ses séries, selon le goût de ses lecteurs, ou sur catalogue, édité par l'O.C.B., que chaque entreprise possède et peut faire circuler parmi ses lecteurs... Par ailleurs, pour les achats personnels de la bibliothèque d'entreprise, l'O.C.B. rédige tous les trimestres un court bulletin des meilleures nouveautés parues, envoyé gracieusement à toutes les entreprises qui en font la demande. L'O.C.B. loue ses livres, par séries de 30, jusqu'à concurrence de 5 séries. Les séries sont louées à l'année mais peuvent être échangées, en partie ou en totalité, tous les mois. »

Cet organisme est en outre habilité par le ministère de la Santé à organiser des stages pour les élèves assistantes sociales et apporte, dans toute la mesure du possible, une aide technique aux bibliothécaires d'usine (reclassement des livres, renseignements bibliographiques notamment).

Mme Guillien a voulu également apporter à Villeurbanne une solution locale au problème de la lecture dans les usines et elle a dressé un bilan de quinze années d'efforts et de ténacité :

« Je vous demande de me suivre un instant à travers cette grande région lyonnaise où Villeurbanne occupe à la fois la place d'une importante commune suburbaine et celle d'une grosse agglomération ouvrière indépendante.

« D'une part, la grande ville voisine est là pour fournir constamment un terme de comparaison, parfois pour susciter l'envie. Et, puisqu'il s'agit de lecture, permettez-moi de souligner l'importance des bibliothèques officielles que Lyon offre à ses habitants :
- Bibliothèque municipale avec ses 700.000 volumes,
- Service municipal de lecture publique,
- Bibliobus départemental du Rhône et de l'Ain.

« Tout ceci, je le rappelle, soutenu, doté financièrement et en livres par la Direction des bibliothèques, par la municipalité et le département.

« Passons, maintenant, à Villeurbanne, et voyons ce que la municipalité a pu réaliser. Ici, joue ce particularisme auquel je faisais allusion tout à l'heure :

« Les habitants, au sens juridique du mot, sont un peu plus de ioo.ooo. Ils se composent de commerçants, d'artisans, d'enseignants, d'employés, de travailleurs groupés dans des quartiers modernes, souvent plaisants... Mais sur ce quadrillage, il faut en appliquer un second constitué par un éparpillement d'ateliers et d'usines dont l'aspect sévère contraste avec celui des quartiers précédents. Les ouvriers qui travaillent là forment une masse difficile à évaluer (plus de 25.000). Ils viennent parfois de lieux très éloignés. C'est une véritable migration qui parcourt la cité aux heures dites « de pointe », foule pressée de regagner son domicile, souvent au prix de longs trajets en autobus ou en cars.

« Dans de telles conditions, les moyens de culture par le livre ne pouvaient être uniformes pour l'ensemble de la commune. Pour les 100.000 habitants résidant sur son territoire, la Bibliothèque municipale fut amenée à créer, successivement :
- une salle de lecture sur place,
- un service de lecture publique réservé aux adultes,
- un « Cercle des jeunes » pour les grands adolescents,
- une bibliothèque des jeunes, pour les moins de 16 ans,
services vivants, modernes, très fréquentés, qui distribuent annuellement 185.000 volumes.

« Mais il fallait joindre ces émigrants quotidiens pour qui le loisir n'est qu'un mot et la lecture le fruit défendu, car ils n'avaient pas la possibilité de venir jusqu'à la bibliothèque.

« C'est pour eux que fut créé, vers 1955, ce service de Bibliothèque pour les usines de Villeurbanne (B.U.V.)... Il fut lancé grâce à une dotation initiale de la Direction des bibliothèques de France. Un premier lot, de l'ordre de 750 volumes, romans et documentaires permit le démarrage.

« Le fonds étant rassemblé, comment allait-on joindre ceux pour qui il avait été constitué ? Il fut décidé que des convocations individuelles seraient adressées aux 250 plus grosses entreprises de Villeurbanne. Mais qui fallait-il convoquer ? Représentants des travailleurs ? ou représentants des directeurs ? Et dans le cas des petites usines qui n'ont pas de comité d'entreprise ? Pour ces dernières, la formule « un délégué responsable choisi par ses camarades » fut adoptée, et tous étant également intéressés à la création du nouveau service, les uns et les autres furent également invités à participer à une réunion d'information.

« Sur 250 convocations, 50 à peine furent entendues. C'était ma première déception.

« Pourtant les 50 entreprises représentées là ayant accepté à l'unanimité de collaborer à son fonctionnement, le nouveau service fut créé. Un local, hélas modeste (faute de place) mais indépendant de la bibliothèque municipale, avait été pourvu de rayonnages et d'un ensemble de mobilier de façon à le rendre le plus accueillant possible. Là sont rassemblés en totalité les ouvrages affectés aux B.U.V. Chaque mercredi, le service est ouvert aux délégués du personnel ouvrier de chaque entreprise qui ont libre accès aux rayons, bien entendu! Ils emportent ainsi, par caisses de 30 volumes, les ouvrages que leurs camarades désirent lire.

« Je précise bien que ces caisses ne sont qu'un moyen de transport, un contenant, et que ce sont les délégués qui les remplissent eux-mêmes. La liberté est la règle. Mais les livres doivent être fréquemment échangés, aussi rapidement que les lecteurs le désirent et, au minimum, tous les 4 mois. Pour atténuer l'inconvénient majeur de cette organisation, à savoir l'absence de contact direct entre la bibliothécaire et le lecteur, j'ai multiplié les précautions. Je demande à chaque délégué de comité d'entreprise, à chaque assistante sociale, à chaque représentant du personnel, de ne pas venir seul, d'amener avec lui des camarades de travail, de l'usine bien entendu, des ouvriers, des employés et, si possible, chaque fois différents. Ils viennent ainsi par petits groupes de 2 ou de 3 qui se renouvellent. Je provoque, ensuite, les demandes individuelles de livres...

« Je demande encore que chacun m'indique les titres des ouvrages qu'il désirerait trouver à la bibliothèque et qui ne figurent pas au catalogue des B.U.V. Si la demande paraît judicieuse, si cette règle de la qualité de l'œuvre qui a été posée au départ n'en souffre pas, le livre acheté est mis en rayon très rapidement. Dans le cas contraire, je justifie ma réticence et le dialogue s'établit entre le demandeur et la bibliothécaire...

« Ce que nous avons voulu, à Villeurbanne, c'est favoriser la promotion humaine, l'épanouissement de la personnalité et plus particulièrement de la personnalité de chaque travailleur. Là, me semble-t-il, il peut y avoir véritable conquête. A chacun de choisir ce qu'il désire et si, pour satisfaire ce choix, le service des B.U.V. manque de certains ouvrages, le délégué responsable a toujours la possibilité de franchir le seuil du Service de lecture publique où il trouve, parmi les 80.000 volumes de la Bibliothèque municipale la possibilité d'emprunter, à titre personnel cette fois, le livre qui lui a été demandé.

« Voilà le système, tel qu'il fut mis en place et voilà l'esprit dans lequel il fonctionne.

« Il s'agit maintenant de dresser ce bilan que je vous ai annoncé du succès et de l'échec. Nous étions partis de 750 volumes. Le service des B.U.V. en compte aujourd'hui environ 4.500 et le nombre des prêts individuels consentis au cours de l'année 1960 s'est élevé à II.292.

« L'échec, pour le mesurer, il faut revenir aux chiffres. Il y a, à Villeurbanne, environ 320 entreprises employant de 10 à I.500 ou 2.000 personnes. Sur ces 320 entreprises, 250 avaient été contactées et je vous ai dit que 50 seulement avaient répondu à l'appel. Mais c'est encore bien plus grave que cela! A l'heure actuelle, 22 entreprises seulement ont adhéré au service de la Bibliothèque municipale. Ces 22 entreprises groupent, environ 10.512 ouvriers contre 26.702 qui travaillent dans les 320 usines. Je n'ai donc pas touché la moitié des travailleurs.

« Quant au nombre de lecteurs, dans l'impossibilité où je me trouve de donner des chiffres précis, je préfère me taire! Mais j'ai bien peur d'être très au-dessous de ces 20 % dont on parlait avant-hier.

« Quels remèdes envisager ? Je pense que l'échec tient à des causes diverses, les unes sont dues au lecteur, les autres à l'organisation. Sans doute, le monde ouvrier n'est-il pas encore suffisamment accessible à la lecture. Pourtant lorsqu'il lit, il lit bien, je dirais même beaucoup mieux que certains autres lecteurs. Alors, peut-être, faut-il incriminer le manque de loisirs, la fatigue, le manque d'habitude. Je suis persuadée que nous sommes encore au début d'une évolution sociale. Que cette habitude viendra peu à peu du seul fait de l'éducation des jeunes.

« Je vous ai dit qu'à la Bibliothèque municipale de Villeurbanne, il y a aussi un « Cercle des jeunes » à l'intention des grands adolescents. Je ne puis, faute de temps, parler comme je l'aurais voulu, de cette section qui intéresse en particulier les jeunes ouvriers de 15 à 18 ans. Qu'il me soit pourtant permis, au passage, de dire que cette bibliothèque-là donne de grandes satisfactions. Elle fonctionne notamment en liaison avec les Maisons de jeunes, dont les délégués viennent, eux aussi, chercher des livres à la Bibliothèque municipale de Villeurbanne.

« Un autre remède exigerait qu'un certain travail d'information pût être fait auprès du patronat. Je pense que, trop souvent encore, les directeurs, les ingénieurs, ne voient pas l'importance essentielle de la lecture à l'usine. Il faudrait arriver à les joindre et c'est très difficile. Il faudrait ensuite les convaincre afin que de plus grandes facilités puissent être accordées, notamment dans l'aménagement des heures de travail, pour que la bibliothèque trouve sa place. Enfin et surtout, il faudrait que chaque usine ait sa bibliothèque et, en disant cela, c'est, d'abord au local que je pense, à l'organisation, à une bibliothécaire responsable.

« Voilà d'abord le point sur lequel devraient porter les efforts des comités. Car, je ne crois pas avoir décrit devant vous une véritable organisation interentreprise. Pourquoi? Ce terme supposerait que chaque usine ait, d'abord, son organisation propre, sa bibliothèque aménagée confortablement, apte à recevoir des dépôts de livres. Alors, dans un système beaucoup plus efficace, la Bibliothèque municipale de Villeurbanne apporterait à chacune le lot des livres récents, des nouveautés ou la documentation qui, sans cesse renouvelée, éviterait le poids mort des ouvrages démodés. »

S'il est difficile d'atteindre les travailleurs dans les grandes villes où cependant la concentration devrait favoriser l'action culturelle, que dire de la population rurale si malencontreusement isolée ? C'est à rompre cet isolement que se sont consacrés, depuis 1945, les bibliobus ruraux, ainsi que le démontre M. Fillet. Ils ont précisément pour mission d'apporter aux travailleurs agricoles, non seulement des ouvrages de distraction, mais surtout la documentation destinée à répondre à leurs besoins d'information qui ne peuvent généralement être satisfaits sur place.

Le bibliobus urbain a un tout autre objectif. Dans le rapport que M. Vaillant, conservateur en chef à la Bibliothèque municipale de Grenoble, consacra à cette moderne réalisation, il est bien précisé que son but est de « compléter les services déjà rendus à la population d'une grande ville par des bibliothèques importantes déjà établies. Le lecteur a ici d'autres sources d'information et de distraction. Il ne s'agit pas tant de lui fournir la documentation qu'il peut, s'il en a besoin, aller consulter de loin en loin à la bibliothèque, que de l'attirer à la lecture au détriment d'autres sources de distraction moins enrichissantes, telles que le cinéma, la télévision et la radio. Il faut, pour cela, éveiller son attention par une voiture qui attire les regards par sa décoration et surtout par un grand choix de livres qu'il puisse choisir lui-même comme dans une bibliothèque. »

Plusieurs articles ayant été consacrés dans ce Bulletin au fonctionnement des bibliobus urbains actuellement en service à Grenoble, Saint-Brieuc, et Toulouse et des bibliobus scolaires de Tours et de Boulogne-sur-Mer, nous nous contenterons sur ce point d'y renvoyer le lecteur 11.

Étant donné le sujet très particulier qui nous intéresse, on peut se demander dans quelle mesure le bibliobus urbain est en état de satisfaire les besoins des travailleurs. Laissons à M. Vaillant le soin de répondre à cette question :

« Le public qui fréquente le bibliobus est, il faut le reconnaître, plus que dans les annexes permanentes de quartier, formé par des emprunteurs sans profession, le plus souvent des femmes, ceci principalement dans les quartiers résidentiels.

« Ce public forme à Grenoble 52 % des emprunteurs adultes inscrits entre le Ier janvier 1959 et octobre 196I, contre 15 % dans chacune de nos deux annexes. Il est également très important pour le bibliobus de Saint-Brieuc et de Toulouse, où il forme, à Toulouse, d'après quelques récents sondages, 31 et 39 % pour deux stationnements assez différents l'un de l'autre. Le nombre plus considérable de ces emprunteurs sans profession tient sans doute à leur plus grande mobilité, attendu qu'ils peuvent régler plus facilement l'emploi du temps de leur journée pour se trouver à telle heure à un stationnement bien déterminé. Il n'en est pas de même pour les personnes âgées qui se déplacent difficilement et qui préfèrent une bibliothèque de quartier permanente où elles peuvent se rendre aux heures où elles ont l'habitude de sortir. Ainsi, n'avons-nous à Grenoble que 7 % de retraités parmi nos emprunteurs au bibliobus contre 31 % dans notre annexe de la rue l'Abbé-de-la-Salle. Le nombre des retraités abonnés aux bibliobus de Saint-Brieuc et de Toulouse est également très faible : 4,9 et 5,5 % à Toulouse pour deux stationnements assez différents l'un de l'autre.

« En ce qui concerne le nombre des emprunteurs de moins de 15 ans, la fréquentation n'est pas très différente de celle des annexes de quartier. Dans un cas comme dans l'autre, elle dépend surtout du nombre de livres d'enfants exposés sur les rayons.

« Ce qui est vrai pour les enfants l'est également pour les travailleurs adultes. Ici encore, comme pour les enfants, il n'y a pas de distinction essentielle entre la fréquentation des bibliobus urbains et celle des annexes de quartier. Cela dépend plutôt du rapport qui existe entre le nombre de romans et celui des documentaires plus demandés en moyenne par les personnes des professions salariées qui constituent généralement une part importante des emprunteurs de bibliothèques. Car, quel que soit le genre de bibliothèque, il y a un faible pourcentage d'emprunteurs appartenant aux professions libérales et commerciales.

« Nous pouvons constater un rapport entre le nombre des salariés et celui du nombre des documentaires empruntés. Pour les bibliobus de Grenoble et de Saint-Brieuc, où le nombre des documentaires prêtés est faible, la proportion des salariés ne dépasse pas 35 à 32 % du nombre des emprunteurs adultes. A Toulouse, où l'on prête plus de documentaires, le nombre des emprunteurs salariés est de 59 % et de 50 % d'après quelques récents sondages faits parmi les emprunteurs de deux stationnements assez différents l'un de l'autre. Parmi les salariés, il y a pour les mêmes stationnements 14 % à 22 % d'ouvriers à Toulouse, alors qu'il n'y en a que 9 % à Grenoble avec de plus fortes proportions, il est vrai, aux stationnements des quartiers industriels à l'heure de la sortie des usines.

« Pour conclure, en tenant compte des expériences de Grenoble, de Saint-Brieuc et de Toulouse, il ne semble pas que le bibliobus urbain soit, plus qu'une annexe permanente de quartier, en état de satisfaire les besoins des travailleurs, lorsqu'il s'agit de quartiers de forte densité de population, étant donné l'affluence de plus en plus grande des lecteurs sans profession... Pour ces quartiers, une annexe s'impose d'autant plus que, à nombre égal d'emprunts, le prix de revient du bibliobus urbain est plus grand que celui d'une bibliothèque de quartier.

« Néanmoins, le bibliobus urbain offre, par rapport à l'annexe de quartier, un grand avantage, celui de sa mobilité. Il peut, de ce fait, en un nombre d'heures limité, sinon distribuer plus de volumes, tout au moins atteindre un plus grand nombre de lecteurs. Et bien qu'il n'ait pas à desservir un district aussi vaste qu'un bibliobus rural, il a néanmoins l'avantage, comme ce dernier, de toucher un public dispersé dans des quartiers de banlieue et de faible densité de population, là où une bibliothèque de quartier ne s'impose pas encore. On ne pourra évidemment, en quelques heures, offrir à ce public des possibilités qu'il aurait en fréquentant régulièrement une bibliothèque située près de son domicile. Mais, avec quelques livres bien choisis et, en particulier, des documentaires, nous pouvons, auprès des travailleurs des cités ouvrières et des quartiers industriels compléter l'action des bibliothèques d'entreprises et des dépôts... dans les usines, surtout lorsqu'il n'y a pas de bibliothèques. »

A plusieurs reprises, les rapporteurs ont insisté sur la nécessité, pour le bibliothécaire, d'avoir une qualification professionnelle. Les statistiques avaient d'ailleurs montré que l'efficacité de la bibliothèque était liée à la présence d'un bibliothécaire diplômé. C'est à Mme Puget, professeur à l'École des bibliothécaires de l'Institut catholique de Paris, qu'il appartenait de définir les qualités essentielles qu'on était en droit de demander à un bibliothécaire et qui sont des qualités psychologiques doublées de qualités intellectuelles. Car, dit Mme Puget, « on est là non pas pour faire un travail de bureau mais pour accomplir une œuvre humaine. Le bibliothécaire est un lien entre le lecteur et le livre, entre le lecteur et tout ce qui peut développer le goût de la lecture et de la culture ». Si l'amabilité, le tact, ce respect « qui exclut tout sentiment de supériorité », sont nécessaires, il faut aussi, à une formation technique solide, allier une grande culture et même une « curiosité vorace ».

Le mérite de ces journées d'étude fut donc de faire le point : de nombreux problèmes particuliers aux bibliothèques sur le lieu de travail furent évoqués, un certain nombre de solutions furent proposées, tout ceci aboutissant à un véritable constat des réussites, des échecs et des progrès à réaliser.

En outre une « Table ronde », à laquelle prirent part notamment MM. Louis François, vice-président de la Commission française, Robert Escarpit, professeur à la Faculté des lettres de Bordeaux, Jacques Lethève, secrétaire général de l'Association des bibliothécaires français, Georges Navel, écrivain, donna lieu à des échanges de vues sur le thème général « Les hommes et les livres. »

La place du livre dans la civilisation moderne, les rapports entre les bibliothèques municipales et les bibliothèques sur le lieu de travail, les critères qui doivent guider le bibliothécaire dans le choix des livres, furent l'objet de prises de position extrêmement diverses.

Ainsi, pour M. Escarpit, le livre correspond à une notion de la littérature totalement dépassée, la littérature en tant qu'aristocratie d'intellectuels. La catégorie des lettrés est figée et fermée et il se peut qu'on assiste actuellement à la naissance d'une esthétique populaire fondée sur le dessin et l'image.

Quant au choix des livres, doit-il être l'unique apanage du bibliothécaire? Telle n'est pas l'opinion de M. Delarue, secrétaire général de « Travail et culture », qui estiment que les Comités d'entreprise étant une émanation des travailleurs, c'est à eux seuls de décider ce qu'il convient ou non de mettre en leurs mains.

Car les nombreuses interventions et discussions animées qui ont suivi chaque exposé n'ont pas manqué de soulever cette importante question : « engagement » ou neutralité de la bibliothèque. Doit-elle être un lieu de culture ou un lieu de propagande ? Il est bien évident que, sur ce point, les avis furent très partagés 12.

Le bilan de ce colloque fut dressé par MM. Cacérès et Brunsvick dans les allocutions qu'ils prononcèrent le mercredi 22 novembre. Le mot de « culture » ayant été maintes fois prononcé pendant ces journées, M. Brunsvick chercha notamment à en définir le contenu : « Avoir de la culture, c'est sans doute être au courant de ce que le progrès technique nous apporte, c'est prendre conscience de l'affaiblissement ou de la disparition, du fait de ce progrès, des cultures traditionnelles en raison du double processus d'urbanisation et d'industrialisation. Avoir de la culture, c'est aussi tenir compte de la situation nouvelle de la femme dans la société, ainsi que des transformations économiques et sociales. Avoir de la culture enfin, c'est aider l'homme à se sentir à son aise dans un monde nouveau qui n'est plus stable et ceci n'est pas le propre des travailleurs, c'est le propre de tous les hommes. Mais ce dont je suis convaincu, c'est qu'une bibliothèque à l'échelle de l'entreprise est, dans une certaine mesure, une communauté d'hommes qui se veulent, qui se cherchent adultes. Or une communauté d'hommes adultes n'est pas concevable s'il n'y est pas reconnu que la vérité est l'expression de ce qui est le droit, de ce qui est juste et non pas de ce qui sert le mieux à un moment donné l'intérêt d'un groupe, quel que soit ce groupe. »

Mme Hattinguais prononça la clôture de ces journées en soulignant l'importance de l'éducation permanente : « Nous essayons à l'heure actuelle en France d'arriver à promouvoir de plus en plus une véritable démocratisation de l'enseignement... Mais nous n'aurons rien, absolument rien, si notre éducation ne débouche sur une éducation qui se prolongera toute la vie. »

M. Louis François avait précisément rappelé, au cours de la première séance, que la mission de l'Unesco était de promouvoir à travers le monde l'éducation, la science et la culture et qu'il n'y a pas de meilleur foyer d'éducation, de science et de culture qu'une bibliothèque. Par conséquent en s'intéressant aux bibliothèques fonctionnant sur les lieux de travail, « une fois de plus, la grande organisation internationale se place dans les perspectives du monde actuel car la culture, nous le savons, n'est plus le privilège du petit nombre ».

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Tableau 1

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Tableau 2

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Tableau 3

  1. (retour)↑  Bibl. de la F., n° 48, Ier déc. 196I, 2e partie : Chronique.
  2. (retour)↑  Un numéro des Informations sociales avait été consacré aux rapports existant entre la littérature et le grand public et, plus spécialement, le public des travailleurs. Informations sociales, Ire année, n° i, janv. 1957. - Paris, Union nationale des caisses d'allocations familiales.
  3. (retour)↑  Autrement dit, pourcentage des entreprises où l'on enregistre un prêt de plus de 2 ou de 5 volumes par personne employée dans celles-ci.
  4. (retour)↑  Nous ne pouvons que renvoyer sur ce point à l'ouvrage suivant : Cacérès (Geneviève). - Regards neufs sur la lecture, avec la collab. de Joffre Dumazedier et Jean Hassenforder - Paris, Éd. du Seuil, 196I. - 17,5 cm, 208 p. (Coll. « Peuple et culture », 2).
  5. (retour)↑  Ces renseignements sont extraits du rapport présenté par Mlle Davoine, bibliothécaire à la Compagnie des ateliers et forges de la Loire, usine de l'Ondaine et intitulé : Formation et animation de la bibliothèque sur le lieu de l'entreprise.
  6. (retour)↑  Le texte du rapport de M. Delarue a été publié intégralement dans Le Peuple, organe officiel bimensuel de la Confédération générale du travail, n° 646, Ier au 15 février 1962, pp. 10-14.
  7. (retour)↑  Les Bibliothèques pour les travailleurs étrangers. Rapport présenté par Mme Grosdidier.
  8. (retour)↑  Il s'agit dans ce cas de frontaliers qui rentrent chaque soir chez eux.
  9. (retour)↑  5, rue de Logelbach, Paris-17e.
  10. (retour)↑  97, rue de Lille, Paris-7e.
  11. (retour)↑  Voir : 1° Sur le bibliobus urbain de Grenoble : B. Bibl. France, 1re année, mars 1956, pp. 167-177 ; B. Bibl. France, 2e année, mars 1957, pp. 219-221.
    2° Sur le bibliocar scolaire de Tours : B. Bibl. France, 2e année, mars 1957, pp. 179-191.
    3° Sur le bibliobus de Saint-Brieuc : B. Bibl. France, 4e année, mars 1959, pp. 152-154.
    4° Sur celui de Boulogne-sur-Mer : B. Bibl. France, 6e année, janv. 1961, pp. 34-35.
    5° Sur celui de Toulouse : B. Bibl. France, 6e année, sept-oct. 1961, pp. 494-495.
  12. (retour)↑  On trouvera l'opinion de la C.G.T. dans le compte rendu publié sous le titre : « Les Bibliothèques d'entreprises » dans Le Peuple, n° 644, Ier-15 janv. 1962, pp. 21-24.