Ve congrès international des bibliothèques et musées des arts du spectacle

Paris, 23-25 juin 1961

Organisé par la Section internationale des bibliothèques et musées des arts du spectacle de la FIAB (Fédération internationale des associations de bibliothécaires), le Ve Congrès international des Bibliothèques et musées des arts du spectacle s'est tenu à Paris, à l'Institut d'art et d'archéologie, du 23 au 25 juin 196I.

Première séance (vendredi 23 juin, 10 h).

La première séance de l'assemblée générale est présidée par M. Julien Cain, directeur général des Bibliothèques de France, vice-président de la FIAB, assisté de M. André Veinstein, bibliothécaire chargé de la conservation de la collection théâtrale Rondel à la Bibliothèque de l'Arsenal, président de la Section internationale.

Dans son allocution d'ouverture, M. Cain rappelle dans quelles conditions a été décidée à Zagreb, en 1954, par le Conseil de la FIAB, la création de la Section internationale. Depuis, la Section a montré sa vitalité. Le dernier témoin en est le remarquable répertoire des Bibliothèques et musées des arts du spectacle dans le monde, édité par le C.N.R.S.

« Les arts du spectacle doivent faire l'objet d'une étude très attentive. L'Unesco s'en occupe également par l'intermédiaire de l'Institut international du théâtre, ainsi que le Théâtre des Nations qui organise diverses sessions d'étude. La collaboration est souhaitable entre ces organismes internationaux et les institutions gouvernementales.

« Le fonds Rondel rend des services éminents par la richesse de ses collections; il est considéré comme l'un des plus riches du monde. Notre devoir sera d'améliorer les conditions matérielles et les moyens en personnel dont dispose M. Veinstein.

« Je suis particulièrement heureux de constater les contacts que vous avez avec la Fédération internationale pour la recherche théâtrale, le Conseil international du cinéma et de la télévision, l'Association internationale des bibliothèques musicales, dont l'œuvre est si remarquable, le Conseil international des musées... La présence des représentants de ces organismes prouvent que les travaux s'orientent vers une étroite coopération.

« Entre toutes les organisations qui s'occupent de la recherche dans le domaine esthétique et plastique, il ne peut y avoir aucune cloison étanche. La coordination est une nécessité. »

M. Cain donne alors la parole à M. Veinstein qui se félicite du nombre important de congressistes inscrits : une centaine. D'autres personnalités ont envoyé leurs excuses, notamment : M. Georges Freedley, conservateur de la section théâtrale de la « Public library » de New York, M. H. Adamovski, directeur du département théâtral de la Bibliothèque nationale de Vienne, le conservateur du Musée théâtral d'État de Leningrad, Mme Witkovskaja, directrice de la Bibliothèque centrale d'État de Moscou, Mme Schiller, de la section théâtrale de l'Institut des sciences de Varsovie, le Dr Batusič, responsable de la Bibliothèque de l'Opéra de Zagreb.

Le président de la Section internationale aborde ensuite son rapport sur les perspectives d'activité ouvertes par la parution du répertoire des Bibliothèques et musées des arts du spectacle dans le monde, dont la publication avait été décidée lors du dernier congrès, à Varsovie, en 1959. L'enquête entreprise il y a cinq ans par les représentants de la Section internationale dans chaque pays a abouti au recensement de 240 établissements dans le monde. Ce répertoire, instrument de travail indispensable 1, renseigne sur le budget et les ressources en personnel de chaque établissement, permet un jeu de comparaison utile et offre la possibilité de faire valoir auprès des pouvoirs publics les avantages dont bénéficient nos collègues de certains pays. M. Veinstein cite, à titre d'exemples, les bibliothèques de Leningrad, Moscou et Belgrade dont le corps scientifique comprend de 50 à 60 personnes, une collection théâtrale suédoise de 20 ooo volumes qui dispose de 15 bibliothécaires.

Sur le plan technique, le répertoire permet d'établir un bilan des méthodes d'organisation, de catalogage, etc.; ces renseignements peuvent être utilisés pour la création ou la réorganisation d'établissements similaires. Le répertoire renseigne également sur la spécialisation et les orientations diverses des institutions, il permet de constater, par exemple, que les établissements dont l'activité concerne les professionnels des arts du spectacle sont de plus en plus nombreux.

On remarque, en outre, que les très grands fonds d'érudition servent également au « théâtre vivant » : la documentation authentique, en principe destinée aux érudits, sert également aux « hommes de pratique » qui font preuve d'exigences nouvelles et ont de plus en plus besoin d'une documentation riche et sérieuse; inversement, les bibliothèques qui recueillent la documentation vivante sont utiles aux érudits, qui sont très attachés aux documents positifs.

La bibliothèque devient un véritable centre de recherches. La bibliothèque théâtrale modèle, dans le cadre d'un musée du théâtre, dispose d'une équipe de chercheurs qui en fait un foyer de production. Il en est ainsi pour certaines bibliothèques russes ou japonaises.

Le président énumère ensuite les divers points du programme de travail concret qui est proposé aux membres de la Section pour les prochaines années :

I. Recensement des collections spécialisées sur un sujet ou une personnalité du théâtre. 2. Recensement des collections théâtrales ayant adopté telle ou telle méthode de catalogage. 3. Étude comparative des différentes méthodes de catalogage. 4. Publication de catalogues communs. 5. Recensement de ce qui peut être diffusé : tirage de diapositives, disques et enregistrements sonores, copies de films. 6. Recensement des établissements offrant des catalogues publiés. (Ceux-ci sont souvent offerts à titre gratuit.) Le répertoire des Bibliothèques et musées des arts du spectacle dans le monde effectue déjà un recensement des catalogues publiés qui peuvent être donnés ou échangés. Ce recensement pourrait être complété dans le bulletin Spectacles-Documents. 7. Échanges entre bibliothèques. Une étude précise de cette question a été faite, et un protocole adopté. 8. Organisation d'expositions et de conférences éventuellement itinérantes. Le répertoire renseigne en effet sur l'existence de salles de conférence ou d'exposition dans les établissements recensés.

M. Veinstein évoque ensuite les autres publications auxquelles participe la Section internationale, en premier lieu la bibliographie internationale très importante publiée par la Revue d'histoire du théâtre, dont le nombre de correspondants est en augmentation; enfin, la revue Spectacles-Documents qui a fusionné avec Recherche théâtrale, organe de la Fédération internationale pour la recherche théâtrale, au comité de laquelle appartient M. Veinstein. Celui-ci fait appel à ses collègues étrangers pour qu'ils signalent régulièrement à la rédaction de Spectacles-Documents leurs acquisitions importantes, les expositions organisées, les nouvelles normes de catalogage appliquées dans leurs établissements, etc. M. Veinstein rappelle que la Section possède actuellement 29 correspondants représentant officiellement les pays suivants : Allemagne fédérale, R.D.A., Argentine, Autriche, Belgique, Bulgarie, Canada, Chili, Colombie, Danemark, Espagne, Égypte, États-Unis, Finlande, France, Grande-Bretagne, Grèce, Hollande, Hongrie, Irlande, Italie, Japon, Norvège, Pologne, Suède, Suisse, Tchécoslovaquie, Yougoslavie, URSS.

M. Veinstein fait état d'un projet en cours, dont les résultats sont publiés régulièrement dans Spectacles-Documents. Il s'agit de compléter l'enquête internationale sur les fonds d'archives de photos de théâtre. Les fonds les plus importants étant conservés par les photographes de théâtre eux-mêmes, il importe de connaître la composition précise des fonds qu'ils détiennent.

M. Veinstein aborde ensuite la question de l'affiliation à l'ICOM de la Section internationale, qui désire coopérer avec les musées et les autres organismes possédant des collections sur les arts du spectacle. Le Conseil de la FIAB a donné son autorisation à ce sujet, lors de sa réunion de 1959 à Varsovie; les membres du comité de la Section internationale ont également donné leur accord.

M. Veinstein donne lecture du Titre XII, art. 38-4I (organisations internationales affiliées) des statuts de l'ICOM. Cette demande d'affiliation pourra être approuvée définitivement lors de la réunion du Conseil exécutif, le 4 juillet.

Après une intervention de M. Georges-Henri Rivière, président de l'ICOM, qui évoque les tâches importantes et les réalisations de l'ICOM, l'assemblée générale vote à l'unanimité pour l'affiliation de la Section internationale à cette organisation. L'enregistrement définitif de cet accord aura lieu au prochain Conseil de la FIAB, à Édimbourg, au mois de septembre.

L'élaboration d'un catalogue des films documentaires sur le théâtre constitue précise M. Veinstein, un autre projet qui pourrait devenir international. Certains pays, comme la Pologne et le Japon, et différents organismes se préoccupent déjà de ce problème. Ces films documentaires, dont l'intérêt pour la recherche est évident, comprennent : le théâtre filmé (au théâtre ou au studio) et les films sur le théâtre : biographies, monographies d'un théâtre ou d'une compagnie, films sur l'architecture ou le décor, séquences d'actualités ayant trait à l'un des sujets ci-dessus.

Il existe un grand nombre de films de ce genre en France; ils sont généralement entre les mains des producteurs ou distributeurs. Ce fait n'exclut pas une recherche éventuelle, par la suite, des films d'amateurs. Le catalogue des films documentaires de l'Unesco, pour l'architecture par exemple, pourrait servir de modèle. La question du principe de l'aide apportée par les membres de la Section en vue de cette réalisation sera posée lors de la réunion qui aura lieu, après l'assemblée générale, entre les experts français et étrangers qui pourront apporter leur collaboration à ce projet; une commission sera constituée.

M. Cain, obligé de se retirer, demande à M. Henriot Marty, chef du service de la Bibliothèque de la Chambre de commerce de Paris, président de l'A.B.F., de prendre la présidence de la séance. M. Veinstein évoque la question du code international de catalogage des documents concernant les arts du spectacle : projet commun à la Section internationale et à la F.I.R.T. (Fédération internationale pour la recherche théâtrale). Il est décidé de renvoyer ce problème à une prochaine session, après de nouvelles démarches. Ce projet a suscité un intérêt réel parmi nos collègues de tous pays.

Après la clôture de l'assemblée générale, M. Jean Sideris, directeur du Musée théâtral d'Athènes, présente une communication accompagnée de projections sur les Textes et monuments de la Grèce antique constituant les premiers témoignages des documents de théâtre.

Deuxième séance (vendredi 23 juin, 14 h 45).

Les congressistes sont réunis dans la salle de conférence du Musée des arts et traditions populaires; M. Rivière, conservateur en chef du Musée, préside la séance. M. Christian Oger, membre du Club du cirque, et qui possède une remarquable collection d'affiches de cirque, présente une communication intitulée : Conservation et classement des affiches du cirque, illustrée de projections.

Mlle Michèle Dobrenine, bibliothécaire à la Bibliothèque de l'Arsenal (Collection Gordon Craig), expose les Problèmes documentaires des marionnettes. Au cours de la discussion qui suit, Mlle Rey, conservateur du Musée de la marionnette de Lyon, fondé en 1950 par la Direction des musées de France, parle de l'organisation et des travaux en cours dans son établissement, ainsi que des réalisations du CIPEMAT (Centre international pour l'étude de la marionnette traditionnelle), constitué en 1958, et dont l'institut de travail se trouve au Musée de la marionnette de Lyon.

Puis, Mlle Claudie Marcel-Dubois, du Musée des arts et traditions populaires, attachée de recherches au C.N.R.S., fait un exposé, agrémenté de projections et de documents sonores, sur Les Instruments de musique de cirque, aussi variés que pittoresques.

A cette séance de travail succède une visite de l'exposition de pièces rares provenant des collections du Musée des arts et traditions populaires, organisée et présentée par M. Rivière lui-même, Mlle Michèle Richet, chef du département d'Ethno-esthétique, et M. Pierre Soulier, chargé de la section Marionnettes. La visite se termine par une séance de démonstration de marionnettes organisée avec le concours de Mme Dulaar-Roussel, MM. Auguste Gantleur et Gustave De Budt, marionnettistes.

Troisième séance (samedi 24 juin, 10 h).

La séance se déroule à l'Institut d'art et d'archéologie, sous la présidence de M. Alfredo de La Guardia, directeur de l'Institut national des études dramatiques de Buenos-Aires.

Les communications présentées sont les suivantes :

Rôle des affiches théâtrales dans les musées de théâtre, par M. Eugène Szwankowski, conservateur en chef du Musée théâtral de Varsovie; Catalogage et références des affiches de théâtre, par Mme Marthe Besson, attachée de recherches au C.N.R.S.; Catalogage et références des affiches de ballets et de mime, par Mlle Marie-Françoise Christout, bibliothécaire à la Bibliothèque de l'Arsenal (collection Rondel); Méthode de catalogage de la collection suisse du théâtre, par M. Edmond Stadler, conservateur de la collection théâtrale suisse à Berne.

Les exposés de Mme Besson et de Mlle Christout sont accompagnés de projections sur deux écrans présentant simultanément des exemples d'affiches cataloguées et les fiches correspondantes, rédigées suivant les principes du Code de références et de catalogage de l'iconographie théâtrale établi par Mlle Giteau et M. Veinstein.

Quatrième séance (samedi 24 juin, 14 h 30).

Cette séance qui se tient au Musée pédagogique comporte quatre exposés, enrichis par des projections et des films. Mme Milena Nikolič, directrice du Musée de l'art théâtral de Belgrade parle des Documents devant être conservés par les musées de théâtre, compte tenu des moyens techniques modernes : enregistrement sur magnétophone, films, télévision. Au cours de la discussion qui suit, M. Veinstein affirme que les bibliothécaires et conservateurs de musée sont très soucieux d'établir des contacts avec le théâtre et de connaître les services qu'ils peuvent rendre aux hommes de pratique. Il convient de rechercher les méthodes qui permettent d'obtenir des hommes de théâtre la fourniture des documents aux bibliothèques et aux musées. L'exposé de M. Alfredo de La Guardia traite de l'Organisation des discothèques dramatiques, celui de Mlle Akakia Viala (France) de La Micro-filmothèque au service de la documentation cinématographique. Enfin l'étude de Mlle Cécile Giteau, bibliothécaire à la Bibliothèque nationale, s'intitule : Valeur documentaire, catalogage et références des diapositives de décors et de costumes.

A la suite de cet exposé, M. Guignard, conservateur en chef de la Bibliothèque de l'Arsenal souligne l'importance des diapositives pour l'enseignement. La question des droits de reproduction est soulevée; elle ne semble pas poser de problèmes en France, où le syndicat des décorateurs de théâtre a encouragé la constitution de collections de diapositives qui permettent, en cas de plagiat, de faire valoir la date indiscutable du document original. D'autre part, les maquettes de décor peuvent être perdues ou abîmées, les diapositives constituent un moyen sûr de les retrouver.

La séance se termine par la projection d'un admirable film japonais sur le « kabuki ».

Cinquième séance (dimanche 25 juin, 10 h 30).

La dernière séance de travail du congrès a lieu à l'Institut d'art et d'archéologie, sous la présidence de M. Paul Blanchart, conservateur de la Bibliothèque de la Société des auteurs et compositeurs dramatiques et vice-président de la Section.

Il est donné lecture de la communication de Mme Irena Schiller, sur les Fichiers géographiques par nationalité des documents de théâtre et de quelques passages de l'exposé de Mme Witkovskaja sur l'organisation, dans les bibliothèques scientifiques, des fonds de coupures de journaux qui constituent parfois les seules sources pour l'histoire du théâtre. Puis, M. Filip Kumbatovič, professeur à l'Académie d'art dramatique de Ljubljana entretient les congressistes de L'Art du comédien, reconstitution à partir des documents (écrits, photos, films, enregistrements sonores, etc...). Enfin, la communication de M. John H. Mc Dowell, directeur de la collection théâtrale d' « Ohio State University», s'intitule : Procedures for processing microfilm in the Ohio State University theatre collection.

A ces exposés succède la deuxième séance de l'assemblée générale. M. Fino, du département des Bibliothèques de l'Unesco, entretient d'abord les congressistes du projet d'un catalogue international des films sur le théâtre, et éventuellement sur les autres arts du spectacle. Il existe déjà plusieurs catalogues internationaux édités par l'Unesco : le catalogue des arts plastiques (1949/50), le catalogue international des films consacrés à l'architecture (1959); le catalogue international des films consacrés à l'éducation musicale est en cours et sera édité l'an prochain.

Ce sont des catalogues sélectifs. Les centres internationaux (par exemple le Conseil international de la musique) se sont adressés aux centres nationaux pour faire le recensement des films, qui sont, non seulement catalogués, mais examinés par le centre, qui procède à leur évaluation critique. La sélection finale est faite à l'Unesco par des comités internationaux composés de personnalités de renommée mondiale indiscutable.

Les questions posées aux délégués des divers pays révèlent qu'il n'existe pratiquement pas de catalogues nationaux de films sur le théâtre, et l'intérêt indiscutable d'un catalogue international est unanimement reconnu.

Les résolutions du congrès, présentées par M. Veinstein et approuvées à l'unanimité par les congressistes, sont les suivantes :
I. Demande d'affiliation à l'ICOM.
2. Établissement de relations de travail étroites avec la commission des phonothèques de l'A.I.B.M.
3. Projet d'un code international de catalogage des documents de théâtre, établi en collaboration avec la Fédération internationale pour la recherche théâtrale.
4. Coopération de plus en plus étendue avec les organismes internationaux : FIAB, A.I.B.M., ICOM, Fédération internationale pour la recherche théâtrale, Institut international du théâtre, Fédération internationale des cinémathèques, Conseil international du cinéma et de la télévision.

On étudie enfin l'application pratique du protocole d'échanges de documents élaboré par la Section et adopté lors du congrès de Varsovie. Les échanges par voie directe semblent les plus efficaces par leur rapidité et leur élasticité; ils sont facilités par le répertoire Bibliothèques et musées des arts du spectacle dans le monde. Lorsque les contacts ne peuvent être pris directement entre pays, il importe de prévoir une centralisation des propositions d'échanges, par exemple leur publication dans le bulletin Spectacles-Documents.

M. Fino rappelle que deux protocoles d'échanges de documents (publications officielles et documents gouvernementaux; publications ayant un caractère éducatif, scientifique, technique ou culturel) ont été signés sous les auspices de l'Unesco et sont en application. Un accord a été signé pour la libre circulation des documents de pays à pays, et une quarantaine de centres nationaux d'échanges existent déjà.

Un résumé des actes et des échanges de vues sera publié ultérieurement par le Comité d'organisation du congrès dans le bulletin Spectacles-Documents. Une publication intégrale des actes est prévue.

  1. (retour)↑  Voir ci-après, p. *480.