Le service de multigraphie
C'est en mai 1953 que la Direction des bibliothèques a créé le Service de multigraphie 1.
D'abord abrité dans un local provisoire offert par la Bibliothèque de la Sorbonne, puis transféré, toujours provisoirement, 2, rue Cujas, dans un cadre plus neuf, mais presque aussi exigu que le premier, le Service a enfin trouvé depuis peu dans les bâtiments de la nouvelle Faculté de droit de l'Université de Paris des locaux confortables et modernes.
La Direction des bibliothèques de France envisageait en premier lieu d'aider les bibliothèques universitaires à opérer la refonte de leurs catalogues sur fiches de format international. On sait que l'adoption de ce format, rendu obligatoire à dater de 1952, entraînait en principe la recopie des fiches établies sur format « dissident ». Or, les catalogues des bibliothèques universitaires étaient d'une ampleur telle que la tâche dépassait les possibilités des effectifs normaux de personnel. Le catalogage à l'échelon central des documents constituant le « fonds commun » des bibliothèques universitaires paraissait un moyen rationnel d'aider à la refonte.
En étendant aux bibliothèques d'études (Bibliothèque nationale, grandes bibliothèques municipales et bibliothèques des instituts français à l'étranger) la diffusion des fiches ainsi établies, on leur permettait de bénéficier d'une documentation utile aux bibliothécaires et aux chercheurs.
Enfin les services d'intérêt commun (Catalogue collectif des ouvrages étrangers, Service central de prêt d'imprimés et de manuscrits) devaient également tirer profit de l'opération.
Afin de réaliser une première tranche de travail les notices de tous les ouvrages en cours et des suites recensés dans les registres de la Bibliothèque de la Sorbonne (2.439 notices) ont été d'abord dactylographiées et ensuite multigraphiées, formant ainsi onze fascicules de 213 pages. Chaque bibliothèque bénéficiaire a reçu l'ensemble de ces fascicules en deux exemplaires, l'un destiné à sa documentation, l'autre devant être retourné au Service de multigraphie avec le sigle de la bibliothèque, souligné autant de fois que la bibliothèque désirait de jeux de fiches multigraphiées.
L'établissement d'un dossier au nom de chaque bibliothèque, le pointage et le report des sigles, le calcul exact du nombre de fiches à tirer ont représenté un travail minutieux de longue haleine d'autant plus que le nombre des bibliothèques changeait pour chaque suite et qu'il s'est écoulé un temps très long entre l'envoi des onze fascicules et leur retour au service central.
Pour 2.650 ouvrages traités, 14.961 jeux de fiches représentant un total de 63.630 fiches ont été expédiés aux bibliothèques bénéficiaires. Des listes de vedettes-matiéres accompagnaient les fiches. En mai 1955, c'est-à-dire deux ans après sa création, le Service avait terminé cette première tâche.
La deuxiènte tranche de notre programme, la multigraphie des collections françaises possédées par la Bibliothèque de la Sorbonne, déjà amorcée pendant l'achèvement de la première tranche, en 1955, est établie selon les mêmes principes. Les titres des collections ont été choisis et pointés par le conservateur et le bibliothécaire sur les registres de la Sorbonne; les titres retenus (849) ont été dactylographiés en 6 listes de 98 pages; ces listes multigraphiées ont été envoyées à toutes les bibliothèques ayant demandé d'y participer. Ajoutons que le nombre de bibliothèques a augmenté considérablement au cours du travail de la première tranche, les bibliothèques municipales s'étant rendu compte des avantages que présentait pour elles ce service.
Nous traitons et nous expédions aux bibliothèques en priorité les collections françaises demandées par le plus grand nombre d'établissements. Des calculs minutieux ont dû être établis et jusqu'à nouvel ordre nous nous proposons de multigraphier les collections françaises demandées par vingt bibliothèques au moins. A l'avenir ce chiffre pourra être reconsidéré avant la mise en chantier de la troisième tranche de notre programme, à savoir la multigraphie des collections étrangères possédées par la Bibliothèque de la Sorbonne.
Voici quelques chiffres se rapportant au traitement des collections françaises :
34 collections ont été multigraphiées;
20 collections sont prêtes à être multigraphiées dans les prochains mois, et autant sont en instance de traitement;
313.326 fiches de collections ont été expédiées ou gardées en réserve dans le service;
18.192 feuilles de registres ont été établies avec les listes de vedettes-matières correspondantes.
Nous avons eu à faire face au cours de ces cinq premières années à un certain nombre de difficultés :
- deux déménagements du service, ce qui entraîne toujours une grande perte de temps;
- l'exiguïté des locaux, qui a rendu d'autant plus difficiles les tâches de manutention (emballage et expédition, et le stockage des fiches destinées à des demandes complémentaires ou à des demandes émanant des nouveaux adhérents);
- le personnel, très restreint, au départ un conservateur, un bibliothécaire et un employé de bureau; il y a lieu de souligner les difficultés de recrutement du personnel chargé de faire fonctionner la machine offset (Multilith 1250) mise à la disposition du service;
- les retards [inévitables dans le retour des listes-qui ont entraîné par voie de conséquence, des délais supplémentaires dans l'envoi de fiches, aucun tirage n'ayant pu être effectué avant le retour de toutes les listes;
- la nécessité de procéder sur place dans certaines bibliothèques à certaines vérifications et parfois même d'avoir recours aux libraires et aux éditeurs pour l'établissement des notices.
Malgré toutes ces difficultés, des améliorations ont pu être apportées :
I. Pour la multigraphie des collections françaises, nous établissons en deux exemplaires les feuilles contenant le dépouillement détaillé des collections. Sur ces feuilles, disposées de manière à pouvoir être perforées ou réunies au moyen de pinces, on a réservé une marge pour l'inscription des cotes des ouvrages dispersés sur les rayons d'une bibliothèque. Elles peuvent donc, telles quelles, servir aux bibliothèques de registres d'inventaire des collections. Le deuxième exemplaire sert, dans certaines bibliothèques (à Versailles, par exemple), à faire connaître aux lecteurs l'état des collections françaises importantes sous une forme simple et facilement consultable.
2. Un deuxième dépouillement, cette fois sur fiches, et de texte abrégé est établi. Ces fiches intercalées dans les catalogues des salles de lecture ou de bibliographie, renseignent sur l'état des collections.
3. Les listes de vedettes-matières contiennent en plus des vedettes des indications servant à l'établissement des différentes fiches de renvois. Ainsi nous espérons faire profiter nos collègues des recherches parfois assez délicates que le bibliothécaire a entreprises en vue d'établir une vedette-matière claire. Désirant faire profiter nos collègues de notre expérience, nous avons, Mme Drevet et moi-même, rassemblé dans un fascicule de 54 pages multigraphié par le service, les principales difficultés rencontrées au cours de trente ans d'élaboration du catalogue alphabétique de matières de la Bibliothèque de la Sorbonne. Ces Suggestions pratiques sont diffusées largement parmi nos «clients » et souvent demandées en plusieurs exemplaires. De nombreuses bibliothèques publiques et privées étrangères nous font des demandes d'envois de ces conseils pratiques, non seulement celles qui se trouvent dans des pays de langue française comme la Belgique, la Suisse, etc., mais aussi des institutions allemandes, sud-américaines et autres.
Les échos qui nous parviennent de nos usagers nous persuadent que notre travail apporte une aide efficace au service d'achat, au regroupement des collections et surtout à la pratique de la normalisation en ce qui concerne les vedettes-matières.
Nous avons également évité au Catalogue collectif des ouvrages étrangers en cours et au Service central de prêt d'imprimés et de manuscrits d'assez nombreuses recherches.
Le Service de multigraphie a été chargé en 1958 par la Direction des bibliothèques d'un autre travail à effectuer régulièrement chaque année : la multigraphie des fiches des thèses étrangères reçues par les bibliothèques universitaires françaises. Ce nouveau service s'est heurté dès l'origine à maintes difficultés notamment en matière de personnel. Pourtant de gros paquets de fiches (214.946 fiches classées minutieusement par facultés, par villes et par années) ont pu être joints à la date fixée (octobre 1958) aux envois de thèses destinées aux 17 bibliothèques universitaires et à la Bibliothèque nationale sans pour autant interrompre la multigraphie des fiches de collections françaises.
Nous avons de plus multigraphié à titre documentaire et bibliographique, pour chaque catégorie de thèses, quelques exemplaires supplémentaires mis à la disposition de bibliothèques d'étude comme la Bibliothèque Sainte-Geneviève, les bibliothèques du C.N.R.S., de l'École normale supérieure, de la Fondation nationale des sciences politiques, de l'Observatoire de Paris, de l'Institut Poincaré, de l'École des mines, du Muséum d'histoire naturelle, de l'Institut Pasteur, du Service central de la santé, etc. Quelques instituts de l'Université de Strasbourg qui en ont fait la demande bénéficient également de ces fiches.
Une augmentation de personnel doit nous permettre en dehors de la multigraphie de fiches de thèses, l'envoi de listes vedettes-matières, comme celles qui accompagnent les collections françaises, on évitera ainsi le gaspillage d'efforts que nécessite, en particulier pour les bibliothécaires de province, l'analyse de textes rédigés en finnois, suédois, norvégien, allemand ou anglais, etc. 2.
Statistique totale de notre activité depuis cinq années :
Ouvrages en cours et suites (1re tranche) 1953-1955 ..... 63.630 fiches
Collections françaises (2e tranche) 1955-1958 ............... 313.326 fiches
Thèses étrangères (1958) ................................. 215.946 fiches
Total 1955-1958 ..... 592.902 fiches
De plus, 18.192 feuilles de registres et de nombreuses feuilles de vedettes-matières.
Dans le domaine des ouvrages en cours, des suites, des collections françaises et des thèses étrangères, le Service de multigraphie a contribué à l'unification et à la normalisation des catalogues. Il s'attache maintenant à augmenter le rythme de son travail et la perfection matérielle de la fiche multigraphiée. L'expérience de la multigraphie, entreprise sur l'initiative de la Direction des bibliothèques et de la Bibliothèque de l'Université de Paris, a donc été concluante. L'extension de la multigraphie à un grand nombre d'ouvrages reçus dans les bibliothèques pourrait désormais être envisagée, libérant ainsi le personnel pour d'autres travaux.