Commission nationale de bibliographie

Séance du 29 octobre 1958

Étaient présents : M. Andreu (représentant M. Lejeune, directeur-adjoint du Centre national de la recherche scientifique), M. Brun, M. Calmette, M. Duportet, Mme Duprat (représentant M. Heim, directeur du Muséum national d'histoire naturelle), Mlle Ernst, Mme Forest, M. Giret (Afnor), Mlle Gouverneur (Biblio), M. Lethève (Association des bibliothécaires français), Mlle Lhéritier, Mlle Malclès, M. Masson, Mme le Dr Nicole-Genty, M. Piquard, M. Rocher, Mlle Ruyssen.

La séance est ouverte sous la présidence de M. Julien Cain. A l'ordre du jour figurent les questions suivantes : I° organisation de la bibliographie régionale; 2° compte rendu de l'activité de la bibliographie 1956-1958.

La presque totalité de la séance fut consacrée en réalité à la deuxième partie de l'ordre du jour. Un exposé introductif de Mlle Salvan, secrétaire générale de la commission, souligna l'intérêt de la bibliographie régionale du point de vue de la Direction des bibliothèques, d'une part, et du Centre national de la recherche scientifique, d'autre part. Les chercheurs spécialisés devraient pouvoir disposer soit d'un fichier central où serait recueillie la documentation relative aux diverses régions, soit de bibliographies imprimées, soit de bulletins des sommaires permettant l'information rapide sur l'actualité intéressant les diverses régions. Les bibliothécaires souhaitent, d'autre part, le développement de la documentation régionale qui a fait l'objet de débats aux Journées d'étude des Bibliothèques municipales de 1957. Enfin l'activité des sociétés savantes intéresse le Comité des travaux historiques et scientifiques rattaché à la Direction des bibliothèques : Le Comité organise les congrès annuels des Sociétés savantes, accueille dans ses publications la documentation régionale, encourage et subventionne les sociétés actives. Un recensement bibliographique complet des articles parus dans les revues locales, pour permettre un accès plus facile à ces revues dont on pourrait envisager le regroupement, est souhaité par le Comité.

Parmi les entreprises existantes qui peuvent répondre à ces exigences diverses on peut signaler :

a) les bibliothèques spécialisées qui recensent une partie de la documentation régionale; b) les fichiers établis sur l'initiative des bibliothécaires ou d'archivistes dans certaines villes; c) les annexes bibliographiques parues dans certaines revues provinciales comme la Bibliographie bourguignonne des Annales de Bourgogne.

Ces entreprises ne sont pas normalisées ni coordonnées, le domaine couvert est très variable et se limite la plupart du temps aux disciplines historiques, sans faire à la documentation économique et sociale la part qu'elle mériterait.

Ces divers problèmes ont été évoqués dans le rapport établi par M. Rocher. D'autre part, il faut reconnaître que l'entreprise Duportet apporte une contribution positive peut-être même décisive, à cette organisation : les cinq cent mille fiches de base réunies par M. Duportet recensant la documentation relative à 51 départements, pouvant être multigraphiées et pouvant permettre soit la constitution d'un fichier central par auteur et par matière, soit la constitution de fichiers locaux.

Sur l'invitation de M. Cain, M. Rocher résume les suggestions qu'il a présentées dans son rapport. Toute organisation rationnelle suppose une définition de la région. A cet égard, M. Rocher, plaçant résolument le problème dans l'actualité, et insistant sur une division tenant compte de l'aménagement du territoire, propose de prendre pour base la région économique le « territoire ». Ainsi on participera activement au mouvement de décentralisation et à la mise en valeur du pays. De ce point de vue, l'entreprise Duportet sur le plan de la bibliographie rétrospective pourrait apporter une contribution appréciable, le recensement s'étend déjà au secteur scientifique.

Suivent des échanges de vues sur les possibilités - assez incertaines à vrai dire - d'une collaboration entre centres spécialisés et centres bibliographiques régionaux.

M. Duportet précise les buts de son entreprise et pense qu'ils s'intègrent dans un plan de coordination qui envisagerait l'étude des documents par les instituts spécialisés. Il y a deux étapes dans le travail bibliographique : les bibliographes effectuent un travail de mine, les spécialistes un travail d'usine. Sélection et analyse relèvent de la compétence du spécialiste. M. Duportet pour sa part estime qu'il ne peut non plus dissocier les diverses disciplines d'un savant ayant toutes les autres sciences comme auxiliaires de la sienne. M. Duportet donne ensuite des précisions sur la présentation qu'il a adoptée : un classement géographique par département et l'établissement de normes pouvant conduire à une distribution automatique de la documentation. Ces considérations ont conduit M. Duportet à adopter un système comportant : a) l'identification des périodiques par un sigle formé d'un numéro minéralogique du département avec le millésime de la fondation du périodique suivi du n° d'ordre; b) la répartition de la documentation par un institut spécialisé auquel elle est destinée, ce qui implique l'adoption d'un numéro de classement qui représente chaque institut.

M. Piquard souhaiterait voir préciser la notion de région . Département ou région économique? M. Rocher pense que si le cadre du département était adopté, la bibliographie comprendrait plusieurs bibliographies régionales subdivisées en départements mais comporterait un index commun. M. Piquard évoque les essais de dépouillements effectués par de nombreuses bibliothèques, soit de périodiques, soit d'ouvrages régionaux non répertoriés par le C.N.R.S. Pourrait-on organiser un centre régional autour d'une bibliothèque en liaison avec les archives? Faut-il envisager des solutions diverses ?

M. Rocher a renoncé à l'idée de charger de ce travail les bibliothèques municipales. Il inclinerait plutôt à croire que les bibliothèques universitaires sont seules en mesure de rassembler des spécialistes pour arriver à constituer des équipes de bibliographes et de spécialistes. M. Cain estime que l'on peut prendre pour hypothèse de travail la région universitaire avec des subdivisions départementales. Il s'interroge toutefois sur le surcroît de travail qui serait ainsi imposé aux établissements responsables. M. Brun fait observer que pour la bibliographie rétrospective, le travail fait par M. Duportet peut être élargi utilement et qu'il y aurait lieu de l'étendre aux sources étrangères. Il demande d'autre part que soit bien précisée l'articulation entre le travail rétrospectif fait par M. Duportet et la coordination qui doit s'établir ensuite. M. Rocher propose la date de 1960 et pense que, une fois lancé, le Bulletin de sommaires envisagé par M. Duportet pourrait servir de base à la rédaction des fiches analytiques. A partir de 1960, les bibliographies signalétiques subsisteraient mais seraient réservées, pour ainsi dire, à l'usage intérieur et ce sont les bibliographies analytiques qui répondraient aux besoins des spécialistes.

M. Cain retient l'idée d'une collaboration entre bibliographes et spécialistes, mais rappelle que le C. N. R. S. a mis sur pied au prix de grosses difficultés un système d'analyse et qu'il n'a même pas la possibilité de l'étendre. On se heurtera aux mêmes obstacles pour les bibliographies régionales analytiques.

M. Masson appuyé par M. Brun souligne l'intérêt de l'entreprise Duportet pour les bibliothèques provinciales. M. Brun fait observer que la collaboration des bibliographes spécialistes pour les analyses ne peut toutefois s'établir que près d'un organisme central bien équipé et disposant de l'ensemble des périodiques, ce qui n'empêche pas d'amorcer sur le plan local des analyses, même si l'on risque d'avoir des doubles emplois. M. Brun souligne à son tour l'intérêt des dépouillements à l'échelon national. M. Calmette donne comme exemple la Bibliographie de l'histoire de France (I.200 périodiques dépouillés).

M. Poindron propose de faire l'inventaire des services existants et souhaiterait, d'autre part, avoir l'avis de la commission sur l'établissement éventuel d'un fichier central utilisant la documentation rétrospective recueillie par M. Duportet.

En conclusion, M. Cain souligne : I° qu'il y a lieu de soutenir l'entreprise Duportet ; 2° qu'il convient d'autre part de poursuivre l'étude du projet de M. Rocher en prenant provisoirement pour base la région universitaire. Il demande à Mlle Salvan de réunir un groupe de travail chargé de poursuivre l'étude.