Les bibliothèques médicales américaines, organisation en réseau octobre-novembre 1977

André Roussel

Pour étudier l'organisation du réseau des bibliothèques médicales et le prêt interbibliothèques, la visite de 24 bibliothèques s'avéra nécessaire dans cinq régions médicales des États-Unis. Le réseau des bibliothèques médicales se présente comme une pyramide avec au sommet la Bibliothèque nationale de médecine (Bethesda). C'est un réseau partagé à quatre niveaux dans lequel la plupart des demandes de prêt sont traitées par la bibliothèque de base (niveau local) ou par la bibliothèque médicale régionale

In order to study the organization of medical libraries network and interlibrary lending, it was necessary to visit 24 libraries in five medical regions in the United States. The medical libraries network is built like a pyramid with the National Medical Library (Bethesda) at the top. It is a resource sharing network with four levels in which most requests for loans can be dealt with in the basic unit library (local level), or in the regional medical library

La Commission franco-américaine d'échanges universitaires et culturels a ouvert aux bibliothécaires français les horizons américains. Depuis 1977, des bourses de recherche aux États-Unis permettent à certains d'entre eux d'étudier les différents aspects de la bibliothéconomie américaine.

Les rapports de ces différentes missions seront publiés dans le Bulletin des bibliothèques de France.

Parmi les candidatures retenues en 1977, l'une était présentée par la Bibliothèque Nationale et l'autre par la Bibliothèque interuniversitaire de Rennes.

Monsieur Roussel, conservateur à la Bibliothèque interuniversitaire de Rennes, nous livre ici ses impressions de voyage et ses remarques sur le système des bibliothèques médicales américaines.

Différentes enquêtes menées par le Service des bibliothèques sur le fonctionnement du prêt interbibliothèques avaient montré l'accroissement des demandes de prêt notamment dans le domaine médical et abouti à la conclusion d'une amélioration du système actuel.

Il importait alors de réunir des informations sur les modes étrangers afin d'obtenir des outils de comparaison.

Si nous connaissons assez bien les systèmes anglais et allemand, nous avions peu d'éléments sur le prêt inter-américain.

Mon sujet de recherches fut ainsi défini avec la collaboration de M. Pallier, conservateur au Service des bibliothèques.

Afin d'organiser mon propre voyage, je me mis en rapport avec « l'American Medical Library Association » et mon itinéraire fut établi en collaboration avec cette association professionnelle particulièrement dynamique. Je tiens d'ailleurs à remercier l'ensemble des collègues des bibliothèques médicales américaines dont l'accueil extrêmement amical et la généreuse hospitalité ont fait de ces deux mois une période très enrichissante par ses aspects professionnels, mais aussi humains.

Le but de mon voyage était de visiter, en un laps de temps de deux mois, un certain nombre de bibliothèques situées dans des régions différentes des États-Unis et avoir un aperçu du fonctionnement du prêt-inter de l'organisation du réseau des bibliothèques médicales.

Mon itinéraire devait comporter un programme de visites assez nombreuses, tout en permettant d'étudier le système mis en place dans chaque région et les problèmes locaux pouvant exister. Un séjour d'une semaine dans les bibliothèques médicales régionales, véritables nœuds du réseau, ne semblait donc pas excessif pour être intégré à l'équipe de coordination et pouvoir visiter quelques bibliothèques voisines.

En deux mois, j'ai donc pu visiter 24 bibliothèques parmi lesquelles on peut distinguer :
- la bibliothèque nationale de médecine ;
- 13 bibliothèques universitaires de médecine;
- 5 bibliothèques d'hôpitaux;
- 2 bibliothèques dépendant de grands corps scientifiques ;
- 1 organisme ne servant qu'au prêt inter ;
- 1 grande bibliothèque publique ;
- 1 grande bibliothèque d'origine privée et parcourir cinq régions médicales (dans le cadre du réseau des bibliothèques médicales, les États-Unis ont été divisés en 11 grandes régions médicales).

Afin de replacer mon expérience à sa juste dimension, il faut rappeler les conditions américaines, insister sur l'immensité d'un pays qui fait 20 fois la superficie de la France et dont l'organisation administrative est très différente de la nôtre.

a) Tout d'abord, au niveau national, la nation américaine est constituée d'une fédération d'états ayant tous leur propre législation, D'état à état, le rattachement administratif des établissements d'enseignement et par voie de conséquence, celui des bibliothèques peut donc varier beaucoup.

b) Ces variations sont d'autant plus fortes que la nation américaine a une croyance très forte dans l'initiative privée. Le rôle joué par l'initiative privée dans le domaine des bibliothèques est donc très important et nous amène à formuler deux remarques :
- L'ensemble des bibliothèques n'étant pas rattachées à une administration unique, émargeant sur des budgets différents, tantôt publics, tantôt privés, cette situation aurait pu ruiner tout espoir de mettre sur pied un réseau efficace. Tel n'est pas le cas puisque depuis 1965, on a assisté à l'organisation de ce réseau, grâce à une initiative du gouvernement fédéral. Par ailleurs, ces différences de statut ont permis des comparaisons intéressantes au niveau de la gestion et ont favorisé une certaine émulation.
- Ma seconde remarque concerne la gestion. Si ces bibliothèques disposent en général de budgets sans comparaison avec les nôtres, toute dépense, qu'elle soit d'investissement, de fonctionnement ou de personnel, sera évaluée par l'organisme de rattachement en fonction du service rendu. Par ailleurs, cette gestion est rendue très souple par la possibilité d'obtenir relativement facilement une subvention d'origine locale ou fédérale, pour développer une nouvelle activité.

Après ces généralités, nous envisagerons la création du réseau des bibliothèques médicales, en commençant par un bref historique. L'existence du réseau des bibliothèques médicales n'est pas très ancienne; en fait, on peut considérer qu'il a pris naissance en 1967, date de création de la première bibliothèque médicale régionale. Selon Martin M. Cumming et Mary E. Corning 1, en 1964 il n'y avait pas à proprement parler de réseau national de prêt interbibliothèques. A l'exception de quelques réseaux locaux, regroupant en général des bibliothèques importantes, le prêt inter fonctionnait surtout en ayant recours à la « National library of medicine », (bibliothèque nationale pour la médecine, située à Bethesda), en raison de l'importance de ses collections. En 1964, la NLM disposait d'un budget de 20 M. de NF et d'un personnel de 350 personnes. Elle servait donc pratiquement de Centre national de prêt pour les bibliothèques médicales américaines.

Au début des années 1960, il y avait eu un certain nombre d'études réalisées pour améliorer la transmission de l'information dans le secteur biomédical, et en particulier une étude de l'Académie nationale des sciences et aussi de la « Commission sur les maladies du cœur, le cancer et la congestion cérébrale ».

D'autre part, à la même époque, il y avait une tendance générale de la part des bibliothèques médicales américaines, à servir au-delà de leur clientèle locale, mais elles n'avaient pas toujours les moyens de le faire. En fait, il y avait un déséquilibre entre l'importance des budgets accordés à l'enseignement et à la recherche médicale et le manque d'accroissement des budgets des bibliothèques médicales.

C'est alors que la NLM réexamina le rôle qu'elle pouvait jouer, se rendant compte qu'elle ne pouvait pas continuer à servir longtemps de Centre national de prêt à plus de 6 000 bibliothèques médicales.

La NLM préconisa alors de créer, ou d'améliorer les bibliothèques au niveau local, et de développer les réseaux régionaux et locaux.

Le Medical library assistance act (MLAA) voté par le Congrès en octobre 1965 reprit ces recommandations et permit de débloquer 438 M. de NF sur une période de 5 ans. Les objectifs poursuivis étaient les suivants :
1. construire des bibliothèques médicales (28 % des crédits) ;
2. former des bibliothécaires médicaux (11 % des crédits) ;
3. favoriser des projets de recherche dans le domaine médical (5 %) ;
4. favoriser la recherche et le développement en bibliothéconomie médicale (15 % des crédits) ;
5. améliorer et accroître les moyens mis à la disposition des bibliothèques médicales (29 % des crédits) ;
6. établir des bibliothèques médicales régionales (12 % des crédits) ;

Nous allons maintenant voir comment le réseau fut effectivement mis en place :

Au départ, il n'y avait pas de plan précis et bien arrêté définissant les différents buts poursuivis par le programme des bibliothèques régionales médicales (Regional medical library program : RMLP). L'objectif général était de permettre au chercheur isolé, au généraliste dans une petite ville, à un chirurgien dans un petit hôpital d'avoir accès à la documentation dans des conditions aussi bonnes que les enseignants d'une grande faculté de médecine.

Cet objectif devait être atteint en complétant et non en supplantant, les réseaux ou les possibilités offertes dans ce domaine. Il fallait donc développer la coopération entre les différents réseaux.

Le schéma du réseau à la forme d'une pyramide, avec la NLM comme sommet (voir fig. n° 1). Cette pyramide est composée de quatre niveaux.

a) la NLM figure au sommet de la pyramide ; c'est le dernier maillon de la chaîne ; en raison de l'importance de ses collections ; 1 400 000 volumes (y compris périodiques reliés), 25 000 titres ; c'est le dernier recours, ou presque, quand la demande ne peut être satisfaite au niveau de la région. En fait, un certain nombre de demandes qui ne peuvent être satisfaites par la NLM peuvent l'être, soit par une autre région, soit par l'envoi à la BLLD (G.B.).

b) les bibliothèques médicales régionales (Regional medical libraries ou RML).

Entre 1965 et 1970 l'ensemble du pays fut divisé en Il grandes régions médicales (voir fig. n° 2), chaque région regroupant plusieurs états et dans chaque région, une bibliothèque fut choisie comme « bibliothèque médicale régionale ».

Cette bibliothèque médicale régionale est une combinaison de deux éléments :

1. des collections importantes permettant de répondre aux demandes de prêt inter de la région. Dans le cas d'une région centralisée, ces collections se trouveront dans une seule bibliothèque. Dans certains cas, cette bibliothèque médicale régionale peut être constituée par plusieurs bibliothèques réparties dans les différents états constituant la région. Cette solution décentralisée est retenue quand la région dispose de plusieurs bibliothèques importantes.

2. un bureau central de coordination composé d'un personnel de 5 à 6 personnes. Ce bureau est en général situé dans les locaux de la bibliothèque médicale régionale, ou à la bibliothèque la plus importante de la région.

Le personnel de coordination n'émarge pas sur le budget de la bibliothèque d'accueil, mais sur le budget fédéral mis à la disposition des régions par l'intermédiaire de la NLM.

Le rôle de la bibliothèque médicale régionale est le suivant :

1. Elle doit améliorer et étendre son service de référence et de prêt inter à l'ensemble des utilisateurs de la région. Elle doit proposer un service gratuit de prêt, et si nécessaire de photocopies pour le prêt inter, c'est le dernier recours avant la transmission à la NLM.

La bibliothèque médicale régionale doit mettre à la disposition de la région des possibilités d'accès aux banques de données de la NLM (Medline, Toxline, Serline, Catline...)

2. Elle doit coordonner les efforts de coopération des bibliothèques de la région, assurer une formation du personnel afin de promouvoir une utilisation maximum des ressources documentaires. Chaque bibliothèque médicale régionale a été chargée d'élaborer un plan régional.

3. Chaque bibliothèque médicale régionale reçoit de la NLM une subvention importante, dont la plus grande partie sert à financer le prêt inter bibliothèque. En ce qui concerne le financement du prêt inter, la NLM accorde sa subvention proportionnellement aux nouveaux accords et aux améliorations du réseau : elle ne prend pas à son compte les demandes de prêt inter qui existaient avant le démarrage du programme : il s'agit de compléter les efforts déjà entrepris, non de les remplacer.

Ces bibliothèques médicales régionales n'ont pas été créées de toutes pièces, mais ont été choisies parmi les bibliothèques les plus importantes, et possédant une réputation de qualité de service. En utilisant une infrastructure déjà existante, on a évité de créer une nouvelle structure, qui aurait été une structure fédérale, en permettant ainsi une meilleure utilisation des crédits.

En général, les bibliothèques choisies, parfois après une compétition assez serrée, sont de grandes bibliothèques universitaires ; pour la Nouvelle-Angleterre, c'est-à-dire la région n° 1 (Connecticut, Maine, Massachussetts, New Hampshire, Vermont), c'est la bibliothèque d'une des plus grandes universités privées des États-Unis, celle d'Harvard qui a été retenue : Francis A. Countway library of medicine. Cette organisation centralisée a d'ailleurs cédé la place, dans le courant de l'année 1977 à une organisation décentralisée. C'est cette formule qui fut choisie en 1971 dans la région de Midwest (Région n° 7, regroupant les états de l'Illinois, Indiana, Iowa, Minnesota, North Dakota, Wisconsin) où la bibliothèque médicale régionale est composée de 12 bibliothèques de secteur réparties dans les différents états ; l'une de ces bibliothèques, John Crerar à Chicago, est le siège du bureau central de coordination dans la région 7 et son personnel est composé de 4 bibliothécaires et 2 secrétaires ; au niveau de chaque état, un bibliothécaire assure la coordination en rapport avec le bureau central à Chicago ; l'ensemble de ce personnel de coordination est payé sur des crédits fédéraux mis à la disposition du réseau par l'intermédiaire de. la NLM ; chaque bibliothèque de secteur reçoit une subvention proportionnelle au nombre de demandes de prêt inter qu'elle satisfait.

La bibliothèque choisie peut être aussi la bibliothèque d'un grand corps scientifique, on peut citer comme exemple la bibliothèque du College of physicians à Philadelphie pour la région n° 3 (Delaware, Pennsylvanie, Sud du New Jersey), ou de la New York academy of medicine (région n° 2 : New York et Nord du New Jersey).

On constate que la bibliothèque médicale régionale a suivi une évolution : tout d'abord centralisée dans un seul établissement qui filtrait l'ensemble des demandes de prêt inter d'une région avant de transmettre à la NLM plusieurs régions se sont orientées vers une décentralisation effective, et la charge du prêt inter, et aussi la subvention correspondante ont été réparties entre plusieurs bibliothèques de secteur ; ces bibliothèques peuvent avoir des noms divers (Area Library, Resource Library, Participating Library) et ont pour mission de servir les plus petites bibliothèques dans une zone géographique bien déterminée. Pour être choisie comme bibliothèque de secteur, les critères peuvent varier et dans la région n° 4, (Maryland, North Caroline, Virginia, Washington DC, West Virginia), la bibliothèque doit réunir les conditions suivantes :
1. avoir au moins 5 bibliothécaires qualifiés ;
2. avoir une collection de 50 000 volumes ;
3. recevoir 1 000 abonnements (avec des collections remontant à 10 ans) ;
4. avoir accès à des banques de données bibliographiques sur ordinateur.

c) Bibliothèques de base (Basic unit library).

Ce sont des bibliothèques au niveau local, les bibliothèques d'hôpitaux, de laboratoires, d'associations de médecins... etc. Elles sont souvent situées dans des villes de petite ou moyenne importance, et l'activité de prêt inter constitue une de leurs activités principales en raison du caractère limité de leurs collections.

Afin de décharger au maximum les bibliothèques médicales régionales, ou les bibliothèques de secteurs qui, lors de la mise sur pied du réseau, recevaient directement les demandes de ces bibliothèques de base, celles-ci ont été encouragées à se regrouper en consortium afin de mettre en commun leurs moyens dans tous les domaines : prêt inter, répartition des abonnements, organisation de journées de formation ou de perfectionnement pour les bibliothécaires, préparation de catalogues collectifs, exploitation en commun d'un terminal Medline.

Après la description de ce réseau en forme de pyramide, nous allons envisager le circuit d'une demande de prêt inter. Pour les demandes par voie postale, le formulaire de demande agréé par l'American library association (fig. 3) est utilisé de façon généralisée. Ce formulaire, constitué d'une liasse de 4 feuilles auto-carbonées, est un instrument essentiel pour le fonctionnement du prêt-inter en simplifiant les formalités d'émission des demandes (suppression du registre), en remplaçant plusieurs imprimés (formulaire de demande, reçu, etc.) par un seul et en permettant une information sur la circulation de la demande (« interim report » partie C). Un gain de temps considérable en résulte. Le prix de revient de ce formulaire, tiré en grand nombre puisque l'ensemble des bibliothèques américaines l'utilisent, est de l'ordre de 16 centimes l'unité. Dans certains cas, la demande de prêt inter, pourra être refoulée si la demande standard n'est pas utilisée ou si elle n'est pas correctement remplie.

Les 4 volets sont utilisés de la façon suivante :
- La partie D, dernière feuille de la liasse est conservée par la bibliothèque emprunteuse, elle sert de double et éventuellement, elle sert d'avis de retour s'il s'est agi d'un prêt.
- Les parties A, B et C sont envoyées à la bibliothèque prêteuse.

La bibliothèque prêteuse conserve la partie A pour ses dossiers, elle renvoie la partie B avec le document et utilise la partie C pour justifier le remboursement auprès de la bibliothèque médicale régionale.

Si la première bibliothèque sollicitée ne peut satisfaire la demande, elle transmettra cette demande à une autre bibliothèque et enverra un exemplaire de la demande à la bibliothèque emprunteuse pour l'avertir de la transmission.

Éventuellement, s'il y a plusieurs passes, on fera une photocopie de la demande afin de toujours tenir la bibliothèque emprunteuse au courant de la circulation de la demande et des différentes demandes effectuées.

De nombreuses bibliothèques sont équipées de télex ; la presque totalité des bibliothèques visitées, à l'exception des bibliothèques d'hôpitaux, en sont équipées. La NLM a commencé à utiliser un télex en 1966, et actuellement 1/4 des demandes de prêt inter qu'elle traite arrive par télex. D'après l'annuaire de l'Association des bibliothécaires médicaux, 114 bibliothèques médicales étaient équipées de télex en 1974-1975.

Le circuit d'une demande de prêt inter peut varier selon le type d'organisation de la région, et l'existence des réseaux de bibliothèques, tels NYSIL (New York system for interlibrary loan). Dans les régions à organisation centralisée, les premières à être créées, la bibliothèque médicale régionale était le seul interlocuteur entre les bibliothèques d'une région et la NLM : toute demande de prêt inter ne pouvant être satisfaite dans la région devait être transmise par l'intermédiaire de cette bibliothèque. Cette situation a beaucoup évolué et les régions sont maintenant organisées sur un modèle beaucoup plus décentralisé ; la région n° 7, dont les 6 états totalisent approximativement 26 000 000 d'habitants répartis sur 900 000 km2, comprend 12 bibliothèques de secteur et 1 500 bibliothèques de base dont 400 sont regroupées en 49 consortia. Pour stimuler la création de consortia, cette région a développé un système original de « BONUS » accordés en fonction du nombre de demandes de prêt inter satisfaites au niveau local par telle ou telle bibliothèque et qui leur permettent de faire d'autres demandes. Ce système encourage les petites bibliothèques à satisfaire le maximum de demandes au niveau local, sans avoir recours à l'échelon supérieur, diminuant d'autant les demandes du prêt inter destinées aux bibliothèques les plus importantes, et limitant, dans l'espace et dans le temps, la circulation d'une demande.

Examinons maintenant le cas d'une demande de prêt inter émise par la bibliothèque A (fig. n° 4). Cette bibliothèque A appartient à un consortium situé dans l'Illinois. Nous allons envisager les différentes possibilités de transmission.

1. Première transmission

A appartient au même consortium que B et C. Après localisation, la bibliothèque A transmettra à la bibliothèque B qui fait partie du même consortium et avec qui un accord de prêt inter existe, en général sur une base de réciprocité.

Si B peut satisfaire la demande, il envoie le document et la transaction est terminée.

2. Deuxième transmission

- B ne peut satisfaire la demande ;

- A envoie alors sa demande à sa bibliothèque de secteur dans l'Illinois (bibliothèque D) ;

- Si la bibliothèque de secteur peut satisfaire la demande, il envoie le document à la bibliothèque A et la transaction est terminée.

- Si la bibliothèque de secteur D située dans l'Illinois ne peut satisfaire la demande, dans ce cas, il y a deux possibilités :

3. Première possibilité : on ne peut pas localiser le document dans la région n° 7, la bibliothèque de secteur D transmettra alors directement à la NLM. C'est la transmission n° 3 sur le croquis et la NLM renverra directement le document à la bibliothèque A.

4. Seconde possibilité : si le document peut être localisé dans une bibliothèque de la région 7, par exemple dans la bibliothèque de secteur du Wisconsin (E), la bibliothèque D transmettra à la bibliothèque E. C'est la transmission n° 4. Si la bibliothèque E peut satisfaire la demande, elle transmet le document à A et la transaction est terminée.

5. Si la bibliothèque du Wisconsin (E) ne peut satisfaire, on ne continuera pas à chercher dans la région 7. E transmettra directement à la NLM qui enverra le document directement à A. C'est la transmission n° 5.

6. Si la NLM ne peut satisfaire, elle ne transmettra pas la demande ailleurs, mais renverra la demande à la bibliothèque A, avec une note précisant que la NLM ne possède pas le document. Dans ce cas, la bibliothèque A pourra demander dans une autre région médicale, en précisant que le document ne se trouve, ni à la région n° 7, ni à la NLM. Il est à remarquer qu'un nombre non négligeable de demandes sont satisfaites par l'intermédiaire de la BLLD (British library lending division) ; il existe peu de statistiques concernant les délais de satisfaction, mais chaque bibliothèque maintient des statistiques très précises concernant le taux de satisfaction et le temps de traitement des demandes à l'intérieur de l'établissement, (fig. n° 5) ainsi que leur provenance ; la plus grande partie des demandes qui peuvent être satisfaites, doivent l'être, soit dans les 24 heures, soit dans les 4 jours suivants. Il ne reste plus alors qu'un pourcentage assez faible de demandes satisfaites dans un délai de 5 à 10 jours. La plupart des bibliothécaires à qui j'ai posé la question avançaient un délai de satisfaction de 15 jours.

Plusieurs remarques peuvent être faites sur l'organisation de ce réseau.

1. La NLM figure en haut de la hiérarchie et n'intervient qu'en dernier ressort. Les demandes de prêt inter qu'elle reçoit concernent donc des documents assez peu répandus, rédigés dans des langues que les Américains ont tendance à appeler « exotiques ». En raison de l'accroissement considérable du prêt inter, le fardeau de la NLM reste lourd, et au lieu de diminuer, il a presque doublé : en 1967, la NLM recevait 175 000 demandes de prêt inter, en 1976, elle en recevait 263 000 (dont 20 000 à 30 000 de pays étrangers). Selon James L. Wood 2, environ 3 millions de demandes sont traitées dans le cadre du « Regional medical library program ».

Le total des demandes de prêt inter subventionnées sur le budget fédéral, c'est-à-dire celui géré par la NLM, dépasse les 600 000.

Ce chiffre ne donne qu'une idée incomplète du volume du prêt inter dans les bibliothèques médicales puisqu'un certain nombre de demandes sont satisfaites au niveau des bibliothèques de base et ne sont pas automatiquement incluses dans ce chiffre. D'autre part, une deuxième catégorie de demandes satisfaites grâce à d'autres réseaux regroupant de grandes bibliothèques de toutes disciplines, ne sont pas non plus subventionnées par la NLM car il s'agissait là de réseaux pré-existant au réseau des bibliothèques médicales.

2. Ma seconde remarque porte sur l'évolution de la politique poursuivie par la NLM dans ce domaine du prêt inter : cette politique a consisté tout d'abord à stimuler la demande afin de favoriser l'accès au document du personnel médical éloigné des grandes bibliothèques.

Mais la NLM a stimulé la demande tout en essayant de diminuer au maximum son rôle en tant que fournisseur direct du document. Ce transfert de charge a été obtenu dans un premier temps par l'organisation des bibliothèques médicales régionales d'abord centralisées puis décentralisées et dans un deuxième temps, les bibliothèques des régions elles-mêmes étant surchargées par des demandes de petites bibliothèques de base, en stimulant la création de consortia afin de pouvoir satisfaire une partie des demandes sans avoir à passer à l'échelon supérieur.

3. Il faut souligner l'importance du travail de formation, de coordination réalisée par les bibliothécaires de chaque bibliothèque médicale régionale, et de la NLM, dans le cadre des services de relations extérieures (« extramural programs »). Il s'agit là d'un travail essentiel, dont les résultats ne sont pas immédiats, mais sans lui le réseau n'aurait pu exister. Cette action est poursuivie dans tous les domaines : entre autres, réalisation de catalogues collectifs, formation ou recyclage du personnel, utilisation des bases de données bibliographiques.

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Fig. 1 - Un réseau pyramidal

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Fig. 2 - Le réseau régional des bibliothèques médicales

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Fig. 3

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Fig. 4

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Fig. 5 - Weekly statistical report

  1. (retour)↑  CUMMING (Martin M.), CORNING (Mary E.). - The Medical library assistance act : An analysis of the NLM extramural programs, 1965-1970. In : Bulletin of the Medical library association, 1971, vol. 59, n° , p. 378.
  2. (retour)↑  WOOD (James L.). - Document access in United States. In : Interlending review, 1978, vol. 6, n° 1, p. 6-19.