Circulaire du 19 juin 1968 adressée aux conservateurs en chef, conservateurs et bibliothécaires et concernant les problèmes soulevés par l'utilisation des bibliobus

Étienne Dennery

Le développement de la Lecture Publique n'a pu se produire que grâce à un accroissement du nombre des bibliobus. En outre, dans de nombreux cas, l'initiative privée a secondé l'action de l'État; des associations de Lecture Publique, créées sous le régime de la loi de 190I, mettent à la disposition des Bibliothèques centrales de prêt du personnel et du matériel. Les chefs de ces établissements ont été conduits à poser un certain nombre de questions de nature juridique, auxquelles peuvent être apportées les réponses ci-après :

I) Nomenclature des permis de conduire d'après la classification des véhicules automobiles :

Le permis de conduire de catégorie B, couramment appelé permis tourisme, permet de conduire les véhicules automobiles affectés au transport des marchandises et ayant un poids total autorisé en charge qui n'excède pas 3 500 kg.

Le permis de conduire de catégorie C, dit permis poids lourds, permet de conduire les véhicules automobiles affectés au transport de marchandises ou de matériel et dont le poids total autorisé en charge excède 3 500 kgs. La validité de ce permis est subordonnée à des examens médicaux périodiques, qui doivent être subis par les conducteurs lorsqu'ils atteignent l'âge de 35, 45, 55 et 60 ans; au-delà de 60 ans, l'examen doit être subi tous les deux ans.

Le permis de conduire de catégorie D, appelé de transport en commun, permet de conduire les véhicules automobiles transportant plus de 8 personnes, non compris le conducteur, ou comportant, outre le siège du conducteur, plus de 8 places assises. La validité de ce permis est subordonnée également à des examens médicaux périodiques, dans les conditions suivantes :
- tous les 5 ans pour les conducteurs âgés de moins de 45 ans;
- tous les 3 ans pour les conducteurs dont l'âge est compris entre 45 et 55 ans;
- tous les 2 ans pour les conducteurs dont l'âge est compris entre 55 et 60 ans;
- tous les ans, au-delà de 60 ans.

Dans un souci de sécurité, l'État exige des conducteurs d'automobile affectés comme fonctionnaires aux Bibliothèques centrales de prêt, la possession des trois permis, ainsi que la réussite à un examen professionnel et psychotechnique.

2) Conduite des bibliobus de l'État :

a) Conformément aux dispositions de la loi du 31 décembre 1957, la responsabilité de la personne morale de droit public est, à l'égard des tiers, substituée à celle de son agent conduisant un véhicule quelconque et auteur de dommages causés dans l'exercice de ses fonctions.

En conséquence, il suffit, pour que soit engagée, le cas échéant, la responsabilité de l'État, à l'occasion d'un accident survenu à un bibliobus ou occasionné par ce dernier, que le conducteur soit réputé effectuer, au moment de l'accident, un déplacement de service, sur ordre soit écrit (ordre de mission, tableau de service), soit même verbal, le chef de service ayant seul pouvoir de décision en ce domaine.

En cas d'indisponibilité du chauffeur en titre, le bibliobus peut être conduit soit par un autre fonctionnaire de la B.C.P., soit par une personne engagée par l'État (agent saisonnier, par exemple), soit par un chauffeur loué à une entreprise de transports; il y aura lieu de s'assurer que les remplaçants sont bien en possession du ou des permis de conduire correspondants au type du véhicule.

b) Sous le bénéfice de cette remarque, les solutions qui peuvent être apportées au problème de la désignation de chauffeurs de remplacement appelés à conduire des véhicules de l'État, semblent commandées au premier chef par des considérations propres à l'organisation et au fonctionnement du service.

Le bibliobus d'État peut aussi être conduit par un chauffeur rémunéré par une association d'amis de la Lecture Publique, à condition que cette association place le chauffeur sous les ordres du Directeur de la B.C.P. Cette « mise à disposition » pourrait soit être prévue dans les statuts de l'association, soit faire l'objet d'une convention écrite entre l'association et la B.C.P. (voir note annexe).

3) Utilisation des bibliobus d'association par les Bibliothèques centrales de prêt :

Dans l'hypothèse de prêt, à l'État, d'un bibliobus appartenant à une association de Lecture Publique donc immatriculé selon le droit commun et assuré auprès d'un organisme privé, les dispositions de la loi du 31 décembre 1957 pourront trouver leur application, quant à la réparation des dommages causés à des tiers, dans les conditions ci-dessus rappelées. Pour éviter, en pareille éventualité, toutes difficultés touchant l'imputation de la dépense au budget de l'État, ou contestations avec l'assureur du véhicule de l'association, il serait hautement souhaitable que les conditions du prêt résultent de clauses contractuelles dûment souscrites par les parties.

Lorsque le bibliobus d'une association est mis à la disposition de la Bibliothèque centrale de prêt et conduit par le chauffeur de l'État, la responsabilité de l'État se substitue à celle de l'association, à la condition que la chauffeur ait reçu mission écrite du chef d'établissement (Directeur de la B.C.P.) ou que l'opération soit inscrite dans un tableau de service.

Cette possibilité ne devant être utilisée qu'avec modération, il conviendra de solliciter l'accord préalable de la Direction des bibliothèques et de la lecture publique.

Il appartiendra à l'association de souscrire les polices d'assurance contre les risques susceptibles de lui incomber en ce qui concerne les dommages causés aux tiers.

En ce qui concerne ces polices d'assurance, il y aura lieu de vérifier qu'elles autorisent la conduite du bibliobus par un fonctionnaire de l'État et qu'elles couvrent les risques encourus par les fonctionnaires qui y sont éventuellement transportés.

4) Transport de personnes dans les bibliobus d'État :

En ce qui concerne les transports, à bord des bibliobus, d'élèves bibliothécaires, de visiteurs étrangers, de fonctionnaires de l'Éducation Nationale ou de membres du personnel des Bibliothèques, s'applique la notion de transports « intéressés », l'Administration trouvant un intérêt direct à l'opération. On doit alors admettre que, en cas d'accident, pèse sur le transporteur une présomption de responsabiblité, dont il ne peut s'exonérer qu'en apportant la preuve d'une faute imprévisible et irrésistible de la victime, le cas fortuit ou la force majeure. Si cette preuve ne peut être administrée, la réparation des accidents survenus aux personnels transportées incombe à l'Administration.

Les personnes transportées, qui n'ont pas la qualité d'agent public, sont, au cours des déplacements, considérées comme placées sous l'autorité hiérarchique de la puissance publique et peuvent prétendre au remboursement de leurs dommages dans les mêmes conditions que les agents publics.

Fonctionnaires et agents sont fondés, selon la jurisprudence des tribunaux judiciaires, à obtenir la réparation intégrale du préjudice suivant le droit commun, déduction faite des prestations statutaires ou prévues aux contrats, allouées par l'Administration.

Dans ces conditions, l'intérêt bien compris de l'État commande qu'il ne soit procédé a de tels transports que de façon limitée.

5) Pénétration des bibliobus dans les locaux scolaires :

De prime abord, il faut considérer comme exclu que les bibliobus aient, au cours de visites à des établissements scolaires, à effectuer quelque manœuvre que ce soit en présence des élèves. Chaque fois qu'un bibliobus devra pénétrer, pour accomplir son service, à l'intérieur d'une enceinte scolaire, il y aura lieu de s'assurer qu'aucun élève n'erre dans les cours ou couloirs d'accès. De même, le bibliobus ne devra effectuer ses manœuvres de départ qu'après la rentrée en classe, ou après la sortie des élèves.

Si, par ailleurs, les conducteurs, une fois le véhicule en place, prennent les mesures de sécurité qui s'imposent (cabine fermée à clé ou surveillance constante, portes bloquées, etc...), seul semble pouvoir s'appliquer, en l'espèce, le droit commun de la responsabilité en matière d'accidents scolaires (article 1384 du Code civil, modifié par la loi du 5 avril 1937).

Note annexe : Relations entre une Association de Lecture Publique et une B.C.P.

Les statuts de l'Association pourraient prévoir dans l'article où sont définis les buts de celle-ci, une formule de ce genre :

« L'Association a pour but d'aider le développement de la lecture publique en apportant son concours à la Bibliothèque centrale de prêt du département de ... notamment par la mise à la disposition du Directeur de cet établissement d'un personnel rémunéré par l'Association et du bibliobus acquis par l'Association... ».

Dans l'article concernant l'organisation de l'Association, il sera bon de prévoir que celle-ci souscrira une police d'assurance concernant tous les risques susceptibles d'être provoqués par le bibliobus ou d'être encouru par les personnes qu'il transporte.

Dans le cas où les membres de l'Association n'accepteraient pas une modification des statuts dans ce sens, il pourrait être envisagé un accord de ce genre.

« Entre l'Association... représentée par son Président et la Bibliothèque Centrale de Prêt du département de... représentée par son Directeur, il a été convenu ce qui suit :
- article Ier :...
- article 2 :... ».

Le texte de ces 2 articles reprendra les propositions formulées ci-dessus pour la rédaction des statuts. La convention devra être signée par les deux parties contractantes et être approuvée au cours d'une assemblée générale de l'Association, à laquelle il pourra être fait référence dans le préambule.