La bibliothèque de la Sorbonne, 250 ans d’histoire au cœur de l’université
La bibliothèque de la Sorbonne, 250 ans d’histoire au cœur de l’université
Éditions de la Sorbonne, 2021
Collection « Histoire de la France aux XIXe et XXe siècles », n° 87
ISBN 979-10-351-0621-8
Lieu emblématique de l’université qui l’abrite, connue dans le monde entier, en particulier pour son impressionnante salle de lecture baptisée « Salle Jacqueline de Romilly », la bibliothèque de la Sorbonne, aujourd’hui nommée officiellement bibliothèque interuniversitaire de la Sorbonne (BIS), fêtait en 2020 les 250 ans de son ouverture au public, le 3 décembre 1770. Cet anniversaire a donné lieu à plusieurs événements, dont la parution fin 2021, dans la collection « Histoire de la France aux XIXe et XXe siècles » des éditions de la Sorbonne, du livre La bibliothèque de la Sorbonne, 250 ans d’histoire au cœur de l’université, dirigé par Laurence Bobis, directrice de la BIS, et Boris Noguès, maître de conférences en histoire moderne à l’École normale supérieure de Lyon, spécialiste de l’histoire de l’éducation en France à l’époque moderne. À tout seigneur, tout honneur, la préface est rédigée par Georges Haddad qui, fait assez rare pour être souligné, avait pris appui sur cet anniversaire pour faire de la dernière année de son second mandat de président de l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, de 2016 à 2020, « l’Année des bibliothèques ».
Une trentaine d’auteurs ont contribué à cet opus organisé en cinq grandes parties qui associent judicieusement des entrées chronologiques et des entrées thématiques : Fondations et refondations ; Éléments d’archéologie des collections ; La bibliothèque en pratique : archaïsmes et innovations ; Voisins, hôtes et rivaux ; Représentations et identités d’une bibliothèque dans le siècle.
Plongée dans une histoire mouvementée
De son ouverture en 1770 à l’initiative des professeurs des facultés des arts et de théologie, à l’établissement documentaire moderne qu’elle est aujourd’hui, on suit avec un vif intérêt l’histoire riche et chaotique de la bibliothèque de la Sorbonne, qui épouse étroitement celle des institutions universitaires et académiques parisiennes. Parmi les étapes importantes, l’installation en décembre 1797 de la « bibliothèque de l’université de Paris » dans le bâtiment construit par l’architecte Henri-Paul Nénot pour la « nouvelle Sorbonne », où elle occupe une place centrale qui est toujours la sienne aujourd’hui, est fondamentale. En 1970, l’éclatement de l’université de Paris conduit à lui donner le statut de bibliothèque interuniversitaire, statut complexe qui montre aujourd’hui ses limites. En 2003, le constat par une commission de sécurité de sa vétusté et de son inadaptation à l’accueil du public a bien failli avoir raison de son existence. Le projet Sorbonne 2013 lui permettra de mener le vaste chantier de modernisation de ses espaces et de ses services dont elle avait besoin.
L’ouvrage fait, bien sûr, la part belle aux riches collections de la BIS. Si la bibliothèque de la Sorbonne ne possède pas le fonds médiéval constitué à partir de 1289 au collège de la Sorbonne, déposé en 1796 à la Bibliothèque nationale, elle détient néanmoins des collections remarquables dans lesquelles les dons occupent une place centrale. Dans la vie des collections, on découvre aussi d’étonnantes histoires de livres volés et restitués anonymement par des dépôts sur les marches de la bibliothèque, ou encore celles d’ouvrages rendus plusieurs dizaines d’années après leur emprunt.
On suit également l’histoire des registres de prêt, des catalogues et des plans de classement qui offre une incursion très concrète dans la vie de la bibliothèque et qui se révèle riche d’enseignements sur l’évolution des approches bibliothéconomiques des XIXe et XXe siècles.
Plusieurs focus éclairent la vie de l’institution et de ses collections, donnent à mieux connaître certains acteurs majeurs de son histoire ou apportent un éclairage particulier. C’est le cas notamment des chapitres consacrés au recteur Jean-Gabriel Petit de Montempuys (1765-1793) dont la bibliothèque constitue le noyau originel des collections de la bibliothèque de la Sorbonne, de celui évoquant Jenny Delsaux (1896-1977), spécialiste de l’indexation matière mais aussi chargée, à partir de 1945 au sein de la Commission de récupération artistique, de la sous-commission des livres dans laquelle elle s’attacha à organiser autant que possible l’identification et la restitution à leurs propriétaires des livres spoliés pendant la Seconde Guerre mondiale, du chapitre consacré aux représentations de la bibliothèque de la Sorbonne dans la presse entre 1790 et 1940, ou encore de celui dédié à la collecte d’archives orales effectuées à l’occasion des 250 ans de la bibliothèque.
Au fil du livre, certains éléments d’information sont repris dans différents chapitres, ce qui peut donner une impression de redites dans le cas d’une lecture continue mais ce qui présente l’intérêt de pouvoir lire indépendamment chaque article de ce riche ouvrage qui retrace l’histoire singulière de la bibliothèque de la Sorbonne mais aussi, à travers elle, celle des institutions académiques parisiennes depuis plus de deux siècles ainsi que les grandes évolutions bibliothéconomiques et les problématiques fondamentales – problèmes d’espace d’accueil et de stockage, de personnels, de gestion des collections, de conservation, de valorisation, de moyens de fonctionnement, d’évolution des services – communes à tous les équipements documentaires de l’enseignement supérieur.