Le rayon best-sellers des médiathèques de Saint-Étienne se porte bien

Iris Petit

En septembre 2015, les médiathèques de Saint-Étienne créaient à Tarentaize un rayon best-sellers 1

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Voir l’article d’Iris PETIT, « Pleins feux sur les best-sellers : une success story à la médiathèque de Tarentaize », Bulletin des bibliothèques de France (BBF), 2016, no 9, p. 96-103. En ligne : https://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2016-09-0096-010

afin de mieux mettre en valeur les livres « dont on parle », ceux qui recueillent les faveurs du public. Après un an d’existence, une évaluation de ce nouveau rayon est indispensable.

Ouvert le 17 septembre 2015, le rayon best-sellers permet de valoriser les achats des nouveautés « meilleures ventes ». Ces ouvrages ne sont ni réservables ni prolongeables, donc plus visibles. Basées sur la liste Edistat, les acquisitions ont subi des modifications depuis la création du rayon. Après des débuts un peu chaotiques (critiques du public, réticences du personnel), le rayon a trouvé son rythme de croisière, et connaît toujours un joli succès. Au fil du temps, d’autres ajustements se sont révélés nécessaires, notamment concernant les modalités de retrait des documents du rayon.

De nouveaux critères d’acquisition

En 2016, le budget alloué aux best-sellers a été identique à celui de 2015 : 8 000 euros, avec cette contrainte supplémentaire qu’il fallait maintenir des commandes régulières sur 12 mois et non plus sur 6 mois. Nous avons donc décidé de modifier les critères d’acquisition des best-sellers :

  • aucune commande de mangas, qui posent problème pour la gestion des séries et qui, de plus, ne sont pas énormément empruntés dans ce rayon ;
  • certaines suites de séries de bandes dessinées sont toujours achetées, mais uniquement les plus connues, suivies par les gestionnaires de fonds BD. Les « one shot » sont à privilégier autant que possible ;
  • idem pour les romans jeunesse et adolescents ;
  • aucun achat de manuel scolaire, guide de voyage, livre de poche, ou roman sentimental type « Harlequin » ;
  • un tri plus affiné pour les achats de romans et documentaire adultes : sont achetés en doubles exemplaires uniquement les « super-best-sellers », ceux qui connaissent une progression à la hausse dans le palmarès d’Edistat, les autres sont achetés en un seul exemplaire. À noter qu’il s’est produit à plusieurs reprises le scénario suivant : un ouvrage placé assez bas dans la liste d’Edistat est acheté en un seul exemplaire, et deux semaines après, ayant gagné de nombreuses places, un second exemplaire est acheté en renfort ;
  • les ouvrages écrits par des hommes politiques ne sont acquis qu’en un seul exemplaire, les essais politiques placés haut dans la liste en deux exemplaires ;
  • afin de suivre au plus près l’actualité éditoriale, le principe d’une commande hebdomadaire est retenu, d’environ dix exemplaires par semaine, hors juillet-août où l’activité éditoriale est moindre, et novembre-décembre en raison des contraintes de fin d’exercice budgétaire ;
  • il a pu arriver qu’une semaine se passe sans commandes vers fin juin-début juillet, car aucun nouveau titre correspondant aux critères n’avait fait son entrée dans la liste Edistat.

Les ouvrages commandés pour le rayon best-sellers bénéficient d’un traitement accéléré dès leur réception : ils sont exemplarisés et équipés en priorité, afin d’être disponibles le plus rapidement possible pour le public. De plus, une chaîne de personnes-relais a été mise en place, afin de maintenir cette réactivité en cas d’absence de l’agent chargé de leur équipement. Les best-sellers sont mis à disposition du public environ deux semaines après leur entrée dans la liste Edistat.

Des modalités de retrait du rayon repensées

Le mois de janvier 2016 a constitué un tournant important dans l’évolution du rayon best-sellers et nous a conduits à revoir totalement les modalités de retrait des documents de ce rayon.

En effet, comme cela avait été décidé à l’origine, nous avons entrepris de retirer les best-sellers qui figuraient dans le rayon depuis plus de trois mois à partir du 15 janvier 2016. Ces exemplaires ont été distribués dans les médiathèques de proximité, selon les desiderata des différents gestionnaires de fonds. En revanche, nous n’avions pas anticipé que, au vu des nouvelles modalités d’acquisition (dix exemplaires par semaine), très peu de nouveautés viendraient regarnir le rayon dépouillé par un retrait massif (plus de 300 documents en une dizaine de jours). Les présentoirs sont donc restés assez vides durant plusieurs semaines. Poursuivre dans cette voie aurait sans doute signé la « mort » de ce rayon à peine né.

Nous avons donc pris la décision de ne plus retirer les best-sellers au bout de trois mois, mais de conserver un « fonds de roulement » permanent d’au minimum 250 exemplaires, afin de maintenir l’attractivité du rayon. Les retraits ne se font plus selon une simple date d’entrée dans le rayon, mais en tenant compte également des ouvrages qui sont le moins empruntés, ce qui nécessite de consacrer plus de temps à cette opération.

Qu’en pense le public ?

Le public avait bien entendu constaté la brutale diminution de l’offre et plusieurs usagers s’en étaient inquiétés : allions-nous continuer d’alimenter ce rayon en nouveautés ? Voici bien la preuve que ce rayon a très vite été adopté par les usagers de la médiathèque, et qu’ils y portent une attention soutenue. Par ailleurs, certains usagers avaient déjà émis le souhait (par l’intermédiaire des bulletins d’expression distribués avec les best-sellers) que les ouvrages restent dans le rayon sur une longue période, afin que les lecteurs qui ne viennent à la médiathèque que toutes les trois semaines puissent avoir une chance de mettre la main sur l’ouvrage qui les intéresse.

Le seul bémol reste que, plus un ouvrage reste longtemps dans le rayon best-sellers, plus longue sera la période d’impossibilité de le réserver comme les autres documents des médiathèques, ce qui peut générer quelques frustrations…

En interne…

Une gestion plus fine des achats et des retraits a nécessairement des répercussions :

  • La sélection des acquisitions est devenue chronophage : désormais, la concertation est plus longue entre le gestionnaire du fonds et l’acquéreur, qui aide à préparer la liste hebdomadaire de commandes, pour déterminer en combien d’exemplaires acheter les titres de la liste d’Edistat (un ou deux), et parfois revenir sur ces choix quelques semaines plus tard, si un titre a connu une progression significative dans la liste.
  • Les listes de commandes des best-sellers sont toujours mises à disposition des acquéreurs du réseau, afin qu’ils puissent en tenir compte dans leurs propres acquisitions. Mais il n’est plus possible de prévoir dans quels délais les best-sellers seront retirés du rayon afin d’être redistribués sur le réseau. Il est donc trop tôt pour savoir quelles conséquences cela aura sur les acquisitions.
  • Même chose pour les suggestions d’achat : il nous est arrivé de signaler à un usager que sa suggestion ne serait pas honorée car le document demandé figurait déjà dans le rayon best-sellers, et qu’il pourrait le réserver trois mois plus tard. Quelle réponse apporter à ce genre de demande à présent ?

Tous ces points devront bien entendu être évoqués dans les groupes de travail qui élaboreront au cours des prochains mois la future politique documentaire des médiathèques.

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Figure 1. Évolution du rayon et du nombre de prêts entre septembre 2015 et septembre 2016
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Figure 2. Nombre de prêts par type de document du 17 septembre 2015 au 30 septembre 2016
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Tableau. Nombre de prêts par type de document

Une initiative qui fait des émules

Suite à la parution de l’article du 4 décembre 2015 sur le rayon best-sellers dans Livres Hebdo, nous avons été contactés par deux bibliothécaires qui souhaitaient mener une réflexion sur la création d’un rayon similaire dans leur médiathèque. Nous avons beaucoup échangé autour de la démarche et des conditions de mise en œuvre du rayon à Saint-Étienne. Il s’agit de :

  • la médiathèque de Saint-Genis-Laval qui a inauguré son rayon best-sellers en septembre 2016, lequel suscite des réactions positives des usagers ;
  • le rayon « Meilleures ventes » de la médiathèque de Calais qui a ouvert le 7 janvier 2017. Il s’inspire largement de notre expérience, mais avec quelques divergences : par exemple les romans sentimentaux du type « Harlequin » y sont inclus, même s’ils ne sont pas nécessairement destinés à rejoindre le fonds général quelques mois plus tard. De plus, la prolongation du prêt est possible pour ces documents, ce qui n’est pas le cas à Saint-Étienne.

Conclusion

Le rayon best-sellers était un pari qui n’avait rien d’évident au départ. Malgré les difficultés d’organisation et les réticences, il a su visiblement combler une attente du public, comme le montrent des chiffres de prêts très satisfaisants. Cette satisfaction du public est d’une importance capitale pour la longévité de ce rayon car, outre un investissement financier non négligeable, il reste d’une gestion complexe et particulièrement chronophage. La réflexion approfondie sur la politique documentaire initiée en septembre 2016 devra déterminer la place à donner à ce rayon dans les années à venir 2

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Pour aller plus loin, voir l’article de Claude POISSENOT, « Les collections à l’épreuve des emprunteurs », Bulletin des bibliothèques de France (BBF), 2016, no 9, p. 80-95. En ligne : https://bbf.enssib.fr/consulter/bbf-2016-09-0080-009

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