« Le numérique, une nouvelle dimension pour les bibliothèques »

Myriam Duboz

Près de 50 établissements étaient représentés à la bibliothèque de la Part-Dieu pour cette journée d’information et d’échange, le 17 juin 2011 – organisée par l’Agence Rhône-Alpes pour le livre et la documentation (Arald) 1 en partenariat avec les médiathèques du Pays de Romans, Médiat et la Drac Rhône-Alpes –, ce qui montre, comme l’a souligné Gilles Éboli, nouveau directeur de la bibliothèque municipale de Lyon, tout l’intérêt, l’enthousiasme mais aussi les interrogations suscités par la bibliothèque numérique.

Les organisateurs avaient parié sur une journée dynamique, multipliant les intervenants et les expériences, où chaque prise de parole était réduite, et par-là même synthétisée, gagnant en intérêt et en efficacité.

En 2008, environ 65 % des bibliothèques de Rhône-Alpes proposent un accès internet au public, pour la moitié gratuitement, et 41,5 % possèdent un site web. Cette étude ne nous dit en revanche rien des usages, c’est pourquoi le nouveau formulaire de rapport des bibliothèques au ministère de la Culture inclura cette dimension.

La révolution du web 2.0 dans les bibliothèques de lecture publique

La révolution du web 2.0, selon Lionel Dujol, de la médiathèque du Pays de Romans, transforme le web prescripteur d’information en web socialisé, fait d’échange et de participation. Et c’est là que les bibliothèques, comme les volontés politiques, doivent faire le grand saut et supprimer les barrières avec les publics, car on ne pourra pas se passer de leur participation. Là où il y avait prescription, il y a maintenant recommandation. Aux bibliothèques d’y entrer de plain-pied pour jouer leur rôle de conseil, mettre l’accent sur les services, et être reconnues comme source fiable d’information. Le bibliothécaire a longtemps indiqué au public où chercher, il doit aujourd’hui repenser ses fonctions face aux questions des usagers qui appellent une réponse immédiate.

Une table ronde a permis d’identifier les obstacles comme les réussites lors de la mise en œuvre de divers projets, qui dépendent des volontés politiques, des moyens, des médias utilisés, de l’implication des agents, du décloisonnement des fonctions, de l’interactivité possible, de l’adéquation avec les attentes des publics. Une large variété de dispositifs était présentée : le blog patrimonial d’Annecy, Libris 2, le site de critiques de livres Babelio 3, des bibliothécaires de Valence, la page Facebook de la médiathèque de Chassieu  4, le blog musical BMOL 5 de la bibliothèque de Grenoble, et l’exemple d’organisation interne des médiathèques du Pays de Romans  6. Les questions qui ont suivi ont porté sur la pérennité des supports et sur le cadre juridique (en rapport avec le succès des albums photos des animations sur Facebook).

Pour les bibliothèques, l’enjeu est de devenir productrices de contenus, au-delà d’une simple présence sur internet, et pour cela de se débarrasser d’une certaine culture de la perfection. Faire avec les moyens du bord, oser mettre en avant les collections et les animations comme les bibliothécaires musicaux de la ville de Grenoble.

L’utilisation du numérique en bibliothèque

La seconde partie de la journée était consacrée à l’utilisation du numérique en bibliothèque, avec en introduction une étude  7 menée à Lyon. Bertrand Calenge a présenté les résultats de cette enquête menée auprès de 129 usagers, qui distingue trois modes d’utilisation : le poste en libre accès, l’espace numérique et le wifi. 16 % des utilisateurs profitent des trois modes, 30 % sont mono-utilisateurs et 66 % connaissent le service wifi. La fracture numérique est réelle, puisque 67 % des usagers n’ont pas de connexion haut débit à leur domicile. Ces services constituent un facteur de fidélisation : 88 % déclarent venir au moins une fois par semaine, 28 % tous les jours. La gratuité est l’atout majeur, ensuite viennent la présence d’une assistance, la convivialité et le confort que procure la bibliothèque.

Un grand chemin a été parcouru depuis les années 1990, la volonté de donner accès à internet a porté ses fruits. Aujourd’hui, l’enjeu réside dans les services mis en place par les bibliothèques, le travail de médiation et de formation à ces nouveaux services, et la satisfaction des demandes complexes et multiples des publics.

Concernant l’offre de presse en ligne, sur écran ou tablette, avec accès ou non à distance, la médiation et la formation sont déterminantes, ainsi que les partenariats, comme l’a illustré une dernière table ronde réunissant différentes petites bibliothèques : le pôle multimédia de la bibliothèque de Saint-Étienne-du-Bois, l’offre de presse numérique du réseau Savoie-biblio  8, et celle du Risom  9 (Réseau intercommunal et solidaire de médiathèques, Tence, Saint-Jeures, Le Mazet-Saint-Voy). Car, dans ce domaine, l’expertise requise et le coût financier obligent les établissements à se regrouper et à travailler ensemble  10. •