La « société de l'information »

glossaire critique

par Claudine Belayche
Commission française pour l’Unesco ; avant-propos de Jean Favier.
Paris : La Documentation française, 2005. – 164 p. ; 24 cm.
ISBN 2-11-005774-2 : 15 €

Cet ouvrage, fruit du travail du Comité information et communication de la Commission française pour l’Unesco, est publié à l’occasion de la prochaine édition du Sommet mondial pour la société de l’information (SMSI) qui aura lieu à Tunis à l’automne 2005. Il comble un manque, dans l’ensemble des publications sur la société de l’information, les sommets mondiaux… En effet, une terminologie s’est développée autour de ces sujets, rarement précisée, d’autant que très souvent traduite/adaptée de concepts anglo-saxons ou autres. On sera donc très redevable à la Commission française pour l’Unesco d’aider les citoyens, et les bibliothécaires ou documentalistes, à faire le point et à comprendre les mots qui émaillent les débats autour de ces thèmes.

Une synthèse remarquable

L’introduction de ce livre est absolument remarquable de clarté, de synthèse explicative, sur ce que l’on appelle aujourd’hui la « société de l’information ». Les auteurs prennent la peine de relire les différentes acceptions du terme « information » qui a changé de sens au cours du XXe siècle : peu à peu, avec l’invasion du numérique, le mot a pris le sens d’« information numérisée », suite aux travaux théoriques et technologiques de Warren Weaver et Claude Shannon, notamment.

Née aux États-Unis, dès 1993-1994, la National Information Infrastructure veut donner un cadre général à une politique de développement stratégique de l’utilisation de cette nouvelle technologie. En France, c’est à l’été 1997, à Hourtin, le fameux discours de l’Université de la communication de Lionel Jospin, alors Premier ministre, qui va ancrer le concept et faire que son développement soit assumé politiquement au plus haut niveau de l’État.

Les auteurs en montrent les implications politiques, mais aussi, et de plus en plus, économiques et sociétales. C’est net, clair, complet, en 35 pages.

Des notions très polysémiques

La suite est le véritable « glossaire » annoncé en titre : sous forme de dictionnaire encyclopédique et critique, des notions (libre accès, communication, communauté, fracture numérique…) sont étudiées, définies, avec une tentative d’en envisager de multiples facettes.

Chaque rédacteur en montre les ambiguïtés, souvent, les complexités, toujours, et complète son exposé par une courte bibliographie et des renvois vers d’autres notions abordées. Dans certains cas, deux rédacteurs sont appelés à apporter leur concours, complémentaire et toujours pertinent, d’autant que les sujets sont généralement très polysémiques et encouragent des multiplicités de points de vue : information, médias, normes, réseau(x).

L’article « communauté » est un bel exemple de la difficulté de traduction de notions plus compréhensibles dans un contexte anglo-saxon : communauté veut dire ensemble de personnes qui se reconnaissent une parenté, spirituelle, d’usages… En France, on l’entend le plus souvent par communauté religieuse, elle doit être étendue quand on parle « société de l’information ».

L’article « médiation » montre bien comment ce mot, largement utilisé, appliqué à l’information numérique, peut laisser germer des utopies, des erreurs : la société numérique n’aurait-elle plus besoin de médiateurs ? Question régulièrement posée aux bibliothécaires à propos des évolutions du métier.

On lira aussi avec intérêt l’article « normes » dont la variété internationale est bien expliquée… et tous les autres.

Les auteurs sont nombreux : universitaires, juristes, bibliothécaire (Christian Lupovici), ingénieurs. Ils ont tous fait l’effort d’éviter le jargon de leur discipline, pour entrer dans le projet de cet ouvrage. Un seul petit, tout petit, regret : que les termes définis ne proposent pas systématiquement leurs équivalents en anglais, car cela aiderait à lire les textes sur le SMSI, très souvent uniquement en anglais. Cela n’empêche pas ce document d’être indispensable dans un fonds de bibliothèque, pour le public et pour les professionnels.