Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur les bibliothèques et les services d'information de Lituanie...
Audronė Glosienė
Chiffres à l’appui, l’auteur décrit le réseau des bibliothèques lituaniennes, les missions des différents types d’établissement et leurs performances. Elle insiste sur le développement de l’automatisation, de l’accès à Internet et des services électroniques. Elle détaille les programmes de modernisation mis en œuvre et les projets novateurs des bibliothèques publiques. Pour poursuivre le changement, elle souligne le rôle moteur des organismes professionnels, l’importance d’un enseignement des sciences de l’information de qualité et la nécessité de la formation continue des personnels.
With the aid of statistics, the author describes the Lithuanian library network, the missions of the various different types of establishment and their performance. She emphasizes the development of automation, Internet access and electronic services. She details modernization programmes set in place and the innovative projects for public libraries. To bring about these changes, she stresses the directional role of professional organizations, the importance of quality training in information science and the need for continuing education for staff.
Anhand von Statistiken beschreibt die Autorin das litauische Bibliotheksnetz, die Aufgaben der verschiedenen Einrichtungen und deren Leistungen. Sie weist nachdrücklich auf den Fortschritt der Automatisierung hin, den Zugang zum Internet und die elektronischen Dienstleistungen. Sie schildert eingehend die eingesetzten Modernisierungsprogramme und die auf Neuerung eingestellten Projekte öffentlicher Bibliotheken. In Hinblick auf die Weiterentwicklung unterstreicht sie vor allem die Rolle der Fachorganisationen als treibende Kraft, die Schlüsselfunktion einer qualitativ hochwertigen Fachausbildung und die Notwendigkeit der Personalfortbildung.
Apoyándose en cifras, la autora describe la red de bibliotecas lituanas, las misiones de los diferentes tipos de establecimientos y sus performances. Ella insiste en el desarrollo de la automatización, del acceso a Internet y de los servicios electrónicos. Detalla los programas de modernización ejecutados y los proyectos innovadores de las bibliotecas públicas. Para proseguir el cambio, la autora subraya el papel motor de los organismos profesionales; la importancia de una enseñanza de las ciencias de la información de calidad y la necesidad de la formación permanente del personal.
Depuis plus d’une dizaine d’années, des changements radicaux intervenus à tous les niveaux, aussi bien politique qu’économique, social et culturel, ont transformé notre État et notre nation, et ces changements ont touché également les bibliothèques et les bibliothécaires.
Cet article va tenter de retracer les développements enregistrés dans le secteur des bibliothèques et des services de documentation en Lituanie au cours de ces dernières années, et analyser les raisons et les conséquences de ces changements. Il a été rédigé à partir de trois communications successivement présentées par l’auteur au 5e Congrès des bibliothécaires des pays baltes (Tallinn, Estonie, 1995) 1, au colloque organisé en 2000 à Leipzig (Allemagne) 2 sur « L’accessibilité de l’information », et au 3e Congrès des bibliothécaires des pays nordiques et baltiques (Tallinn, octobre 2001) 3. Il suffit de reprendre ces communications pour réaliser qu’au cours de cette décennie les changements et le dynamisme ont été les traits les plus marquants du secteur des bibliothèques et des services de documentation.
Contexte historique, politique et économique
La Lituanie a une histoire dramatique qui tient en grande partie à sa situation géographique de carrefour entre l’Est et l’Ouest. C’est au XIIIe siècle qu’elle est entrée dans l’histoire de l’Europe en tant qu’État politique à part entière. Le premier livre en lituanien fut imprimé en 1547 à Kœnigsberg ; il témoigne d’une volonté culturelle de se tourner vers l’Ouest plutôt que vers l’Est, et de bâtir une culture spécifiquement lituanienne en résistant à l’influence écrasante de la Pologne et de l’Allemagne. La première bibliothèque universitaire fut créée à Vilnius en 1570 (neuf ans avant l’université elle-même !). C’est aujourd’hui l’une des plus riches de la région balte.
Les XVIIe et XVIIIe siècles ont vu la désintégration de l’État lituanien. Au XIXe siècle, la Lituanie perdit son indépendance et fut annexée à l’Empire russe. Plusieurs soulèvements ont jalonné la lutte pour l’indépendance nationale. Celui de 1832 a entraîné la fermeture de l’Université de Vilnius et le transfert en Russie d’une partie des collections de la bibliothèque. Après les révoltes de 1864, le pouvoir tsariste interdit aux Lituaniens d’imprimer, de publier ou de diffuser des livres en caractères latins : en clair, il les autorisait à lire des livres dans leur langue à condition qu’ils soient imprimés en caractères cyrilliques. Il aura fallu une résistance farouche pour obtenir enfin l’abrogation de cette mesure restée en vigueur quarante ans durant. Aujourd’hui, en 2004 – « Année du livre et de la langue » par décision du Parlement lituanien –, le pays fête le centième anniversaire de la levée de cet interdit.
Après avoir brièvement retrouvé son indépendance dans la période de l’entre-deux-guerres, la Lituanie l’a à nouveau perdue en 1940. En 1990, au terme d’un demi-siècle d’occupation soviétique et d’isolement international, la Lituanie a retrouvé sa place d’État souverain dans la communauté des nations. Depuis, elle a entrepris des réformes radicales, tant sociales que politiques et économiques. En peu de temps, elle a réussi à réunir les principales conditions exigibles d’une société démocratique : le multipartisme, des élections libres, la liberté de la presse et la liberté d’expression. L’apparition de médias indépendants a considérablement élargi les possibilités de choix et d’accès à l’information. La transformation massive des structures économiques du pays est due pour l’essentiel à la réforme qui, en encourageant les privatisations, fut pour beaucoup dans la rapide croissance des petites et moyennes entreprises et du secteur agricole.
Depuis 2001, l’économie lituanienne a l’un des taux de croissance les plus rapides de l’Europe centrale et orientale (de 5 % en 2001, il a atteint 9 % en 2003), et la part du secteur privé dans le PIB est supérieure à 80 % 4. L’ampleur de la transition opérée a certes permis au pays de s’ouvrir à la démocratie et à l’économie de marché, mais non sans bouleverser radicalement le quotidien de la population et les performances des institutions dans leur ensemble. Malgré les apports indéniablement positifs de la démocratisation de l’État, les années de l’indépendance ont été marquées par des difficultés économiques, une inadéquation des lois et de graves difficultés financières.
Une réforme de fond a remplacé les anciennes bibliothèques de masse soviétiques par un système de bibliothèques publiques. Il ne s’agit pas là d’un simple changement de nom. La tâche, immense, consistait à passer d’une conception idéologique et doctrinaire des bibliothèques à une conception démocratique, d’une philosophie de prise en charge par l’État à de nouvelles notions de bibliothèques participatives et flexibles, d’un modèle de bibliothèque fermée et fonctionnant en vase clos à un modèle de centre culturel convivial et ouvert, où chacun peut venir s’informer, se détendre et apprendre. Ces transformations portent sur la nature même de cette institution sociale qu’est la bibliothèque, désormais indissociable des exigences en matière de formation et de performance professionnelles.
Dans les premières années de l’indépendance, plus de 200 bibliothèques (des annexes, pour la plupart) ont été fermées. Le manque de crédits a entraîné une diminution générale des acquisitions ; entre 1990 et 1994, tous les indicateurs de performance étaient à la baisse. La fréquentation des bibliothèques publiques a commencé à se redresser en 1994-1995, et depuis elle connaît chaque année une hausse significative. Ce mouvement montre bien que les ressources et les services documentaires des bibliothèques font l’objet d’une demande soutenue dans la société de l’information qui commence à se constituer.
Le cadre juridique et la politique des bibliothèques
La Constitution de la République lituanienne fixe le cadre légal de l’État et de la société dans son ensemble. Elle garantit aussi les conditions préalables à la liberté de pensée, d’information, d’expression, et au respect de la confidentialité. Elle pose en principe le respect de la vie privée, affirme que chacun a le droit d’avoir ses opinions et de les exprimer, encourage la promotion des cultures, des langues et des coutumes nationales, défend les droits d’auteur, se prononce pour l’abolition et la prohibition de la censure.
La loi sur les bibliothèques 5 a été adoptée en 1995. Elle organise le fonctionnement des bibliothèques, définit la nature de leurs collections et affirme la nécessité de les préserver, précise les relations des bibliothèques entre elles et les règles des financements accordés par l’État. Cette loi qui garantit le droit de la société à l’information prévoit le cadre juridique dans lequel les bibliothèques lituaniennes exercent leurs activités. Cependant, elle reflète la situation qui prévalait jusque dans le milieu des années 1990, et à ce titre elle est surtout « défensive », puisque son principal objectif était de mettre un terme aux fermetures des bibliothèques décidées par les municipalités. Un nouveau projet de loi sur les bibliothèques sera présenté en 2004.
La loi sur le copyright et les droits associés a été votée en 1999. Les questions relatives au droit d’auteur intéressent nécessairement les bibliothécaires, mais ils ne doivent pas pour autant négliger les droits des utilisateurs à l’information et au savoir.
Le ministère de la Culture 6 est l’institution officiellement habilitée à administrer les bibliothèques de la République lituanienne. Quant au Conseil des bibliothèques de Lituanie, il a des fonctions d’expertise et de conseil et se prononce sur les grandes questions relatives à l’activité des bibliothèques. Il soumet au ministère de la Culture et au gouvernement des propositions sur la stratégie de développement des bibliothèques, leurs programmes scientifiques et leur financement. Enfin, le Centre des bibliothèques scientifiques rattaché à la Bibliothèque nationale Martynas Mazvydas coordonne les services de recherche et de consultation des bibliothèques du pays.
Ces différents éléments structurels apparaissent comme les conditions de création d’une politique efficace des bibliothèques et des services documentaires de Lituanie. Non seulement les nombreuses mesures promulguées et la mise en place de nouvelles institutions permettent de coordonner les activités des différents acteurs, mais elles offrent aussi une base juridique au fonctionnement et au développement des bibliothèques. Le plus gros défi qu’il reste à relever consiste maintenant à inscrire leurs activités culturelles et documentaires dans des cadres politiques.
Traditionnellement, les bibliothèques font partie de la politique culturelle de l’État. Le Rapport sur les institutions culturelles (1997), préparé pour une enquête du Conseil de l’Europe, décrit les bibliothèques comme des institutions à vocation culturelle et éducative, qui s’appuient au premier chef sur leurs collections d’imprimés pour remplir leurs missions. Il ne dégage aucune perspective quant aux applications des technologies de l’information, ou à la transformation des bibliothèques en centres d’information au service de la collectivité.
Pourtant les bibliothèques sont aujourd’hui de plus en plus nombreuses à mettre en avant le rôle qu’elles entendent jouer dans la société fondée sur l’information et sur le savoir, et cette revendication paraît de plus en plus crédible. L’Association des bibliothécaires lituaniens contribue activement à l’élaboration des règles et des dispositions destinées à structurer le développement de la société de l’information.
Le programme de modernisation des bibliothèques, rédigé en 1999, aurait dû en principe être approuvé en 2000, mais son adoption et sa mise en œuvre ont été repoussées de trois ans à cause de la crise économique. Prévu pour dix ans (jusqu’en 2013), c’est aujourd’hui un des principaux instruments de modernisation du secteur. Il met en lumière les besoins et les manques de toute nature à combler au plus vite pour transformer les bibliothèques en institutions documentaires modernes. Il indique aussi les moyens à employer pour améliorer radicalement la situation dans un bref laps de temps 7. Les développements les plus récents en matière de politique des bibliothèques sont à rattacher au plan dit de Développement national de la société de l’information pour la Lituanie (2000) 8, qui considère que les bibliothèques font partie intégrante de l’architecture globale de l’information et qu’il est de leur devoir de mettre l’information à la disposition de tous les citoyens.
Le réseau des bibliothèques lituaniennes
À l’heure actuelle, le système des bibliothèques lituaniennes repose sur différentes catégories d’établissements placés sous la tutelle du ministère de la Culture et du ministère de l’Éducation et des Sciences, ou rattachés à d’autres organismes d’État (tableau 1 p. 39). À la fin 2002, on dénombrait 3 571 bibliothèques en Lituanie, dont :
– 1 425 bibliothèques dépendant du ministère de la Culture, parmi lesquelles la Bibliothèque nationale de Lituanie Martynas Mazvydas, 5 bibliothèques publiques régionales, 60 bibliothèques municipales et leurs 1 340 annexes ;
– 2 067 bibliothèques dépendant du ministère de l’Éducation et des Sciences, dont 18 bibliothèques universitaires, 20 bibliothèques d’établissements d’enseignement supérieur, 1 743 bibliothèques scolaires ;
– 5 bibliothèques d’importance nationale : la Bibliothèque de l’Académie des sciences de Lituanie, la Bibliothèque universitaire de Vilnius, la Bibliothèque pour aveugles, la Bibliothèque technique de Lituanie, la Bibliothèque de médecine de Lituanie ;
– des bibliothèques spécialisées, dont 25 bibliothèques techniques, 40 bibliothèques de médecine, 8 bibliothèques agricoles.
Très populaires, les bibliothèques ont une activité débordante (cf. tableau 1).
Malgré cela, pendant les treize années d’indépendance, les indicateurs de performance du réseau des bibliothèques et de leurs collections ont baissé de façon continue. Il y a moins de bibliothèques publiques, techniques, médicales et agricoles que par le passé, et quasiment plus aucune bibliothèque syndicale. L’examen des données statistiques révèle une tendance assez dangereuse dite « effet ciseau » : l’écart se creuse entre la demande croissante de bibliothèques et de services documentaires, et une offre en diminution. Le cas des bibliothèques publiques l’illustre particulièrement bien (cf. graphique).
Les bibliothèques publiques
Le système des bibliothèques publiques de Lituanie est assez classique : il comprend des bibliothèques régionales et des bibliothèques municipales avec des annexes dans les villes de grande et de moyenne importance et dans les villages ; à cela s’ajoutent quatre bibliobus, et ce service à domicile connaît un indéniable succès.
Les cinq bibliothèques régionales ont leur siège dans les principales villes lituaniennes (Vilnius, Kaunas, Klaipéda, Panevezys et Šiauliai).
Malgré la baisse spectaculaire du nombre des bibliothèques dans les premières années de l’indépendance (plus de 200 fermetures), le réseau national des bibliothèques a été consolidé, et, depuis 1993, la fréquentation ne cesse d’augmenter (cf. graphique).
Les collections qui sont un paramètre tout aussi important de l’activité des bibliothèques sont elles aussi moins importantes que par le passé. Cela s’explique d’abord par l’« épuration » de toute la littérature soviétique, qui a considérablement réduit le volume des titres conservés. Et cela tient aussi à l’insuffisance notoire des acquisitions. Il y a des années où certaines annexes ont dû se contenter d’acheter entre trois et cinq titres. La tendance persiste, mais elle s’est un peu ralentie ces dernières années et le nombre total de livres achetés est aujourd’hui en augmentation. Pour compléter ces remarques, il faut ajouter que la composition même des collections a changé : la proportion des livres de fiction y est moins forte qu’autrefois, alors que les documentaires sont en augmentation.
La Bibliothèque nationale
La Bibliothèque nationale de Lituanie 9 porte le nom de Martynas Mazvydas, auteur du premier ouvrage imprimé en lituanien en 1547. Créée en 1919, cette institution qui est la première bibliothèque de recherche ouverte au grand public est également une bibliothèque parlementaire. Ses missions couvrent des domaines très divers :
– le développement des collections, la législation et la gestion du patrimoine culturel national ;
– l’archivage national des documents en lituanien, imprimés ou autres, reçus par l’intermédiaire du dépôt légal ;
– la bibliographie nationale et l’enregistrement des publications en lituanien.
C’est aussi :
– le Centre d’attribution et d’enregistrement des ISBN, ISSN… ;
– le Centre expert en conservation et en restauration des documents ;
– le Centre de gestion du Système intégré d’information des bibliothèques lituaniennes (Libis), ainsi que du Catalogue collectif des bibliothèques lituaniennes ;
– le Centre de coordination des activités recherche et développement des bibliothèques.
Ses fonds comprennent 7 millions de documents répartis en plusieurs collections, dont des manuscrits médiévaux et des archives ; des livres anciens et rares ; les Lituanica (ouvrages en lituanien publiés à l’étranger, ouvrages sur la Lituanie, et livres d’auteurs lituaniens publiés en langue étrangère), etc.
À ces collections de livres, de périodiques, d’ouvrages de référence, de manuscrits, etc., s’ajoutent les publications des institutions internationales ainsi que les bases de données locales ou disponibles sur Internet. La BN organise aussi régulièrement des expositions, des conférences, des rencontres et autres événements. 510 personnes travaillent à la Bibliothèque nationale dans 6 centres et 14 départements ; 18 salles de lecture sont à la disposition des utilisateurs.
Les bibliothèques universitaires
Il en existe 18 en Lituanie, au sein de chaque université ou institut d’études supérieures. Elles rassemblent quelque 12 millions de documents. Elles apportent à la communauté universitaire dans son ensemble des services essentiels à l’étude et à la recherche. Là aussi, la tendance est à la hausse de la fréquentation (tableau 2), ce qui, en soi, constitue un vrai défi car les effectifs de ces bibliothèques sont passés de 613 personnes en 1995 à 588 en 2003.
Depuis quelques années, les bibliothèques universitaires se sont informatisées et proposent de nouveaux services informatiques et l’accès à Internet.
Les technologies de l’information et de la communication
Les ressources et les technologies de l’information sont les deux piliers de l’infrastructure moderne des bibliothèques. Aujourd’hui, la majorité des bibliothèques lituaniennes sont équipées d’ordinateurs, beaucoup ont accès à Internet et aux ressources électroniques mondiales, créent elles-mêmes des bases de données et des ressources numériques, et proposent ainsi à leurs usagers des services en réseau.
L’automatisation des bibliothèques
Le Consortium des bibliothèques scientifiques a été créé en 1993 afin de coordonner les acquisitions et de mettre en place un système automatisé intégral. Il fut au départ du programme Libis (Système intégré d’information des bibliothèques lituaniennes), avalisé en 1996 par le gouvernement 10, et riche à l’heure actuelle de plus de 1 205 705 entrées.
Les bibliothèques universitaires se servent pour leur part du système automatisé Aleph. Le Réseau des bibliothèques universitaires de Lituanie (LABT) 11 a été constitué pour créer une bibliothèque universitaire virtuelle, rendue possible par l’informatisation de ces établissements, et pour unifier les moyens de recherche et d’accès aux sources d’information et aux services en ligne. À l’heure actuelle, ce réseau regroupe 16 universités, 9 instituts d’études supérieures, l’Académie lituanienne des sciences et 29 institutions scientifiques de recherche et représente, à ce titre, les consortiums des bibliothèques universitaires lituaniennes.
L’accès à Internet
Depuis 1995, l’accès à Internet fait partie des services proposés par les bibliothèques lituaniennes. Les « pionniers » en la matière n’ont cependant pas tout de suite fait des émules. Au début de 2001, 30 bibliothèques municipales seulement (50 %) offraient ce service à leur public. Le plus souvent, les postes de travail avec connexion à Internet ont été installés dans les bibliothèques activement impliquées dans le projet dit de « Société ouverte » et dans un certain nombre d’autres programmes.
Grâce au financement par le gouvernement du plan de « Développement national de la société de l’information », depuis la fin de 2001, les 60 bibliothèques municipales et les 5 bibliothèques régionales ont pu offrir l’accès à Internet à leur public. C’est également le cas de l’ensemble des bibliothèques universitaires, des bibliothèques de recherche et des bibliothèques spécialisées ; de la plupart des bibliothèques scolaires et des annexes des bibliothèques municipales qui sont également connectées au web.
Ces dernières années, le nombre des utilisateurs d’Internet en Lituanie a augmenté de façon spectaculaire, au point de représenter aujourd’hui 24 % de la population. Selon un sondage TNS-Gallup, cette proportion a quasiment doublé en l’espace d’un an, de l’automne 2001 à l’automne 2002, après quoi la croissance a un peu fléchi 12. L’institut de sondage TNS-Emor présente pour sa part des statistiques montrant qu’en 2003, encore, l’augmentation du nombre des utilisateurs d’Internet était plus soutenue et plus rapide en Lituanie que dans les autres pays baltes ; cette année-là, le taux de pénétration d’Internet est passé de 20 à 25 %. Dans ce domaine, la palme revient cependant à l’Estonie où 47 % de la population âgée de 15 à 74 ans utilisent d’ores et déjà Internet 13.
S’il est à bien des égards bénéfique, l’essor des services Internet et des technologies de l’information et de la communication contribue aussi à aggraver la fracture numérique. En Lituanie, les différences entre la ville et la campagne restent très marquées : à la mi-2003, un foyer urbain sur dix disposait d’un accès à Internet, contre seulement un foyer rural sur cent. Ces chiffres attestent la réalité de la fracture numérique et le danger de marginalisation économique qui menace les zones rurales.
Globalement, les bibliothèques municipales, principaux fournisseurs d’accès à Internet, disposent dorénavant de 490 postes informatiques offrant cet accès. 30 points d’accès publics à Internet ont été installés grâce aux financements versés au titre du programme OSF-Bibliothèques de Lituanie et par l’Institut pour une société ouverte (OSI), 61 autres grâce au programme « Équipement de la société de l’information » du ministère de la Culture, et 40 grâce à l’initiative privée « Fenêtre sur l’avenir ». En s’associant à d’autres organismes, cette dernière en a par ailleurs créé 28 autres 14.
Les ressources et les services électroniques
Dans la plupart des bibliothèques, l’offre de ressources électroniques est assez diversifiée. Les bases de données plein texte occupent à cet égard une place très importante. Plusieurs d’entre elles ont un site web et/ou un portail électronique, et fournissent le service virtuel baptisé « Ask a librarian ».
La création d’une bibliothèque virtuelle suscite des projets plus excitants les uns que les autres. Ainsi, le réseau des bibliothèques universitaires (LABT) envisage dans un avenir proche d’élargir ses propres bases de données en les proposant en plein texte (e-resources). L’installation en 2004 des logiciels MetaLib et SFX 15 permettra de créer un portail unique pour la recherche d’information et la consultation. Une bibliothèque virtuelle, cela signifie des bibliothèques électroniques, des équipements de télécommunication et des interfaces unifiées pour l’utilisateur. Elle permet un éventail de choix : depuis la constitution de sa bibliothèque personnelle jusqu’à l’accès aux sources d’information internationales.
La numérisation fait désormais partie des tâches de routine des institutions patrimoniales (bibliothèques, musées, centres d’archives) de Lituanie 16. En la matière, l’initiative revient à la Bibliothèque universitaire de Vilnius, l’une des plus anciennes et des plus riches bibliothèques universitaires de l’Europe centrale et orientale. Les financements reçus au titre du programme « Mémoire du Monde » (Unesco) lui ont permis en 1988 de produire un CD-Rom intitulé Les Collections de la Bibliothèque universitaire de Vilnius 17 ; on peut y découvrir 153 documents numérisés, aussi bien des manuscrits que des cartes et plans, des photographies, ou des objets de musée.
En 2000, la Bibliothèque nationale Martynas Mazvydas a lancé, en concertation avec d’autres organismes nationaux et étrangers, l’ambitieux projet des Archives numériques des documents historiques et culturels. Il a déjà donné lieu à l’édition d’un premier CD-Rom sur Les Collections de parchemins 18.
La bibliothèque de l’Académie nationale des sciences s’emploie également à numériser ses parchemins 19. Depuis 1999, le Musée national de Lituanie présente des expositions virtuelles 20, et le Musée des beaux-arts s’est attelé à la réalisation du projet de Centre culturel et d’information sur les publications numériques 21 depuis 2000. Le portail des musées lituaniens propose une gamme très diversifiée de services virtuels 22.
Les vecteurs du changement
Les projets et les programmes, outre le fait qu’ils procurent des financements, sont aussi des vecteurs de changement essentiels. En y participant, les bibliothèques sont amenées à s’engager dans des partenariats et des consortiums, à moderniser leurs activités, à développer des compétences, des connaissances et une expérience nouvelles, à s’instruire mutuellement.
Les programmes OSI et OSFL
On ne saurait surestimer le rôle joué par l’Institut pour la Société ouverte (Open Society Institute, OSI) et par la Fondation nationale pour la Société ouverte (National Open Society Fund) dans la modernisation des bibliothèques d’Europe centrale et orientale, et de l’ancienne Union soviétique.
L’Open Society Fund-Lithuania (OSFL) 23 fait partie de la bonne cinquantaine de réseaux établis depuis 1985 en Europe centrale et orientale, en Asie, en Afrique et en Haïti par George Soros, homme d’affaires américain et l’un des plus grands philanthropes de la fin du XXe siècle. L’OSFL, organisation indépendante non gouvernementale et non lucrative, a démarré ses activités en octobre 1990, dans le but d’appuyer le développement d’une société ouverte, démocratique et civile en Lituanie pendant la période de transition. En un peu plus de douze ans, elle a ainsi apporté à différents projets un soutien très tangible (plus de 50 millions de dollars américains), dans des secteurs concernant essentiellement l’éducation, les sciences, la société civile, le droit, la culture, la communication et l’édition.
Le Programme pour les bibliothèques qu’il a lancé sur une période de dix ans, de 1993 à 2003, était destiné à promouvoir et à soutenir la rénovation des bibliothèques ; à les aider à s’équiper de nouvelles technologies et de moyens modernes de diffusion de l’information ; à encourager leur coopération ; à inciter leur personnel à se perfectionner ; à renforcer la formation et le recyclage ; à servir de relais entre ces établissements et les diverses sources de financement. Entre 1993 et 1995, les subventions versées aux bibliothèques lituaniennes ont avoisiné le million de litas 24. De 1994 à 1997, la priorité est allée aux bibliothèques universitaires et de recherche, et plus précisément à leurs projets d’automatisation et d’informatisation. Depuis quelques années, l’effort porte surtout sur les bibliothèques publiques.
Un des projets les plus passionnants ainsi soutenu par l’OSI porte sur l’échange de formateurs organisé de 2000 à 2003. Douze de nos confrères lituaniens se sont rendus en Azerbaïdjan, en Géorgie, au Kazakhstan, au Kirghizstan, en Moldavie, en Mongolie et en Ouzbékistan afin d’assurer à l’intention de leurs homologues de ces différents pays des séminaires sur les nouvelles tendances concernant l’administration des bibliothèques, le marketing et les relations publiques, les ressources électroniques et le contrôle bibliographique, l’ouverture des bibliothèques à la collectivité tout entière, la gestion et la planification stratégiques, le regroupement des bibliothèques, la mission d’information assignée aux bibliothèques scolaires, etc.
Les projets de l’Union européenne
Les bibliothèques et les institutions d’information lituaniennes sont engagées dans plusieurs des projets et des programmes de l’Union européenne – notamment Phare-Tempus, Cecup, PubliCA, CobRA+, Libecon 2000, Dedicate. Cette participation les aide à mettre en place des services de bibliothèque modernes, à même de soutenir leurs activités économiques, sociales et culturelles en les intégrant à une vaste infrastructure de communication et d’information. Deux de ces projets européens, parmi les plus récents – « Cultivate-Central and Eastern Europe » et « Pulman » –, ont eu un retentissement considérable.
Le premier, élaboré dans le 5e Programme cadre relatif aux technologies de la société de l’information (2001-2003), visait à encourager les coopérations croisées entre les bibliothèques, les musées et les centres d’archives. Il a beaucoup contribué à favoriser la collaboration de ces institutions, tant en Lituanie que dans l’ensemble de l’Europe. Le site web « Cultivate-Lithuania » est devenu un instrument très efficace pour la diffusion de l’information 25.
Le second projet, « Pulman » (PUblic Libraries Mobilising Advanced Networks : réseau européen d’excellence pour les bibliothèques publiques, les musées et les centres d’archives au niveau local) 26, qui a été lancé le 1er mai 2001, faisait quant à lui partie du 5e Programme cadre de la Communauté européenne pour une société de l’information conviviale (User-friendly Information society).
Il a notamment abouti à la publication de Directives concernant la politique de services, la gestion des bibliothèques et l’appropriation des TIC, traduites en plus de vingt langues 27 et qui se répartissent en trois grandes sections : la politique sociale, la gestion et les recommandations d’ordre technique. Des ateliers nationaux ont été organisés dans les différents pays impliqués, et plus de soixante-dix directeurs de bibliothèques publiques d’Europe du Sud et de l’Est ont suivi des formations spécialement adaptées à leur profil dans certaines des plus prestigieuses bibliothèques publiques européennes, au Danemark, en Finlande, en Grèce et en Slovénie 28.
Le projet Pulman a connu son temps fort lors du colloque de clôture qui s’est tenu les 13 et 14 mars 2003 à Oeiras, au Portugal, en présence de ministres, de décideurs et de responsables politiques représentant trente-six pays européens. Il s’est conclu sur l’adoption du Manifeste d’Oeiras : Programme Pulman pour le développement de l’e-Europe, un document stratégique qui définit les quatre piliers du développement des bibliothèques et de la société de l’information : démocratie et citoyenneté ; apprentissage tout au long de la vie ; développement social et économique ; diversité culturelle 29.
Depuis la fin de 2003, deux institutions lituaniennes (la Bibliothèque publique d’Utena et la Bibliothèque de l’Université de Vilnius) participent au 6e Programme cadre des technologies de la société de l’information, baptisé Calimera (« Cultural Applications Local Institutions Mediating Electronic Resource Access ») 30. Cette action de coordination s’inspire des avancées réalisées grâce au réseau d’excellence Pulman. Il s’agit d’aider les institutions locales (bibliothèques, musées, archives) à se doter de technologies et de stratégies novatrices, susceptibles d’améliorer la qualité d’un service conçu pour aider le citoyen lambda dans sa vie quotidienne.
Dans l’avenir immédiat, les Fonds structurels de l’Union européenne, dont le déblocage est prévu en mai 2004, au moment où la Lituanie entrera dans l’Union européenne, sont un des principaux objectifs des bibliothèques 31.
Des projets novateurs dans les bibliothèques publiques
Plusieurs projets novateurs définis par les bibliothèques publiques lituaniennes figurent dans les Directives pour les bibliothèques publiques de l’ère numérique, publiées en 2002 dans le cadre du programme Pulman 32. Les propositions lituaniennes reprises dans ce document portent à la fois sur les nouvelles applications des technologies de l’information dans les bibliothèques publiques, et sur des exemples de bonnes pratiques adoptées par les bibliothèques pour contribuer à la lutte contre l’exclusion et la marginalisation de différents groupes sociaux, à la diffusion de l’enseignement (langues étrangères, familiarisation avec l’outil informatique) et à la vie de la collectivité, notamment en se chargeant de numériser le patrimoine culturel local pour le rendre accessible à tous.
La bibliothèque publique A. et M. Miskiniai d’Utena 33 fut une des premières bibliothèques de Lituanie à fonctionner aussi comme un centre d’information municipal. Parce qu’elle s’est résolument engagée dans des projets et des programmes divers, elle est aujourd’hui en mesure d’offrir à ses utilisateurs des ordinateurs connectés à Internet, un vaste éventail de bases de données et de ressources électroniques, ainsi que divers programmes éducatifs. Elle organise régulièrement des cours où enfants et adultes peuvent se familiariser avec l’usage de l’ordinateur et les technologies du numérique. Les autorités locales soutiennent financièrement ce programme d’initiation et de perfectionnement à l’usage des outils informatiques. Démarré en 2001, le projet intitulé « De la bibliothèque à la communauté virtuelle » doit à terme aboutir à la création d’un portail régional d’information 34.
La bibliothèque municipale de Klaipéda a mis en place un programme systématique d’apprentissage de l’informatique, avec des outils adaptés aux différents groupes d’âge et au niveau des utilisateurs. Les cours et les ateliers conçus à l’intention des élèves du primaire, des enfants en maternelle et des familles sont organisés dans les locaux de la bibliothèque pour enfants. La bibliothèque pour la jeunesse met à la disposition des jeunes adultes une salle équipée d’ordinateurs connectés à Internet, où ils peuvent naviguer, demander des conseils ou bénéficier d’une formation suivie. Il est également prévu de lancer un programme d’initiation et de perfectionnement en direction de la population adulte de Klaipéda.
La bibliothèque publique de Kretinga 35 a lancé avec succès plusieurs projets pour l’intégration des jeunes adultes et des femmes. En 2000-2001, elle a mis au point un programme très complet pour l’intégration des enfants de familles monoparentales, suite aux résultats encourageants de ses actions systématiques contre l’usage de la drogue et pour la prévention de la délinquance chez les jeunes. Le Centre d’information et de formation des femmes installé depuis quelques années dans ses locaux accueille régulièrement les réunions du « Week-end des mères ».
La bibliothèque municipale d’Alytus 36 a ouvert en 1999 une annexe pour les personnes âgées et handicapées dans un quartier de la ville où les catégories sociales défavorisées sont surreprésentées. L’initiative vaut d’être mentionnée pour ses effets sur l’intégration des enfants issus de milieux particulièrement démunis. Ce bâtiment accueille aussi plusieurs organisations non gouvernementales travaillant en direction des handicapés, tandis que, dans les étages supérieurs, vivent des familles sans ressources ou aux revenus très bas, pour la plupart frappées par le chômage.
La bibliothèque publique de Plunge propose depuis 1998 un programme systématique de formation tout au long de la vie. La plupart des projets afférents sont financés conjointement par l’OSF-Lituanie et les autorités locales. Pour les mener à bien, la bibliothèque coopère étroitement avec des organismes d’enseignement pour adultes, des écoles, des collèges, des lycées, des universités et différentes ONG. Elle assure elle-même des séances de cours hebdomadaires, des séminaires, des formations, des ateliers, ainsi que le soutien individuel aux étudiants, et dispose désormais, en plus de l’équipement nécessaire à ces différentes activités d’enseignement, d’un laboratoire de langues où chacun peut s’inscrire indépendamment. Deux clubs ont été créés à l’intention des étudiants.
Les citoyens des pays autrefois rattachés à l’Union soviétique sont nombreux à éprouver le besoin d’apprendre des langues étrangères. Parce qu’ils n’ont souvent pas les moyens de suivre les cours dispensés par des organismes privés, les initiatives proposées dans ce domaine par les bibliothèques lituaniennes sont particulièrement bienvenues. L’exemple de la bibliothèque publique de Zarasai 37 démontre le succès de ce service gratuit, qui augmente le prestige et la popularité de la bibliothèque au sein de la collectivité. Cette bibliothèque a ouvert en 1999 une salle réservée à l’étude des langues étrangères, grâce aux subventions versées par l’OSI-NLP et par l’OSF-Lituanie.
La bibliothèque publique de Šiauliai 38 fait partie des nombreuses bibliothèques lituaniennes à avoir conçu des services destinés aux enfants handicapés. Elle s’est associée pour ce faire au département de pédagogie de l’Université de ·iauliai, où les enseignants apprennent à travailler avec des enfants souffrant de divers handicaps. Dans sa « Ludothèque », les enfants handicapés trouvent des jeux et des jouets adaptés à leurs déficiences, côtoient les autres enfants, participent aux activités organisées à leur intention par les étudiants et les enseignants du département de pédagogie.
Des exemples d’expériences et de déploiement d’activités novatrices et créatives existent aussi à la bibliothèque publique de Silute 39, la bibliothèque régionale de Kaunas 40, la bibliothèque publique de Moletai 41 et dans bien d’autres encore.
L’enseignement de la bibliothéconomie et des sciences de l’information
Les études universitaires
Deux universités lituaniennes proposent aujourd’hui des cursus en bibliothéconomie et sciences de l’information : celle de Klaipéda, depuis 1998 (niveau licence), et celle de Vilnius, depuis 1949 (licence, maîtrise et doctorat).
La formation dispensée aux futurs bibliothécaires a derrière elle une longue histoire, en lien étroit avec l’Université de Vilnius et sa bibliothèque. Elle y fait l’objet d’un enseignement universitaire instauré en 1949, dans le droit fil d’une tradition remontant à la première moitié du XIXe siècle. Son contenu a longtemps été pensé en fonction des sciences humaines et sociales, jusqu’à la fin des années 1960 où un second paradigme, celui de l’information, a entraîné l’ouverture du département des bibliothèques et des sciences de l’information. 1991 marque une troisième étape importante avec la création au sein de l’Université de Vilnius d’une Faculté de Communication, qui a englobé le département de bibliothéconomie et des sciences de l’information.
La Faculté de Communication 42 a été conçue sur la base de deux cursus existants (bibliothéconomie et journalisme), complétés en 1992 par un programme de cours en gestion de l’information et divers programmes d’études ajoutés par la suite. La création d’une faculté séparée traduit principalement la prise en compte de l’extension spectaculaire du rôle de la connaissance, de l’information et de la recherche dans un domaine émergent.
Sa mission consiste à former des professionnels capables d’organiser et de gérer l’information dans toutes les sphères d’activité, de définir une politique d’information, d’utiliser l’information avec toute l’efficacité et toute la souplesse désirées.
Les relations internationales constituent une de ses grandes priorités stratégiques. Nous participons à de nombreux projets et programmes européens et internationaux et travaillons en coopération avec des universités, des instituts d’enseignement supérieur et des entreprises du Royaume-Uni, des États-Unis, d’Allemagne, des Pays-Bas, de Suède, de Finlande, du Danemark, d’Islande, de Pologne, de Lettonie, d’Estonie et d’ailleurs.
Les filières d’enseignement de la faculté offrent des débouchés professionnels très diversifiés dans les métiers du journalisme et de l’édition, les relations publiques, les bibliothèques et les services de documentation, les archives, les institutions gouvernementales, culturelles ou de recherche et les sociétés en communication et en informatique. Cette diversité répond au concept d’intégration des activités en lien avec l’information adopté par l’Unesco.
Les thèmes de recherche couvrent différents processus informationnels dans la société, et notamment leurs aspects philosophiques, économiques, politiques, juridiques, éducatifs, organisationnels et administratifs. La Faculté de Communication publie deux collections de travaux de recherche : Knygotyra (Histoire du livre) et Informacijos mokslai (Sciences de l’information). Vingt-cinq étudiants y préparent actuellement leur thèse.
Perspectives
Une des plus jeunes institutions de la très ancienne Université de Vilnius, la Faculté de Communication se veut une structure souple, moderne et novatrice tout en s’efforçant parallèlement de satisfaire aux plus hautes exigences universitaires. La place qui lui est d’ores et déjà reconnue au sein de l’Université de Vilnius repose sur la conviction que la bibliothéconomie et les sciences de l’information représentent un domaine d’étude et de pratique professionnelle particulièrement prometteur.
Entre 1949 et 2002, l’Université de Vilnius a formé près de 4 000 bibliothécaires. En venant se greffer sur l’activité poursuivie pendant plus d’un demi-siècle en bibliothéconomie et en sciences de l’information, les efforts récents pour moderniser l’enseignement, la formation et la recherche conformément aux critères d’excellence internationaux et pour assimiler les succès enregistrés en la matière à l’étranger, ont permis de définir de nouvelles approches et de nouvelles stratégies qui, s’agissant des futurs professionnels des bibliothèques, fonctionnent comme des outils de démocratisation indispensables à la création d’une société civile ouverte.
La formation professionnelle continue
L’inculcation et l’acquisition des connaissances et des compétences seules à même de permettre de répondre rapidement à la demande croissante d’information électronique, la volonté de fournir un service aussi efficace que possible, d’aider et de former les utilisateurs, relèvent d’ambitions exigeantes qui imposent aux bibliothécaires de renouveler et d’élargir en permanence leurs savoirs professionnels.
Plusieurs acteurs interviennent sur le marché de la formation professionnelle continue en Lituanie.
Le Centre lituanien de formation des responsables culturels a pour mission de parfaire les compétences professionnelles des personnels employés dans des institutions culturelles (musées, bibliothèques, centres culturels). Il est financé par l’État, mais les formations et les programmes qu’il propose s’adressent exclusivement aux personnels des bibliothèques publiques (financées par les autorités locales).
La Bibliothèque nationale Martynas Mazvydas étant la plus grande bibliothèque du pays, il est de sa responsabilité d’apporter un soutien méthodologique à toutes les catégories de bibliothèques ; elle n’a cependant pas les moyens financiers et techniques de s’acquitter pleinement de cette tâche et doit en conséquence concentrer l’essentiel de ses efforts sur les bibliothèques publiques, les bibliothèques pour enfants et, le cas échéant, les bibliothèques scolaires.
Quant au Centre de formation des enseignants, il organise aussi, entre autres, des formations adressées aux personnels des bibliothèques scolaires.
Jusqu’à la création, en 1999, du Centre de formation intégré (CFI) à l’Université de Vilnius, aucune formation systématique n’était donc proposée aux personnels des bibliothèques universitaires, des bibliothèques de recherche et des bibliothèques spécialisées. Le CFI 43, qui a pu démarrer ses activités grâce à une subvention du Programme de mise en réseau des bibliothèques lancé entre 1999 et 2002 par l’Open Society Institute, fonctionne comme une fédération des différents acteurs de la formation. Il associe donc les institutions et les organismes de formation professionnelle continue, et cumule de la sorte les ressources, les compétences et les points forts de ses membres.
Il s’attache avant tout à proposer des programmes de formation souples et à les diffuser auprès de tous les personnels des bibliothèques et des services d’information. Comme nos collègues du Royaume-Uni, nous considérons que les trois piliers de la société de l’information sont la connectivité, le contenu, et les compétences. La technologie perd son sens et sa valeur faute des compétences qui permettent d’en tirer le meilleur parti, et c’est la raison pour laquelle la formation professionnelle continue des bibliothécaires vise principalement à en faire des fournisseurs de services efficaces et des guides pour les utilisateurs.
En quatre ans d’activité, le CFI a obtenu des résultats remarquables : 1 664 bibliothécaires ont suivi ses formations, ce qui veut dire que 25 % des bibliothécaires lituaniens ont acquis grâce à lui un niveau de qualification plus élevé (tableau 3). Contrairement aux autres intervenants du secteur, le CFI ne reçoit pas de financements publics, mais il a su faire la preuve de la qualité de l’enseignement qu’il dispense.
Outre ces différents centres de formation, les bibliothèques universitaires, régionales et municipales, l’Association des bibliothécaires lituaniens et maints autres organismes professionnels proposent des programmes de cours et des conférences.
En guise de conclusion
Depuis qu’il y a treize ans la Lituanie a accédé à l’indépendance, le paysage des bibliothèques et des services documentaires a été profondément remanié. Les évolutions en cause sont de deux ordres. Les facteurs de changement que sont les technologies de l’information et de la communication, les ressources électroniques, les consortiums ont depuis quelque temps des effets similaires dans de nombreux pays.
Mais la Lituanie et les pays qui, comme elle, étaient inclus dans le bloc communiste ne doivent pas seulement relever ces défis mondiaux, ils ont dû aussi affronter les difficultés liées à la désintégration d’un système politique, économique et idéologique, et à l’indispensable transition vers un nouveau modèle. Cette mutation a profondément influé sur le fonctionnement et la philosophie des bibliothèques. Il semble loin, aujourd’hui, le temps où, au lieu d’être financées par les autorités locales, les bibliothèques dépendaient du budget de l’État, où l’offre démocratique d’informations accessibles à tous n’avait pas encore dépoussiéré ces institutions de leur endoctrinement idéologique. Il n’y a pourtant qu’une dizaine d’années que les bibliothèques lituaniennes fonctionnent sur un nouveau modèle.
Nos bibliothèques ont en quelque sorte une double personnalité : tenues d’un côté de servir au mieux la collectivité des utilisateurs, elles doivent de l’autre assurer leur fonctionnement en fournissant des gages de crédibilité aux pouvoirs locaux et aux différents bailleurs de fonds. Cette double contrainte rend les métiers des bibliothèques extrêmement créatifs et stimulants. Nombre de bibliothèques ont certes fort bien réussi à développer leurs activités et à obtenir les crédits nécessaires, mais il reste encore beaucoup à faire, à la fois pour généraliser les compétences réclamées par le troisième millénaire et pour trouver de nouvelles sources de financement et de soutien.
Si on entend beaucoup dire, ces temps-ci, que l’ère de l’Internet rend les bibliothèques superflues, on n’a jamais autant parlé de l’avènement de la société fondée sur le savoir, des effets de la mondialisation et du « nouvel ordre mondial ». Les bibliothèques ont devant elles un bel avenir pour peu qu’elles arrivent à démontrer – et je suis sûre qu’elles y parviendront – que, derrière ces mots et ces formules, il y a une vraie volonté d’agir et un potentiel énorme.
Février 2004