Offrir Internet en bibliothèque publique
Gaëlle Enjalbert
Le dernier-né de la collection « Bibliothèques » du Cercle de la Librairie se penche sur l’arrivée d’Internet dans les bibliothèques publiques. Il fait la synthèse d’expériences françaises et internationales et s’appuie sur les propos de théoriciens des technologies en bibliothèque, comme Hervé Le Crosnier, Alain Jacquesson ou Dominique Lahary.
Pour sensibiliser et former les Français à l’usage des nouvelles technologies, les bibliothèques s’ouvrent depuis 1995 à Internet. Conformément aux engagements de l’État dans le Programme d’action gouvernementale pour la société de l’information, les bibliothèques publiques participent à l’abolition des barrières, qu’elles soient d’ordre technique, pédagogique ou financier.
Une nécessaire introduction d’Internet en bibliothèque
L’auteur débute sa présentation par l’initiation et la formation des usagers à une navigation citoyenne et critique. Pour cela, le bibliothécaire devient un médiateur, voire un formateur, chargé de transmettre ses méthodes et ses compétences en matière de recherche documentaire. L’auteur illustre ces propos en présentant les actions des bibliothèques départementales de prêt (BDP) dans les réseaux des communes de moins de 10 000 habitants. Rappelons que si les besoins sont importants en zones rurales, les BDP ont tout de même d’abord étudié et analysé les offres des médiathèques de communes plus importantes pour élaborer leur offre. Quant à l’insistance de l’auteur pour le développement de l’accès gratuit à Internet, l’ambition est louable ; cependant, aujourd’hui, les droits d’inscriptions et les tarifications sont en France très répandus.
Ensuite, Gaëlle Enjalbert présente Internet en bibliothèque comme un moyen d’enrichir les collections. Les documents numériques présents sur les réseaux, une fois sélectionnés, s’intègrent au fonds. Cette nouvelle tâche, dont la lourdeur n’est pas à sous-évaluer, s’accompagne d’une veille accrue de par la nature des publications.
Les enquêtes et les sondages qui, depuis 1995, étudient les pratiques des publics montrent le développement des usages liés à la communication (mél, chat) par rapport à la simple recherche d’information. À plusieurs reprises, l’auteur dévalorise les usages liés à la communication sur Internet. Rappelons qu’ils sont très répandus dans les pays anglo-saxons où la satisfaction des besoins de l’usager prime.
Ensuite, un point sur les moyens techniques, financiers et humains. La partie technique décrit les matériels et logiciels disponibles. L’évolution rendra rapidement obsolète de nombreux détails techniques et tarifaires. Le professionnel sera amené dans ses projets à travailler avec les services informatiques de sa collectivité qui compléteront et adapteront les propositions. Pour les applications propres aux bibliothèques, comme les interfaces des catalogues ou les logiciels gérant les ressources numériques, leur durée de vie sera plus longue et leur analyse revient aux bibliothécaires. Ces derniers confronteront alors leurs objectifs et les attentes du public aux produits du marché. Le point sur les mobiliers et leurs dispositions s’avère utile lors de la création d’un espace multimédia. Ensuite, l’auteur recense les différentes aides financières disponibles, en détaillant les taux de subvention et les critères d’éligibilité. Enfin, au travers de la présentation des contrats emplois-jeunes, Gaëlle Enjalbert explicite et analyse la double compétence du technicien animateur et gestionnaire d’un espace dédié aux nouvelles technologies de l’information et de la communication. Si leur apport est important, la mort annoncée de ce dispositif nous contraint à lire attentivement les paragraphes sur la nécessaire polyvalence des personnels.
Afin de valoriser Internet, l’auteur recense différents exemples d’animations ponctuelles ou régulières. L’analyse de leur montage et de l’opinion des publics inspirera certainement d’autres établissements.
Quelle offre proposer ?
Le chapitre sur l’organisation de la consultation est essentiel, les chefs d’établissement ayant à cet égard à faire des choix. L’analyse des différentes modalités de consultation, du réel libre accès à l’Internet à la limitation de l’offre à une sélection de sites, et des conséquences pour l’usager est primordiale. L’auteur ne recommande pas aux établissements de proposer des accès libres et non contrôlés, leur préférant un accès encadré par des chartes d’utilisation et les propositions des bibliothécaires. Cette problématique s’est enrichie lors du débat organisé lors du Salon du livre de Paris 2002, qui s’est poursuivi entre les professionnels dans le BBF au cours de l’année 2002. Il faut ajouter à la réflexion les propos d’Hervé Le Crosnier, quant à la responsabilisation des usagers annihilée par l’anonymat et au rôle de l’État pour éviter la prolifération et la consultation de sites illicites.
Nous regretterons que, pour l’auteur, la bibliothèque doive être située en dehors de l’espace marchand. Si les propos sont louables pour garantir un accès gratuit à tous à l’information, il en va autrement pour la consultation des sites marchands. L’information payante se développe et les besoins des usagers peuvent la justifier.
Plus loin qu’Internet pour le public
Deux chapitres dépassent la thématique du titre. Le premier, sur l’Internet professionnel, recense les ressources utiles aux bibliothécaires : les adresses et une présentation des listes de discussion, des périodiques en ligne ou des sites institutionnels et enfin une liste de sites utiles tout au long du circuit du livre. Un petit guide reprend les principes de base de la recherche documentaire. Il devra cependant être complété par des ouvrages plus pointus comme ceux d’Olivier Andrieux 1 ou Jean-Pierre Lardy 2. Rappelons que ces compétences ne sont que depuis peu intégrées aux formations initiales et continues des professionnels, et qu’elles doivent s’accompagner d’une pratique assidue pour assimiler les compétences. Les éléments rassemblés permettront aux collègues de se familiariser avec l’outil, pour ensuite être plus à même de répondre aux attentes du public.
Enfin, l’auteur consacre la dernière partie de son ouvrage à la présence des bibliothèques sur Internet. Ce petit guide du webmaster dresse les points essentiels pour mettre en place un site web. Il recense les fonctionnalités présentes sur les sites de bibliothèques françaises et des informations pratiques relatives à la mise en ligne du catalogue et à la numérisation du patrimoine.
Une riche bibliographie clôture l’ouvrage. La liste des institutions et des personnes ressources permettra non seulement de recenser les stages de formation continue pour les personnels, mais aussi de mettre à jour des informations qui deviennent de par leur nature rapidement obsolètes.