Grande-Bretagne : la Library Association cède la place au CILIP
Gernot U. Gabel
Sans tambours ni trompettes, une des plus vieilles associations de bibliothécaires vient de tirer sa révérence et d’entrer dans les annales. Le 1er avril 2002, en effet, la Library Association (LA), l’Association des bibliothécaires britanniques fondée à Londres en 1877 (un an après l’ALA, American Library Association, qui fut la première du genre), a fusionné avec l’Institut d’information scientifique (IIS), créé en 1958. La nouvelle organisation ainsi constituée a été baptisée CILIP, pour Chartered Institute of Library and Information Professionals.
Une fusion longtemps différée
La réunion de ces deux entités, qui représentaient respectivement les bibliothèques britanniques et la documentation scientifique, fut le fruit d’un processus de longue haleine. Bien que par le passé cette fusion ait été maintes fois proposée, les premières démarches concrètes datent du début de la décennie 1990. Il fallut dans un premier temps définir les étapes de l’unification, ce qui n’alla pas sans débats prolongés de part et d’autre. Suivirent trois années de négociations officielles entre les deux parties, assorties d’un échange d’arguments parfois assez vif à propos du changement envisagé. Du côté des bibliothécaires en particulier, la perspective de devoir renoncer au nom de l’Association suscitait de sérieuses réserves.
Pour finir, chaque organisation demanda à ses membres de voter pour ou contre la fusion. Après que ceux de l’IIS l’eurent approuvée à la mi-juillet 2001, la dernière haie fut franchie au mois d’octobre suivant ; à l’occasion de ce qui devait être la dernière assemblée générale annuelle de « leur » association, les bibliothécaires optèrent à leur tour massivement pour l’unification. Il ne restait alors plus qu’à rédiger les statuts et le règlement intérieur, et à les déposer auprès du Conseil privé de la reine qui les entérina lors de sa réunion de décembre.
Une nouvelle association
Une fois la date de naissance officielle du nouvel organisme arrêtée au 1er avril 2002, un groupe de travail fut chargé d’assurer la transition en douceur. Il sollicita la participation active des adhérents de la LA et de l’IIS et dressa avec leur concours les listes des candidats pour un poste au conseil. Le comité intérimaire élut ensuite Sheila Corrall (université de Southampton), seule à se proposer à cette fonction, à la présidence de la nouvelle association.
L’adhésion au CILIP se fait selon deux procédures. Pour des raisons juridiques, les personnes jusqu’alors inscrites à l’IIS doivent demander leur affiliation au CILIP, alors que les transferts d’adhésion des membres de la LA sont automatiques. Sur le fond, le statut des membres est peu ou prou resté identique, dans la mesure où chacun peut proposer sa candidature au conseil. Quant au montant de l’adhésion, il y a tout lieu de penser qu’il sera fixé en fonction du salaire. Au vu des estimations actuelles, le CILIP devrait rassembler quelque 23 000 adhérents. Ceux-ci pourront, comme dans leurs anciennes associations professionnelles, jouer un rôle dans les commissions régionales ou dans des groupes de travail particuliers. La nouvelle organisation comprendra au total neuf commissions régionales pour l’Angleterre, une pour l’Écosse, une pour le pays de Galles et une pour l’Irlande du Nord ; quant aux groupes de travail, ils sont d’ores et déjà plus d’une vingtaine. Ouvert à tous les professionnels des bibliothèques et des services de documentation, le CILIP s’efforcera de rallier le plus grand nombre d’entre eux. Son but est d’effectuer la synthèse entre leurs métiers respectifs à partir des savoir-faire et des compétences qu’ils partagent, quel que soit le lieu où ils travaillent.
Une des toutes premières décisions prises par le conseil portait sur le logo du CILIP. Le graphisme reprend l’acronyme, qui vient s’inscrire en minuscules sur une ligne ondulée, l’appellation complète de l’organisation étant placée, selon les cas, en dessous ou à côté. Lorsqu’on mentionne le CILIP dans un texte, mieux vaut en revanche écrire le sigle en majuscules afin de le rendre plus lisible en tant que tel. Juste avant que la fusion devienne officielle, les membres des deux organisations mères s’interrogèrent sur sa prononciation : fallait-il dire « cilip » ou « kilip » ? « Cilip », trancha le conseil, avec un c doux comme dans « cyber ».
Sur le plan administratif, les choses n’ont pas fondamentalement changé. Le CILIP a son siège dans les locaux de la défunte LA. Depuis le mois d’avril dernier, les deux associations disposent d’un site web commun **, qui fournira également le « radical » des adresses de courrier électronique du personnel travaillant dans l’immeuble londonien de Ridgmount Street.
La LA et l’IIS sont tombés d’accord pour fixer à trois ans, d’avril 2002 à mars 2005, la période dite « de transition ». Quand elle prendra fin, les principales structures du CILIP (nouvelles commissions régionales, nouveau cadre des qualifications, nouveau code de conduite et d’éthique, etc.) seront en place. Dans l’intervalle, les adhérents sont encouragés à participer activement au déroulement des programmes d’intégration.
Un nouvel éditeur, Facet Publishing
Les éditions de l’ex-LA se présenteront sous un jour complètement nouveau. LA Publishing, l’ancienne maison d’édition de l’Association des bibliothécaires, devient Facet Publishing (allusion au schéma de classification). Adressée aux métiers de l’information et de la documentation, elle publiera dans des domaines très divers, de la gestion des connaissances aux services « hybrides », mi-littéraires, mi-documentaires, en passant par Internet, la numérisation et la formation au moyen des outils électroniques. Elle se fera essentiellement connaître par la nouvelle revue des adhérents, (Library + Information) Update, qui remplace à la fois le LA Record (publié depuis 1899), et Inform, le bulletin de l’IIS (publié depuis 1975). Le premier numéro du mensuel Update est sorti en avril 2002.