Le métier de documentaliste

par Dominique Cartellier
Rouen : Centre national d’enseignement à distance (CNED), 2000. – Vidéogramme 90 minutes. 195 F/29,72 euro

Documentaliste, ce métier qu’exercent aujourd’hui près de 30 000 personnes en France demeure mal connu et sans doute insuffisamment reconnu. Exercé en majorité par des femmes jeunes (36 ans en moyenne), il est couramment associé à la sphère culturelle alors qu’il se pratique essentiellement en entreprise, dans une grande diversité de domaines relevant du public et du privé.

Pour remédier à cette méconnaissance et permettre une meilleure information sur cette profession par ailleurs en pleine évolution avec l’essor des nouvelles technologies d’information et de communication, le Centre national d’enseignement à distance (Cned) vient de réaliser une vidéo à partir d’une table ronde qui s’est déroulée le 28 janvier dernier au Futuroscope de Poitiers. Cette table ronde rassemblait six documentalistes venus d’horizons très divers 1 qui ont présenté leur activité, réagi à des reportages projetés pendant la séance et répondu à des questions du public présent sur place ou assistant à la retransmission en direct des débats.

Un métier récent

Se documenter, a rappelé Jean-Philippe Accart, c’était autrefois se renseigner. Mais, si la notion de documentation date de la fin du siècle dernier, le métier de documentaliste, lui, est relativement récent, puisqu’il est véritablement né dans les années 50 avec la création de l’Institut national des techniques documentaires (INTD) et qu’il englobe aujourd’hui l’ensemble des opérations liées au traitement et à la diffusion de l’information. Avec le métier plus ancien de bibliothécaire – par rapport auquel il s’est construit – qui s’attache à la conservation et à la communication du patrimoine écrit, et celui d’archiviste qui s’intéresse au patrimoine de l’entreprise, il constitue un ensemble de trois professions qui ont chacune leurs spécificités, mais qui tendent aujourd’hui, avec le développement des supports électroniques, à converger.

La fonction de documentaliste présente cependant certaines caractéristiques que les participants de la table ronde se sont attachés à mettre en évidence. Parmi elles, la notion de médiation est essentielle. L’ensemble de la chaîne documentaire est orientée vers l’utilisateur avec lequel doit s’instaurer un dialogue, une relation de confiance même, permettant de préciser la demande et d’apporter une réponse plus adaptée.

Mais le métier de documentaliste, c’est aussi la mise en œuvre d’un ensemble de tâches complexes et variées : traitement de l’information, élaboration de produits documentaires, diffusion et réalisation d’outils de communication, veille technologique, etc. Ces opérations s’appuient pour certaines sur des techniques et des outils communs. Le traitement de l’information (catalogage, indexation), par exemple est normalisé ce qui permet l’échange de données au sein d’un même domaine d’activités ou d’un même champ thématique. Les documentalistes travaillent beaucoup, et sans doute de plus en plus, en collaboration dans des réseaux structurés (des associations professionnelles par exemple) ou informels. Ce partage est une façon de mieux rentabiliser le travail lui-même et, sur un plan économique, de remédier par exemple au problème du coût de plus en plus élevé des abonnements aux revues scientifiques.

Des domaines très différents

La profession de documentaliste s’exerce dans des domaines très différents (presse, médecine, éducation, secteur social, recherche, industrie, etc.), ce qui nécessite dans certains cas des compétences particulières : des connaissances scientifiques pour travailler dans l’industrie pharmaceutique, de la pédagogie pour répondre aux élèves d’un collège ou d’un lycée, la maîtrise de langues étrangères, notamment l’anglais. Mais, à la base, il faut d’abord une excellente culture générale. « Nous sommes toujours en relation avec des spécialistes », rappelle Dominique Velten, « et nous devons être en mesure de dialoguer avec eux quel que soit le sujet ».

De fait, les documentalistes en place actuellement ont dans l’ensemble reçu une formation poussée. D’après une enquête de l’ADBS (Association des professionnels de l’information et de la documentation), 70 % d’entre eux avaient, en 1999, une formation universitaire de 3e cycle et un grand nombre ont un diplôme en documentation (diplôme universitaire de technologie-DUT, licence, maîtrise, diplôme d’études appliquées-DEA, diplôme d’études supérieures spécialisées-DESS, INTD...).

Le développement des réseaux de communication et des supports électroniques fait aujourd’hui considérablement évoluer le métier (84 % des documentalistes utilisent Internet, d’après l’enquête de l’ADBS). Ils ouvrent de nouveaux champs professionnels (cyberdocumentalistes), mais ils libèrent aussi le documentaliste de certaines tâches et ils modifient la demande en permettant l’accès par tous à de multiples sources d’informations. Pour autant, au dire des intervenants de la table ronde, les nouvelles technologies sont avant tout des outils supplémentaires. Et ce qui fait l’intérêt et la valeur ajoutée de ce métier, c’est bien le lien avec l’utilisateur qui passe d’abord par une femme ou un homme, professionnel de la documentation.

Cette vidéo, première d’une collection consacrée aux métiers, bien qu’un peu longue, montre de façon vivante les différentes facettes de ce travail parfois stressant, supposant d’être toujours en éveil, de savoir réagir dans l’urgence et d’anticiper. Elle constitue un excellent support de présentation pour des élèves, des étudiants, de futurs professionnels ou encore des bibliothécaires qui trouveront à la fois des informations, des renseignements pratiques et différents points de vue à travers les débats, les reportages (chez Bayard Presse au centre de ressources documentaires, ou au service de documentation de l’annuaire de recherche électronique Nomade) et les témoignages comme ceux de Pierric Bergeron qui travaille dans un lycée, d’une documentaliste audiovisuelle qui exerce en indépendante ou de journalistes « utilisateurs ». S’il fait une large place à la documentation de presse, domaine sans doute attractif, ce film permet néanmoins de se faire une idée précise des débouchés variés qu’offre cette profession qui, de plus en plus, s’inscrit dans le cadre européen.

  1. (retour)↑  Il s’agissait de Jean-Philippe Accart, enseignant à l’IUT2 de Grenoble, Pierric Bergeron, documentaliste au lycée pilote innovant du Futuroscope, Joëlle Lacanal, documentaliste chez Sanofi-Synthélabo, Françoise Navarro, responsable de centre de documentation sociale du conseil général de Seine-Maritime, Marie-Pierre Réthy, documentaliste à l’hôpital Pierre-Wertheimer de Lyon, et Dominique Velten, directrice des ressources documentaires de Bayard Presse, secrétaire générale de l’ADBS.