Item

revista de biblioteconomía i documentació 1998-1999

par Laurence Tarin
Barcelona : Col-legi oficial de bibliotecaris-documentalistes de Catalunya. - 2 n° par an-Abt annuel : 3 500 ptas/21,03 euro. Numéro : 1 800 pta/10,81 euro.

Item, revue en langue catalane, est éditée par le Col-legi des bibliothécaires et documentalistes de Catalogne (Espagne). Créé en 1985, ce Col-legi relève d’un type de structure qui n’a pas d’équivalent en France : c’est une corporation à laquelle il est obligatoire d’adhérer pour exercer la profession de bibliothécaire à l’intérieur de la communauté autonome de Catalogne 1.

Il est nécessaire pour faire partie de la corporation d’être titulaire d’un diplôme délivré par les écoles universitaires de bibliothéconomie et de documentation ou d’un titre équivalent. Le Col-legi assure à ses adhérents un soutien pour toutes les questions – en particulier juridiques – liées à l’exercice de la profession, et les représente au niveau du gouvernement régional. Il organise aussi la réflexion autour du métier : en publiant Item et en réalisant des colloques, mais aussi en animant des groupes de travail thématiques (propriété intellectuelle, bibliothèques pour la jeunesse par exemple). Le Col-legi joue également un rôle dans le domaine de la formation continue en proposant des stages à ses membres.

La revue Item, qui existe depuis plus de dix ans, traite de sujets intéressant toutes les catégories de bibliothèques, mais elle paraît faire une part un peu plus importante aux bibliothèques d’étude (bibliothèques universitaires et bibliothèques spécialisées). Elle se présente sous la forme d’une revue scientifique : maquette sobre, quasi-absence de publicité, résumés des articles en castillan et en anglais. Son contenu l’apparente aussi à ce type de périodiques : articles denses complétés par des bibliographies et des notes.

Articles de fond et nouveautés

La revue se compose de deux parties. La première partie est constituée d’articles de fond – qui forment parfois un dossier, mais pas toujours – et d’articles présentant une expérience concrète ou une bibliothèque. La seconde partie est composée d’une part, d’une liste de nouveautés sur les métiers des bibliothèques, de la documentation et des archives, classées par thème et accompagnées chacune d’un bref résumé, et, d’autre part, de critiques qui analysent en profondeur un petit nombre d’ouvrages récemment parus et sélectionnés par le comité de rédaction. Cette organisation ne manquera pas de nous rappeler celle du BBF.

L’analyse des articles permet de constater que les préoccupations des bibliothécaires catalans sont proches des nôtres. Un des numéros de 1998 est en effet consacré en partie au management des bibliothèques et à la gestion du changement. Le premier numéro de 1999 s’articule autour d’un dossier sur le rôle des bibliothèques publiques dans la société de l’information ; y sont évoqués la collaboration entre les bibliothèques publiques et les services des municipalités, ainsi que les liens à développer entre les bibliothèques et les autres services d’information locale. Le second numéro de 1999 rassemble plusieurs articles traitant de la documentation électronique. Le marché de l’information électronique en Catalogne y est comparé à celui du reste de l’Espagne, la question de la conservation des documents électroniques est abordée, et le serveur Web de la bibliothèque universitaire de Barcelone, qui propose en ligne les sommaires des revues électroniques auxquelles la bibliothèque est abonnée, nous est présenté. Les problèmes liés au catalogage et à la description des documents électroniques avaient été traités lors de la livraison précédente et ceux qui concernent les formats à choisir pour numériser un fonds avaient été, quant à eux, abordés dès 1998.

De façon plus marginale, la revue Item publie également des articles sur des thèmes tels que la formation des bibliothécaires, le développement de la littérature enfantine ou la propriété intellectuelle. À propos du droit d’auteur, on signalera un article de Miriam Sort paru en 1998. Miriam Sort n’est pas une inconnue des lecteurs du BBF puisqu’elle y a publié un article sur ce même sujet 2.

Enfin, chaque numéro est également l’occasion de porter l’attention sur des bibliothèques de la région. En parcourant les quatre numéros des années 1998 et 1999, nous pouvons ainsi découvrir des bibliothèques de type administratif telles que celles de la mairie de Barcelone ou de la Généralitat (gouvernement autonome de Catalogne), les services de documentation des télévisions locales, la bibliothèque de Catalogne 3 et d’autres bibliothèques souvent très liées au particularisme catalan.

Le premier numéro de 1998 retrace en effet l’histoire de la bibliothèque du parlement catalan qui a eu une très courte existence (de 1932 à 1939) durant la seconde république 4. Dans ce même numéro, les trois autres bibliothèques évoquées ont un point commun : elles rassemblent des fonds ayant trait à la mer. Il s’agit de la bibliothèque des sciences de la mer, de la bibliothèque du Musée maritime de Barcelone et de la bibliothèque de la faculté nautique (où sont enseignés l’ingénierie navale, le droit de la mer, la météorologie maritime, etc.).

Formation

Il nous a semblé intéressant de présenter ici avec plus de détails deux articles parus dans Item. Ces articles traitent de la formation et ont été publiés au premier semestre de 1998, le premier numéro de 1998 est en effet le dernier que le BBF ait reçu 5.

Le premier fait le bilan de l’activité de formation du Col-legi sur douze années. Nous l’avons sélectionné, car cette mission semble importante pour le Col-legi dont l’équivalent n’existe pas dans notre pays (l’Association des bibliothécaires français ne pouvant être assimilée à une corporation ou à un ordre tel que celui des médecins). Il a pour titre : « Bilan de 12 ans d’actions de formation au Col-legi oficial de bibliotecaris-documentalistes de Catalunya (1986-1997) » et est le fruit de la collaboration de Núria Balagué, Pilar Martínez et Nelly Peydró. L’intervention du Col-legi dans le secteur de la formation s’est d’abord portée – dès 1987 – sur la préparation aux concours qu’ouvraient différentes collectivités locales sur le territoire catalan. Cela répondait à une forte demande des professionnels.

Très tôt, le Col-legi a aussi développé une activité importante dans le domaine de la formation continue en organisant des stages. L’intervention du Col-legi en matière de formation continue peut prendre deux formes. Il propose en effet de façon classique un catalogue, mais passe également des contrats avec des collectivités territoriales ou des universités souhaitant former le personnel de leurs bibliothèques. Le Col-legi a également signé un accord avec l’université de Barcelone pour que les étudiants de l’École de bibliothéconomie et de documentation de cette université puissent assister à certains stages organisés par lui. La collaboration avec cette école a, d’autre part, abouti à l’élaboration en commun de journées d’études.

Les auteurs de l’article font également un bilan chiffré de l’activité de formation du Col-legi. Au total, sur douze ans, le Col-legi a organisé 248 formations (dont 39 correspondaient à des commandes et ont donc fait l’objet de contrats). La durée moyenne de ces formations est de 11 heures. 4 800 stagiaires y ont assisté, soit une moyenne de 400 stagiaires par an. Les formations avaient pour thèmes des sujets très variés. On peut cependant distinguer trois périodes : de 1986 à 1989, où les cours de catalogage et sur l’informatisation dominaient ; de 1989 à 1993, où la gestion et les technologies de l’information (cédéroms, bases de données) faisaient l’objet d’une forte demande ; de 1993 à 1997, où les demandes de formation concernaient en priorité Internet et les services rendus aux usagers.

À travers ces données, on remarque que l’activité de formation du Col-legi est loin d’être négligeable. Même si le nombre de stagiaires accueillis et de jours de stages organisés en moyenne par an sont inférieurs à ceux d’un de nos centres régionaux de formation aux carrières des bibliothèques, il semble que la corporation des bibliothécaires catalans joue plus ou moins ce rôle au niveau de la communauté autonome.

Enquêtes

Le second article, rédigé par Maite Comalat, Lourdes Reyes et Concepción Rodríguez, présente les résultats d’une enquête réalisée auprès des élèves de l’école universitaire de bibliothéconomie et de documentation Jordi Rubió i Balaguer. L’enquête recueille le point de vue des étudiants de 2e et 3e années (une autre consultation ayant été réalisée précédemment auprès des étudiants de première année). Ces enquêtes avaient pour objectifs d’analyser l’évolution de l’image que ces étudiants ont des services d’information et de déterminer les changements apparus au cours de leur scolarité dans les usages personnels qu’ils en font.

Rappelons au préalable que les écoles universitaires dispensent en Espagne un enseignement de premier cycle qui dure trois ans après le baccalauréat. Les résultats de l’enquête nous renseignent tout d’abord sur le type de centres d’information (les auteurs de l’article entendent par là les services d’archives, les bibliothèques publiques et les centres de documentation, ces derniers incluant les bibliothèques universitaires) que les étudiants en bibliothéconomie fréquentent de préférence.

Nous apprenons ainsi qu’ils ont peu recours aux services d’archives, sauf pour la réalisation d’un travail scolaire particulier et que, s’ils utilisent bien des centres de documentation, ils continuent à fréquenter assidûment la bibliothèque publique de leur lieu de résidence. Cette constatation étonne les concepteurs de l’enquête qui avaient fait l’hypothèse que les élèves se détacheraient progressivement de ce type de bibliothèque lors de leurs études. Ils expliquent ce résultat par un possible attachement des étudiants à « leur » bibliothèque, la découverte de cette bibliothèque ayant certainement été déterminante dans le choix de leur future profession. Les auteurs notent, par ailleurs, que les étudiants exploitent les ressources de la bibliothèque de l’école pour réaliser des travaux académiques et non pas pour satisfaire une curiosité liée à leur avenir professionnel.

En ce qui concerne les pratiques documentaires de ces mêmes étudiants, on note qu’ils utilisent prioritairement le catalogue de la bibliothèque pour trouver une information, sauf dans le cas de l’utilisation de services d’archives où ils s’adressent d’abord au personnel. L’utilisation des catalogues les distingue des usagers habituels des bibliothèques qui préfèrent regarder directement sur les rayonnages. Cette attitude semble logique étant donné l’expérience qu’ils ont acquise à l’école de bibliothéconomie : elle a fait d’eux des usagers autonomes. L’enquête met également en relief leur familiarité avec l’outil informatique, ce qui explique leur penchant pour l’utilisation de catalogues informatisés plutôt que manuels. Cependant, curieusement, ce sont les qualités de rapidité et de simplicité des catalogues informatisés qui sont mis en avant par les étudiants pour expliquer leur préférence plutôt que les possibilités de recherches complexes.

Il était aussi demandé aux étudiants de préciser les aspects du fonctionnement des différents établissements fréquentés qui les avaient le plus frappés. Il apparaît que c’est leur jugement sur les services d’archives qui évolue le plus au cours de leurs études. En fin d’études, ils ont en effet pris conscience de l’importance de la conservation et s’intéressent plus aux systèmes de sécurité à mettre en place pour préserver les documents.

En ce qui concerne les bibliothèques de lecture publique, l’attention des étudiants de 2e et 3e années se porte sur tout ce qui touche à l’attitude du personnel et aux services rendus. Ils s’attachent également à la qualité des locaux alors que cet aspect ne les intéressait pas au début de leur cursus. Leur façon de voir les usagers a, elle aussi, évolué depuis leur entrée en formation. Au sujet des centres de documentation, c’est surtout l’utilisation des nouvelles technologies dans la recherche d’information qui les frappe. Les auteurs de l’article concluent en expliquant qu’il semblerait qu’en fin d’études, les étudiants en bibliothéconomie se posent en défenseurs des usagers, l’accès à l’information étant devenu pour eux un droit. Ils tempèrent un peu les critiques sur le fonctionnement des bibliothèques que les étudiants ont exprimé à travers l’enquête en précisant que les élèves ont encore des difficultés à distinguer les rôles complémentaires que sont amenées à jouer les différentes catégories d’établissements. Ils indiquent également que si les étudiants sont capables de décrire d’une part, le fonctionnement idéal d’une bibliothèque et d’autre part, les réalités qu’ils observent sur le terrain, ils ont encore du mal à comprendre le pourquoi des différences qui les séparent. Un article nuancé donc, dont l’intérêt réside dans le regard qu’il nous permet de porter sur le processus de professionnalisation des étudiants en bibliothéconomie.

La lecture de la revue Item nous fait découvrir l’univers des bibliothèques catalanes qui sont certainement parmi les plus dynamiques d’Espagne. Nous pouvons ainsi constater que nous avons beaucoup d’intérêt en commun et que la culture latine que nous partageons n’est pas sans conséquence sur l’histoire, mais aussi sur l’avenir de nos bibliothèques.

Pour ceux qui souhaiteraient en savoir plus, une promenade sur le site du Col-legi : www.cobdc.org est toujours possible (le lecture du catalan est accessible à ceux qui maîtrisent le castillan et certainement possible pour un lecteur français un tant soit peu latiniste).