Petites bibliothèques partenaires de l'aménagement rural
l'exemple du Tarn-et-Garonne
Patrick Montbarbon
Les 30es journées d’étude du CEBRAL (Cercle d’études des bibliothécaires des régions Aquitaine, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon) ont eu lieu cette année dans le Tarn-et-Garonne selon une formule inédite. Après les traditionnelles communications, les participants – une cinquantaine – se sont déplacés de bibliothèque en bibliothèque dans tout le département, ce qui a permis d’évaluer une politique de lecture publique à laquelle le conseil général et la médiathèque départementale apportent un concours déterminant. Certaines visites mettaient l’accent sur un thème précis : bibliothèques et milieu scolaire, animation, partenariat. Étienne Brunet, vice-président du conseil général, ouvrait la journée en soulignant la volonté du département de se doter d’un véritable réseau de bibliothèques municipales, chargé de diffuser partout la culture.
Un plan départemental de lecture publique
Dès 1987, après un recensement des ressources humaines et documentaires, l’Assemblée départementale a adopté un plan départemental de la lecture publique, actualisé en 1995, dont les principales composantes sont :
– les missions de la médiathèque départementale : restructuration de son réseau en favorisant un dépôt unique par commune ; aide à la création et au développement des bibliothèques municipales ; mise en place d’un service de prêt direct pour sensibiliser la population et susciter ensuite l’ouverture d’un relais de la médiathèque ; développement du secteur audiovisuel (cassettes audio et disques compacts) ;
– les missions du CDDP (Centre départemental de documentation pédagogique) : prêt de documentaires, assistance technique aux BCD (bibliothèques centres documentaires) et CDI (centres de documentation et d’information), formation des documentalistes, aide à la constitution de fonds, conseils en animations ;
– la clarification des relations de la médiathèque départementale avec les bibliothèques municipales, les BCD et les établissements scolaires. Avant toute création de bibliothèque dans une commune, une réunion de concertation est organisée entre les différents partenaires (mairie, conseil général et médiathèque départementale, inspection académique, enseignants, CDDP), afin de définir une politique communale cohérente de lecture publique et d’accueil des scolaires. Une telle concertation a notamment entraîné la création de structures mixtes BM/BCD qui permettent non seulement des économies, mais encore et surtout une bonne articulation de la lecture publique et de la lecture à l’école, point décisif s’il en est ;
– le rôle des associations ouvrant à la promotion de la lecture, soutenues financièrement par le conseil général ;
– des actions complémentaires, telles que l’organisation de manifestations grand public (Plaisirs de lire en Tarn-et-Garonne), la promotion d’animations dans les zones rurales, le soutien de la langue d’oc, l’aide à la publication d’ouvrages sur le Tarn-et-Garonne.
L’actualisation de 1995 a vu la création des relais-lecture destinés à remplacer, principalement dans les communes de moins de 1 000 habitants, les dépôts scolaires ou en mairie et le prêt direct. Les contraintes sont moins lourdes que celles d’une bibliothèque municipale (40 m2 et quatre heures d’ouverture par semaine). Le conseil général apporte une aide à la construction ou à l’aménagement, une aide à l’acquisition de mobilier, un prêt de 200 à 500 ouvrages renouvelés trois fois par an et la formation des responsables du relais.
Bilan du réseau
Monique Hillenmeyer, directrice de la médiathèque départementale, a rappelé les différentes aides de l’État en faveur des bibliothèques municipales : concours particulier 1re et 2e parts, subventions du Centre national du livre et, depuis 1994, relais-livre en campagne. Ces derniers concernent les communes de moins de 2 000 habitants et visent à rassembler les différents partenaires de la chaîne du livre (bibliothèque, librairie...). Suivait un bilan des bibliothèques du réseau départemental, largement positif quantitativement (voir encadré) et qualitativement : aménagement de nombreuses bibliothèques, présence de documents sonores, formation des responsables. Quelques ombres restent à ce tableau : trois chefs-lieux de canton sont encore dépourvus de bibliothèque municipale (elles sont en projet) ; aucune bibliothèque ne diffuse de vidéocassettes ; aucune des bibliothèques visitées n’est informatisée.
En matière de construction et d’aménagement de bibliothèques, les communes du Tarn-et-Garonne peuvent solliciter, gratuitement, l’avis du CAUE (Conseil en architecture, urbanisme et environnement) départemental. Marie-Christine Saïs, l’un des architectes, a présenté cette structure associative, chargée notamment d’informer le grand public et de sensibiliser les écoliers, susceptible d’apporter une aide technique à la commune pour sa bibliothèque municipale ou pour les BCD : diagnostic des besoins, établissement d’une proposition adaptée pouvant porter aussi bien sur le choix du terrain d’implantation, conseils concernant la répartition des surfaces, l’aménagement intérieur (éclairage, chauffage, isolation, ventilation, rideaux, revêtements, mobilier, couleurs...), etc. Le CAUE n’a pas de mission de maîtrise d’œuvre, mais sa consultation préalable permet d’éviter bien des erreurs.
Formation
Marie-Noëlle Monserié, de la médiathèque départementale de Haute-Garonne, décrivit enfin la formation dispensée par le Centre ABF Midi-Pyrénées, « dernier maillon après la volonté politique et la construction ». Trente-sept personnes l’ont suivie en 1994/95 – employés de mairie, bénévoles, CES (contrat emploi-solidarité) – dont plus de la moitié viennent de Haute-Garonne. Le programme (200 heures) et l’examen sont classiques : bibliothéconomie, acquisitions et catalogage, bibliographie, intercalation. Cette formation se heurte à quelques problèmes tels que la diversité des candidats, la non-prise en charge par le CNFPT (Centre national de la fonction publique territoriale), l’origine presque exclusivement toulousaine des enseignants. Mais, non obligatoire en théorie, elle est requise en fait pour le recrutement des agents du patrimoine.
Le président du Conseil supérieur des bibliothèques, à qui revenait la conclusion de ces interventions, a souligné l’importance nationale du thème de cette année. Il s’est félicité du « bourgeonnement » de petites bibliothèques publiques et du changement de rôle des BDP (bibliothèques départementales de prêt), dont la fonction de conseil devient déterminante. Les politiques départementales peuvent être très diverses, mais la lecture publique doit rester un service de proximité.
Le circuit de visites pouvait alors commencer : Saint-Nicolas-de-la-Grave, Auvillar, Beaumont-de-Lomagne, Moissac, et, la seconde journée, moins chargée, Montpezat-de-Quercy. Toutes ces bibliothèques ont bénéficié de l’aide de l’État pour leur construction et/ou leur aménagement. Toutes sont dirigées par des professionnels. Le tableau ci-après donne la mesure des résultats obtenus.