Le chèque-lire
Annie Le Saux
« Dans ce pays-là, monsieur, on lit ». C'est ainsi que Jack Riou, directeur de l'Office régional culturel de Champagne Ardenne (ORCCA), a commenté l'implication de sa région dans l'opération « chèque-lire », système qui permet à la personne à qui vous désirez faire un cadeau de choisir elle-même son livre.
Le chèque-lire, une initiative réservée aux libraires, lancée en France il y a un an, selon le modèle des book tokens anglais, créés, eux, en 1932 et forts, actuellement, d'un réseau de 3 000 librairies. « La plus grande promotion en faveur du livre après les ventes de clubs », constate W.A. Barnes, directeur de la Société anglaise. Ce service existe aussi en Allemagne, en Hollande et en Suissé. « Quand on pense cadeau, on pense souvent livre », mais, continue Jean-Pierre Tandin, concepteur du chèque-lire français, les obstacles surgissent immédiatement : le choix du livre, suivi de son envoi par la poste. D'où l'idée du chèque-lire, « idée généreuse et idée de liberté ».
Le système est simple. Vous allez chez l'un des 180 libraires adhérents et vous choisissez parmi les quatre chèques-lire qui vous sont proposés (d'un montant de 20 F, 50 F, 100 F, 200 F), celui ou ceux que vous allez expédier par la poste. Vous pouvez accompagner cet envoi d'un des 8 modèles de carte que vous achetez 5 F. Le mode d'emploi vous est indiqué au dos avec, en sus - et c'est d'autant plus regrettable quand on touche au domaine du livre ! - deux fautes d'orthographe. La personne à qui vous envoyez ce chèque-lire peut, sans limite de date ni de lieu - il faut quand même que ce soit chez un libraire adhérent - recevoir un des 300 000 titres (livre scolaire, roman, livre documentaire, BD...) contre le chèque-lire. « C'est une ouverture extraordinaire pour les enfants et les adolescents, qui ne dépendent plus de leurs parents ou du libraire dans le choix de leurs lectures », remarque Claude Boislève, directeur de Synergie édition. Cette formule peut créer l'habitude de fréquenter les librairies, en offrant autre chose que ce qui existe déjà. Le chèque-lire cherche à briser les barrières. C'est pour cela qu'il est gratuit pour le client : en effet, on achète un chèque-lire de 100 F à un bout de la chaîne et on a un livre de 100 F à l'autre bout de la chaîne.
Outre l'aspect économique du « chèque-lire », l'aspect culturel de cette opération explique l'aide que lui apportent tant la région Champagne-Ardenne - le siège du chèque-lire se trouve à Esternay, dans la Marne -, par l'intermédiaire du Centre régional du livre, que l'Etat, par celle de la Direction régionale des affaires culturelles (DRAC) de Champagne Ardenne. Afin d'étendre la liberté de choisir le lieu d'achat ou d'échange de chèque-lire et de mieux le faire connaître, il a été suggéré de déborder le cadre des librairies. C'est ce qu'a fait le département de la Marne en dotant sous forme de chèques-lire un concours organisé sur le thème de la lecture. Autre ouverture possible : les collectivités, les associations, les comités d'entreprise, qui peuvent utiliser cette formule pour les cadeaux de fin d'année ou comme aide à la rentrée scolaire.
Le chèque-lire, service rapide, peu encombrant (chaque chéquier contient 25 chèques), offre à chacun une plus grande liberté de choix. Excellent principe, encore faut-il que le nombre des libraires adhérents s'accroisse sans plus tarder. La balle est dans leur camp.