D'autres défis pour notre temps
1989 : l'écrit est partout. Et l'imprimé, son support traditionnel, omniprésent dans la vie quotidienne, croît comme la mauvaise herbe. Mais le signe typographique lui-même se dilue, soumis à la pression des formes graphiques nées à la suite des nouvelles techniques d'impression. L'idéogramme, le logo, l'image, entrent dans le jeu pour déboucher sur une lecture « universelle » via les réseaux mondiaux de communications. Et aussi, la lecture se dégage du moule dominant ; la lecture de consultation silencieuse et solitaire n'est plus la seule forme de lecture : émerge une lecture multimédia, une lecture libérée, aléatoire, éclatée et discontinue. Une lecture intelligente sur un texte désormais infini susceptible de remaniements ad libitum.
Et pourtant, un discours récurrent annonce depuis des années la disparition prochaine de l'écrit, menacé d'une part par l'audiovisuel et la civilisation de l'image, d'autre part par la montée de l'illettrisme. Les chiffres, pourtant, ne laissent aucune ambiguïté : les bibliothèques seront bientôt submergées et ne pourront plus maîtriser leurs collections. A force de trop produire, la civilisation de l'information risque d'imploser. Reflet culturel mais aussi socio-économique de leur société, les bibliothèques se doivent d'évoluer. En intégrant bien sûr les logiques en différé des nouvelles technologies, mais aussi en procédant à une révolution culturelle : le conservateur devra se transformer en désherbeur ; il devra aussi se tranformer en aiguilleur ; mais, aussi il devra rester un guide et un animateur.