L'information sur les revues scientifiques

premier bilan d'une expérience dans le domaine de la psychologie

Denise Malrieu

Le Catalogue thématique des revues de psychologie et disciplines connexes publié par le CDSH, ainsi que la banque de données sur les périodiques dont il est issu (PSYSIS), ont été conçus dans le but d'offrir aux chercheurs, étudiants et praticiens une meilleure information sur les revues. Sont discutés les choix effectués, lors de la réalisation de ce produit, concernant la définition de la couverture (internationale et multidisciplinaire), les éléments de description des revues, la méthodologie de traitement employée pour caractériser le contenu scientifique et les limites du logiciel utilisé. L'auteur présente quelques utilisations possibles de la banque de données PSYSIS : évaluation de la production nationale et internationale de la littérature périodique dans la discipline, évaluation des banques de données bibliographiques et des ressources collectives en revues scientifiques. Enfin, l'auteur propose quelques modalités d'étude des comportements de recherche d'information, encore trop peu explorés, et d'analyse des caractéristiques des productions écrites, qui devraient permettre d'améliorer encore les fonctionnalités de ce type d'outil documentaire informatisé.

The CDSH (information center for humanities) has published the Catalogue thématique des revues de psychologie et disciplines connexes, created from the databank on periodicals (PSYSIS), Both have been elaborated in order to provide searchers, students and doctors with a relevant information about scientific periodicals. The choices made in the setting-up of this product are studied regarding the coverage (international and multisubject), the description elements, the methodology of the processing used to describe the content, and the limits of the software. The author presents some applications of PSYSIS : assessment of the national and international production in the subject, evaluation of the bibliographic databanks and of the existing resources in scientific periodicals. The author suggests some guidelines for a study of retrieval behaviors, relatively unexplored, as well as an analysis of the written products features, which should improve the uses of such a tool.

Quelques mois après la publication du Catalogue thématique des revues de psychologie et disciplines connexes (1), il apparaît possible de dresser de cette expérience un premier bilan, qui puisse être utile à des tentatives du même ordre dans d'autres disciplines : il s'agit moins d'une évaluation du produit par les utilisateurs - il est trop tôt pour cela -, que d'un essai d'analyse critique de la démarche effectuée, suivi de propositions techniques d'améliorations.

Le contexte

Pourquoi, dans un centre de production de bases de données bibliographiques (BDB), dévier ainsi vers un produit non bibliographique, tâche normalement dévolue aux bibliothèques et au Catalogue collectif national des publications en série (CCN), spécialiste de l'information sur les périodiques ? Loin de vouloir faire double emploi avec le travail du CCN, ce projet est directement issu des problèmes liés à la fabrication des BDB elles-mêmes.

Crise des BDB

Le projet s'insère dans une démarche globale qui visait à définir les conditions de viabilité d'une production de banques d'information scientifiques.

Depuis 1984, le CDSH (Centre de documentation sciences humaines du CNRS) s'interrogeait sur les solutions à apporter à la crise des BDB et sur la définition d'une politique scientifique cohérente 1. Une enquête auprès des enseignants et chercheurs en psychologie permit de dégager un certain nombre de problèmes : crise de l'édition des revues de langue française en psychologie, manque de lieux de publication pour la recherche appliquée et d'information sur les lieux de publication au niveau européen, nécessité d'aider les étudiants à se repérer dans les publications au niveau national et international et à localiser les périodiques dans les bibliothèques spécialisées. Certains chercheurs ont aussi évoqué le besoin d'un meilleur recensement, par les BDB françaises, de la littérature européenne, en particulier de langues romanes ; ils déploraient également le non-recensement des ouvrages, alors que, dans cette discipline, la publication de monographies est en France très supérieure à celle des périodiques. Les critiques formulées par les chercheurs portaient enfin sur le faible pouvoir sélectif des BDB : indexation trop générique, qui engendre souvent des listings trop lourds et onéreux et où l'absence fréquente de résumé précis interdit de juger de la pertinence réelle du document.

Les discussions concernant les frontières de la discipline ont d'autre part amené les participants à conclure à la nécessité de prévoir des outils à couverture largement pluridisciplinaire, tels que revues de sommaires de type Current contents (très utilisés par les chercheurs, mais trop centrés sur les publications américaines). Le projet de revue de sommaires de couverture européenne, vivement souhaité par les chercheurs, confirme bien le fait généralement constaté que, dans la documentation de ces derniers, les périodiques jouent un rôle central : le chercheur circonscrit un noyau bien défini de revues « intéressantes » qu'il observera régulièrement. L'enquête menée en 1972 par la Ligue des bibliothèques européennes de recherche (LIBER) (17) montrait que « lorsqu'ils entreprennent une recherche..., 85 % [des chercheurs] dépouillent des revues spécialisées, 56 % lisent des revues bibliographiques, 44 % consultent les fichiers et catalogues imprimés des bibliothèques de leur université..., 7 % font appel à des centres de documentation spécialisés et 3 % écrivent à une banque de données 2.. »

On peut rattacher le faible usage des BDB et leurs points faibles à trois types de problèmes du côté de la production :
- le manque de personnel, qui induit un retard considérable dans le traitement des documents et fait des BDB des outils rétrospectifs ;
- le mode de production, dans des centres coupés de la recherche, qui induit une incapacité à trouver des critères clairs pour le choix des revues traitées et des articles sélectionnés dans chacune, d'où la redondance croissante des BDB; de la même façon, le traitement uniforme de l'information, quelle que soit la discipline considérée, aboutit à l'inadéquation des modes de tri : on ne peut impunément indexer avec les mêmes outils et selon la même méthode la préhistoire et la psychologie ;
- enfin, la méthodologie de traitement, qui n'est pas en mesure de gérer l'évolution du langage scientifique ni d'adapter sa réponse au type d'utilisateur ou de questionnement (3), ni non plus d'aider l'usager à structurer et pondérer les références obtenues en fonction de sa problématique (4).

Un traitement à trois vitesses

A partir des problèmes rencontrés dans la pratique d'analyse-indexation et d'interrogation de différents systèmes et serveurs de BDB, certaines améliorations ont pu être élaborées et proposées concernant les conditions de production, la couverture des BDB et la méthodologie de traitement en psychologie.

La première proposition consistait à immerger l'unité documentaire dans une unité d'enseignement et de recherche, où la responsabilité scientifique serait partagée par documentalistes et chercheurs-enseignants. Cette solution, dont on a pu vérifier l'efficacité à l'unité documentaire de Trêves qui produit PSYNDEX 3, présente plusieurs avantages : contacts quotidiens avec les usagers, qui favorisent la définition de solutions adaptées à la discipline ; insertion dans une dynamique de la communication informelle, qui permet d'établir des réseaux de recueil de la littérature. C'est ce que montre aussi l'analyse du fonctionnement du réseau ERIC de centres spécialisés sur la recherche en éducation (5).

Le traitement des littératures francophone ou de langues romanes, très mal fait dans les BDB actuelles, nécessitait également d'être amélioré.

Un traitement à trois vitesses et trois niveaux gérés par un même système de gestion de bases de données (SGBD) fut ainsi étudié, comprenant une banque de données sur les périodiques, une revue de sommaires de type Current contents et une BDB analytique conçue selon une méthodologie redéfinie (6). La gestion par un même SGBD devait permettre de répercuter les sélections d'un niveau sur l'autre et de tirer de la BDB des informations utiles pour décrire le contenu du périodique ou les rattachements institutionnels de ses auteurs ; elle permettait également de faire appel à la revue de sommaires pour compléter le descriptif des revues dans le fichier périodiques ou bien de partir de ce dernier pour circonscrire des sous-ensembles de revues, à l'intérieur desquels on puisse définir une interrogation adaptée de la BDB analytique. Revue de sommaires et BDB sont alors deux banques de données, l'une étant le sous-ensemble de l'autre : la première repère correctement et signale ouvrages, congrès et sommaires de revues, elle est rapide et peut être éventuellement consultée sur Minitel ; l'autre est une sélection des ouvrages et articles les plus solides présentant un apport nouveau quant à la conceptualisation, la méthodologie, la discussion des résultats de recherche ou l'histoire de la discipline ; cette sélection serait évidemment effectuée ou validée par les spécialistes du domaine 4.

Les propositions concernant le traitement analytique portaient essentiellement sur deux points : d'une part préserver la possibilité d'un accès au discours de l'auteur (résumé d'auteur à défaut de texte intégral, avec éventuellement des réactions nominales de spécialistes sur le document traité), ceci dans le but de favoriser la gestion de l'évolution du langage scientifique en se donnant les moyens d'explorer l'environnement conceptuel d'un terme ; d'autre part, définir - en fonction des éléments dégagés par la pratique de l'interrogation - une nouvelle grille d'indexation, où seraient différenciées les dimensions de description du document et de la recherche en psychologie, ce qui revient à différencier les fonctions sémantiques et cognitives des différents types de descripteurs et identifieurs (cf. annexe I), de façon à moduler, à l'interrogation, les tris ou sélections selon ces dimensions en fonction de la question ; il devenait en outre possible, par l'agencement des dimensions sous une forme phrastique facilitant l'interprétation de l'index 5, de générer automatiquement des index-phrases construits à partir de la grille d'indexation.

Certains éléments de cette démarche existent déjà, sous une forme plus ou moins sophistiquée, dans des bulletins bibliographiques (comme le Bulletin analytique de linguistique française), dans des BDB traditionnelles (Modern language abstracts ou le Répertoire d'art et d'archéologie), ou dans des systèmes experts de type PLEXUS 6 (7).

Résistances

On a pu constater deux types de réactions à ces propositions de changement, réactions somme toute assez classiques dans toute institution. Certains rédacteurs, sensibles aux inadéquations du système, car amenés à confronter quotidiennement leur pratique d'indexation et de traitement du document aux questions des usagers, ont marqué un certain intérêt pour le projet. D'autres ont reçu ces propositions de manière négative, les percevant à la fois comme un surcroît de travail et comme une critique indirecte de l'indexation telle qu'elle est souvent pratiquée actuellement, vu les normes de productivité, sans lecture de l'article ; comme si l'explicitation des problèmes existants réveillait automatiquement une culpabilité endormie.

Les propositions de sélectivité de la couverture de la BDB analytique heurtaient visiblement certains principes éthiques de la profession, à savoir neutralité et exhaustivité. L'espèce de confusion entretenue dans les centres de BDB entre catalogues (proposant un recensement exhaustif des parutions) et BDB est, sans doute, autant l'expression d'une norme intériorisée lors de la formation des documentalistes, que celle d'un manque de réflexion sur les spécificités respectives des BDB scientifiques et des catalogues. Ces deux principes ont leur origine sociologique dans l'ambivalence profonde liée au statut de documentaliste : d'un côté se mettre au service des chercheurs, ce qui évite tout engagement scientifique et constitue une acceptation de la hiérarchie ; de l'autre, se poser en garant de l'éthique de la recherche en livrant « toutes » les informations, de manière à lutter contre les protectionnismes de chapelles.

Ces principes constituent une sorte d'aménagement de la relation hiérarchique chercheur/documentaliste, particulièrement forte en France, où le documentaliste ne se sent pas reconnu et opte finalement pour une position autonome loin de la recherche. Cette éthique de la neutralité a été démontée par Jacques Dreyfus et Martine Comberousse (8), qui apportent des solutions institutionnelles à des problèmes vécus comme sans solution dans les gros centres du CNRS, qui fonctionnent en ghettos de la documentation. Ces auteurs critiquent le principe de neutralité qui préside à la non-sélection des articles et à la rédaction des résumés, et qui justifie de ne retenir dans ces derniers que les éléments les plus formels, au lieu de s'attacher à dégager les problématiques. Ce type de neutralité est en fait, selon eux, une pseudo-neutralité car, à mettre tous les articles sur le même plan et de façon émasculée, la BDB entretient un conformisme en contribuant à enfermer ses utilisateurs dans le courant dominant du moment. Ils proposent donc une démarche plus engagée, où des réseaux de chercheurs définiraient le noyau dur des documents novateurs importants pour la discipline (une centaine pour plusieurs milliers de documents effectivement entrés), exigeant un traitement spécifique à l'intérieur de la BDB plus large. Dans son enquête auprès de chercheurs en psychologie sociale, Marie-Claude Vallet-Gardelle (16) confirme le handicap que constitue cette neutralité dans la prise d'information 7.

Le projet de revue de sommaires, qui, en soi, était plus recevable que le précédent, dans la mesure où il n'impliquait pas de travail intellectuel qualifié, ne put lui non plus être réalisé pour des raisons techniques (circuit de la chaîne de traitement trop lent, absence de solution informatique, caractère lacunaire des abonnements européens, dispersion géographique des fonds à traiter). Il fut donc décidé de diffuser l'information déjà engrangée lors du travail de repérage des revues françaises et européennes, de constituer sur micro-ordinateur une base de données sur les revues et d'en tirer un catalogue qui, à la fois, informe sur les productions françaises et étrangères, favorise un meilleur usage des canaux de publication existants, donne des informations thématiques et favorise l'accès en bibliothèque aux ressources collectives.

Périodiques : choix effectués

Le projet initial, trop lourd pour être réalisé intégralement, consistait en une description détaillée de la revue selon une centaine de zones : outre les données habituelles d'identification (ISSN, titre, sous-titre, titres parallèles, changement de titre, périodicité), étaient définies différentes dimensions (caractérisation de la source, des objectifs explicitement présentés par la revue, du contenu du périodique, informations concernant l'accès à la revue), dont la prise en compte pouvait varier selon le type d'objectif poursuivi : aide à l'interrogation, à la publication, information sur la production scientifique, observation de cette production, aide à la définition des fonds documentaires et aide à la consultation en bibliothèque (cf. annexes II et III : La mise en rapport des objectifs de la recherche d'information avec les critères de description des revues).

Une couverture élargie

Il était évident qu'un tel projet demandait des moyens bien supérieurs à ceux qui étaient disponibles 8, car il supposait d'entrer un très grand nombre d'informations, de compulser manuellement chacune des revues pour en tirer des données chiffrées et de confronter des sources d'informations et des fichiers dispersés et hétérogènes : si la réalisation du fichier, dans son état actuel, a supposé pour chaque mise à jour la consultation manuelle de vingt fichiers parallèles, le temps de traitement par unité (recueil des données et saisie) aurait, dans l'option maximale, facilement dépassé une heure et demie.

Il était donc exclu de réaliser un traitement aussi détaillé, à moins de se restreindre aux périodiques français. Cette éventualité nous a paru d'un intérêt limité (la production française étant relativement faible) ; elle ne répondait pas non plus aux souhaits des utilisateurs, qui s'étaient prononcés en faveur d'une revue de sommaires de couverture européenne ; il était de plus intéressant d'exploiter la richesse en revues étrangères des deux centres (CDSH et CDST) pour effectuer un repérage aussi large que possible, sans restrictions de nationalités, repérage qui n'est d'ailleurs pas restreint, pour la psychologie, aux fonds de ces deux centres réunis. Ces centres étant pluridisciplinaires, ont été également incluses dans ce répertoire en psychologie des revues de disciplines voisines, dans lesquelles le psychologue peut soit trouver des données à réinterpréter, soit confronter son approche avec celle des disciplines voisines, tant il est vrai que c'est aux frontières des spécialités que les choses bougent. Le critère de sélection a été de choisir des revues partiellement traitées par les bases de psychologie ; ont été également retenues les revues à vocation interdisciplinaire et des revues centrées sur l'épistémologie des sciences sociales et les problèmes de méthodologie de recherche.

Une autre difficulté rencontrée dans ce genre d'entreprise tient à l'hétérogénéité des publics liés à la discipline : d'un côté, celui lié à la psychologie générale et à ses différents champs de recherche (type CNRS ou universitaire), de l'autre, les praticiens liés aux sphères d'activités médicales et cliniques (14). On sait que le premier public, beaucoup moins important en nombre que le second, est soucieux de suivre régulièrement les publications internationales, surtout anglo-saxonnes ; le second, plus productif en ouvrages et revues, se contente plus facilement de lire la littérature francophone. Fallait-il adapter les critères de sélection à ces deux publics ? De fait, la sélection ne s'est pas opérée de manière identique pour les revues françaises et les revues étrangères : la couverture a été très peu sélective pour la France, incluant des revues de praticiens, mais non les revues de vulgarisation grand public ; il en a été autrement pour les revues étrangères puisque, d'une façon générale, les revues de praticiens ne traitant pas de recherche ont été écartées. Le fait de privilégier une couverture internationale multidisciplinaire n'a pas été sans poser de problèmes, car il est difficile de définir des frontières claires entre des disciplines voisines.

Au vu de l'expérience menée, il apparaît finalement préférable de prévoir des catalogues plus ciblés que celui qui est ici présenté, quitte à les multiplier, ce qui aura comme avantage d'éviter de fournir des outils difficiles à manipuler et décourageants par leur volume, tout en rendant possible un traitement plus riche, qui réponde aux fonctionnalités décrites plus haut. Il s'avère en outre difficile d'effectuer de manière satisfaisante un recensement à couverture internationale sur plusieurs disciplines. Il semble donc raisonnable d'envisager des catalogues qui ne dépassent pas l'étendue d'une discipline au sens classique du terme (psychologie, linguistique, sociologie), soit 500 à 600 revues. Cette base semble d'autant plus justifiée que les revues généralistes ou couvrant plus d'une spécialité sont assez nombreuses et que ces catalogues sont avant tout destinés à des publics non spécialistes (étudiants) ou non intégrés dans les milieux de la recherche institutionnellement reconnue.

Il aurait été sans doute préférable, dans le cas présent, de concevoir des outils parallèles concernant le versant neurosciences, la psychiatrie et la psychanalyse, disciplines pour lesquelles la description des revues s'est avérée trop succincte. Le traitement des spécialités ou des nouveaux champs transdisciplinaires, ainsi que le repérage des couvertures pertinentes, devraient s'effectuer avec l'aide des spécialistes, tout en s'appuyant sur l'observation des abonnements pris par les laboratoires spécialisés et sur les intercitations dans les revues. D'une manière générale, ce catalogue, s'il veut être réellement informatif, suppose de la part du documentaliste une bonne connaissance des champs et familles scientifiques et éditoriales de la discipline et de ses spécialités et nécessite d'être élaboré en collaboration étroite avec les spécialistes.

Le recensement large qui a été choisi dresse un état des lieux global (même s'il n'est pas exhaustif) de la production. Il a abouti à restreindre notablement la description et dans cette optique, les données facilement accessibles par le CCN ont été sacrifiées au profit de données complémentaires : approches disciplinaires et objets d'étude, localisations dans certaines bibliothèques spécialisées (avec mention des cotes), mention des banques de données de psychologie ou multidisciplinaires traitant le périodique. Le produit qui en est résulté n'est, de ce fait, pas autosuffisant et ne saurait éviter le recours à la bibliothèque : après avoir repéré certaines revues, l'utilisateur doit les consulter en bibliothèque ou interroger les BDB pour se faire une idée plus précise de leur contenu. On peut à ce propos espérer que la possibilité offerte à l'utilisateur par le serveur DIALOG, de définir lui-même ses formats d'édition, facilitera cette utilisation des BDB pour une information sur les périodiques peu accessibles.

Un contenu mieux défini

Si l'on observe la façon dont les revues se caractérisent elles-mêmes dans leurs titres et sous-titres, on constate que la quasi-totalité d'entre elles se définit par le nom de la discipline ou de la spécialité, par un corps professionnel lié à une discipline ou par un objet d'étude. La notice éditoriale donne des précisions sur les types d'approche disciplinaire (unique ou multiple), les types de recherches privilégiés, le public cible et les types d'élaboration acceptés (articles originaux, synthèses, notes de recherche, articles de discussion critique,... )

Il nous a donc paru nécessaire de donner la priorité, dans le traitement par indexation, à la caractérisation des approches disciplinaires et éventuellement des objets d'étude lorsque c'était possible, l'objectif étant d'effectuer une indexation obligatoire sur le premier axe et à un niveau de spécificité suffisamment informatif à l'intérieur de la discipline psychologie. L'attribution de plusieurs descripteurs à une même revue permet à la fois d'éviter des choix arbitraires dans la classification et de retrouver un même périodique sous différentes disciplines ou spécialités, si besoin est.

La nécessité d'une double indexation - approche disciplinaire et objet d'étude - pour les catalogues n'a peut-être pas été assez souvent soulignée : Lois Mai Chang (10) décrit les difficultés de la recherche sur le catalogue de la Library of Congress, lorsque cette double indexation fait défaut. La saisie de ces deux types de descripteurs dans des zones différenciées doit s'avérer fort utile pour l'interrogation et la génération d'index ; cette saisie était d'ailleurs prévue dans la grille d'indexation des articles de la BDB analytique dans des zones différenciées ZA1 et ZA2 (cf. annexe I). Cette distinction devrait faciliter le passage des informations du niveau articles au niveau revue et vice versa.

Approches disciplinaires

La démarche suivie le plus généralement a consisté à garder l'étiquette disciplinaire choisie par la revue elle-même, quitte à l'enrichir par d'autres données : Le Journal of cross-cultural psychology a été ainsi indexé sous le descripteur « psychologie interculturelle », le Journal of school psychology sous celui de « psychologie scolaire ».

Les revues représentant une des grandes spécialités de la discipline sont sans doute les plus faciles à indexer ; ce n'est pas le cas des revues sans spécialité dans la discipline ou généralistes (comme par exemple l'Australian journal ofpsychology), auxquelles a été associé le descripteur vide « revue multithème ». Quant aux revues généralistes des disciplines voisines, elles ont été indexées par le terme générique désignant la discipline (« sociologie » dans le cas de l'Année sociologique).

La solution du descripteur « multithème » est un pis-aller, puisqu'elle ne permet pas de retrouver la revue sous les différentes spécialités que fournit l'index thématique. Ce dernier privilégie donc les revues spécialisées. Il faut cependant noter que les revues concernées représentent moins de 14 % des revues de psychologie. L'autopostage des 6 ou 7 spécialités de la psychologie nous a paru arbitraire et fausser la réalité, dans la mesure où ces revues, souvent le fait des associations nationales ou sociétés savantes des pays à faible édition scientifique, ne sont pas homogènes quant à leurs orientations : suivant les contextes nationaux, certains champs ou approches y sont mieux représentés ; ils ont pu être signalés dans certains cas.

L'étiquette « interdisciplinaire » ou « multidisciplinaire », sous laquelle se définissent d'autres revues, recouvre des réalités hétérogènes, que seule une analyse en langage naturel pourrait décrire. Il peut s'agir de :
- revues à thèmes - souvent de recherche appliquée -, qui visent à confronter les discours des spécialistes : c'est le cas des Cahiers du nouveau-né, où s'expriment pédiatres, psychogénéticiens, psychophysiologistes, psychobiologistes, psychiatres, pharmacologues,... On peut ranger dans cette catégorie les revues centrées sur les problèmes sociaux et où certaines communautés de spécialistes collaborent de manière plus évidente et permanente, par exemple : Sciences sociales de la santé, Déviance et société, etc. ;
- revues tentant une intégration des théories utilisées dans différents domaines : c'est par exemple le cas de Human relations, qui confronte les champs de la famille, de la psychologie des groupes et de la psychosociologie des organisations ;
- revues adoptant un cadre conceptuel unique et exposant ses développements dans différentes disciplines : on peut citer Behavioural science, centrée sur la recherche systémique appliquée à la physique, aux organismes vivants, groupes, organisations, systèmes politiques, galaxies,... ;
- revues centrées sur des méthodologies et définissant leur adaptation dans différents champs d'application, par exemple : Multivariate behavioral research ou Transactional analysis journal ;
- revues étudiant un certain nombre d'organisations des conduites selon des approches différentes : Symbolon étudie par exemple les conduites symboliques de personnes, de cultures, de civilisations,... ;
- revues traversant certaines spécialités d'une discipline selon une approche extérieure (Anthropological linguistics).

Toutes ces différences ne sont pas rendues par le descripteur « recherche interdisciplinaire ». Il faut noter d'autre part que l'indexation des revues interdisciplinaires a été orientée par la nature du catalogue, limité à une seule discipline, la psychologie ; de ce fait, les revues interdisciplinaires, mais centrées sur une autre discipline que la psychologie, ont été indexées de manière moins détaillée que les revues de psychologie : la revue Kodicas est indexée par les descripteurs « sémiotique » et « recherche interdisciplinaire », le Journal of musicological research sous « musique », « psychologie de l'art » et « recherche interdisciplinaire ». Il semble donc préférable de préciser de façon exhaustive les approches disciplinaires représentées dans la revue.

Lié au problème de l'indexation est celui de la pondération. La pondération consiste à différencier deux classes de descripteurs en fonction de leur importance pour décrire le contenu du document : les descripteurs majeurs et les descripteurs mineurs. Certaines revues - souvent issues de milieux de praticiens - regroupent des spécialités différentes, qu'il eût été intéressant de pondérer. Dans l'optique d'un traitement par indexation simple (suite de descripteurs), il était envisageable de pondérer les descripteurs en majeurs/mineurs, comme cela se pratique dans certaines BDB. Nous ne l'avons pas fait pour plusieurs raisons : le logiciel utilisé ne le permettait pas - si ce n'est en différenciant deux zones, ce qui alourdit le processus. D'autre part, si l'introduction d'une pondération est aisée dans certains cas, elle se révèle difficile dans d'autres, en particulier dans le cas de revues à numéros thématiques de spectre large, qui font appel tour à tour à des spécialités différentes ; enfin, la pondération majeurs/mineurs est une procédure brutale, qu'il est délicat d'appliquer à des revues dont on n'a pas une longue pratique. Les notices d'autoprésentation peuvent, de par leur rédaction en langage naturel, donner ou suggérer ce type d'information de manière finalement plus satisfaisante. On voit ici les limites d'une simple indexation par descripteurs.

Objets d'étude

Certaines revues se définissent cependant par leur seul objet d'étude, sans référence à quelque discipline. Dans certains cas, l'objet d'étude renvoie à une spécialité : le Journal of classroom interaction peut ainsi être classé en psychologie de l'éducation. Il s'agit cependant là de cas exceptionnels. La plupart du temps, l'objet d'étude spécifique (conflit, douleur, lecture,...) ne peut être automatiquement raccroché à une spécialité : il s'agit de revues qui étudient un type de conduite, de groupe d'âge ou d'institution, selon une ou plusieurs approches disciplinaires, que seule la consultation de la notice et surtout des sommaires et articles peut révéler. Il faut donc, dans ces cas, rechercher le type d'approche privilégié par la revue. Dans le cas des deux revues suivantes : Beiträge zu Konfliktforschung, indexée par « conflit », « psychologie sociale », « psychologie politique » et Aggressive behavior, indexée par « conflit », « psychologie comportementale », « émotions », « animal », « humains », la seule indexation sous le descripteur « conflit » ne permettait pas de situer chaque revue.

Cette indexation ne tient cependant pas compte du niveau de spécificité de l'objet d'étude, très variable d'une revue à l'autre. La difficulté vient de la grande hétérogénéité des niveaux de spécialisation des revues. L'indexation systématique des objets d'étude pour les revues généralistes ou de spécialisation moyenne était évidemment exclue, si bien que la consultation de l'index offre, en ce qui les concerne, une lecture partielle de l'existant : dans le domaine de la perception visuelle, l'index ne fournit par exemple que deux titres : Spatial vision et Vision research, alors qu'il est évident que d'autres revues, par exemple Perception and psychophysics, publient régulièrement des articles sur le sujet. Il faut alors rechercher les titres sous le générique immédiat de « perception visuelle », à savoir « perception ». Dans d'autres cas, le recours au thésaurus n'est d'aucune aide : il est par exemple impossible de retrouver l'ensemble des revues traitant de la douleur par l'intermédiaire de l'index, qui ne mentionne que la revue spécialisée sur ce thème, Pain.

Types de descripteurs utilisés

Si l'on observe a posteriori le statut des descripteurs utilisés pour l'indexation des revues, on arrive à dégager six types, qui correspondent à des zones différentes de description dans la grille d'indexation des articles (cf. tableau 1).

Un 7e type de descripteurs aurait pu être utilisé, celui des aires culturelles ou géographiques dans certaines spécialités, telles que la psychologie interculturelle ou l'anthropologie ; il correspondrait à la zone ZC (GE) de la grille (cf. annexe I).

On voit donc que ces critères recoupent les dimensions explicitées dans la grille d'indexation des articles, certaines étant, dans le catalogue, quasiment toujours remplies (1,2,3), d'autres très peu (4,5,6), d'autres pas du tout (types de recherches et méthodologies dominantes). Un traitement statistique des grilles analysant les articles d'une même revue selon ces dimensions permettrait de compléter de façon plus fine le descriptif de la revue. A cette fin, il paraît nécessaire de prévoir la saisie de ces catégories de descripteurs dans des zones distinctes.

Quelles méthodes de traitement ?

Le choix du traitement obéit à trois critères essentiels : Quelles informations utiles transmettre à l'usager ? Comment assurer une interrogation fiable de l'information engrangée ? Quel traitement s'avère le plus économique en temps de travail qualifié, tout en étant compatible avec une information de qualité, c'est-à-dire capable de répondre aux différents types de recherche d'information ?

Points de comparaison

L'examen de quelques catalogues existants montre qu'il existe une gamme très variée de possibles.

Le Catalogue descriptif des périodiques français d'études anglaises et américaines (11) décrit chacun des 54 périodiques répertoriés sur une double page verso-recto : la première page est consacrée à une notice bilingue explicitant les objectifs de la revue, ainsi qu'aux informations concernant la périodicité, le comité de rédaction, l'éditeur, les tarifs et adresses d'abonnement ; la seconde donne le sommaire du dernier numéro et les titres des numéros disponibles ou à venir. L'originalité de ce répertoire réside dans son souci de description détaillée, qui inclut la présentation physique de la couverture et du logo de la revue. Il s'agit d'un produit papier uniquement, destiné à être feuilleté - le nombre de revues traitées est très faible - et le traitement de type indexation y est réduit au minimum (huit mots-clés au total) ; on peut toutefois signaler que l'indication de la pagination des articles dans le sommaire, de même que la fourniture de deux ou trois sommaires eussent été plus informatives.

L'Agenda de la psychanalyse (12), qui répertorie séminaires, lieux de formations, associations et revues françaises, est un autre exemple de produit papier destiné à informer et à aider à la diffusion des revues. La présentation, faite le plus souvent par les revues elles-mêmes, est loin d'être homogène, mais les éléments d'information fournis concernent généralement l'association éditrice, la date de création, voire parfois l'évolution de la revue parallèlement à celle des écoles et groupes en présence, les objectifs, le comité de rédaction, l'adresse et les tarifs d'abonnement ; cette information est complétée par les titres des numéros déjà parus.

Ces deux répertoires montrent qu'une couverture restreinte à la seule communauté française est jugée utile par les communautés éditrices de revues. Sur l'autre versant, se trouvent les catalogues issus de bases de données, tels la Liste mondiale des périodiques en sciences sociales, publiée par l'Unesco (13) ou le Catalogue thématique du CDSH. Ils présentent des suites d'informations beaucoup plus brèves, standardisées, peu attrayantes à la lecture du fait de leur uniformité, et se composent de deux parties essentielles : la liste alphabétique des références (avec l'ensemble des informations pour chacune d'elles), qui en constitue le corps, complétée par l'index thématique, qui permet de retrouver les références appelées par chaque descripteur.

On constate que les logiques de description des deux types de sources - sources éditrices d'un côté, sources documentaires de l'autre - sont différentes : les premières privilégient les informations qualitatives concernant les objectifs scientifiques de la revue et son origine institutionnelle et s'efforcent de cerner son contenu par une présentation en langage naturel accompagnée de sommaires ; les secondes sont surtout tributaires de contraintes liées à l'accès à la banque de données. Les volumes traités sont surtout incomparables : 54 et 30 revues pour les deux premiers répertoires, contre 1 300 pour le catalogue du CDSH et plus de 3 000 pour celui de l'Unesco.

D'un point de vue lisibilité des index, le catalogue de l'Unesco comporte, du fait de son volume, un index de consultation assez difficile, puisqu'il s'agit d'un index à mot-clé unique : sous chacun d'eux apparaît une suite de numéros de références souvent très longue et quelque peu rébarbative. La solution adoptée dans le Catalogue thématique - qui consiste à faire figurer sous chaque descripteur les titres développés des revues, accompagnés chacun par les autres descripteurs retenus - n'était pas envisageable pour un catalogue aussi volumineux que celui de l'Unesco. Il est cependant important de noter qu'un descripteur n'a pas vraiment de sens à lui seul et que la lecture de l'ensemble des descripteurs signalés dans l'index permet à l'usager d'effectuer une première sélection de références, qui représente un gain de temps précieux.

Si l'on revient aux interrogations figurant au début de ce chapitre, il apparaît clairement, pour répondre à la première question, que les répertoires papier des communautés éditrices sont plus riches en informations qualitatives sur le contenu des revues ; les répertoires informatisés assurent en revanche une interrogation fiable - dans la mesure où l'indexation l'est aussi -, mais parviennent mal à définir la spécificité d'orientation de chaque revue. De manière tout aussi évidente, le deuxième type de répertoire nécessite une forte intervention de travail qualifié, lié à l'opération d'indexation ; dans le premier cas, le travail est effectué en amont par la communauté éditrice.

Un traitement enrichi

La question qui découle de ces constats est de savoir s'il est possible d'améliorer de façon réaliste les informations qualitatives sur le contenu des revues dans les catalogues informatisés et de sauvegarder la fiabilité de l'interrogation, tout en diminuant la part de travail qualifié lié à l'indexation.

En ce qui concerne la caractérisation du contenu du périodique, il paraît nécessaire d'enrichir le traitement. Différentes solutions se présentent : description manuelle, indexation automatique et/ou traitement en langage naturel. La solution qui consiste à créer une notice descriptive en langage naturel au vu des sommaires apparaît un travail délicat. Très lourd, car supposant la lecture de cinq ou six sommaires, il est proche de l'indexation - même s'il laisse plus de liberté -, mais beaucoup plus éprouvant qu'une indexation individuelle d'article : dans la lecture des sommaires, l'attention est en effet focalisée sur l'interprétation des titres d'articles, opération qui consiste pour le documentaliste à classer l'article dans une des spécialités ou dans la classe d'objet d'étude dont il relève. La rédaction de la notice nécessite ensuite de mémoriser les catégories ainsi formées, puis de pondérer ces classes pour ne garder que les plus importantes. La fiabilité du résultat dépend à la fois du degré de spécialisation de la revue (degré d'homogénéité des problématiques et objets d'études), du nombre de sommaires observés, du degré de spécificité choisi pour l'indexation, de processus de mémorisation non contrôlés, de l'organisation des numéros, et du degré de connaissance que le documentaliste peut avoir du domaine. Cette solution paraissant trop lourde - même si le résultat dépasse celui d'une simple indexation, comme le montre le traitement comparé d'une même revue (cf. annexe IV) -, il semble plus économique de remplacer ce travail par la saisie des notices éditoriales des revues, accompagnées des deux ou trois derniers sommaires.

A partir des revues observées - une vingtaine, en majorité anglo-saxonnes, car les notices sont souvent absentes des revues françaises -, on peut constater que le discours d'autoprésentation porte sur une quinzaine de rubriques 9 :
- affirmation du statut international de la revue ;
- public(s) cible(s), objectif de développement des « théorie, recherche, pratique » ;
- affirmation d'une multidisciplinarité ;
- désignation des approches privilégiées ou exclues ;
- désignation des spécialités traitées ;
- désignation des objets d'étude ;
- désignation des types de recherches et d'élaborations ;
- affirmation d'un objectif d'échange inter- ou intradisciplinaire ;
- affirmation d'une volonté d'assurer la multiplicité des points de vue et des approches ;
- périodicité ;
- langues acceptées ;
- organisation des numéros (par exemple numéros thématiques) ;
- types de documents admis ;
- organisme ou association éditeur ;
- critères de sélection des articles.

On constate que les rubriques les plus fournies concernent l'information sur les disciplines sources, la multidisciplinarité, les objets d'étude, les types de recherches et d'élaborations acceptés et les types de documents. Ces notices sont donc riches en information sur la politique éditoriale, les objectifs scientifiques et de diffusion, les spécialités alimentant la revue, les approches privilégiées ou exclues. On peut cependant remarquer que la description des thèmes de recherche reste très générique (du même niveau que notre indexation) et trop abstraite pour donner une bonne idée de la revue ; l'adjonction de deux ou trois sommaires, qui donneraient une photographie exacte, non reformulée, des problématiques traitées, semble à ce titre pouvoir être fort utile. A l'usager de traiter cette information comme il l'entend. Cette solution présente plusieurs avantages : elle permet dans certains cas de rétablir la vérité par rapport aux affirmations quelque peu ambitieuses contenues dans les professions de foi des notices ; les sommaires sont en outre plus riches en informations que n'importe quelle indexation, puisqu'ils contiennent non seulement l'information sur les problématiques (contenue dans les titres), mais aussi les noms d'auteurs, en soi informatifs, ainsi que les rubriques autres que les articles originaux (comptes rendus, notes critiques,...)

Ce traitement, qui diminue l'intervention du documentaliste, laisse cependant entiers le problème du multilinguisme des notices et sommaires, de même que celui de l'interrogation fiable des notices. La solution passe par la constitution de dictionnaires multilingues concernant quelques-unes des dimensions de description prises dans les titres, sous-titres et notices : disciplines et spécialités, interdisciplinarité, objets d'étude, types de recherches, types d'élaborations et de documents acceptés, publics cibles. Cette constitution de dictionnaires, qui doit autoriser à moyen terme une indexation automatique, doit s'appuyer sur l'étude des patterns de constructions syntaxiques permettant la reconnaissance de ces dimensions comme la reconnaissance des mots - le plus souvent composés - dans leurs différentes formes syntaxiques, flexionnelles et dérivationnelles.

Évaluer la richesse collective

La constitution de banques de données sur les revues d'une discipline devrait permettre un certain nombre de bilans utiles pour évaluer les problèmes existants et définir une politique d'information scientifique et technique cohérente pour la discipline. L'interrogation de la base PSYSIS a ainsi permis une description comparée des contenus des BDB et des fonds des bibliothèques, quant aux pays d'édition, aux langues de publication, et aux spécialités et thématiques 10. Elle a également permis une première évaluation et une comparaison des ressources collectives en revues scientifiques : 14 bibliothèques ont été rentrées dans la base de données, dont 3 bibliothèques universitaires (BU) parisiennes et 6 bibliothèques spécialisées en psychologie. Sur 1 323 revues recensées, 367 ne sont localisées dans aucune des 14 bibliothèques ; sur les 818 revues présentes dans PSYCINFO, 215 ne sont pas localisées, parmi lesquelles 142 nord-américaines, 54 européennes, 13 asiatiques (pour les spécialités de ces 215 revues, cf. annexe V).

La banque de données fournit également des informations utiles concernant la répartition des revues dans les différentes bibliothèques. Si l'on compare l'apport respectif des gros centres de documentation du CNRS, des laboratoires et instituts de psychologie et des BU, on constate que 869 revues (soit 91 % des revues localisées) proviennent des trois centres CDST (608), CDSH (210) et MSH (Maison des sciences de l'Homme, 410) ; les bibliothèques liées à des laboratoires de psychologie fournissent 261 titres différents. Il y a donc une forte centralisation des moyens et fonds documentaires, pour une grosse majorité en dehors des institutions de recherche et d'enseignement en psychologie. 303 revues sont localisées dans les BU parisiennes (Sorbonne, Paris VIII et Paris X). Lés bibliothèques les plus riches dans la discipline sont - si l'on ne tient pas compte des spécialités - celles du CDST, de Piéron 11, de la MSH et de la Sorbonne ; en outre, sur l'ensemble des disciplines couvertes, la MSH contribue pour 210 revues nouvelles par rapport au CDST, le CDSH pour 155.

L'interrogation permet de définir les revues communes à deux bibliothèques (ou plus), ainsi que les apports spécifiques de chacune ; on peut ainsi mettre en évidence que, sur les 210 revues de la MSH non possédées par le CDST, les spécialités les plus représentées sont la socio- et la psycholinguistique, la psychanalyse, la recherche en ethnopsychiatrie et ethnopsychanalyse, la psychologie interculturelle, la psychologie clinique et psychothérapies, les courants humanistes et phénoménologiques, sans compter l'épistémologie des sciences sociales. De la même façon, il est possible de caractériser les revues de la MSH non localisées dans les trois BU, ou les revues de la Sorbonne qui ne sont pas à la MSH : revues sur la pathologie du développement, sur l'étude de la personnalité et la psychologie de l'éducation, domaine particulièrement sous-représenté en France. Cette comparaison montre que les fonds reflètent les spécialités des équipes locales de recherche et que les BU font bien office de bibliothèques de recherche, même si elles sont parfois complétées de bibliothèques d'UFR (cf. annexe VI). Cela permet également l'étude de la richesse des fonds en revues étrangères et en revues généralistes ou spécialisées, qui semble indiquer que les équipes universitaires travaillent avec des fonds spécialisés souvent restreints.

Quelques conclusions techniques

La production du Catalogue thématique des revues de psychologie a permis de confirmer l'existence d'une demande d'information sur les revues. L'idée de diffuser des outils par discipline ou par spécialité, couplant informations sur la source, sur le contenu et sur les localisations, paraît fonctionnelle. Il semble donc envisageable d'élaborer des fichiers similaires dans d'autres disciplines.

Il paraîtrait logique que la gestion des fichiers, qui est lourde et demande une mise à jour permanente, s'effectue par l'enrichissement des bandes de l'ISDS (International serials data system) ou du CCN, de manière à éviter la resaisie des données de base 12 et des localisations pour 65 à 70 % des références. En ce qui concerne ces dernières, on peut envisager de moduler les éditions sur disquettes par région, pour y rajouter les localisations en province. Le suivi de la mise à jour passe par des accords avec les éditeurs français et étrangers pour un traitement rapide des nouveautés.

Dans l'immédiat, l'indexation automatique des notices éditoriales n'étant pas réalisable, le traitement intellectuel supposera une consultation et une connaissance des revues que les documentalistes de centres de recherche ou de BDB sont seuls à posséder : le contenu et l'étendue de la couverture de tels catalogues par discipline ou spécialité se définira plus facilement si les documentalistes s'assurent la collaboration des spécialistes. Il serait en tout cas mal avisé de définir a priori un format de description du contenu scientifique des revues qui soit uniforme pour toutes les disciplines.

On peut concevoir un mode mixte de diffusion des données : une édition minimale du Catalogue, complétée par d'autres données fournies sur disquettes (cf. tableau 2), ceci afin d'éviter une édition trop volumineuse, difficile à manipuler. Cette formule aurait, en outre, l'avantage de la souplesse, en permettant la diffusion des données sur la totalité comme sur des sous-ensembles de la base (par grandes spécialités ou par intersection de disciplines). L'investissement nécessaire au départ reste minime puisque, mise à part l'opération de déchargement des bandes CCN, un poste plein-temps par discipline (environ 600 revues) devrait suffire, équipé d'un IBM PC AT (ou équivalent).

Quelques remarques à propos du logiciel. L'utilisation d'un logiciel documentaire classique pour tirer des données secondaires (croisement de variables (par exemple BDB et origine géographique des revues) ou étude des intersections et complémentarités entre BDB et fonds de bibliothèques) n'est pas sans poser des problèmes :
- lorsque les valeurs d'une variable sont très nombreuses, l'interrogation des croisements s'avère très longue et fastidieuse ;
- le logiciel ne permet pas de travailler sur les compléments de relations, à savoir l'ensemble qui ne satisfait pas telle relation (par exemple, les périodiques sans localisation dans la banque de données ou non traités par telle BDB) ;
- l'étude des intersections d'ensembles de n éléments (intersections entre n bibliothèques) et l'évaluation des apports propres de chaque bibliothèque au fonds global s'avère elle aussi extrêmement laborieuse ;
- de même, la définition statistique de familles de périodiques par degré de similitude sur certaines variables ou sur certains croisements de variables serait une application secondaire intéressante, qui n'est pas possible avec un logiciel booléen classique.

Dans cette perspective, le logiciel documentaire se montre inadapté à ce type de traitements et le passage à un système relationnel de base de données paraît nécessaire.

Comportements de recherche d'information

Aux contraintes techniques et institutionnelles indiquées tout au long de cet article et qui ont grandement influencé et limité les choix, s'en ajoutent d'autres, d'un ordre plus général, qui tiennent à la méconnaissance des comportements de recherche d'information scientifique et de l'usage qui est fait des revues. L'élucidation de ces comportements, pour l'instant insuffisamment explorés et explicités, est cependant indispensable pour que les outils informatisés, encore tâtonnants dans leur conception, puissent progresser dans leurs fonctionnalités.

Deux courants coexistent dans la recherche en sciences de l'information. Le premier se caractérise par le souci de mieux connaître la démarche des usagers pour mieux les aider ; on le retrouve essentiellement chez les bibliothécaires, soucieux d'améliorer la convivialité des logiciels d'interrogation ou des modes de classement des livres, de manière à les rendre le plus adéquats possible aux représentations des usagers et à la formulation de leurs demandes. L'autre est plus tourné vers l'automatisation du système documentaire et la création de systèmes experts. Il est à craindre que, si ces deux courants ne se rejoignent pas, les systèmes experts de rappel de l'information les plus sophistiqués ne soient souvent la montagne qui accouche d'une souris, leur conception n'étant pas fondée sur une observation précise des comportements de recherche et d'utilisation de l'information. La conception d'outils informatisés a priori, auxquels l'usager doit ensuite s'adapter, a fait son temps.

Recourir à l'usager

L'expérience des centres qui gèrent des BDB très volumineuses montre qu'il existe une forte tendance du système à l'auto-reproduction, le souci de cohésion interne l'emportant sur le souci d'évoluer. Il existe un conflit certain entre la normativité interne d'un système et la démarche qui vise à définir les normes à partir de l'observation externe du comportement des usagers. Nous avons vu que, dans cet environnement institutionnel, les documentalistes, livrés à eux-mêmes, pataugent pour définir des critères clairs justifiant la couverture des catalogues ou des BDB, et il ne peut en être autrement. Le documentaliste ne pourra sortir de ce cercle vicieux, lié à sa situation d'intermédiaire technique en dehors du circuit, qu'en faisant appel à l'usager, qui doit rester l'arbitre pour la détermination du contenu scientifique à engranger, ceci non seulement en tenant compte des déclarations explicites de l'usager, mais aussi en observant précisément ses comportements (9,15) : le relevé des revues pratiquées dans chaque spécialité par les laboratoires compétents, ainsi que des revues considérées par eux comme importantes ou secondaires, de même que l'observation des intercitations de revues par spécialité, permettent par exemple de définir des critères clairs de validation des choix documentaires.

Dans le cas présent, il eût été possible par exemple de ne rentrer que les revues disponibles dans les BU et les bibliothèques spécialisées en psychologie, en circonscrivant les revues utilisées pour la recherche et les fonds définis par les usagers eux-mêmes. Une autre solution eût encore été de partir de l'observation des publications, c'est-à-dire du comportement de citation des auteurs des revues francophones, pour définir d'une part le corpus de revues étrangères citées par les revues françaises, et inversement celui des revues étrangères citant les francophones - ce qui présente un intérêt sociologique évident.

De même, c'est en observant la lecture des revues exposées sur un présentoir que l'on peut déterminer comment, et où, sont tirées, dans la revue, les informations utiles et définir les critères de sélection en fonction des finalités de l'action, dans laquelle s'inscrivent l'approche et/ou la consultation de la revue (cf. annexe III). Nombre d'études mettent en évidence la diversité des stratagèmes mis en oeuvre par les usagers pour retrouver une information intéressante. Au documentaliste de s'en inspirer pour définir des stratégies et outils documentaires adaptés à ces démarches et aux finalités de la recherche.

Sociologie de la science

Dans cette démarche d'observation du réel - comportements ou productions écrites -, la documentation rejoint la dynamique de la recherche tout en lui fournissant un regard extérieur sur elle-même, qui peut l'aider à mieux saisir les déterminants de cette dynamique.

L'observation du statut des auteurs qui publient dans une revue, de leur origine géographique et institutionnelle, éclaire les modalités de sélection des articles par le comité de rédaction. L'observation des intercitations de revues peut mettre à jour les familles éditoriales et institutionnelles, les courants et leur évolution : une étude d'analyse de réseaux effectuée sur quatorze revues de sociologie à partir des intercitations (18) permet de définir des clusters de journaux ayant des objectifs et des publics cibles scientifiques différenciés, comme de définir les liens et statuts respectifs de ces blocs de revues. Une étude similaire (19) portant sur 21 revues de psychologie met en évidence non seulement les familles de revues, mais aussi l'absence de noyau central reliant les deux corps professionnels de la psychologie (cf. supra); l'auteur insiste sur l'intérêt que représente l'analyse de réseaux de revues d'une même discipline pour établir un diagnostic sur son état et faire l'étude séquentielle de son évolution. L'examen conjoint des réseaux et de leur composante institutionnelle permet de juger de la structure d'un champ - centralisé, décentralisé, fragmenté - et de sa vitalité.

Une étude plus fine portant sur un champ de recherche précis et fondée sur l'analyse des intercitations peut mettre à jour les horizons de références de groupes de revues - théories citées, types de problématiques, paradigmes dominants. Une étude multidimensionnelle, qui prendrait en compte le type de communauté éditrice, la spécialité, la famille éditoriale, le style typographique, le statut professionnel des auteurs, etc., parviendrait sans doute à définir des genres de revues scientifiques, comme il existe des genres littéraires.

L'irremplaçable contact du document

Il n'est peut-être pas inutile que le documentaliste adepte des nouvelles technologies de l'informatique réfléchisse aux limites de ces dernières. Est-il besoin de rappeler l'intérêt du libre-accès aux documents dans les bibliothèques 13 ?

Très apprécié des chercheurs chaque fois qu'il existe, le libre-accès permet le feuilletage, à travers lequel s'effectue non seulement la découverte « au hasard » des articles intéressants, mais aussi la familiarisation avec la production scientifique et avec l'élaboration quotidienne de sa cartographie institutionnelle (telle revue est produite par tel laboratoire et publie les articles de tel réseau international, avec telle orientation théorique) ; il permet également la prise de connaissance progressive de grandes familles éditoriales jusque dans leur repérage typographique (couleur, couverture, mise en page, normes de rédaction). Les bibliothécaires, mais aussi les analystes-indexeurs, utilisent intensivement cette connaissance de l'aspect physique des revues- dans la gestion de leur fonds, l'organisation et la mémorisation des phases du travail effectué sur les documents. Il est probable que l'utilisateur qui a déjà une certaine pratique d'un fonds documentaire utilise lui aussi ces indices physiques pour la sélection des objets à explorer 14.

Il semblerait donc utile d'analyser de plus près dans quelle mesure des outils informatisés, qui contiendraient les informations essentielles énumérées dans notre projet de départ - informations que l'usager glane au cours de sa fréquentation des revues - seraient perçus comme aussi informatifs que la consultation matérielle de ces revues. Il n'est en effet pas exclu que l'uniformisation de ces entités documentaires - laquelle s'effectue obligatoirement dans la constitution de fichiers informatisés, où l'imagerie n'est pas utilisée - soit à l'origine d'une perte (ou non-prise) d'information considérable, par perte d'indices physiques qui aident à la mémorisation des contenus, et soit donc responsable, en partie, du faible usage des banques de données documentaires.

Il faut de plus prendre en compte le caractère syncrétique de cette mémorisation, où sont associés une multiplicité de critères ou dimensions de description des contenus, des sources, et de l'objet physique lui-même : l'enseignant ou le documentaliste, qui cherche à familiariser les étudiants avec la production scientifique, ne peut qu'essayer de coupler la présentation physique des revues, l'analyse descriptive de leur style informatif, des courants qu'elles représentent, les noms et objectifs des institutions éditrices et les noms et rattachements de leurs membres les plus connus.

Les outils d'information scientifique et technique peuvent prétendre à la sélection de sous-ensembles utiles, mais ne peuvent en aucun cas prétendre donner une connaissance réelle des périodiques ; le repérage, une fois fait, renvoie l'usager à une consultation manuelle. C'est pourquoi des localisations ont été indiquées le plus souvent possible. Si l'on prend l'exemple du chercheur qui se situe aux frontières de deux disciplines et cherche où publier en français (revue de psychologie ou revue de linguistique), le catalogue lui fournit une première sélection (revues francophones comportant de la psycholinguistique) ; mais cette première sélection n'économise pas la consultation manuelle des 4 ou 5 derniers numéros de chaque revue, pour vérifier l'orientation de la revue, son degré d'ouverture à des courants divers et la variété des approches et méthodes admises, savoir si des thèmes proches ont été abordés, si la publication est programmée par numéros thématiques, quels sont les délais de publication, etc. On voit mal comment cette démarche de consultation manuelle pourrait être économisée : la consultation couplée des sommaires des derniers numéros serait envisageable - revue de sommaires informatisée -, mais il reste douteux qu'une telle consultation fournisse les éléments nécessaires à la prise de décision concernant le lieu de publication de l'article.

Jeux de pistes

Les usagers recourent à différentes formes de consultation des revues scientifiques : traque d'information ciblée dans une revue connue, repérage d'articles, exploration de revues de sa spécialité ou d'une spécialité autre, exploration de l'objet revue pour la situer, exploration à la découverte de revues de domaines où l'on est novice, etc.

Il serait intéressant d'observer comment s'effectue selon les publics la prise de contact avec une revue nouvelle : comment se constitue l'image du nouvel objet, comment se fait son exploration, quels sont les endroits explorés en premier et comment, et quels sont les repères recherchés ? Il est probable que cette exploration ne sera pas la même selon le niveau d'expertise du lecteur : étudiant de DEUG, étudiant de DEA ou chercheur confirmé. On peut penser que plus l'insertion dans la recherche est forte, plus les repères nominaux-géographiques-institutionnels sont importants, le nouvel objet étant placé dans la cartographie institutionnelle à partir d'un certain nombre d'indices. Ces indices nominaux-institutionnels-géographiques fonctionnent comme une sorte de raccourci mnémotechnique désignant une école ou une approche précise d'un problème, si bien que chez l'expert, la cartographie d'un champ de recherches peut être représentée par cette cartographie nominative des courants en présence, comme les écoles de peinture en histoire de l'art. Le lecteur non expert établit des liens moins complexes entre repères, mais peut, par exemple, partir de repères nominaux pour situer les domaines ou matières dans une bibliothèque, ainsi que l'observe Martine Naffrechoux à la BPI (9) : « Certains usagers utilisent le catalogue auteurs pour déterminer, à partir d'un auteur connu, la cote où l'on trouvera les livres de la même matière, ou partent du catalogue matières pour trouver la liste des auteurs d'une spécialité. »

La lecture de l'objet revue, au cours du feuilletage, se fait de façon non linéaire, à travers la construction d'indices, de rapprochements d'informations et d'inférences qui guident l'exploration ; ces rapprochements d'indices constituent, au fur et à mesure de la manipulation, l'élaboration d'un contexte cumulatif global, mettant en rapport les indices perçus et la connaissance préalablement acquise du champ.

Pour énoncer autrement la question posée au début de ce chapitre, la caractérisation abstraite que constitue un catalogue tel que notre projet le décrivait, qui revient à une caractérisation par descripteurs (société savante, formation universitaire, comité de lecture international, nombre moyen de pages par article, numéros à thèmes, etc...) aide-t-elle à l'appropriation de l'objet ? S'il est vrai que l'appropriation de l'objet passe par un travail de caractérisation et de dégagement d'indices par l'usager lui-même, il est à craindre qu'une banque de données, qui présenterait la revue sous forme d'indexation multiple, où tout le travail d'abstraction serait effectué par le documentaliste, ne soit pas « lue », car il n'y a pas de lecture sans activité d'exploration et d'interprétation : c'est en effet par le travail sur l'information brute que l'usager peut se faire son idée de la revue.

On peut supposer que l'appropriation passe par ces opérations d'abstraction effectuées par l'usager lui-même, sans doute de façon non systématique, à un degré moindre d'abstraction et de verbalisation que ne le fait le documentaliste, et en s'appuyant sur une mémorisation visuelle et nominale (telle revue a publié dernièrement les articles de X, Y et Z, tels numéros spéciaux sur tels thèmes patronés par un tel et un tel, etc.), tout cela étant mémorisé visuellement (typographie, papier, mise en page, ...).

Il semble donc - cela reste à vérifier - que la caractérisation spontanée des revues soit un processus où se mêlent le style graphique de la mise en page, la familiarité avec les styles des différentes familles éditoriales (c'est une revue Elsevier, Sage ou Academic press), la mémorisation des derniers articles lus, la prégnance de certains noms parmi les auteurs ou éditeurs, etc. La caractérisation intellectuelle de la revue est le résultat de ces différents indices indissociables dans la mémoire du lecteur, tant il est vrai que sont intimement liées la structuration de l'espace typographique et les variantes des normes de structuration du discours scientifique. La démarche du documentaliste, qui sépare caractéristiques formelles et de contenu, et qui omet les indices physiques et nominatifs, ne peut donner qu'une idée abstraite et sans vie de la revue. A ce titre, la retranscription nominale, lors de l'élaboration de catalogues informatisés, des éditeurs intellectuels, des auteurs des articles et de leur rattachement institutionnel, ainsi que des titres des sommaires dans leur intégralité, s'avère nécessaire. De plus, la sauvegarde du logo de la revue et de la typographie originale des sommaires, à laquelle s'efforce par exemple Current contents, n'est pas un simple luxe, mais fait partie de cette lecture d'indices intégrés : style de la revue, style typographique et aide à la sélection par mémorisation de ces indices physiques.

Retour au langage naturel

Le système informatisé doit donc préserver l'activité de l'usager et sa capacité d'interpréter les éléments d'information, et pour cela, fournir le maximum d'informations brutes, riches de leur contexte, non retraduites par le système : il existe en effet une multiplicité de lectures possibles d'une même information, donc de dégagement d'indices, selon les usagers et les finalités de l'action - l'éditeur intellectuel peut être lu comme tel ou comme indice du style scientifique de la revue, le sommaire peut être lu de façon morcelée comme suite d'articles individuels, intéressants ou non, ou comme expression d'un courant théorique.

Préserver cette liberté d'interprétation implique de redonner toute sa place au langage naturel : lui seul permet l'expression des problématiques - sans lesquelles on ne peut représenter l'activité scientifique -, des points de vue et approches et de leurs pondérations, en bref l'expression écrite d'un discours et non plus simplement sa représentation sibylline par le système classificatoire documentaire. Il semble dorénavant possible et souhaitable de déplacer le centre de gravité de l'activité documentaire du retraitement-standardisation de l'information vers la définition d'outils d'accès à l'information en langage naturel. Dans la plupart des banques de données actuelles, l'usager a accès par l'interrogation à environ 80 % d'information retraitée - classement, indexation, résumé - et 20 % d'information brute - titre, auteur. L'exploration porte sur l'information retraitée par le système, lequel correspond à un système fermé, à un outillage spécifique de représentation des connaissances (type de vocabulaire, classification et ses dimensions, logique booléenne, modèle non relationnel, quelques opérateurs de proximité pour recherche en langage naturel). Ce système autorise certaines questions, en interdit beaucoup d'autres.

Dans un modèle de système quasi ouvert, il s'agit de situer l'intervention du système documentaire non dans le retraitement (résumé et indexation manuels), mais dans la fourniture d'outils de reconnaissance des parties et dimensions du discours scientifique, autorisant bien sûr l'indexation automatique sur quelques dimensions, mais autorisant aussi l'usager à définir lui-même les dimensions à explorer et les liens logiques entre ces dimensions, en mettant à sa disposition les outils linguistiques nécessaires.

« Si je me chargeais du résultat et que je dise (au lecteur) : Tel est mon caractère, il pourrait croire sinon que je le trompe, du moins que je me trompe... C'est à lui d'assembler ces éléments et de déterminer l'être qu'ils composent : le résultat doit être son ouvrage... Or il ne suffit pas pour cette fin que mes récits soient fidèles, il faut qu'ils soient exacts » (J.-J. Rousseau, Les Confessions, Livre quatrième).

Septembre 1988

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Présentation rapide du produit

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Tableau 1 - Types de descripteurs utilisés et mode de saisie

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Tableau 2 - Exemple de diffusion mixte des données

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Le public acquéreur et ses premières réactions

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Annexe I - Exemple de traitement analytique avec la nouvelle grille d'indexation

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Annexe II - Zones de description retenues dans le projet initial

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Annexe III - Critères de description retenus en fonction des objectifs poursuivis

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Annexe III - Critères de description retenus en fonction des objectifs poursuivis (suite)

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Annexe IV - Présentation comparée des informations apportées sur une revue (Human relations) par différents catalogues

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Annexe V - Spécialités et disciplines représentées dans PASCAL et PSYCINFO (en nombre de revues)

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Annexe VI - Répartition des spécialités et disciplines par bibliothèque

  1. (retour)↑  Un premier bilan des forces et faiblesses des banques de données en psychologie avait alors été réalisé ; cf. Bibliographie (2).
  2. (retour)↑  Op. cit., p. 419.
  3. (retour)↑  PSYNDEX est la banque bibliographique en psychologie de langue allemande.
  4. (retour)↑  La BDB PSYCINFO (qui est la banque de données américaine en psychologie) pratique déjà les deux vitesses : PSYCINFO est un sous-ensemble d'une autre banque, PSYCALERT, qui est plus proche du catalogue, visant un recensement rapide et à jour des parutions, où l'indexation est réduite à quelques mots-clés très génériques.
  5. (retour)↑  En s'appuyant sur les travaux de traitement automatique en génération effectués par les linguistes.
  6. (retour)↑  Ce système expert en horticulture définit, en vue de l'interprétation de la question par le système, une dizaine de catégories sémantiques (objets, processus, attributs, environnement, temps, lieu, etc.), qui lui permettent de définir une formule (ou combinaison) de facettes, de frames et de slots, qui composent les éléments de la base de connaissances auxquels la question sera confrontée.
  7. (retour)↑  Elle note la méfiance des chercheurs à l'égard des bulletins bibliographiques, où les résumés sont jugés trop sibyllins dans le style, trop lapidaires pour donner une idée exacte du document et peu utilisables car non critiques. Ce qui explique, selon elle, leur préférence pour les échanges informels avec les collègues, qui sont à même d'évaluer l'importance des documents recommandés et de l'argumenter.
  8. (retour)↑  La réalisation, depuis le repérage des revues jusqu'à l'édition du catalogue (entièrement réalisée avec MicroISIS), en incluant les nombreuses mises à jour, a nécessité deux ans (trois mi-temps sur 1 an 1/2 et un plein temps sur 6 mois).
  9. (retour)↑  A l'exclusion des recommandations aux auteurs.
  10. (retour)↑  Pour l'origine géographique des revues, les langues et la comparaison des BDB, voir aussi l'introduction du Catalogue (1).
  11. (retour)↑  Il s'agit de la bibliothèque de l'Institut de psychologie, Centre Henn-Piéron, qui est rattachée à la bibliothèque de l'Université de Paris V.
  12. (retour)↑  A savoir : titre, titres parallèles, ISSN, périodicité, éditeur intellectuel et adresse, éditeur commercial et adresses, langues des articles, date de création de la revue, changement de titre.
  13. (retour)↑  On pourra se reporter à ce propos à l'article de Marie-Claude VALLET-GARDELLE (Bibliographie, 16), p. 291, ainsi qu'à celui de Nicole ROBINE (17), p. 418 et 423.
  14. (retour)↑  C'est ce que confirment les observations effectuées sur les lecteurs de la Bibliothèque publique d'information du Centre Georges Pompidou : « Il arrive fréquemment que les séances de lecture de la BPI s'enchaînent d'un jour sur l'autre, et le plus souvent cela réduit les recherches :le lecteur retrouve le livre dont il connaît maintenant l'apparence. Extrait d'entretien 7-85109-3 : « Lundi dernier j'ai commencé ce livre-là... et aujourd'hui j'suis revenu directement, cette fois-ci, j'ai trouvé directement où était le livre... C'est un livre que j'ai retrouvé à la couverture. »... » ; cf. le rapport de Martine NAFFRECHOUX (9)