Catalogue des récits de voyages antérieurs à 1815 conservés à la Bibliothèque municipale de Toulouse
Claire Voisin
Claire Voisin s'attache dans son introduction à cerner la notion de « récit de voyage » ; c'est bien plus difficile qu'on ne le croirait à première vue. Un premier critère est énoncé : « Voyage réellement effectué » ; donc pas de roman imitant la forme littéraire du voyage comme Gulliver, ni d'ouvrage didactique empruntant cette forme comme Anacharsis (dit éliminé p. 6, mais cependant répertorié p. 21) - mais que fera-t-on des voyages prétendus ? Le catalogue en a gardé un, facile à déceler, p. 74 : Relation d'un voyage du pôle arctique au pôle antarctique par le centre du monde, 1723 !
... « Même si le récit n'est pas l'œuvre du voyageur lui-même », ce qui permet de comprendre les recueils de voyages genre Hakluyt ou Histoire générale des voyages (prise au titre et non au nom de l'abbé Prévost), mais amène à faire figurer dans le catalogue l'Histoire philosophique de l'abbé Raynal, alors que Dutertre est absent. Labat est présent bien entendu pour les Isles de l'Amérique mais aussi pour l'Afrique occidentale, où il n'est jamais allé. On trouve les guides de voyages et itinéraires, à commencer par Pausanias, ainsi que les voyages « littéraires » type Chapelle et Bachaumont, mais les expéditions guerrières, les missions simples récits d'évangélisation, les ambassades simples récits de négociations ont été écartées...
L'auteur s'est efforcée de ne pas se laisser impressionner par le mot « voyage » figurant dans un titre, mais la Relation d'un voyage d'Aleth contenant des mémoires pour servir à l'histoire de la vie de Nicolas Pavillon, évêque d'Aleth, de Lancelot (p. 53), fit-elle beaucoup progresser les connaissances géographiques ?
On se demande s'il ne faudrait pas distinguer le voyage comme genre littéraire, récit descriptif personnel d'un témoin venu d'ailleurs, du voyage catégorie de document parmi d'autres apportant des connaissances sur un secteur géographique déterminé et qu'il n'y aurait pas lieu, d'un point de vue bibliothéconomique (classement des connaissances), de séparer des autres catégories de documents concernant le même secteur géographique; cela serait applicable principalement aux pays « exotiques », pour lesquels tous les types de documents se trouveraient naturellement réunis étant peu nombreux ; alors que pour les pays « proches », le voyage serait un type de source qui pourrait être particularisé mais resterait en fait secondaire par rapport à d'autres catégories d'ouvrages... Le caractère embarrassé de cette formulation montre qu'il y a ici un difficile problème méthodologique.
Les notices (481) sont classées dans l'ordre alphabétique des auteurs et titres anonymes ; elles ne sont pas homogènes quant aux normes suivies (des fiches anciennes ont été utilisées avec des modernes ; mais le tout a été recomposé) ; elles ne sont pas numérotées : l'index systématique (cadre géographique de Brunet révisé Parguez) contient les noms d'auteurs ou titres d'anonymes (dans la section Inde et ses îles figure une Description de l'empire du prêtre-Jean, p. 108, qui ne se retrouve pas dans le corps du volume), plus les cotes. Malgré la difficulté de l'entreprise, un index géographique alphabétique aurait été bien apprécié (et aussi un index des auteurs secondaires).
L'impression et la présentation matérielle sont fort agréables et font honneur à nos collègues de Toulouse. On déplorera seulement une cacographie systématique fort répandue dans le monde dactylographique, l'abréviation de l'expression du quantième par un è au lieu d'un e (dernière lettre du mot abrégé).