L'inventaire général dans les Bouches-du-Rhône, 1968-1978
Il est probablement superflu de rappeler ici que la création de l'Inventaire général des monuments et richesses artistiques de la France remonte à 1962 lors de l'élaboration du 4e plan de développement économique et social. Dès le départ, l'Inventaire général reposait sur une commission nationale définissant les objectifs généraux et les fondements scientifiques et techniques, et sur des commissions régionales. Mais depuis 1964, 17 régions seulement sur les 22 ont un comité régional, qui à son tour a généré des comités départementaux. C'est au travers de ces structures départementales qu'ont été réalisées les missions d'inventaire et de préinventaire.
Le préinventaire ne se veut qu'un repérage ou un recensement des monuments ou objets dignes de figurer dans l'inventaire départemental. Il est bien souvent le fait d'érudits ou d'associations locales qui voient ainsi leurs recherches valorisées. En ce qui concerne l'inventaire, il s'agit d'une démarche plus scientifique menée par des professionnels dans le cadre de l'unité géographique du canton ; ils étudient les monuments et objets retenus et les font connaître en particulier dans le cadre des « inventaires topographiques ».
La tâche est considérable et de longue haleine : elle demande, en effet, une énorme mobilisation, beaucoup de patience et aussi de moyens provenant de multiples partenaires. Les itinéraires de l'inventaire sont maintenant jalonnés de dossiers, de publications, de catalogues d'expositions, d'articles divers. Les répertoires bibliographiques des inventaires régionaux en fournissent une bonne synthèse.
Dans le cadre de la région Provence-Côte d'Azur, deux publications très différentes permettent de faire le point. Elles sont toutes les deux des numéros de revue. La première est un numéro spécial de la revue Marseille, revue officielle de la ville de Marseille, qui dresse un bilan de dix ans d'inventaire dans les Bouches-du-Rhône. Son aspect dense, compte tenu de la présentation habituelle de la revue, ne doit pas rebuter les lecteurs. Les nombreuses contributions (une trentaine environ) provenant aussi bien de scientifiques que de chercheurs locaux, présentent les résultats des préinventaires et des recherches locales très variées. Elles sont regroupées en deux parties, l'une rapprochant l'inventaire de thèmes proches (sauvegarde, aménagement, culture), l'autre étant plus géographique : présentation de communes et des zones de Marseille, d'Aix et des rives de l'étang de Berre. Le tout comporte de nombreuses photographies et des tableaux.
Au-delà de ces présentations, il faut s'interroger avec les préfaciers sur le rôle des collectivités locales et des associations qui, par la force des choses, ont pris le relais de l'État qui avait lancé l'Inventaire. Dans ce département bouleversé par l'aménagement ou l'urbanisme, il était certes indispensable que les collectivités locales prennent rapidement la mesure de ce qui allait se modifier. Par ailleurs, « c'est dans la mesure où les particuliers et les associations auront étroitement participé au repérage et à l'inventaire qu'ils seront plus motivés et armés pour participer aux opérations de sauvegarde et d'animation » (A. Ramière de Fortanier). Alors que l'année du patrimoine s'achève, il s'agit de redéfinir, dans l'intérêt de toutes les parties, quelles sont les responsabilités et les moyens possibles, en dehors du bénévolat : les collectivités locales ne doivent plus être en situation de quémandeuses, et les campagnes de sensibilisation doivent déboucher sur autre chose que de l'improvisation.
La seconde publication semble apporter une réponse concrète à ces questions puisqu'elle émane de l'Association « Alpes de lumière », qui, en matière de sauvegarde et d'animation, peut être considérée comme une association exemplaire en Haute-Provence. Cette brochure contient quelques dossiers succincts et surtout des propositions d'action. On retiendra en particulier la formation des « volontaires-chercheurs ». Depuis plusieurs années, l'Association assure cette formation sur le terrain. Mais elle considère qu'une nouvelle association à l'échelon départemental doit être créée pour recevoir les différents crédits et être l'interlocuteur agréé de la commission régionale.
Il faut simplement espérer que ces propositions soient suivies d'effet, que les nécessaires structures et coordinations aboutissent. Les bibliothèques ont aussi leur rôle à jouer. Peut-être que, dans dix ans, l'Inventaire national sera alors une réalité !