Comité intergouvernemental sur les échanges internationaux de publications (UNESCO)
Ce Comité s'est réuni à Bruxelles, du 28 mai au 7 juin 1958, sous la présidence de M. Liebars, conservateur en chef de la Bibliothèque royale de Bruxelles. Vingt-neuf états étaient représentés 1. Certaines organisations internationales avaient délégué des observateurs, et notamment l'Association internationale des bibliothécaires et documentalistes agricoles (Mme Duprat), l'Association internationale des bibliothèques musicales (M. Van der Linden), la Fédération internationale de documentation (M. Lorphèvre), la Fédération internationale des associations de bibliothécaires (M. Kessen) et l'Organisation internationale de normalisation (M. Giret). La délégation française comprenait M. Julien Cain, administrateur général de la Bibliothèque nationale, directeur général des Bibliothèques de France, Mme Honoré et Mlle Courtois, respectivement conservateur et bibliothécaire à la Bibliothèque nationale.
La réunion s'inscrivait dans un plan de travail concernant la préparation de nouvelles conventions destinées à remplacer la convention de Bruxelles de 1886 touchant les échanges de publications. Un premier comité d'experts s'était réuni à ce sujet à Paris en février 1956, et il en avait été rendu compte ici même 2. Depuis lors, la 9e session de la Conférence générale de l'Unesco ayant autorisé la poursuite des travaux, le secrétariat avait préparé deux textes de conventions soumis aux États membres dans un rapport préliminaire en date du 10 juillet 1957 (Document Unesco CUA/8I). Les observations des États ont été à leur tour publiées dans les documents CUA/8I/Addendum 1, 2 et 3; la réponse française figure dans le second de ces addenda, pp. I-4.
La discussion portait donc cette fois sur le texte même des deux conventions, tel qu'il figure dans le document CUA/8I/Addendum i, pp. 25-35, et après une discussion générale relativement brève, les délégations ont été priées de procéder par voie d'amendements proposés au moment du vote par articles.
Les projets préparés par l'Unesco étaient, à vrai dire, assez profondément différents de l'esprit des débats du comité d'experts de 1956; et à la simple lecture des observations des États, il était à prévoir que leur adoption demanderait de larges retouches. Mais les délégués ont tous fait preuve de la plus grande compréhension ; le secrétariat de l'Unesco de son côté, et notamment MM. Saba et Lussier, sans jamais peser sur les débats, les ont utilement éclairés de leurs avis sur le terrain juridique, de sorte que le Comité a finalement abouti, sans perte de temps, à un texte qui semble donner satisfaction à la grande majorité des États.
En fin de compte, les deux conventions retenues concernent, l'une « les échanges internationaux de publications » en général, l'autre « les échanges de publications officielles et documents gouvernementaux entre États ». La première touche tous les échanges de nature privée, conclus par simple accord entre institutions gouvernementales ou non; elle est donc plus large que la seconde, qui concerne seulement les échanges de publications officielles conclus de façon formelle entre deux gouvernements.
Dans le cas de la première convention, il est évident que les échanges privés échappent à la compétence de l'État qui peut cependant les encourager, par l'établissement de services d'échanges et par l'octroi des facilités prévues dans la convention. Ces avantages sont toutefois limités, d'une part aux organisations « de caractère éducatif, scientifique et technique, ou culturel », à l'exclusion des organismes à but lucratif, d'autre part aux « publications », au sens donné à ce terme par l'article 6 de la Convention universelle sur le droit d'auteur. La question en effet a été posée d'inclure dans les échanges les disques, films, bandes magnétiques et autres matériels audio-visuels; le Comité a estimé qu'en l'absence d'une étude poussée sur les conséquences d'une telle mesure, il ne lui appartenait pas, dans l'état actuel de la réglementation internationale, d'aller au delà des limites fixées par le projet de l'Unesco. Les avantages prévus, gratuité de port, facilités douanières et autres, sont réservés aux envois faits par l'intermédiaire des services d'échanges habilités par chaque Gouvernement; il a paru impossible, faute de moyen de contrôle, d'étendre ces avantages considérables à toutes sortes d'institutions. Telle est d'ailleurs la pratique française actuelle.
La convention concernant les échanges de publications officielles, telle qu'elle a été adoptée par le Comité, ne leur donne pas un caractère automatique et obligatoire : chaque État garde le choix de ses partenaires et du volume qu'il entend donner à ses échanges. Comme il avait été prévu en 1956, la convention servira surtout de cadre à des accords bilatéraux qui règleront les dispositions propres à chaque cas. L'on n'a pas cherché à définir de façon stricte les publications officielles, autrement que par leur caractère législatif ou administratif; cette définition est laissée à la compétence de chaque État. Il est toutefois précisé que l'échange est limité aux publications « exécutées par ordre et aux frais d'une autorité gouvernementale nationale », c'est-à-dire que les publications des territoires fédérés (dans le cas de fédérations du type des États-Unis ou de l'U.R.S.S.) ou des autorités locales (départements, communes, etc.) en sont exclues; cette clause a paru nécessaire à tous les délégués. Le texte de la convention prévoit de façon explicite que les autorités chargées des échanges auront tout pouvoir pour se procurer les publications - ce qui n'est pas toujours le cas. Il était difficile d'imposer dans une convention internationale l'établissement de bibliographies de publications officielles, ou de bibliographies nationales distinguant les publications disponibles aux fins d'échange; le Comité a toutefois émis un vœu dans ce sens; et de toutes façons, les accords bilatéraux ne peuvent fonctionner sans l'envoi réciproque de listes de publications. Le Comité, à la demande de M. Cain, a également émis le vœu que l'Unesco prépare un petit manuel pratique sur l'organisation et le fonctionnement d'un service d'échanges, à l'intention des pays souhaitant en établir.
Les clauses « de style » sont identiques dans les deux conventions. La plus importante prévoit que les États non membres de l'Unesco pourront être invités à accéder à ces conventions, ce qui répond au vœu de tous les délégués.
La situation des organisations intergouvernementales à l'égard des conventions a été examinée; et sans qu'il lui fût possible de prendre parti sur une matière trop tardivement inscrite à l'ordre du jour, le Comité a estimé que le bénéfice des conventions pourrait être étendu, si la Conférence générale le jugeait bon, aux Nations Unies et à leurs institutions spécialisées.
En résumé, il semble que l'on peut être largement satisfait du travail fait à Bruxelles, où la position française a joué un rôle déterminant. Certes, si l'on compare les nouveaux textes à la convention de 1886, il semble y avoir recul sur certains points : par exemple, les États ne s'obligent plus à échanger leurs publications officielles, ils « expriment leur volonté » de le faire. Mais il faut voir la réalité en face : la convention de Bruxelles a-t-elle fonctionné comme il était souhaitable, pour les États qui l'ont signée et qui étaient peu nombreux ? S'il a paru nécessaire de la remplacer, devait-on lui substituer un texte qui n'avait pas plus de chances d'être largement ratifié ? Nous ne le pensons pas. La véritable coopération internationale ne peut s'établir que sur une base minimum acceptable par tous les États, chacun restant maître d'aller au delà s'il le désire. Si la prochaine session de la Conférence générale, qui se tient à Paris en octobre 1958, approuve largement les textes préparés, ce sera dans la pratique un grand pas en avant.