Les « Trésors de la Bibliothèque nationale ».
Sous ce titre, la Société des éditions filmées d'art et d'histoire vient d'entreprendre la publication d'une collection de documentation visuelle en couleurs dont le but est de diffuser, selon un plan qui se modèle sur les divisions traditionnelles de la bibliothèque et sur l'évolution de l'histoire du manuscrit et des arts graphiques, la connaissance des richesses accumulées au cours des siècles dans les différents départements de la Bibliothèque nationale.
Sans doute les expositions, consacrées à des sujets déterminés, permettent-elles au public parisien de voir quelques-unes de ces richesses, tandis que leurs catalogues, souvent abondamment illustrés, sont demandés en province et à l'étranger. Lorsque les Éditions filmées d'art et d'histoire sollicitèrent l'autorisation de reprodùire au moyen de vues de projection les documents les plus rares de la Bibliothèque nationale, celle-ci ne pouvait refuser d'apporter sa contribution à l'établissement d'une forme de documentation qui conquiert actuellement la faveur des historiens de l'art et celle des enseignants.
Chaque série de 20 diapositives est accompagnée d'un livret de 36 pages comportant une introduction de caractère général sur la période à laquelle les vues sont consacrées et, pour chaque vue, une notice donnant sur l'origine, l'histoire, les caractéristiques du document toutes les indications utiles. L'ensemble se présente matériellement sous un emboîtage qui a l'aspect extérieur d'un livre (format approximatif in-12) recouvert de papier parchemin, avec un dos sur lequel peuvent être portées toutes les indications opportunes de provenance et de contenu 1.
Le plan de la collection ayant été établi d'un commun accord, le choix des premiers documents à reproduire se porta naturellement sur les manuscrits à peintures du Cabinet des manuscrits. M. Jean Porcher, conservateur en chef, voulut bien s'intéresser personnellement à la réalisation de cette histoire de l'enluminure d'un aspect tout nouveau, dont les illustrations sont destinées à être projetées sur un écran ou étudiées au moyen d'une visionneuse. C'est à lui que nous sommes redevables de l'établissement du plan général des séries des « Trésors de la Bibliothèque nationale » qui seront consacrées aux peintures des manuscrits; il en a désigné les collaborateurs et s'est entretenu avec eux du choix des enluminures à reproduire, ainsi que des textes destinés à accompagner ces reproductions.
Depuis le mois d'octobre, et au rythme d'une série par mois, quatre séries ont déjà été publiées; ce sont celles relatives aux manuscrits des époques précarolingienne, carolingienne et romane (France méridionale et France septentrionale). Les visiteurs de l'exposition Les Manuscrits à peintures en France du VIIe au XIIe siècle retrouveront les rapprochements par écoles qui présidèrent à l'ordonnance des vitrines de 1954; sans doute reverront-ils avec joie quelques-unes des illustrations à pleine page du Pentateuque de Tours, du Sacramentaire de Gellone, de l'Évangéliaire de Charlemagne, de l'Évangile de Lothaire, des Bibles et du Psautier de Charles le Chauve, pour ne citer que les plus anciens ou les plus célèbres de ces livres.
Quatre autres séries seulement avaient été prévues pour les mois à venir, traitant des XIIIe, XIVe et xve siècles; mais, étant donné la variété et l'abondance des volumes entre lesquels il faudra choisir, il s'est révélé indispensable de consacrer au xve siècle une cinquième série. Et nous ne saurions oublier que le Cabinet des manuscrits conserve encore une extraordinaire collection de manuscrits étrangers et orientaux qu'il sera nécessaire de faire connaître eux aussi.
Si la partie scientifique de l'entreprise est l'œuvre des conservateurs et des bibliothécaires, c'est au personnel du service photographique qu'il appartient d'établir des reproductions dont la fidélité par rapport aux originaux doit être constatée avant qu'ektachromes et négatifs couleurs soient confiés aux techniciens de la Société des éditions filmées d'art et d'histoire. Ceux-ci produisent pour chaquevue les 500 diapositives qui composent le tirage de chacune des séries. Avant d'être rangées dans leur emboîtage, toutes ces diapositives subissent un dernier contrôle qui a pour objet de vérifier l'exactitude des couleurs par comparaison avec les ektachromes originaux. Ces derniers peuvent alors prendre leur place dans les collections des archives de sécurité de la Bibliothèque nationale.
Il est bien évident que cette expérience de large diffusion, faite sous une forme attrayante, de documents qui ne sauraient être communiqués à tous ceux qui désirent les connaître, ne devra pas être limitée aux seuls volumes du Cabinet des manuscrits. Nous pensons qu'elle pourra s'étendre, avec l'accord et sous la direction des conservateurs en chef des autres départements, aux estampes et aux dessins du Cabinet des estampes, aux ouvrages et aux reliures de la Réserve des imprimés, aux portulans du Cabinet des cartes et plans, aux médailles et aux objets d'art du Cabinet des médailles.
Il nous semble qu'au moment où une collection complète des « Trésors de la Bibliothèque nationale » aura pu être constituée, cette collection sera appelée à rendre les plus grands services aux bibliothécaires, aux érudits, aux chercheurs, aux maîtres de tous les ordres d'enseignement qui ont parfois tant de peine à se procurer les reproductions en couleurs nécessaires à leurs travaux ou à l'illustration de leurs cours.
Elle assurera, par ailleurs, dans une certaine mesure, la protection des originaux eux-mêmes en évitant que les plus célèbres de ces originaux ne soient photographiés à maintes et maintes reprises.