Chronique des bibliothèques
Bibliothèque nationale.
Film documentaire.
Depuis plusieurs années la Bibliothèque nationale a été fréquemment saisie de propositions concernant la réalisation d'un film documentaire qui présenterait au public le fonctionnement de ses différents services.
Au début de l'année 1956, la Société des producteurs des Films de la Pléïade, grâce au concours de la Direction des relations culturelles du Ministère des affaires étrangères et de la Radio-télévision française, a adressé à M. Julien Cain, administrateur général de la Bibliothèque nationale, une proposition qui a été retenue. M. Alain Resnais a été choisi comme réalisateur.
Il apparut aussitôt qu'il serait difficile sinon impossible de présenter en vingt minutes les innombrables formes du travail qui s'effectue dans les différents départements et services de la Bibliothèque nationale. Il fallut donc se contenter de donner une vue d'ensemble.
M. Alain Resnais s'est efforcé de suivre le cheminement d'un livre en partant de son arrivée au Dépôt légal jusqu'à sa mise en place sur les rayons. Il a montré la masse des journaux qui affluent quotidiennement au Département des périodiques. Il a souligné la délicatesse des travaux de restauration, de conservation, de préservation qui incombent à l'atelier de la reliure, l'importance grandissante accordée à la photographie et au microfilm au service de la documentation.
Quant aux richesses des collections, le réalisateur a dû renoncer à les présenter. Il s'est contenté de montrer rapidement quelques pièces dans le cadre de la Réserve des estampes, des salles de travail des Départements des manuscrits, des cartes et plans, du Cabinet des médailles.
Au total, il s'agit d'un documentaire, auquel on a donné ce titre : « Toute la mémoire du monde ». Le commentaire a été rédigé par M. Forlani. Le film, préparé pendant les mois d'avril et de mai, a été réalisé entre le 24 mai et le 28 juin. Il représente 630 mètres de pellicule en 35 millimètres (noir et blanc) et dure vingt-trois minutes.
Une nouvelle émulsion très sensible à la lumière nommée tri X. a été utilisée spécialement pour permettre à M. Cloquet, l'opérateur, de compenser quelques insuffisances d'éclairage motivées par des mesures de sécurité.
Le montage terminé, le film a été mis en musique par M. Maurice Jarre. L'acteur Jacques Dumesnil a été choisi pour dire le commentaire.
Exposition Gustave Geffroy.
Gustave Geffroy ne fut pas seulement le collaborateur de Clemenceau au journal La Justice, l'auteur de L'Enfermé et de L'Apprentie et l'un des premiers présidents de l'Académie Goncourt, il fut aussi l'un des critiques les plus avertis et les plus perspicaces de sa génération. C'est à son œuvre de critique qu'est plus particulièrement consacrée l'exposition qui vient de s'ouvrir à la Bibliothèque nationale, sur l'initiative du Syndicat de la Presse artistique française, dont le président est M. Charles Kunstler et le secrétaire général, M. Maximilien Gauthier, qui fut le collaborateur de Geffroy.
Grâce au concours des Musées nationaux et de collectionneurs privés, l'organisateur de cette exposition, M. Jean Adhémar, conservateur au Département des estampes, a pu réunir un ensemble de tableaux et de gravures qui constitue une rétrospective de l'art français à la fin du XIXe siècle. Au groupe des peintres traditionnels, qui firent l'objet des plus vives attaques de Geffroy, les Gérôme, les Jean-Paul Laurens, les Dagnan-Bouveret, s'oppose celui des tenants de la « modernité », des peintres qui trouvèrent dans le critique, ainsi que l'a souligné M. Julien Cain, dans sa préface au catalogue de l'exposition 1 « un de leurs interprètes, un de ceux qui pouvaient le mieux expliquer au public les tendances qu'ils représentaient et qui étaient celles de ce qu'on a nommé l'art vivant ». Les articles que Geffroy leur consacra et qui furent réunis par la suite dans les huit volumes de la Vie artistique trouvaient tout naturellement leur illustration dans la présentation de quelques-unes de leurs œuvres : l'Église de Gréville, par Millet; les Meules de Claude Monet; les Bords du Loing par Sisley, un Pissaro; citons encore un Renoir qui n'avait jamais encore été exposé, le portrait de Paul Durand-Ruel. Les liens d'amitié qu'il entretint avec quelques-uns des plus grands artistes de son temps nous valent d'admirer, à l'exposition de la Bibliothèque nationale, les portraits de Geffroy par Carrière et par Cézanne, ainsi que son buste par Rodin, qui fait partie des collections de l'Académie Goncourt.
Cet hommage rendu à Geffroy, critique d'art, était également l'occasion d'évoquer tous les critiques qui, avant lui et en même temps que lui, se firent les défenseurs d'un art libre et novateur, Diderot le premier de tous, Jal, Thiers lui-même, Théophile Gautier, Baudelaire, Thoré, Duranty, Roger Marx, M. Georges Lecomte, etc... dont les Salons et les comptes rendus d'exposition témoignent à la fois de leur perspicacité et de leur indépendance à l'égard des partisans du conformisme et de l'art dit « traditionnel ». La rétrospective qui leur est consacrée s'ouvre sur un rarissime exemplaire du premier catalogue imprimé de salon dont on ait conservé la trace, celui de 1673.
Des souvenirs personnels de Geffroy complètent cet ensemble dédié à un homme à qui les artistes impressionnistes durent de trouver, dans la presse et parmi le public, un accueil plus favorable et qui entre autres mérites, eut celui d'inscrire son nom au tableau d'honneur de la critique artistique, derrière d'aussi grands noms que ceux de Diderot, de Théophile Gautier ou de Baudelaire.
Manuscrit des Très-belles heures de Notre-Dame.
Le manuscrit des Très-belles heures de Notre-Dame, ayant appartenu au duc de Berry, frère de Charles V, et que son dernier possesseur, M. le baron Maurice de Rotschild a donné à la Bibliothèque nationale 2 est présenté au public du 10 janvier au 9 février 1957.
Bibliothèques universitaires.
Aix (Bouches-du-Rhône).
Le 8 janvier 1957, a eu lieu, dans les nouveaux locaux de la Bibliothèque universitaire d'Aix (section droit-lettres), la cérémonie officielle de l'inauguration du fonds Paul Mazon. Cette manifestation s'est déroulée sous la présidence de M. le Doyen de la Faculté des lettres et en présence notamment de Mme Paul Mazon, de plusieurs membres de sa famille et de M. Séchan, professeur honoraire à la Sorbonne.
Cette bibliothèque, riche de plus de 3.000 volumes et constituant une documentation de premier ordre pour les recherches helléniques avait pu être acquise en 1955 3, grâce à des subventions de la Direction de l'enseignement supérieur, de la Direction des bibliothèques et de l'Université d'Aix-Marseille.
Poitiers (Vienne).
A la Bibliothèque universitaire de Poitiers a eu lieu, du 19 décembre 1956 au 12 janvier 1957, une exposition d'ouvrages scientifiques des XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles provenant de son fonds, auxquels avaient été jointes quelques pièces intéressantes prêtées par la Bibliothèque municipale de Poitiers et la Bibliothèque universitaire de Bordeaux. Inaugurée par la réception de la section locale de l'Association Guillaume Budé, cette exposition a ensuite été présentée aux étudiants au cours de plusieurs visites commentées.
Bibliothèques centrales de prêt.
Hérault.
Le Comité consultatif de la Bibliothèque centrale de prêt de l'Hérault s'est réuni le 20 décembre 1956 à Montpellier.
Il a notamment examiné le problème de la reprise des tournées; celles-ci interrompues depuis le 10 décembre faute d'essence ne pourront être reprises que partiellement les mois prochains : au tiers maximum des tournées habituelles. Plusieurs solutions furent proposées : création d'une centrale annexe à Béziers, limitation des tournées aux grands centres, envoi de colis de livres.
M. Pitangue fit également part au Comité consultatif des projets qu'il avait formés afin d'étendre l'action culturelle de la bibliothèque centrale de prêt. Il envisage notamment la création de clubs de lecteurs et l'organisation, par la troupe universitaire « les Escholiers de Languedoc », de montages dramatiques.
Le Conseil général du département ayant décidé la constitution d'un centre de documentation du théâtre et de la musique, un effort particulier devra être fait par la bibliothèque centrale de prêt pour réunir une documentation susceptible d'être utilisée par les organisateurs de ce centre (établissement d'un catalogue, commun à la bibliothèque universitaire et à la bibliothèque centrale de prêt, des livres et collections intéressant la musique et le théâtre, prêt de documents tels que pièces de théâtre, traités d'initiation artistique, gravures, etc.., expositions).
D'autre part, une phonothèque régionale va être créée auprès de la bibliothèque. Le prêt des disques ne sera autorisé qu'à titre exceptionnel, sur demande des clubs, foyers ou maisons de jeunes.
Enfin des centres intercommunaux de documentation rurale fonctionnent dans ce département en liaison avec la bibliothèque centrale de prêt et les services publics de l'Agriculture, de l'Éducation nationale et de la Santé. La bibliothèque y fait des dépôts permanents de livres de caractère agricole, artisanal, familial ou professionnel.
Isère.
Les activités de la Bibliothèque centrale de prêt de l'Isère faisaient jusqu'à présent l'objet d'une chronique dans le Bulletin de la Fédération des œuvres laïques du département. Depuis le mois de mai 1956, l'Association des amis de la Bibliothèque centrale de prêt de l'Isère a pris l'initiative d'en faire effectuer des tirages à part destinés aux maires et aux conseillers généraux. Les deux premiers numéros de ce Bulletin de l'Association des Amis de la Bibliothèque centrale de prêt de l'Isère contiennent, entre autres articles, une liste des dépôts desservis par le bibliobus et un exposé du travail accompli par la Bibliothèque depuis sa création en 1945.
Bibliothèques municipales.
Aurillac (Cantal).
Mlle A.-M. Royer, bibliothécaire de l'Association du bibliobus de la Charente-Maritime, a été nommée par arrêté municipal, bibliothécaire de la ville d'Aurillac. Mlle Royer est en outre chargée de diriger le service de lecture publique du Cantal.
Barentin (Seine-Maritime).
Créée en janvier 1946, la Bibliothèque municipale de Barentin n'a cessé de s'accroître au cours des dix premières années de son existence. Elle comptait 3.000 ouvrages en 1954, 4.600 en 1955 et 5.200 en 1956; parallèlement le nombrc des lecteurs inscrits passa de 43 à 425 en trois ans.
Dijon (Côte-d'Or).
La Bibliothèque municipale de Dijon a présenté, du 7 au 26 janvier 1957, un trésor monétaire d'environ 13.000 pièces, découvert en janvier 1954 par un habitant de Courcelles-Fremoy (Côte-d'Or). Ces monnaies avaient été envoyées au Cabinet des médailles de la Bibliothèque nationale pour décapage et identification. Ce sont, pour la plupart, des « deniers », petites monnaies d'argent de la fin du XIIe siècle et surtout du début du XIIIe siècle, bourguignons en grande majorité. La présence de monnaies datées avec précision permet de fixer la date d'enfouissement en 1271, ou très peu de temps après, et d'attribuer sans conteste au Duc de Bourgogne Hugues IV (1218-1272) certain type de denier pour lequel les numismates hésitaient jusqu'à présent entre Hugues IV et son petit-fils Hugues V (1305-1315).
Lille (Nord).
A l'occasion du dixième anniversaire de la création de l'annexe de la Bibliothèque municipale de Lille, rue des Fossés, une manifestation a eu lieu le samedi 6 janvier 1957, dans les locaux de cette bibliothèque, sous la présidence de Mme Rachel Lempereur, député du Nord, adjointe à l'Instruction publique et aux Beaux-Arts, qui représentait M. le Maire de Lille, et en présence des membres de la Commission de la bibliothèque, de M. l'Inspecteur d'Académie, des responsables des différents organismes de lecture publique à Lille et des représentants de la presse.
Après que Mlle Crombez, bibliothécaire, eût retracé l'historique de la Bibliothèque municipale de Lille depuis sa fondation en 1789 et que Me Decroix, bâtonnier, vice-président de la Commission d'inspection et d'achat de la Bibliothèque municipale, eût souligné le succès remporté par l'établissement de l'annexe de prêt, Mme Lempereur prit la parole pour exposer les projets en cours de réalisation et annoncer l'intention de la municipalité d'entreprendre, cette année même, la construction d'un bâtiment réservé à la Bibliothèque municipale; celle-ci, en effet, depuis l'incendie de 1916, avait trouvé un abri dans les locaux de la Bibliothèque universitaire.
Menton (Alpes-Maritimes).
La Bibliothèque municipale s'est enrichie de divers documents provenant de la famille Gastaldy et relatifs à Adolphe Thiers, premier président de la République française, qui était apparenté à cette famille.
Montauban (Tarn-et-Garonne).
Du 25 novembre au 13 janvier une exposition réalisée par la Bibliothèque de la ville s'est tenue dans les salles du Musée Ingres sous le titre Faune et Flore de la Renaissance à l'époque romantique. Le thème en était : les sciences de la vie du XVIe siècle au transformisme, vues sous l'angle graphique et iconographique. Les documents graphiques provenaient du fonds de la bibliothèque; la Bibiothèque du Muséum y participa par le prêt de documents iconographiques où figuraient, parmi les planches d'Abraham Bosse et de Nicolas Robert extraites du Recueil de plantes gravées par ordre du roi, quelques vélins de la collection du Muséum.
A cet ensembe de plus de deux cents documents venaient s'ajouter des objets naturalisés-oiseaux, provenant de la collection du Musée d'histoire naturelle de Montauban, un des plus riches de France, destinés à animer le texte et l'image et en stricte concordance avec eux. D'autre part le Conservateur du Musée d'histoire naturelle devait compléter par une conférence sur l'histoire des sciences, les visites guidées, donnant à cette manifestation, son caractère éducatif.
Pau (Basses-Pyrénées).
En collaboration avec le « Théâtre-club » de la ville de Pau, la Bibliothèque municipale a présenté, du 15 décembre 1956 au 30 janvier 1957, sous le titre : « Visages d'acteurs » un ensemble de portraits photographiques de Mme Thérèse Le Prat. Des livrets de pièces et des ouvrages sur le théâtre complétaient cette exposition et montraient l'évolution des personnages dramatiques au cours des siècles.
Saint-Dié (Vosges).
A l'occasion de la « semaine de l'unité chrétienne » qui s'est tenue à Saint-Dié à partir du 18 janvier 1957, la Bibliothèque municipale a exposé à la Chambre de commerce sept précieux exemplaires de la Bible, parmi lesquels il convient de signaler un fragment manuscrit de bible hébraïque, découvert en Algérie en 1840.
Tours (Indre-et-Loire).
Du 1er au 31 janvier 1957, une exposition de quelques-uns des plus beaux manuscrits enluminés de la Bibliothèque municipale a été organisée au Musée des Beaux-Arts de Tours. Elle a attiré de nombreux visiteurs et notamment les enfants des écoles et lycées de la ville.
Versailles (Seine-et-Oise).
La Bibliothèque municipale vient de faire imprimer un dépliant publicitaire avec gravures sur bois par le maître-graveur versaillais R. Lemagny, membre de l'Institut.
Le jeudi 13 décembre 1956, les Amis de la bibliothèque de Versailles ont célébré un anniversaire qui fut, en cette année Mozart, complètement oublié des musicologues : le 3e centenaire de la naissance d'un des maîtres de l'École française de la fin du XVIIe siècle, Marin Marais. Le concert qui eut lieu dans la galerie de l'ancien Hôtel des affaires étrangères, inscrivait au programme : Suite en la, Récit et air d'Ariane et Bacchus, Suite en sol majeur avec le concours de Mmes Jacqueline Cellier, Laurence Boulay, Colette Lequien, Geneviève Leroux-Gillard, Marguerite Stromeyer, et réunit plus de 120 amateurs fervents de musique classique.