RéVOdoc

Une expérience de mutualisation non contrainte

Claire Gaudois

Présentation de ReVOdoc, réseau de coopération entre plusieurs bibliothèques et institutions du Val-d'Oise formalisé depuis 2008 par un catalogue collectif, et impact de ce modèle collaboratif sur les pratiques documentaires.

The article presents ReVOdoc, a co-operative network linking several libraries and institutions in the Val-d'Oise département near Paris, established in 2008 with a union catalogue. It also looks at the impact the collaborative model has had on document management policies.

RéVOdoc est un réseau de coopération documentaire à l’échelle du département du Val-d’Oise : 62 collectivités ou institutions, 75 bibliothèques ou centres de documentation spécialisés y participent. Si les bases et principes de cette coopération ont été posés en 1994, c’est le catalogue collectif   1 mis en place en 2008 qui a permis l’essor du prêt entre bibliothèques.

Le département du Val-d’Oise finance, coordonne et anime ce réseau : une bibliothécaire de la bibliothèque départementale assure l’interface avec le prestataire informatique, organise deux réunions plénières par an et gère une plate-forme collaborative en ligne.

Une réserve départementale de prêt (inspirée de la réserve centrale des bibliothèques de Paris), fusionnée avec les fonds en réserve de la bibliothèque départementale, vient compléter le dispositif : elle permet aux bibliothèques de se délester de leurs documents à rotation très lente tout en gardant pour leurs usagers la possibilité de les emprunter.

RéVOdoc tient de « l’auberge espagnole » : chacun apporte ce qu’il a et ce qu’il est au bénéfice de tous. Pour l’usager, c’est un service quatre étoiles : « Avec RéVOdoc, votre bibliothèque est grande comme le Val-d’Oise » ! À sa disposition, les collections non seulement de 75 % des bibliothèques publiques du département, mais également des services documentaires départementaux (archives, archéologie, BDP), de Canopée95, et des bibliothèques universitaires… Deux millions de titres en tout, disponibles pour près de 90 % des Valdoisiens, pourvu qu’ils soient inscrits dans une bibliothèque participant au réseau.

Un modèle original : le principe du réseau horizontal

Le Val-d’Oise a reçu le prix Livres Hebdo 2012 de l’innovation pour, entre autres, le fonctionnement du réseau RéVOdoc et son mode d’accompagnement du changement.

C’est un réseau réellement horizontal : pas de hiérarchie, pas de procédure formalisée, pas d’unification explicite des politiques documentaires ni des pratiques catalographiques… mais on se connaît, et on s’amuse ! Une collectivité « support », le Département, finance l’essentiel de la logistique informatique et de transport des documents et assure un rôle de coordination, mais pas de prescription. Il compte sur la force de l’exemple pour induire un changement non contraint, résultant de l’offre et de la demande.

Le phénomène de glissement progressif des pratiques se fait à partir d’un service à l’usager. C’est le service à l’utilisateur final qui est le moteur du changement. C’est sous sa forte influence que les pratiques locales évoluent, selon un principe de régulation naturelle sans cadre contraignant, de complémentarité de l’offre par coopération horizontale.

Ce modèle coopératif est praticable à une échelle étendue qui ne contrarie pas l’existence en son sein de réseaux moins étendus fonctionnant sur un autre modèle (réseaux intercommunaux intégrés par exemple).

Illustration
Un modèle original : le principe du réseau horizontal

RéVOdoc peut se théoriser comme étant deux applications du modèle de la longue traîne dans l’offre documentaire sur un territoire étendu :

  • Le modèle classique : la bibliothèque locale doit proposer ce qui correspond aux demandes massives, l’échelon intercommunal puis départemental (RéVOdoc) permettant de servir la queue de la traîne.
  • Le modèle appliqué à chaque titre : le nombre d’exemplaires et leur répartition sur le territoire s’amenuise naturellement au fur et à mesure de la diminution de la demande jusqu’au dernier recours de la réserve départementale qui assure la pérennité.

Quelle influence l’existence de ce réseau de prêt entre bibliothèques a-t-elle réellement sur les pratiques documentaires des bibliothécaires ?

Une enquête est en cours pour vérifier auprès des participants les hypothèses suivantes :

  • Acquisitions, désherbage : la conception partagée d’une collection départementale influe sur les pratiques documentaires des bibliothécaires.
  • La visibilité du réseau auprès des usagers permet de valoriser des particularités documentaires par établissement.
  • La Réserve départementale de prêt permet de concilier la disponibilité des titres à rotation très lente et le désherbage des espaces en accès public.

Concernant les modalités de recueil des données auprès des opérateurs, un questionnaire en ligne a été envoyé à toutes les bibliothèques participant au réseau, à remplir avant le 22 juin. Dépouillement et analyse se feront pendant l’été. Un premier retour sera proposé le 22 septembre, lors des rencontres départementales de la lecture publique.