Politiques publiques pour la jeunesse
De la Ruche à la BMVR
Cet article est la version remaniée d’une intervention prononcée lors de la journée d’étude « Enfants et jeunes en bibliothèque : regards européens », le 15 novembre 2012, à l’Enssib, et s’attache particulièrement à replacer la question de la lecture des enfants au sein des politiques publiques récentes.
The article builds on a presentation given at the one-day conference on Children and Young People in Libraries across Europe held at ENSSIB on November 2012. It explores the place of children’s reading in recent public policy.
Dieser Artikel ist die überarbeitete Fassung eines bei der Tagung „Kinder und Jugendliche in der Bibliothek im europäischen Blick“ am 15. November 2012 an der enssib gehaltenen Vortrags und befasst sich insbesondere mit der Wiederaufnahme des Themas Lesen der Kinder in die aktuelle öffentliche Politik.
Este artículo es la versión retocada de una intervención pronunciada durante la jornada de estudio “Niños y jóvenes en biblioteca: miradas europeas”, el 15 de noviembre 2012, en la enssib, y se aferra particularmente en reubicar la cuestión de la lectura de los niños en el seno de las políticas públicas recientes.
Si j’interviens ici sur le « territoire jeunesse » 1, ce n’est pas comme « spécialiste jeunesse » – ce que je ne suis pas –, mais avec la vision d’un directeur d’établissement sur une question proche des politiques publiques, question vue d’une grande BM, dans le cadre de la réflexion menée autour d’un projet d’établissement. Exercice qui ne manque ni de difficultés, ni d’intérêt.
Difficultés et intérêt de l’exercice
Difficultés parce qu’il s’agit d’un programme vaste et peu identifié, dans le sens où un programme « politique publique pour la jeunesse » n’est pas affiché pour les bibliothèques ; ce n’est pas un territoire abandonné mais qu’on pense déjà investi par d’autres, et qu’on ne formalise pas pour notre part. Ainsi, le programme du ministère de la Culture, « 14 propositions pour le livre », de Frédéric Mitterrand (doté de 100 millions d’euros) comprend deux propositions qui concernent ce secteur :
- Proposition 9 : « Soutenir et accompagner les associations qui travaillent au développement de la lecture chez les jeunes et auprès des populations éloignées de la lecture » : destinée aux associations (lire et faire lire, ACCES…), avec une dotation de 300 000 € (0,3 %).
- Proposition 11 : « Familiariser l’enfant avec la lecture dès le plus jeune âge » : extension de l’opération « Premières Pages », opération qui existe déjà, notamment dans les départements, avec une dotation de 100 000 € (0,1 %).
Difficultés, aussi, pour rassembler les données : on se trouve face à une synthèse s’arrêtant en 1975 2, des données statistiques nationales qui ne sont pas à jour, une faiblesse des publications et études des institutions et associations (IGB : rien ; tags de l’ADBGV : rien ; dossiers de l’ADBGV : rien ; ABF : congrès de Reims 2007 sur les parcours en bibliothèque mais les interventions ne sont pas toutes en ligne, etc.). Du côté de l’Enssib, j’ai fait une recherche dans l’ensemble des travaux universitaires numérisés avec le mot clé = jeunesse (dans le titre) : 6 réponses 3, sur plus de 500 mémoires, soit 1 %.
Il s’agit d’un véritable paradoxe : les publics jeunes représentent 30 %, 40 % de certains indicateurs, et 40 % des surfaces, des équipes, des collections, etc. Par ailleurs, les indicateurs peuvent paraître ambigus : à Lyon, depuis 2001, on constate une forte hausse des 0-15 ans, et une forte baisse des 15-35 ans. Et aussi : dans les équipes de direction, où sont les bibliothécaires jeunesse ?
Difficultés mais intérêt. Voir comment, à l’heure des interrogations sur le modèle de la bibliothèque, l’offre pour la jeunesse est, elle aussi, interrogée ; voir aussi comment cette interrogation jeunesse est au cœur de l’interrogation globale sur les bibliothèques :
- quand le métier veut se déplacer de la collection vers les publics, de l’offre vers la demande ;
- quand la bibliothèque s’orientant public s’interroge sur les attentes, les pratiques des publics et singulièrement des jeunes publics. Pensons à l’enquête du Crédoc sur les ados : « La bibliothèque, c’est super mais ça ne nous concerne pas » ;
- à l’heure aussi où, localement, les tutelles priorisent leur politique sur les jeunes publics ;
- et donc à l’heure où, dans des environnements contraints et dans des contextes de concurrence, l’enjeu jeunesse prend une dimension qu’il n’est pas possible de ne pas revendiquer, de ne pas valoriser.
On est donc bien devant un enjeu de politique publique.
Politiques publiques des bibliothèques jeunesse
Comment des politiques publiques organisent-elles l’« offre pour la jeunesse » ? Je vais centrer mon propos naturellement sur les bibliothèques publiques, voire municipales, avec un accent sur ce qu’on peut repérer, en termes de modèle, comme les deux bouts d’une chaîne : les Ruches et les bibliothèques municipales à vocation régionale (BMVR).
Les Ruches
Définition : programme impulsé par la DLL visant à développer des structures de petite taille (500 m²) en zone rurale et périurbaine. Lancement du programme en 2002-2003 ; en 2007, 400 Ruches sont recensées par la DLL, 80 % en milieu rural, 20 % en zone périphérique urbaine.
Arrêt sur image : c’est un programme mal né, mais à reconsidérer. Mal né : on se souvient de la réception mitigée par la profession lors de sa présentation au congrès d’Aubagne en 2003 par le directeur du livre de l’époque, Éric Gross : le nom de ruche (bibliothécaires = abeilles ?) mal accepté (pourtant choisi après une réflexion intense du ministère) ; les doutes sur les capacités budgétaires de l’État en termes de projets finançables, alors que le mouvement était déjà lancé par les collectivités ; des questions sur le lancement de ce type de programme à l’heure naissante du désengagement de l’État (différent du programme BMVR).
À reconsidérer : si l’on relit le programme-cadre, on le trouve réellement novateur, quatre ans avant le congrès de l’ABF sur les bibliothèques de l’avenir et cinq ans avant l’étude du Crédoc. Novateur en quoi ? L’idée de médiathèque de proximité : « favoriser l’émergence de lieux modestes mais très disponibles pour les gens » (Jean-Jacques Aillagon) ; l’accent sur les nouveaux médias, internet, la vie culturelle ; des interrogations sur les financements mais pour la première fois depuis les années Gattégno, une aide sur les ressources humaines dans un objectif de qualification sinon de pérennisation (aide dégressive) ; une réflexion sur les publics spécifiques : handicap, citoyenneté (kiosque, jeune public) ; l’idée d’agora – l’ABF dira forum : sociabilité, rencontre, séjour ; les missions de base rappelées (collections, prêt) mais avec un accent sur de nouveaux espaces d’accueil et d’animation relatifs aux nouveaux supports d’information (internet) et aux attentes citoyennes : 42 % de la surface.
Et une attention portée à la question de la jeunesse : travail multipartenarial en direction de la petite enfance, des publics scolaires au moyen de collections appropriées et d’espaces dévolus à ces actions (kiosque, salle de travail en groupe, salle polyvalente, salle d’heure du conte), dégagement pour les poussettes et stockage des patins à roulettes, salon de lecture et de musique (qu’on pense à la bibliothèque d’Oslo, aux préconisations de l’Ifla en 2005, à la « living-room library »), espaces de rencontre et de détente, avec des collections de BD, des périodiques, des collections multisupports musique, des chauffeuses. L’espace jeunesse est programmé à 90 m², l’espace adultes à 110 m² ; pour les collections, le programme prévoit 3 260 documents pour les jeunes, 10 080 pour les adultes, grosso modo un peu plus de 30 %.
Aujourd’hui, on manque de recul pour dresser un bilan chiffré mais on ne peut que constater l’exemplarité des réalisations et le caractère utilement novateur non seulement de l’architecture retenue, mais aussi, et surtout, du projet et de sa modélisation.
Les BMVR
Programme diamétralement opposé sur plusieurs plans : en terme de visibilité d’abord, inutile d’insister ; en terme d’échelle évidemment : les ruches 500 m² pour 5 000 habitants, les BMVR jusqu’à plus de 20 000 m² – de la proximité à la centralité régionale ; en terme de chronologie : le programme des BMVR est élaboré dix ans avant celui des Ruches, dix années essentielles sur lesquelles les BMVR elles-mêmes ont influé et pour lesquelles on a déjà un recul ; en terme de programme : on a souvent dit que celui des BMVR était flou. Le reproche, on le sait, vaut essentiellement pour le « VR » de BMVR.
On pourrait presque opposer au fond des Ruches la forme des BMVR qui, elle, a dès l’origine une grande précision si l’on se réfère au décret du 5 février 1993 :
- commune ou groupement de communes de plus de 100 000 habitants ou chef-lieu de région ;
- fonds d’au moins 250 000 ouvrages pour adultes ;
- présence de plusieurs supports documentaires et utilisation de moyens modernes de communication ;
- surface minimum (50 m² pour 1 000 habitants ; au-delà de 200 000, plus de 10 000 m²) ;
- travail en réseau (accès aux catalogues, circulation régionale des documents, coopération en matière d’acquisition, de conservation, d’animation ou de formation).
C’est un dispositif plus technique que bibliothéconomique : troisième part du concours particulier (60 millions de francs par an, total de 550 millions de francs pour 12 projets) ; on n’abordera pas ici les projets post-BMVR ni la thématique un moment travaillée des GBR (grandes bibliothèques en région).
Manifestement, on n’est pas non plus dans le même modèle : celui des BMVR reste ancré dans le modèle de la médiathèque, celui des Ruches est déjà à la recherche de nouvelles formes. En bref, la BMVR de 1993 n’est pas une bibliothèque hybride (internet est un nouveau support, cité, mais pas une autre bibliothèque), elle est plus orientée collections que publics (le mot n’est pas cité), la notion de lieu de vie n’est pas prise en compte (salle d’exposition, salle de conférence, etc., sous-dimensionnées, pensons a contrario à la Cité du livre d’Aix-en-Provence, où elles représentent près de 2 500 m²). Ce n’est pas la problématique de l’époque, même si elles vont contribuer à l’installation de la suivante.
En conséquence, la question de l’offre jeunesse ne fait pas partie du cahier des charges, mais on va naturellement la retrouver partout et notamment – paradoxe – dans l’épineuse question du VR. Il est clair toutefois qu’aujourd’hui ledit cahier des charges serait fort différent.
Partout, sauf à Montpellier, jeunesse et adultes sont séparés. Secteur jeunesse donc mais, avec la départementalisation, une offre documentaire s’arrêtant aux 12-13 ans. Il n’y a pas d’espaces ados, renvoyés chez les adultes (La Rochelle : petit espace chez les adultes, Troyes à cheval, si j’ose dire). Citons le cas spécifique d’Intermezzo à Toulouse sur lequel il est prévu de revenir.
Le plus souvent, la jeunesse est un département aux côtés de civilisation, société, etc. (comme le patrimoine !). Partout, l’offre est tous supports, mais avec des déséquilibres ; l’accès à internet n’est pas systématisé. L’espace est identifié mais ne reçoit pas de traitement spécifique : signalétique à Poitiers, architecture d’intérieur à Rennes, mobilier à Limoges. Le passage jeunesse/adultes se fait avec une partie attractive des collections : image et sons à Reims ; arts, disques et vidéo à Limoges.
Pour les surfaces des espaces jeunesse, on identifie un premier groupe à plus de 20 % : Châlons, Limoges, Orléans (Poitiers : 17 %) ; un deuxième groupe à 15 % : Nice, Troyes, Toulouse ; un troisième à 10 % : La Rochelle, Marseille, Reims, Rennes – Montpellier est inclassable mais au-dessus de 10 % ; les plus petites sont dans le premier groupe, les plus grandes dans le dernier.
Limoges est en tête en absolu (1 232 m²) et en relatif (plus de 20 %). Même chose pour la collection : 43 % en jeunesse. Pierre Riboulet : « La bibliothèque pour enfants occupe un vaste plateau intégralement vitré sur trois façades qui forment une sorte de proue s’avançant sur la ville. La ville est directement présente dans la bibliothèque. À l’inverse, depuis la rue, l’entrée, les quartiers alentours, la bibliothèque pour les enfants est le signe de la bibliothèque tout entière. »
On ne trouve pas de chiffres sur les collections jeunesse dans le décret, mais partout un effort considérable allant parfois jusqu’au renouvellement complet.
Ici encore, comme pour les Ruches mais de façon différente, voire a contrario, une exceptionnelle exemplarité (12 très grands programmes sur 5 ans) et pas seulement au niveau architectural ; un programme daté mais qui ouvre des pistes fécondes, notamment avec la question de la vocation régionale.
Le maillage
On reste donc sur les BMVR, mais en abordant leur vocation régionale. On connaît les interrogations sur cette « VR », on sait aussi les questions posées par rapport aux agences régionales. Des thématiques à connotation jeunesse trouvent leur place dans les BMVR :
- La formation : les BMVR ont pratiqué de forts recrutements et des formations massives à la clé, elles ont pu servir de tête de pont, en liaison avec les CRFCB, les IUT, les masters, ou en partenariat avec l’Éducation nationale (à Reims sur les BCD).
- L’action culturelle : Poitiers, Troyes (création d’un service éducatif).
- La conservation : élément très fréquent (La Rochelle, Marseille, Nice, Poitiers, Rennes, Toulouse), le fonds étant parfois relié au patrimoine.
- La conservation partagée : avec les agences. Travail sur les périodiques en Paca, en Bretagne, en Champagne-Ardennes sur les collections de jeunesse.
- La création de centres de ressources à Toulouse, Marseille, Limoges. À Montpellier : un budget propre, 4 postes pour les prêts aux écoles, 570 m², 44 places, 43 000 documents. À Marseille, l’Ile aux livres : 70 m², 30 000 livres, 15 000 euros, 5 personnes, avec des comités de lecture régionaux – une quinzaine par an –, un comité petite enfance avec les éducatrices de crèche, le « passe-livres » avec le CRDP, l’IUFM et l’agence régionale sur les nouveautés ados, des journées professionnelles, des formations, des liens avec Aubagne Ville-lecture, avec l’université (master incluant la littérature de jeunesse).
On voit bien l’intérêt d’observer les deux bouts de la chaîne, non pas en termes d’inventaire exhaustif, mais sous forme d’interrogation des modèles et de mise en perspective dynamique sur le maillage pouvant les relier. Impression de patchwork et d’un manque de liant que certaines initiatives actuelles permettraient de compenser pour établir une offre cohérente et sans solution de continuité. Intérêt, finalement, du flou initial sur les VR, les solutions locales se mettant peu à peu en œuvre.
Et aussi, bien sûr, le numérique…
La grande absence dans cette présentation, c’est l’offre virtuelle. Manque de temps, évidemment, mais intérêt d’un questionnement, voire d’un inventaire, sur l’offre actuelle dans ce domaine au niveau des sites, des Opac, des blogs et des collections numérisées, de l’offre jeunesse 2.0.
Cette dimension est impérativement à prendre en compte avant d’aborder la question de la demande des jeunes publics et de la confrontation entre des pratiques, sinon des attentes, de la part du jeune public et des propositions des structures pour en vérifier l’adéquation. Cette vérification n’a pas vraiment de spécificité jeunesse : c’est l’interrogation qui parcourt la réflexion globale de la profession.
Selon la dernière enquête d’Olivier Donnat sur les pratiques culturelles des Français, l’univers du livre et de la lecture est confronté à un « phénomène générationnel » qui dépasse la traditionnelle désaffection des jeunes de 13-16 ans pour le livre. C’est, aujourd’hui, toute une génération, née avec le numérique et un contexte culturel en pleine mutation, qui s’éloigne du livre pour se livrer à d’autres formes de lecture et d’expression, peut-être tout aussi enrichissantes : blogs, formes courtes comme celles de Twitter, réseaux sociaux, jeux, etc.
Aussi convient-il de raisonner, non pas en fonction d’un public adolescent qui serait « problématique » comme il l’a toujours été, mais en fonction d’une mutation générationnelle, qui a toutes les chances, d’ailleurs, de s’amplifier. C’est la réflexion de la BPI : pourquoi et comment mettre en place un dispositif susceptible, à la fois, de répondre aux attentes de cette nouvelle génération, d’observer le changement, de l’accompagner et d’anticiper les évolutions futures.
À Lyon, la place des enfants
À la BM de Lyon, cette réflexion s’inscrit dans le projet d’établissement, le schéma directeur de la Part-Dieu, et la préparation du congrès de l’Ifla en 2014.
Le projet d’établissement est structuré en 9 rubriques :
I. Orienté publics :
1. accessibilité
2. offre documentaire
3. élargissement des publics
II. Lieu de vie :
4. territoire
5. espace
6. débat et création
III. Un modèle lyonnais :
7. innovation numérique
8. valorisation patrimoniale
9. autres territoires
La réflexion sur l’espace jeunesse s’inscrit dans « débat et création » et a généré le projet « RéCréation », création contemporaine pour la jeunesse, qui se déroulera d’avril à juin 2013.
De quoi s’agit-il ? De la création d’une cité de la culture contemporaine, ville imaginaire ouverte à tous (enfants et adultes) organisée en trois quartiers/pôles : arts graphiques, arts numériques, arts vivants. Cette « ville » sera à la fois un lieu d’exposition, de rencontres et d’animation, mais existera aussi de façon virtuelle. Le public cible est les 6-12 ans et les familles (et par extension, les tout-petits – 0-6 ans – et les 15-35 ans). 150 000 visiteurs sont attendus sur les trois mois du projet, à la bibliothèque de la Part-Dieu, dans les 14 bibliothèques d’arrondissement, dans les bibliobus et les lieux partenaires sur la ville.
L’offre culturelle consistera en plus de cent rendez-vous proposés sur les trois mois : expositions, concerts, spectacles, rencontres avec des artistes, ateliers de découverte artistique, journées professionnelles, conférences et rencontres, accueils de groupes (scolaires, centres de loisirs, MJC, individuels.) Le projet est piloté par un comité scientifique qui regroupe la Maison de la danse, le Théâtre Nouvelle Génération, le Festival Nuits sonores, l’école Émile Cohl, la BnF… Les principaux partenaires sont la Région Rhône-Alpes, le Centre national du livre, le Syndicat national de l’édition, la Caisse des dépôts et consignations. Quelques artistes présents sur le parcours : Scénocosme (art numérique), Pierrick Sorin (art contemporain), Xue Feng Chen (arts plastiques), No Rules Corp (street art), Pierre Bastien (musique contemporaine), Aldebert (chanson française), Compagnie Arcosm (danse), Random Lab (design), etc.
Conçu comme un parcours sur le modèle de la Cité des enfants (de la Cité des sciences et de l’industrie), le projet vise avant tout une approche sensorielle et humaine de la création contemporaine à destination du jeune public. Sans sens de visite ni parcours fléché, le visiteur construira lui-même son parcours entre les diverses expériences qui lui seront proposées, l’occasion de rencontrer un univers, un créateur ou un domaine artistique. Une attention toute particulière sera apportée à la place du corps et de l’humain dans le projet. Les moyens d’appropriation de l’œuvre seront pensés en amont comme autant de chemins pour construire une relation à l’art et au monde autour de trois postures : jouer, créer, rêver. L’exposition sera enrichie d’une offre d’ateliers, de rencontres et d’une programmation culturelle riche d’une centaine de propositions.
Les points forts du projet sont nombreux :
- Collaboration à l’échelle de la ville de Lyon entre différentes institutions ou associations culturelles (musée Gadagne, Opéra, Maison de la danse, TNG, Nuits sonores, AADN, Fête du livre de Villeurbanne…).
- Expérimentation d’une nouvelle façon de penser la médiation culturelle (possibilité de poser directement des questions aux artistes, vote émotionnel) sur le modèle du Brooklyn Museum ; l’exposition web sera conçue sur le modèle Second Life.
- Innovation : travail avec des écoles d’enseignement supérieur – École de design de Saint-Étienne (scénographie, identité graphique), école Epitech (innovation numérique, espace immersif), École de management de Lyon (évaluation du projet).
- Développement durable : le projet cherche à s’inscrire dans le cadre de la norme ISO 26000.
- Les plus : accessible de 10 heures à 19 heures, entrée gratuite pour l’exposition et toute la programmation. Le congrès de l’Association des bibliothécaires de France en juin 2013 à Lyon viendra renforcer le rayonnement du projet.
Le projet « Cité des enfants », venu de la préparation de l’exposition « Création contemporaine pour la jeunesse », n’est pas encore abouti, mais il lui sera donné corps dans le cadre du schéma directeur de requalification de la Part-Dieu : joindre à l’espace « traditionnel » d’une bibliothèque pour les enfants les espaces et les moyens permettant d’accueillir des activités, des services et des expositions interactives, qu’il appartiendra à l’équipe en charge de la jeunesse de lier à la documentation. Une surface de 1 200 m² paraît nécessaire aux objectifs.
Ce projet :
- participe du « modèle lyonnais » en offrant une réponse originale à la question : qu’est-ce qu’une bibliothèque centrale pour la jeunesse ? (Ce n’est pas une bibliothèque de quartier au sein de la bibliothèque centrale pour adultes…) ;
- offre un but naturel aux sorties en famille et contribue donc à attirer un des publics cibles ;
- contribue à placer la bibliothèque au cœur d’une coopération centrée sur les enfants et à pérenniser la fédération d’un grand nombre des principaux acteurs et équipements culturels de la ville (et qui intéresse d’ores et déjà ces équipements) sur la thématique de la création contemporaine, fédération initiée par RéCréation.
On peut ici préconiser en guise de conclusion un nécessaire recentrage des problématiques jeunesse en les faisant sortir d’une périphérie professionnelle pour les placer au cœur des interrogations politiques du métier. •
Novembre 2012