Catalogues en devenir : nouveaux usages, nouveaux outils ?

Marie-Pierre Roux

Proposée par Médiadix, cette journée d’étude stimulante, qui s’est tenue le 26 juin à Saint-Cloud, a permis une réflexion sur l’avenir des catalogues et leur évolution indispensable face à de nouveaux usages. Elle a été l’occasion de faire un point sur l’impact du web social dans les bibliothèques, des nouveaux usages qu’il induit et des évolutions possibles sur les catalogues. Des professionnels venus d’horizons différents ont brossé un tableau extrêmement attrayant de l’Opac (Online Public Access Catalog) du futur.

Se sont succédés à la tribune Lionel Dujol, responsable de médiation numérique pour les médiathèques du Pays-de-Romans, Corinne Leblond, directrice du service commun de la documentation de l’université d’Artois, puis Isabelle Westeel et Juliette Guillemoteau, respectivement chef de projet à la Direction de la culture du conseil régional Nord-Pas-de-Calais et responsable de l’informatique documentaire à la bibliothèque municipale de Lille. L’après-midi, la parole fut donnée à Jérôme Pouchol, chef de projet Koha à la médiathèque intercommunale Ouest-Provence ainsi qu’à Françoise Leresche, chef du pôle modélisation fonctionnelle au département de l’Information bibliographique et numérique de la Bibliothèque nationale de France.

« Transformer la recherche experte en recherche simple »

Le web 2.0 et les outils collaboratifs au service des catalogues, tel fut l’objet de la première intervention. Parfois suspect aux yeux des bibliothécaires, le web 2.0 propose néanmoins de nombreux services. Grâce au système « pro-am » par exemple, espace partagé entre professionnels et amateurs, on peut dire qu’il s’inscrit absolument dans le web social. Au niveau de la recherche bibliographique, les catalogues du web 2.0 rendent possibles la recherche à facette, la recherche suggérée ou encore les rebonds sur le Sudoc (Système universitaire de documentation) ou sur Google Books ; fils RSS et barre d’outil personnalisée enrichissent les contenus et améliorent l’ergonomie. La bibliothèque 2.0 n’est pas seulement fondée sur la technologie mais sur de nouveaux usages : elle doit « proposer au lecteur de trouver ce qu’il ne cherche pas ». On peut être plus réservé quand il s’agit de recommandation statistique dans le style d’Amazon (« les lecteurs ayant emprunté ce livre ont aussi emprunté ») ou de la pertinence des commentaires.

Visual Catalog  1 est un outil en cours d’expérimentation au SCD de l’université d’Artois. On peut légitimement le définir comme un Opac guidé. Trois modules d’interrogation sont accessibles (titre, mot sujet ou indice Dewey). Les trois listes textuelles sont interdépendantes et communicantes. La navigation permet d’explorer la Dewey sans aucune saisie de la part du lecteur. Celui-ci navigue alors en simples clics, et peut obtenir en parallèle une localisation virtuelle des documents sur les différents sites. Le Visual Catalog devient un moyen pour le lecteur de s’approprier la classification et de comprendre la subtilité de l’indexation. Au final, une enquête révèle que 60 % des usagers interrogés considèrent que la Dewey est utile et 67 % d’entre eux estiment que le Visual Catalog leur a permis de comprendre la classification : un succès !

Koha, un « don  2 » du ciel ?

400 bibliothèques utilisaient Koha en 2006, elles sont aujourd’hui 1 200… Ce développement exponentiel s’explique en partie par son adaptabilité à des établissements de tout type et de toute taille, mais également par la grande souplesse qu’il offre. Il est complété par le portail Typo 3. Ces deux produits offrent toutes les fonctionnalités de la bibliothèque 2.0 : fils RSS personnalisés, facettes, nuages de tags, de sujets, accès aux contenus enrichis d’Amazon. Le lecteur peut même parcourir l’étagère virtuellement ! Centré sur l’utilisateur, c’est aussi un outil collaboratif qui implique les bibliothécaires. En effet, dans le cas de la médiathèque intercommunale Ouest-Provence, ce sont eux qui participent à l’évolution fonctionnelle du logiciel. Il n’est plus nécessaire d’être informaticien pour garantir un SIGB (système intégré de gestion de bibliothèque) de qualité. Forts de ce constat, ils seront bientôt en mesure de proposer à la communauté un module acquisition. Le choix de l’open source est une valeur ajoutée, mais c’est, avant tout, un état d’esprit.

« Une seule page avec des contenus dynamiques », voilà comment Darlene Fitcher (citée par Lionel Dujol) définit le blog de bibliothèque. Il offre des services en ligne dont ne disposaient pas les Opac auparavant : des commentaires, des fils RSS, une appréciation. La démarche est nouvelle, c’est à partir d’une recherche de contenus que l’on bascule ensuite vers le site de la bibliothèque. « Les bibliothèques se doivent d’étudier et comprendre ces nouveaux outils, sans céder aux effets de mode et autres sirènes technophiles et conserver un regard critique. Elles pourront ainsi poursuivre leurs missions pédagogiques de sélection et d’organisation des connaissances  3. »

Un renouvellement de la réflexion catalographique voit le jour. L’adoption de RDA (Resource Description and Access) ou du modèle FRBR (Functional Requirements for Bibliographic Records) représenterait une avancée remarquable pour faire évoluer les catalogues vers le web sémantique. Évolution sur laquelle l’ensemble des professionnels s’accordent, mais qui suppose une transformation profonde de la façon de concevoir la description catalographique.