47e congrès de l’ADBU. Lille – 17-19 octobre 2017

Ouvrir les bibliothèques à la recherche (et réciproquement)

Pierre-Yves Cachard

Le 47e congrès de l’ADBU 1 se tenait cette année à Lille, à LILLIAD 2, lieu emblématique des interrogations portées par cet événement, qu’il s’agisse de la question des services aux chercheurs – thème de la journée d’étude cette année – comme de celle de l’ouverture, au sens large (des horaires à l’open access), thème retenu pour une matinée politique des plus stimulante.

Une association active

La première journée, traditionnellement consacrée aux actualités, bilans et perspectives de l’association et de ses commissions permanentes, a confirmé le rôle croissant de l’ADBU parmi les acteurs de la politique de l’IST en France, un développement qui semble logique et nécessaire, après la transformation du paysage de l’enseignement supérieur en France (mise en place de la LRU, fusions d’universités et d’écoles). Christophe Péralès 3 et les membres très actifs du Conseil d’administration ont pu rappeler, cette année encore, les démarches importantes de lobbying menées par l’association auprès des principaux opérateurs de l’enseignement supérieur public en France. L’ADBU nourrit aussi la réflexion et les stratégies des bibliothèques universitaires grâce aux travaux de ses commissions permanentes, et leur implication forte dans l’organisation du congrès annuel et de différentes journées d’étude.

Pierre Carbone 4 a ensuite présenté les résultats d’une étude menée conjointement par l’IGB avec l’IGAENR, consacrée au parcours et carrières des conservateurs de bibliothèque 5 ; il a aussi annoncé les prochaines études thématiques qui seront menées par l’IGB. Yves Alix a présenté l’état d’avancement de la réflexion de l’ENSSIB, avec le soutien inattendu de Samantha Fox pour un très beau final touchy revival 80’s.

Les bibliothécaires, acteurs de la recherche

Comme chaque année, c’est bien sûr la journée d’étude 6 qui a été l’objet de toutes les attentions, dans un format parfaitement rythmé et pensé par Jérôme Poumeyrol 7 et Isabelle Eleuche 8. Si l’appui à la recherche fait partie des missions prioritaires confiées aux services communs de documentation, force est de constater que la complexité toujours plus grande du paysage de la recherche en France et les évolutions ou tensions apparues ces dernières années autour des enjeux juridiques et économiques de l’édition scientifique ont quelque peu distendu les relations entre les laboratoires, les directions de la recherche et la documentation.

Pour autant – cette journée d’étude aura permis de le rappeler brillamment – les initiatives, qui ne manquent pas, impactent fortement l’organisation même des bibliothèques académiques et offrent aujourd’hui de nombreuses opportunités pour réorienter une partie des activités documentaires vers des coopérations innovantes avec les chercheurs.

Nécessité d’une organisation et de moyens à la hauteur des enjeux

Lionel Montagne, Vice-président en charge de la recherche au sein de l’Université Lille 1, a ouvert la journée du 18 octobre en rappelant que la nouvelle frontière scientifique de notre époque reste le fonctionnement du cerveau humain, ce qui pouvait être lu et vu comme le thème même de cette journée de réflexion.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Après la présentation de la journée par Isabelle Eleuche, les interventions de Wolfram Hortsmann 9 et Arjan Schalken 10 ont offert deux exemples impressionnants d’établissements étrangers qui ont repensé leur organisation à l’aune des services d’appui aux chercheurs. De ces présentations très efficaces, nous retiendrons bien sûr, et comme souvent, l’écart qui existe entre les moyens et les modes d’organisation de la documentation scientifique à l’étranger et ceux qui caractérisent aujourd’hui encore les ressources documentaires et humaines à disposition de nos établissements. L’exposition claire des enjeux et des solutions apportées durant ces deux interventions a permis de mettre en lumière une nouvelle forme d’organisation, centrée sur le cycle de vie d’une publication scientifique.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Le poids de l’open access et de la métrique dans ces nouvelles activités a confirmé qu’une politique d’appui à la recherche suppose des moyens financiers et humains renouvelés, pour parvenir à une offre de service professionnelle et pertinente, permettant d’accompagner les chercheurs dans leurs pratiques. Wolfram Hortsmann a illustré qu’avec 2% de tâches nouvelles chaque année, il faudrait 25 ans pour parvenir à changer 50% des tâches d’une bibliothèque ! Pour repenser l’activité d’une bibliothèque dans un cycle de 10 ans, il faudrait alors, selon lui, parvenir à changer au moins 5% des tâches chaque année, ce qui confirme l’importance de l’accompagnement au changement et de la formation tout au long de la vie.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Pour Arjan Schalken, la mise en œuvre d’un service de soutien aux activités de recherche repose sur des interactions permanentes avec les chercheurs, et nécessite des feed backs réguliers (outils de contrôle, tableaux de bord, etc.) et le développement de compétences solides en management de projet, en community building, en connaissances juridiques et en data visualisation. Des recrutements extérieurs aux profils documentaires semblent dès lors impératifs.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Fouille de données et corpus numériques : une perspective française

L’intervention d’Emmanuelle Bermès 11 constituait une articulation parfaite avec les études de cas présentées l’après-midi. Le projet BNF DSR - Corpus vise à préfigurer un service de fourniture de corpus numériques à destination de la recherche, et à fournir aux chercheurs des outils pour les analyser. Ce projet se déploie sur trois années d’expérimentation suivies d’une année de bilan, et porte sur trois corpus distincts :

-Gallica (4,5 millions de documents)

-Les archives de l’Internet (793 To de données)

-Les métadonnées (plus de 20 millions de notices autorité et bibliographiques 12)

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

À partir de ces ensembles de données – qui posent des problèmes techniques et juridiques –, Emmanuelle Bermès a présenté trois approches différentes : le corpus abordé comme source (exemple avec le projet Europeana Newspaper 13), comme sujet d’expérimentation (exemple avec le projet porté par le laboratoire ETIS autour d’une analyse sémantique) et enfin comme interface, à travers le projet « Le devenir en ligne du patrimoine numérisé : l’exemple de la Grande Guerre 14 », mené avec le labex « Les passés dans le présent ».

Ces différents exemples montrent que la relation entre la BnF et les chercheurs présente une vraie diversité de situation, en fonction des profils et attentes de ces scientifiques : certains chercheurs maîtrisent les sources mais attendent de la BnF les compétences techniques qui leur font défaut, d’autres au contraire ont des compétences solides dans les outils, mais ont besoin de jeux de données brutes à traiter pour pouvoir produire leur recherche. Cette relation se complique parfois du fait que les attentes des professionnels de la documentation et des chercheurs peuvent diverger. Ainsi, la BnF attendait de la coopération avec ETIS une facilitation de l’indexation des images, préoccupation absente des objectifs de l’équipe scientifique.

Il est trop tôt pour dire si ce projet pilote aboutira à la création d’un laboratoire Bnf pour l’étude et l’analyse de corpus numériques, mais il pose toutefois des questions très similaires aux exemples étrangers, autour des choix organisationnels, des aspects juridiques, des questions d’infrastructures techniques et de ressources humaines.

Publication scientifique et bibliothèques : études de cas et mise en pratique

Des interventions plus courtes et très concrètes ont permis, l’après-midi, de mettre en lumière différentes réalisations et coopérations réussies entre bibliothèques et chercheurs. Ces projets ont en commun de s’attacher à la gestion des données de la recherche, s’intègrent dans une chaîne éditoriale qui leur préexistent ou relèvent de leur propre initiative. L’ensemble des intervenants ont mis en avant les compétences propres et singulières des bibliothécaires dans la distribution des rôles.

Excellents sprinteurs, Olivier Legendre 15 et Jérôme Poumeyrol ont tout d’abord présenté en un tandem parfait leur activité de soutien à la création de revues en open access. Si Clermont a opté pour une démarche expérimentale proposant trois plateformes différentes de publication, Bordeaux a implémenté OJS 16 et accompagne cinq revues. De ces deux projets, il ressort que, si le rôle moteur des bibliothèques dans la mise en œuvre de ces chaînes de publication a permis de nouer d’excellentes relations avec les chercheurs impliqués, les deux dispositifs semblent encore fragiles et nécessitent des temps de traitement importants.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Philippe Chevallier 17 a présenté un travail sur l’analyse des logs de connexion de Gallica, mené par Bibli-Lab 18. Considérant que les enquêtes traditionnelles en ligne ne permettent pas d’étudier les usages furtifs de cette ressource, cette étude s’attache à identifier des « clusters » (14 sessions-types ressortant de l’analyse) et permet d’évaluer également l’impact des actions de médiation sur le niveau de consultation et les types de documents consultés. Il reste à interpréter ces classifications de logs. Philippe Chevallier a insisté sur le travail de documentation, de nettoyage et d’organisation encore nécessaires pour une exploitation exhaustive et parlante de ce corpus d’étude.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Le projet Corpus Web 19, porté par Sciences Po Paris, est mené en partenariat avec le médialab de Sciences Po. Il vise à constituer des corpus qui soient à la fois des objets documentaires et des outils de recherche, sur lesquels les chercheurs puissent s’appuyer pour explorer et exploiter les données mises à disposition. Cynthia Pedroja, chef de projet « Gestion des données de la recherche » au sein de cette institution, insiste sur l’aspect expérimental d’une démarche qui a permis de constituer et de traiter quatre corpus depuis 2012, centrés sur les grands rendez-vous électoraux français mais aussi les changements climatiques. La démarche comporte trois étapes : sélectionner les sites web pertinents à partir de l’outil Hyphe 20, catégoriser les sites retenus et qualifier les acteurs importants de la thématique, et, enfin, exposer le résultat à travers une cartographie exploitable par les internautes (datavisualisation via les outils Gephi 21 et Sigma 22). Pour Cynthia Pedroja, il s’agit de donner ainsi de la profondeur aux données 23, en impliquant des profils et des compétences complémentaires : ingénieurs informatiques spécialistes du web et des méthodes numériques, bibliothécaires et chercheurs spécialistes des sujets retenus.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Présenté par Claire Mouraby 24, Fonte Gaïa (le Gai savoir du XXIe siècle) est une bibliothèque numérique des études italiennes. Ce projet, qui doit durer neuf ans, consiste à numériser, diffuser et enrichir les éditions numériques du patrimoine d’intérêt italianiste conservé en France. La construction de cet objet d’étude doit permettre de favoriser et de faciliter la coopération des bibliothécaires avec les chercheurs. Pour Claire Mouraby, la richesse d’un tel projet naît d’un double paradoxe : les bibliothécaires doivent se recentrer sur leurs compétences et en lâcher le pilotage, car cela apporte légitimité et confiance auprès des chercheurs ; mais c’est aussi l’image de stabilité et de conservatisme des services documentaires qui font d’une bibliothèque le partenaire idéal pour un projet innovant.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

François Calais 25 présente ensuite un cas plus atypique : il est personnellement intégré dans une chaîne éditoriale mise en place par le Cochrane Lung Cancer Group 26, en qualité de Trial Search Coordinator. Sa mission est de fournir aux auteurs de revues systématiques un corpus exhaustif d’essais cliniques, pour garantir la complétude de la méta-analyse réalisée par les chercheurs. De cette expérience, il ressort que le spécialiste de l’information est reconnu comme pair et acteur à part entière de la chaîne éditoriale de production d’une revue scientifique. Mais cela induit deux pré-requis importants : la fonction nécessite des connaissances de base en médecine et une disponibilité importante en temps, la charge occasionnée pour chaque revue publiée étant de l’ordre de deux à trois jours.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Il revenait logiquement à Jérôme Poumeyrol de conclure cette session d’études de cas, par un retour d’expérience de l’université de Bordeaux permettant de mieux mesurer le rôle que les bibliothèques peuvent aujourd’hui jouer dans l’appui au pilotage scientifique. Le Pôle Recherche, International, Partenariats et Innovation (RIPI) 27 mène des enquêtes sur commande pour mesurer l’activité des réseaux et l’impact scientifique au sein de cette université. À partir d’une réflexion entamée en 2013, et grâce à l’acquisition d’outils d’analyse, ce service d’appui aux chercheurs, intégré à la direction de la documentation, répond à des demandes d’évaluation émanant de l’interne comme de l’externe, dans le but d’accompagner les chercheurs dans le suivi des publications, mais aussi de repérer les forces émergentes (signaux faibles) et les collaborations pertinentes. Une douzaine d’études ont été livrées à ce jour. Jérôme Poumeyrol a présenté les grandes étapes d’une étude-type, qui implique, là encore, la coopération de compétences diverses, sachant que sont nécessaires pour les bibliothécaires une expertise dans certains outils, notamment Excel, ainsi qu’une bonne connaissance des enjeux de l’IST et de la métrique.

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Pierre-Yves Cachard 2017 pour le BBF

Ouvrir ?

La matinée politique 28, conclusion de ce 47e congrès, a permis de donner toute son ampleur au thème de l’ouverture. Après quelques éléments de contexte présentés par Christophe Péralès, une table ronde animée brillamment par Paul Thirion, directeur de la bibliothèque de l’Université de Liège, associait Marin Dacos 29, Simon Larger 30, Sylvie Robert 31 et Julien Roche 32. L’occasion, pour Sylvie Robert, de rappeler tout d’abord les grands enjeux ressortant de son rapport de 2015, lequel visait à rappeler que ces équipements – qui font encore l’objet de nombreux projets de construction – sont au cœur de multiples enjeux sociétaux, car, quel que soit leur statut ou territoire, ils sont devenus des lieux de vie tout autant que des espaces documentaires. Pour la sénatrice, la question est en fait moins celle de l’ouverture du dimanche que d’une meilleure adéquation de nos équipements avec les temps libres des citoyens ; elle voit dans les bibliothèques des lieux de démocratie moderne, citant l’exemple des Champs Libres à Rennes, avec son espace du citoyen. Relayée par d’autres intervenants, elle a rappelé que cette problématique n’est pas l’apanage des bibliothèques publiques, et qu’elle se retrouve tout autant du côté des bibliothèques universitaires, avec un enjeu autour de la vie étudiante.

Pour Simon Larger, il est essentiel de relier cette question de l’ouverture avec celle du développement du numérique, qui influe sur les usages. Julien Roche a rappelé à ce propos qu’une construction ne se pense qu’avec ses services associés, et que l’ouverture implique la disponibilité d’autres services, comme la restauration, la logistique et l’informatique. Un tiers lieu est un ensemble de zones de confort qui vont bien au-delà des collections et qui interrogent l’équipement et les services à mettre à disposition sur des horaires élargis. Marin Dacos a rappelé que la situation matérielle de certains étudiants donne une responsabilité particulière aux universités pour la mise à disposition de bibliothèques qui offrent tous les équipements et moyens de connexions nécessaires au confort de travail.

Dans un contexte de hausse démographique importante du public étudiant, Paul Thirion a noté que la France avait encore des efforts importants à produire pour une réflexion rénovée sur la médiation documentaire, mais aussi des efforts de construction. Simon Larger a évoqué les préconisations du rapport de Philippe Marcerou 33 ; il a avoué que ces préconisations lui ont donné le vertige, lorsqu’il les a converties en montants d’opération immobilière. Pour lui, l’approche doit être plus globale, pour intégrer la dimension du numérique et l’échelle des campus universitaires, et non uniquement celle des lieux documentaires. Paul Thirion a pointé le fait que, par nature, la stratégie immobilière est toujours en retard par rapport à la réalité démographique. Sylvie Robert a évoqué dans ce contexte l’importance de la réversibilité dans les projets de constructions publiques, elle souhaiterait plus d’expérimentation autour des ouvertures partielles et de l’autogestion de certains espaces par les étudiants.

Sans transition, mais était-elle possible, Paul Thirion a ensuite abordé la question de l’open access, qui, en France, semble progresser beaucoup moins vite que celle de l’ouverture des bibliothèques, par une interrogation sur le fait que l’ouverture des données ne soit toujours pas une obligation. Pour Marin Dacos, aujourd’hui, des leviers existent, qui vont simplifier les choses, mais cela prend au final plus de temps qu’un projet de construction. De nouveaux modèles émergents, comme le modèle auteur-payeur (APC 34), troublent encore un peu plus le paysage. Marin Dacos estime que ce dernier modèle pose des problèmes éthiques sérieux, soulignés par l’UNESCO, d’où l’importance de l’appel de Jussieu 35, en faveur d’une bibliodiversité. Pour lui, il faut changer d’écosystème et reprendre le contrôle, en investissant en faveur des données ouvertes. Les revues doivent par exemple déclarer leur indépendance, ce qui suppose de les accompagner. Seules des initiatives volontaristes émanant des établissements pourront modifier radicalement les modèles éditoriaux actuels : il faut cesser d’acquérir pour soi, et acquérir pour le collectif. Selon sa conclusion, les acteurs du changement seront locaux, un big deal national s’avère toujours trop complexe à réaliser.

Quelle navigation pour les bibliothèques ?

Le congrès de Lille s’est achevé sur une intervention d’Alain Abécassis 36, représentant la ministre Madame Frédérique Duval, et une nécessaire synthèse de Christophe Péralès. Alain Abécassis a notamment insisté sur la transformation de la Bibliothèque Scientifique Numérique (BSN) en Conseil pour la Science Ouverte – Marin Dacos en est le Vice-Président – sur le rôle que peuvent jouer les bibliothèques dans les opportunités des appels à projets diffusés par le Ministère, et sur le fait que les mutualisations et les initiatives n’ont pas toutes vocation à émaner du MESRI. Christophe Péralès a énuméré quelques grands axes de réflexion et d’actions pour les bibliothèques universitaires, en écho aux interventions du congrès : la valeur des bibliothèques, une offre de services repensée autour des nouveaux profils étudiants, une démarche volontariste en faveur de l’open access qui s’inscrit naturellement dans cette volonté collective d’accompagner les chercheurs par des initiatives fortes telles que celles liées au TDM 37.

En clôture de ce congrès de Lille très réussi, rendez-vous a été donné aux congressistes à Brest (25-27 septembre 2018) pour le 48e congrès de l’ADBU.