Editorial

Anne-Marie Bertrand

L’adolescent, cet inconnu ? Pourtant, ne croyons-nous pas tout savoir sur cet adolescent, ce « jeune » dont les médias ne cessent de relater les pompes et les œuvres, les faits d’armes et les méfaits ? La culture juvénile ne tient-elle pas le haut du pavé commercial, artistique et esthétique, des baskets au Mac-Do, des tags au Loft, des musiques « actuelles » au Coca, du streetwear au verlan ?

Mais, précisément, ces discours et ces images dont nous sommes imprégnés – jusqu’à plus soif – ne cachent-ils pas la réalité de la vie adolescente ? L’évolution physique et psychique, l’inquiétude, la quête d’identité, les preuves à faire, le courage à afficher, le manque de confiance en soi, la recherche d’approbation de ses pairs, le besoin de se distinguer de ses parents, la pression scolaire, la dépendance économique, l’incertitude : pas facile d’être jeune.

La culture jeune, qui existe au moins comme objet transactionnel, est peut-être le dernier avatar des cultures populaires. Populaire mais désormais légitime, voire dominante : la culture de masse s’en est saisie pour créer la nouvelle esthétique de notre temps, les nouvelles normes culturelles, au sens anthropologique. En ce sens, la culture « humaniste », lettrée, ne serait plus une culture dominante. C’est du moins l’analyse d’Olivier Donnat : « La montée en puissance des valeurs et de l’image de la jeunesse à travers l’économie médiatico-publicitaire a placé la culture sous la menace permanente d’être frappée de ringardisme : à mesure que l’univers culturel des jeunes gagnait en autonomie, qu’une certaine image de la modernité se généralisait autour des nouvelles technologies, ce qui était classique était menacé de verser dans le ringardisme dès l’instant où une touche de modernité ne pouvait lui être apportée. »

Ainsi, l’adolescent serait l’avenir de l’homme ? La culture jeune l’avenir de la culture ? Et, plus précisément, la lecture adolescente l’avenir de la lecture adulte ? Les pratiques de lecture des jeunes, en effet, semblent bien annonciatrices (ou révélatrices) de nouvelles pratiques de lecture adultes, fragmentées, utilitaires, distantes, pour tout dire « ordinaires », suggère Christine Detrez, qui poursuit : « La suprématie de la lecture savante sur les autres pratiques de lecture n’est plus affirmée nulle part. » Ainsi, l’adolescent serait l’avenir de l’homme ? La culture jeune l’avenir de la culture ? Et, plus précisément, la lecture adolescente l’avenir de la lecture adulte ? Les pratiques de lecture des jeunes, en effet, semblent bien annonciatrices (ou révélatrices) de nouvelles pratiques de lecture adultes, fragmentées, utilitaires, distantes, pour tout dire « ordinaires », suggère Christine Detrez, qui poursuit : « La suprématie de la lecture savante sur les autres pratiques de lecture n’est plus affirmée nulle part. »

La culture jeune comme exotisme, comme miroir, comme avenir et comme enjeu…