Éditorial

Anne-Sophie Chazaud

Rien ne semble plus éloigné dans les représentations collectives que les univers policiers et bibliothécaires… On imagine d’un côté un joyeux foutoir un peu vintage, sentant le Havane bon marché, la Gauloise, le café et la transpiration d’hommes épuisés par des nuits de filoche, et de l’autre un bureau bien ciré sur le parquet craquant dans un silence sépulcral sur lequel régnerait une vieille dame portant lunettes et chignon, naturellement revêche…

Une fois dépassés les stéréotypes (qui ont toutefois la vie dure), on s’aperçoit que les points de rapprochement sont bien plus nombreux qu’il n’y paraît… Se mouvoir dans le maquis d’une collection, dans la forêt informationnelle, requiert des compétences d’enquêteur tandis qu’une grande partie de l’efficacité policière repose sur le tri, la classification, l’archivage et le traitement d’informations en apparence anodines mais dont l’examen minutieux et intelligent permettra de révéler les vérités initialement invisibles. Dans les deux cas, c’est une affaire de flair et de méthode.

Le genre policier, quant à lui, d’abord relégué dans la catégorie des « mauvais genres » littéraires, a conquis peu à peu ses titres de noblesse et sa place au sein des bibliothèques. Son succès auprès des publics, de tous âges et des deux sexes (ce qui n’est pas si courant), n’est plus à démontrer. Sa place dans le secteur éditorial, dans les collections et, partant, dans les budgets d’acquisition, mais aussi en termes d’action culturelle et d’événementiels, est désormais fondamentale et parfaitement légitime, d’autant qu’une réelle qualité narrative y est désormais associée. Retour en quelques étapes sur une enquête du BBF…