Les outils et pratiques collaboratifs
Cécile Touitou
L’objectif de cette journée, organisée à l’INHA le 17 juin 2013 par le secteur Recherche de l’ADBS, était de fournir un panorama des outils et des pratiques collaboratifs mis en place principalement dans le monde de la recherche et de l’entreprise. L’accent était volontairement porté sur l’aspect opérationnel de la mise en œuvre de ces outils innovants. Pour illustrer le propos, les animateurs ont, dès le début des échanges, ouvert un Framapad, outil permettant de rédiger en direct un compte rendu collaboratif des interventions 1.
Les présentations ont débuté par l’intervention d’Emmanuelle Corne (Éditions de la FMSH) et de Pierre Mounier (Cléo) qui proposaient un retour sur l’expérience d’édition collaborative après le ThatCamp 2 2012 (comprendre : The Humanities And Technology Camp), « une non-conférence sur les Digital Humanities ». L’idée était de fabriquer en un temps record les actes de ces journées (les « non-actes de la non-conférence »), en incitant les participants à contribuer à la rédaction du compte rendu. Les orateurs ont plaidé pour les conditions exceptionnelles que permettent de réunir ces journées et l’émulation créatrice qui jaillit de cette dynamique… Si on a pu être sceptique sur les modalités de rédaction sans feuille de route ni consignes, la consultation du résultat est assez convaincante 3. Il est intéressant d’avoir en tête l’existence de ces outils qui peuvent effectivement permettre la composition en un temps record de travaux collaboratifs en profitant de la présence dans un même lieu de personnes réunies autour d’un même objectif.
Claire Séguret (musée de Cluny) et Adrienne Alix (Wikimédia) ont ensuite présenté comment le musée s’est engagé dans un projet qui a fédéré les équipes autour de la rédaction de contenus dans Wikipédia. Les intervenantes ont insisté sur la force de ce projet d’établissement qui visait d’abord à créer une synergie entre les personnels et les équipes au sein du musée. Des ateliers d’initiation à l’écriture sur le web et à la composition d’articles sur Wikipédia ont permis aux équipes pluridisciplinaires de passer du statut de lecteur à celui de contributeur.
La présentation de Sophie Mahéo (Inria 4) a permis à l’assistance de mesurer le potentiel d’une véritable gestion collaborative de la veille, et l’intérêt de l’animation de cette communauté professionnelle experte dans une organisation qui compte huit centres de recherche autonomes répartis sur tout le territoire français (avec 1 800 chercheurs de l’institut et près de 1 600 universitaires ou chercheurs d’autres organismes associés). Sophie Mahéo a montré quelle a été la difficulté pour le community manager qu’elle est (qui dit pourtant qu’on ne manage pas les communautés, mais qu’on les anime !) de repérer, rassembler, animer les multiples comptes des collègues chercheurs sur les réseaux sociaux (Flickr, Twitter, Pinterest, Slideshare) qui avaient depuis longtemps l’habitude de publier et de partager le fruit de leurs recherches auprès de leurs réseaux professionnels et privés. Ces comptes étaient parfois institutionnels, semi-institutionnels ou personnels. L’animatrice de la communauté Inria a donc choisi de repérer les agents qui faisaient de la veille sur Twitter afin d’animer cette entité de veilleurs déjà existante, tout en gardant à l’esprit que les communautés sont d’abord des communautés de métier (il y a donc maintenant un animateur de communauté dans chaque centre et par communauté de métier). La prise de parole libre de ces agents n’a pas été sans créer des tensions au sein de l’institution pour qui il n’est pas facile de gérer la dilution de sa communication vers l’externe… jusqu’à ce que le président ait créé son propre compte. Il a fallu initier une habitude chez les chercheurs d’un relais de leur parole par le service de communication qui a mis en place des interfaces et des outils permettant de pérenniser ce qui était échangé sur Twitter ; organiser des Live tweets ; en publier les résultats ; travailler sur la coordination et la reéditorialisation des contenus émis et coordonner la ligne éditoriale. Un travail de facilitateur préférant le terme de « communauter » à celui de « communiquer ».
Christine Sireyjol, de l’Inra, a présenté le montage et la gestion du projet de veille collaborative AgriBEA avec la plateforme de veille Digimind. Antonio Mendes da Silva a exposé quelle était l’utilisation des outils collaboratifs dans le cadre d’un laboratoire InVisu du CNRS (usages des sources bibliographiques avec Zotero et Mendeley dans le cadre d’un programme européen COST). Dinah Galligo (bibliothèque de Sciences Po) a fait part des difficultés qu’elle rencontrait pour entraîner ses collègues dans son activité de veille. Enfin, Albert Grego et Maylis Bayvet se sont partagé la parole autour du thème « Regards croisés d’un knowledge manager juridique et d’un consultant sur l’utilisation des outils collaboratifs dans les directions juridiques » et ont évoqué les étapes qui ont abouti à la création d’un service de veille juridique sans papier à TF1. •