Le métier de libraire. I La gestion de stock
Paris : Cercle de la Librairie, 2008, 143 p., 24 cm
ISBN 978-2-7654-0964-9, 25 €
Paris : Cercle de la Librairie, 2006, 235 p., 24 cm
ISBN 2-7654-0933-1, 30 €
On pourrait se demander, à juste titre, pourquoi traiter d’un manuel destiné au métier de libraire dans une revue destinée aux bibliothécaires ? L’argument n’est pas infondé, néanmoins la proximité professionnelle, dont nous ne cessons de rappeler l’évidence, plaide en faveur d’une telle recension.
Le métier de libraire. I La gestion de stock
De quoi s’agit-il ? D’un ouvrage très pratique, traitant pour ainsi dire de problèmes de boutique. La gestion du stock, la trésorerie, le transport, l’achat, la réception, l’office, les retours, les taux de rotation, les publics, le lectorat. Autant dire : un cours destiné aux conservateurs.
L’ouvrage est en fait en deux volumes, tout à fait distincts : le premier, « La gestion de stock », et nous pourrions, nous bibliothécaires, nous en nourrir pour mieux évaluer comment calculer un taux de rotation, comment, pour le coup, remplir ces fameux tableaux de bord qui sont l’alpha et l’oméga des contrôleurs de gestion, et Dieu sait qu’on les aime, reste très tourné vers la technique professionnelle de vente. Il est indispensable pour tout libraire, qui, frais émoulu, et sorti d’un pimpant IUT (institut universitaire de technologie) se lance dans ce métier qui, parfois, confine au sacerdoce. Les règles énoncées sont simples et d’évidence : et pourtant, combien d’entre eux les applique ?
Le métier de libraire. II La production de l’assortiment
Le second volume nous concerne davantage puisqu’il traite de la production et de l’assortiment : en d’autres termes, de l’économie du livre. On sait depuis François Rouet que l’édition est une industrie de contenu : une industrie avec ses contraintes, qui sont, entre autres, celles de la vente, et de contenu, c’est-à-dire que, pour reprendre une formule usée jusqu’à la corde, le livre n’est pas un produit comme les autres.
Michel Ollendorf et l’équipe qu’il a réunie nous rappellent comment se constitue le prix du livre, qui est le seul produit dont le prix est fixé par le fournisseur, quelle est l’offre éditoriale aujourd’hui, type de maison d’édition par type de maison d’édition, genre par genre, convoquent une étude sur le lectorat, et abordent la question des enquêtes de satisfaction. Jean-Marie Ozanne, libraire, et Clarisse Normand, journaliste à Livres Hebdo (qui tente vainement de devenir notre concurrent), évoquent les réseaux de vente et « la distinction chez les libraires ».
Enfin est abordée l’épineuse question de l’assortiment, de la variété des publics et des animations en librairie. Ces terrains nous sont connus, et en même temps nous les fréquentons peu : la librairie est viable, a coutume de dire le délégué de l’ADELC (Association pour le développement de la librairie de création)… pourvu qu’on s’en occupe, qu’on suive l’évolution du lectorat, des pratiques d’achat et de lecture, et que le libraire sache, à tout moment, modifier un rayon, proposer un service supplémentaire, être attentif aux nouveautés : par exemple, l’ascension du poche, la baisse du livre de sciences humaines (encore que), l’irruption de certaines formes de littérature (adolescents, jeunesse, polars…), ou la pratique de l’achat en ligne. Le libraire fait un choix, y compris spatial, qui dicte sa clientèle. Elle lui est fidèle parce que son image globale ne se modifie guère : c’est la « distinction des libraires ». Il cherche à l’accroître. Son commerce est toujours en question. La comparaison est peu flatteuse à l’égard des disquaires (qui ont [presque] tous disparu), elle est éloquente et fort instructive pour les bibliothécaires : au fond, nous avons du stock, un lectorat, que nous devons accroître, nous organisons des « animations », bref, il n’y a que la pérennité de notre petite entreprise qui ne soit guère menacée à court terme.
Utilisons à bon escient ce travail intelligent, il devrait nous être fort utile. Et connaître le fonctionnement de son partenaire privilégié, obligé, c’est tout de même le minimum.