La bPI à l’heure de Facebook

Jeremy Jeanguenin

La Bibliothèque publique d’information du centre Georges-Pompidou donnait le 25 novembre 2008 rendez-vous aux professionnels des bibliothèques et du livre (à l’occasion de la présentation de Carel, les éditeurs électroniques étaient conviés) autour de trois tables rondes animées par des membres de l’équipe, agrémentées de visites coutumières de l’ensemble de ses ser-vices.

La première rencontre a consisté à présenter le nouveau site internet inter-actif et collaboratif de la BPI, ainsi que les étapes de sa conception. La deuxième problématique était celle de l’accessibilité et plus particulièrement de celle du lecteur handicapé. La journée s’est achevée sur un exposé des « chartes » développées à la BPI.

Introduite par Thierry Grognet, directeur de la bibliothèque, la journée, « temps de rencontre », se voulait placée sous le signe de ce qui fait la caractéristique de la BPI : une bibliothèque résolument moderne et pilote en matière de lecture publique en libre accès. L’esprit du décret de 1976 officialisant les missions de la BPI restait prégnant tout au long de la journée, au même titre que l’expression mitterrandienne au sujet de la BnF « bibliothèque d’un genre entièrement nouveau », qui fait toujours mouche. Dans un centre Pompidou dont Pontus Hulten  1 voulait qu’il fût panoptique, la BPI continue de confirmer cette vision dans ses actions.

Un site panoramique

C’est donc sur une présentation de la nouvelle mouture du site internet  2 que la journée a commencé. Attendue, la présentation du prototype du site s’est voulue assez convaincante, à travers les interventions de Marc Bouilloux et de Jérôme Villeminoz. Il s’agissait de s’adapter aux évolutions de l’internet 2.0, en jouant sur deux tableaux : ergonomie (graphismes, dynamique de la page) et mise à jour des contenus (approche transversale des ressources). L’ensemble des fonctionnalités et des outils intégrés à cette refonte massive a été particulièrement bien explicité, ainsi que la phase en amont du projet (établissement du cahier des charges, choix des prestataires), en termes de contraintes et d’exigences. Rappelons que Martine Blanc-Montmayeur, directrice de 1993 à 2001, avait porté à bras-le-corps le projet d’un site de la BPI dès 1995, et que le site subissait une deuxième refonte majeure en 2004.

L’enjeu est désormais de faire évoluer le site vers un web participatif, en conviant des contributeurs rédacteurs de différents niveaux. Pour cela, la logique d’une base open source, au-delà de l’aspect financier, renvoie à la possibilité d’une solidarité et d’un partage d’expériences dans la communauté de rédacteurs CMS (Content Management System). En outre, le choix d’une logique prestataire permet de se libérer d’évolutions obligatoires non désirées.

Les intervenants ont rappelé l’étude sérieuse à laquelle a été soumise cette nouvelle mouture, puisque la société Anyware a été retenue pour la gestion des contenus open source (logiciel Améthys) et la société Oliance pour une prestation de conseil en ergonomie. L’évolution majeure devrait être l’intégration de LibraryFind  3, moteur de recherche fédéré puissant pour les portails de bibliothèques. Le nuage de tags, quant à lui, pose des soucis techniques de masse critique à analyser : c’est donc un work in progress.

Par ailleurs, le site de la BPI devrait proposer rapidement un module d’identification « Mon compte » qui permettra à chacun de gérer ses abonnements aux fils RSS, à la lettre d’information ainsi qu’aux alertes de manifestations.

Enfin, pari audacieux, la BPI a lancé sa page officielle sur le réseau social Facebook  4 ; elle propose un module de recherche catalogue directement intégré à sa page Facebook, ainsi que des outils de présentation interactifs du catalogue et des collections.

Faut-il rappeler en passant que l’implication de la cellule « Lecture handicap » a été déterminante dans l’élaboration de ce prototype ?

Travail collaboratif

Le deuxième temps de la journée s’articulait autour de la problématique « comment les outils participatifs améliorent-ils le travail collaboratif entre professionnels ? ».

Les responsables de la mission handicap (Sylvie Colley et Madjid Guitoune), ont rappelé leur rôle de veille professionnelle sur la lecture et le handicap, couronné par la mise en place du wiki AlphaBib  5. Ce dernier a pour mission de sensibiliser tant les lecteurs handicapés que la profession à l’accueil. La problématique du handicap a été totalement intégrée à la refonte du site de la BPI.

Annie Brigant, de la bibliothèque municipale de Grenoble, rapportait l’expérience modeste du web collaboratif autour de la manifestation « Le printemps du livre » : il s’agissait là aussi de créer une dynamique collaborative, inciter les professionnels et les lecteurs à émettre et à partager leurs critiques de lectures (en signant ou en préservant l’anonymat). Le bilan d’une cinquantaine de participations de lecteurs s’avère encourageant  6.

À l’« école des chartes »

Le troisième temps de la journée aura été celui des chartes  7, ces documents voués à « porter une action », dont Sophie Danis rappelait la valeur performative : un « guide », une « loi que l’on applique à soi-même ». La BPI a été pionnière en matière de chartes ; la première étant la charte documentaire élaborée à partir des statuts du décret de 1976 fixant ses missions et prérogatives (sa dernière révision est de 2008), dont Danièle Heller a dressé l’état des lieux. La deuxième charte est relative à l’exigence d’un niveau de qualité de service public (selon la Direction générale de la modernisation de l’État) : c’est la charte Marianne, dont la BPI est le premier bénéficiaire au sein du ministère de la Culture.

En dernier lieu, Philippe Charrier exposait l’exigence d’une charte d’action culturelle, afin d’unifier et de rendre cohérent le projet d’établissement, de « rendre visible » le projet culturel de la bibliothèque. Dernier point de l’action, et non des moindres : il s’agit de participer à la transformation du métier de bibliothécaire, « ni dépositaires, ni passeurs, mais acteurs », c’est-à-dire de s’affirmer comme des producteurs de contenus. Renvoi d’ascenseur au web 2.0 : bienvenue à la BPI branchée !