Formation à l’information : où en sommes-nous ?

8es Rencontres Formist

David Vivarès

Pour cette huitième édition, les Rencontres Formist ont proposé aux participants un programme ambitieux : réfléchir sur les évolutions et les changements intervenus, depuis dix ans, dans le domaine de la formation à la recherche d’information, et évoquer les perspectives d’avenir.

Sigles

C2i Certificat informatique et internet

CévuConseil des études et de la vie universitaire

FormistFormation à l’information scientifique et technique

IUFMInstitut universitaire de formation des maîtres

LMDLicence Master Doctorat

LolfLoi organique relative aux lois de finances

LRULoi relative aux libertés et responsabilités des universités

RGPPRévision générale des politiques publiques

SCDService commun de documentation de l’université

SDBISSous-direction des bibliothèques et de l’information scientifique, ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche

    L’heure des bilans

    Anne-Marie Bertrand, directrice de l’Enssib, a ouvert cette journée en décrivant la décennie écoulée comme celle du passage de l’ère des « missionnaires » à celle des « missionnés », preuve de l’institutionnalisation et de la pérennisation des formations à la recherche documentaire au sein des cursus universitaires.

    Frédéric Blin (SDBIS) a dressé un panorama des formations tenues dans les SCD, à partir des enquêtes annuelles d’activité et des contrats quadriennaux (État-établissement). La progression des formations s’est appuyée sur les réformes (loi dite « Bayrou », mise en place du LMD, plan pour la réussite en licence) et indique une augmentation régulière, tant des formations que des financements. F. Blin pointe cependant un « effet de seuil » : les bibliothèques sont-elles arrivées aux limites de leurs capacités de formation ?

    Or, dans l’évolution programmée de la réforme, le nouveau cadre administratif (depuis la Lolf, la LRU et la RGPP) implique désormais que le pilotage de la politique pédagogique et les crédits soient intégrés dans la logique globale du projet d’établissement de l’université ; là se situe sans doute l’enjeu capital pour les formations à l’information.

    Les deux retours d’expériences qui ont suivi, d’Yves Goubatian (bibliothèque de l’université Paris-Sud – XI) et de Marie-France Grouvel (directrice de la bibliothèque universitaire des Antilles et de la Guyane) ont apporté respectivement un éclairage sur leur activité, d’une part au sein du dispositif du C2i, et d’autre part sur la réalisation d’un tutoriel élaboré afin de répondre à l’éclatement géographique des publics à former. Ces deux expériences illustrent l’adaptabilité des bibliothécaires formateurs au contexte, et la nécessité de saisir les opportunités de partenariat avec les universités pour mener à bien les projets.

    Identifier les besoins et percevoir les évolutions

    L’enquête menée en Belgique francophone, et dont ont rendu compte Bernard Pochet et Paul Thirion  1, a permis de mettre en évidence le niveau de non-maîtrise des compétences par les étudiants primo-arrivants, grâce à une analyse statistique fine, qui démontre qu’il existe une marge de manœuvre importante pour la formation, tant est fort le décalage analysé entre les connaissances de départ et le niveau nécessaire en milieu universitaire (que ce soit sur les stratégies de recherche, l’exploitation des résultats, le plagiat, les outils spécialisés…).

    L’enquête menée par Ottilia Henriet (bibliothèque de l’université de Bretagne occidentale) a porté sur l’autre extrémité du parcours universitaire, pour étudier les besoins des doctorants, à partir de leurs compétences à l’entrée du doctorat. L’objectif de l’enquête était de permettre la future mise en œuvre d’un didacticiel dévolu aux doctorants.

    Ces deux enquêtes pointent ensemble vers la nécessité de construire les formations dans une continuité graduée de connaissances et de maîtrise des outils documentaires, tout au long des cursus.

    Annette Béguin (université Lille-III) a ensuite présenté l’Équipe de recherche en technologie de l’éducation (ERTé) qu’elle anime. Il s’agit d’un réseau de réflexion et de proposition, au sein d’une plate-forme collaborative, qui vise cinq objectifs : clarifier les enjeux institutionnels, identifier et définir les concepts clés, étudier les ressources cognitives sollicitées, identifier et observer les conduites des apprenants, modéliser les types de connaissances mobilisées. Le colloque ERTé (du 16 au 18 octobre 2008 à Lille) sera un moment de réflexion sur les métiers et les enjeux de la formation à l’information.

    La table ronde finale portait le titre : « La formation à l’information a-t-elle réellement évolué ? (objets, méthodes, moyens, modalités pédagogiques, contenus, supports)  2 ».

    Les interventions des participants ont permis d’apporter des réponses graduées à ces questions : si l’on manque d’une enquête complète sur les activités menées depuis dix ans, il est cependant clair que les formations ont progressé en quantité et en qualité dans les cursus, de la première année au doctorat. Mais les succès sont parcellaires, les partenariats avec les enseignants à consolider, et les pratiques doivent encore évoluer. Un plan d’ensemble de formation, cohérent et intégré à tous les niveaux des études scolaires et universitaires reste à constituer.

    On peut conclure des débats, à l’instar de Josef Herget, que le formateur devra désormais partir des pratiques réelles des usagers, pour y intégrer les éléments d’une méthodologie informationnelle mieux adaptée, et ne plus se centrer sur les seuls outils documentaires. L’évolution du réseau (pour l’instant web 2.0) et les nouveaux supports de socialisation de l’information (wikis, blogs, tags...) sont autant de points d’ancrage des pratiques d’où il importe désormais de partir, pour transmettre les éléments de maîtrise des outils, de problématisation et d’esprit critique – leur « transposabilité » – qui sont à la base des compétences informationnelles et documentaires.

    1. (retour)↑   Bernard Pochet est président du groupe belge EduDOC, directeur de la bibliothèque de la faculté universitaire des sciences agronomiques de Gembloux. Paul Thirion est directeur du réseau des bibliothèques de l’université de Liège.
    2. (retour)↑   Participaient à cette table ronde, animée par Frédéric Blin : Yolande Maury (maître de conférences à l’IUFM de Lille), Claire Nacher (chargée de mission Cévu, université Paris-III), Paul Thirion, Josef Herget (Swiss Institute for Information Research, Chur).