Le mundaneum :

les archives de la connaissance

par Yves Alix
Coordination Charlotte Dubray
Réd. Raphaèle Cornille, Stéphanie Manfroid et Manuela Valentino.
Préf. Elio Di Rupo
Bruxelles, Les Impressions nouvelles, 2008, 95 p., 21 cm
ISBN 978-2-87449-054-5 : 13 €

Paul Otlet (1868-1944) avait rassemblé au musée du Cinquantenaire, à Bruxelles, plusieurs des institutions qu’il avait créées avec Henri La Fontaine, sous le vocable de Palais mondial : Musée international, Union des associations internationales, Institut international de bibliographie, Bibliothèque internationale, Encyclopédie documentaire. En 1934, le Palais est fermé par le gouvernement belge et les collections doivent être déménagées. Otlet ne se décourage pas pour autant et rêve de reconstituer l’institution sur des bases élargies. Il veut édifier un Mundaneum qui serait, dit-il, « un résumé du monde ». Hélas, la guerre aura raison de cette dernière utopie, les collections seront bientôt dispersées et, après la mort de La Fontaine et d’Otlet, laissées à l’abandon. Cependant, au début de 1993, grâce à l’obstination de quelques-uns (Elio Di Rupo, Jean-Pol Baras, Jean-Paul Deplus), une partie des collections rescapées est rassemblée à Mons pour constituer un centre d’archives privées de la Communauté française de Belgique. Le nouveau Mundaneum est né.

L’ouvrage coordonné par Charlotte Dubray, sa directrice, est une excellente présentation de cette institution originale, à la fois musée, centre d’archives, lieu d’exposition, centre de conférences. Installé dans les bâtiments art déco d’un ancien magasin, le musée bénéficie d’une belle scénographie de Benoît Peeters, François Schuitten et du studio Bleu Lumière. Comme l’écrit Charlotte Dubray, « plus qu’un centre d’archives classique, le Mundaneum se positionne par rapport à un double héritage. Un héritage matériel, celui des archives et collections, mais aussi un héritage spirituel, celui des idéaux de paix, de partage des connaissances, de justice, de démocratie et d’humanisme, défendus par Paul Otlet et Henri La Fontaine tout au long de leur vie ». Pour un bibliothécaire, c’est sans doute aujourd’hui l’utopie bibliographique et documentaire qui fascine le plus dans cette aventure extraordinaire : ces deux visionnaires, après d’autres certes, mais pour la première fois d’une façon aussi systématique, n’ont pas seulement rêvé de mettre le monde en fiches et de faire la synthèse parfaite des connaissances à travers des systèmes symboliques (comme la classification décimale universelle), ils ont aussi rêvé d’un accès universel à la connaissance. Cette utopie est-elle en train de se réaliser avec internet ? Notre scepticisme nous incline plutôt à penser qu’il en sera de cette illusion comme il en fut du rêve de paix entre les nations d’Otlet et La Fontaine (prix Nobel de la paix en 1913), qui s’est abîmé dans l’horreur de la Seconde Guerre mondiale : on trouvera toujours un homme prêt à détruire ce qu’un autre homme a construit…

Le livre présente clairement l’histoire et le contenu des diverses collections qui ont pu être reconstituées, propose un choix d’iconographie pertinent. Il donnera à tous ses lecteurs l’envie d’aller faire une visite à Mons. Pour mieux la préparer, le site internet  1 donne toutes les indications et liens utiles. Signalons pour conclure que Françoise Levie a consacré en 2006 un livre captivant à Otlet, chez le même éditeur. Le BBF en a rendu compte dans son no 2, 2007, p.126.